Zakk Wylde - BLACK LABEL SOCIETY par JEAN-CHARLES DESGROUX - 4856 lectures
Talk On The Wylde Side !

Quelques mois après la sortie du huitième album studio de Black Label Society l’été dernier déjà !- le très très bon "Order Of The Black", enfin avions-nous le bonheur de retrouver le bûcheron (littéralement : n’appelle-t-on pas une guitare «axe» -hache- aux US ?) à la fois sur les planches d’une Cigale incandescente complètement sold-out, et dans une chambre feutrée face à face avec un pote pour une petite conversation ma foi bien euphorique...


Zakk Wylde ne vient cependant pas assez à Paris. La dernière fois que je l’avais rencontré, c’était pour la promo de "Mafia", il y a un peu plus de six ans en février 2005, et la conversation avait duré, duré, duré, autour de larges pintes dans une brasserie de Bastille, heureux fus-je d’être le dernier scribouillard programmé après un interminable marathon promo, au terme duquel l’homme avait soif, TRES soif, et visiblement ravi de partager ses binouzes en face de l’inépuisable fanatique d’Ozzy que j’incarnais. Oh, tant de points communs : bonheur de boire des mousses en refaisant le monde, Ozzy Osbourne, Black Sabbath, et Bayonne comme lieu de naissance -c’est hilare qu’il apprendra que nous sommes chacun nés dans la même ville, mais des deux côtés de l’Atlantique : Bayonne Pays-Basque pour ma pomme, Bayonne New-Jersey pour l’idôle. Point de pintes en 2011, et une rencontre réduite, hélas, au minimum syndical de vingt minutes, augmenté d’un bon 50% grâce à la bienveillance et la compréhension de notre charmante attachée de presse. Et puis le planning du jour était serré : si le leader du motorcycle gang accordait pas mal de son temps à quelques journalistes charitablement sélectionnés, il donnait surtout son premier concert parisien depuis cette même année 2005 et le show tonitruant de l’Elysée Montmartre le 17 juin. Si le père Wylde ne venait donc d’habitude jamais jouer chez nous (ni avec Black Label Society ni avec Ozzy puisque toutes les tournées esquivaient négligemment notre pays), c’était avec étonnement qu’un DVD live officiel vit le jour peu après, immortalisant cette sacré belle prestation avec un beau package souvenir ("The European Invasion Doom Troopin’", depuis réédité dans un triple digipack collector définitif). Si l’attente fut à nouveau longue avant qu’il ne daigne réitérer l’exploit, elle fut récompensée par un show à nouveau explosif à la Cigale parisienne le 25 février dernier, date sold-out depuis des mois, signe de l’impatience et de la passion des fans français pour leur guitar hero vénéré.

Zakk Wylde : On a toujours passé des putains de moments à chaque fois qu’on est venu jouer en France, çà oui ! Et c’est même la raison pour laquelle on a voulu shooter le dernier DVD.



Pas mal de fans furent déçus par "Shot To Hell" : un peu trop mou et mielleux, trop de ballades, un manque certain d’intensité et de folie toute wyldienne. En revanche, "Order Of The Black" est l’un de vos albums les plus puissants. As-tu été conscient des faiblesses de "Shot To Hell" et as-tu recherché à retrouver tes fans avec la signature qui t’identifie le plus auprès d’eux ?
Je ne suis pas d’accord, j’adore "Shot To Hell", il y a des trucs vraiment heavy là-dedans, genre «Black Mass Reverend», «Concrete Jungle»... et puis y a toujours eu des morceaux plus doux dans Black Label’... Non, on s’est jamais dit qu’on voulait se rattrapper et faire un album franchement plus heavy ; ce qui sort doit sortir, tu vois ? La seule fois où l’on a voulu prévoir à l’avance quelque chose de spécifique c’était pour "Hangover Music", exactement le même truc qu’a pu faire Jerry et ses potes dans Alice In Chains à l’époque de "Jar Of Flies", tout un album en acoustique d’un bout à l’autre. Quand tu enchaînes des disques comme "The Blessed Hellride" ou "Mafia", et toutes ces tournées, t’as parfois envie de faire des trucs plus tranquilles ; tu vois, quand t’es dans le tour-bus tu écoutes des disques vraiment cools et franchement plus calmes, parce que le heavy, c’est ce que tu fais toute la journée ! Ce fut donc à l’époque le seul disque que nous avons conçu de manière vraiment réfléchie. Après, ce qui m’inspire c’est ce que j’écoute à tel moment de la journée : si c’est du Zeppelin, ou du Neil Young, ou je ne sais quoi encore ; tout dépend vraiment de quel côté de ton pieux tu te lèves le matin... Quand on s’est attelé à ce disque, cela faisait quatre ans qu’on avait rien fait depuis ce "Shot To Hell" : on n’avait rien sous la main et résultat, en 94 jours il a été écrit, enregistré, mixé, masterisé et illustré en si peu de temps.

Avec les années, ta voix ressemble de plus en plus à celle de ton mentor, Ozzy Osbourne, alors qu’à tes débuts en solo ou avec Pride & Glory elle se rapprochait davantage du blues avec des feelings très sudistes, très soul. Est-ce parce qu’à un moment beaucoup de chansons de Black Label Society furent originellement composées en vue des albums solo potentiels d’Ozzy et qu’elles devaient être interprétées de cette manière si singulière, ou bien est-ce que l’influence évidente d