Mario Duplantier - MARIO DUPLANTIER par PAMALACH - 9401 lectures
On ne présente plus Monsieur Mario Duplantier, frappeur métronomique du monstre de Combat Gojira à la personnalité aussi sympathique qu'au jeu rigoureux et précis.
Mario nous a fait le grand plaisir de participer à ce dossier "Spécial batteur Français" et le moins qu'on puisse dire c'est qu'il en ressort une interview étonnante !
Salut Mario ! Comment as-tu découvert la batterie ?
Salut ! J'ai découvert la batterie quand j'avais 12 ans, mon frère m'a fait découvrir Metallica et j'ai de suite été impressionné par Lars Ulrich, l'envergure de sa batterie, sa couleur blanche, son son... c'est ça qui m'a directement sauté aux yeux et aux oreilles. Je m'intéressais surtout au sport à cette époque et j'ai, à partir de ce moment-là, basculé dans la musique.
Ton style de jeu est basé sur des fondations métalliques solides auquel tu ajoutes beaucoup de groove et des éléments de percussions tribaux. Est-ce que ton jeu reflète ce que tu écoutes ?
Oui forcément, tout ce que j'écoute et j'entends m'influence et m'inspire. J'aime toutes les sortes de percussions, j'ai étudié différents styles de batterie (afro, bossa, jazz, rock) et cela a enrichi mon jeu. Après, c'est dans le métal que je me retrouve et m'exprime. Je pense que le Groove reste l'essentiel, c'est ce que je recherche dans toutes les musiques. De manière plus abstraite, je peux aussi m'inspirer du son du vent dans une vallée ou encore par exemple d'un tremblement de tôle à l'intérieur d'une usine désaffectée.
Tu as plutôt un petit set en comparaison de certains de tes collègues. Tu as cependant ajouté quelques éléments assez inhabituel avec notamment cette espèce de grande barre creuse qui semble en fer et dont tu tires des sons assez bizarres. C'est quelque chose que tu as fabriqué ou c'est vraiment un élément de percussion?
Oui je joue avec un petit set, c'est depuis que j'ai pris conscience que ce n'est pas la quantité de toms et cymbales qui compte mais bien la diversité et l'originalité des astuces et combinaisons rythmiques. Par contre, pour cette barre dont tu parles, elle me suit depuis 1997, je me sers de gong métallique pour accompagner des caisses claires ou bien créer des ambiances entre les morceaux. C'est une barre que mon frère et moi avons trouvée dans une zone désaffectée.
Tu avais dit un jour que tu avais travaillé la technique de façon quasi martiale. Est-ce que c'est le seul moyen pour arriver à jouer vite ou bien y a-t-il quelques privilégiés qui bossent moins que les autres et jouent tout aussi vite ?
Il y a toujours des gars qui ont plus de facilités que d'autres, je pense que la vitesse n'est pas le problème mais la régularité et la maîtrise est le véritable challenge. On peut aller vite un jour et le lendemain ramer.
Mon but est d'être carré sur une période de 200 dates d'une tournée.
Pour ça, mon travail a été d'analyser la musculature de mes jambes et la mécanique de mes pédales et en fonction, trouver des moyens de m'adapter aux différents tempos. Je m'explique, quand on joue à une vitesse de 185 BPM en triple croche, les muscles du genou et des cuisses jouent un rôle important. Je peux encore mettre beaucoup de puissance dans mes coups. Quand je joue à 215 BPM, les mollets, les tibias et les chevilles prennent le relais. Je joue avec moins de puissance et plus de vitesse. Le but est de comprendre la mécanique du corps.
En concert, je me sers du travail d'analyse effectué dans mon local. Je le mentaliste. Je ferme les yeux dans les passages rapides et je me rappelle comment fonctionnent mes jambes. Le mental joue un rôle primordial.
Sur quel matos tu joues ?
Tama superstar pour la batterie... qui viennent d'ailleurs aussi de sortir un modèle de baguette à mon nom, ce qui est super pour moi, j'utilise Zildjan en cymbales et Gibraltar pour le hardware.
Les batteurs sont parfois l'objet de railleries, genre c'est des brutes etc, etc. et il y a même des blagues qui circulent comme par exemple : Comment faire ralentir un batteur ? Réponse : En lui mettant une partition sous les yeux. Est-ce que la résistance s'organise et connais-tu toi-même des blagues sur les guitaristes ou les chanteurs ?
Allez... une p'tite blague pour nos amis six cordistes... Combien de guitaristes faut-il pour changer une ampoule? Douze ! Un pour la changer et onze pour dire qu'ils le feraient mieux.
Les batteurs qui jouent vite ont parfois des problèmes de tendinites, des maux de dos et des problèmes articulaires. Tu fais quelque chose de particulier pour prévenir les blessures ?
Avoir un bon siège est primordial, boire beaucoup d'eau avant l'effort et respirer pendant l'effort. La détente musculaire, c'est-à-dire penser à relâcher les tensions en jouant. Dans l'effort j'ai vite tendance à crisper mes muscles, j'essaye de toujours me rappeler à l'ordre. Et surtout faire des étirements avant de jouer, bien se chauffer.
Tu as déjà pu parler de la "transe" que pouvait t'apporter le fait de jouer de la batterie. Bien que cela soit un concept qui revienne très régulièrement dans la musique tribale et la World music on en parle assez peu en metal. Pourquoi à ton avis ? Le metal n'est pas sujet à la transe ?
On a quelques passages de morceaux qui sont très répétitifs. Quand je joue ces passages il m'arrive de partir dans un état second, Quand la musique m'emporte émotionnellement, je bouge ma tête et mon corps, et je rentre progressivement dans un état particulier, peut-être celui de transe...
J'ai lu que les mouvements rotatifs de la tête et l'hyper-extension du cou sont des moyens techniques pour accéder à la transe. C'est vrai que jouer un riff qui tourne pendant 10 minutes peut m'amener à cet état, mais c'est surtout si j'headbangue avec que je m'envole Ha ha ha !
De nombreux batteurs de metal disent qu'ils ne pourraient pas jouer un autre style parce que seul le metal leur permet d'extérioriser avec autant de violence toute la tension qui en eux. Es-tu d'accord avec ça ?
Oui c'est un peu ça. Le métal demande d'être à cent pour cent de tes capacités physiques. C'est marrant je ne me suis jamais bagarré de toute ma vie mais je peux te dire que je me suis battu avec ma batterie avec toute la violence qui est en moi. Je pense que je m'adresse aussi aux personnes, c'est un peu effrayant quand j'y pense, j'ai l'impression en tapant le plus fort possible sur ma caisse claire de communiquer des choses. Des fois à travers un bon "grind" je crois que je dis aux gens qui parlent trop "Maintenant fermez vos gueules c'est moi qui parle !!" Ha ha !
Tu sais dans le milieu de la musique, comme dans la plupart des milieux d'ailleurs, je trouve qu'il y a beaucoup de codes, de blabla, de critiques, de frime, de beaux discours, de "m'as-tu-vu". Moi je m'en fiche de tout ça, je trouve que l'essentiel c'est l'expression artistique.
Quel est le premier batteur qui t'ait ébloui ?
Lars Ulrich mais je dois aussi citer Igor Cavalera (Sepultura), Gene Hoglan (Death), Alex Marquez (Resurrection), Pierre Belleville (Lofofora), Dirk Verbeuren (Soilwork, Aborted, Scarve), Abe Cunningham (Deftones).
Joues-tu de la batterie ailleurs que dans Gojira ?
Je jamme avec des potes de temps à autre. Mais je joue beaucoup seul pour m'entraîner.
Tu peux nous donner ton avis sur ces différents batteurs ?
- Bill Ward : Pour être honnête je ne connais pas bien Black Sabbath (honte à moi) seulement à travers des covers d'autres groupes, notamment par le groupe de death metal floridien Brutality. J'étais fan de ce morceau.
- John Bonham : Une personnalité incroyable derrière la batterie, un son bien à lui, c'est un mythe
- Mike Portnoy : J'adore son jeu sur le seul album que je connais, "Train Of Thought", c'est très impressionnant.
- Mikkey Dee : Je n'écoute pas Motörhead mais ce mec est phénoménal ! C'est un vrai cogneur, il incarne parfaitement ce qu'un batteur Rock "doit" être. on a joué avec eux l'an dernier... une claque sur scène!
- Vinnie Paul : Vinnie Paul fait partie des légendes du metal, son jeu est puissant et efficace avec un son monumental ! Il est celui qui, dans le metal, a montré comment jouer au service de la musique. Ses fills sont géniaux, tous ces patterns inventifs, je suis fan.
- Steve Asheim : J'ai écouté "Legion" et "Once upon the cross" en boucle quand ils sont sortis. J'adore le jeu de Steve dans ces albums : c'est complexe, groovy et rapide. Un très bon batteur de death metal.
- Travis Baker : J'admire la puissance de son jeu, c'est vraiment un super batteur, et il cogne comme une brute en étant subtil en même temps !
Le mot de la fin est pour toi.
Merci beaucoup pour cette interview. Et à très bientôt sur la route !
Mario nous a fait le grand plaisir de participer à ce dossier "Spécial batteur Français" et le moins qu'on puisse dire c'est qu'il en ressort une interview étonnante !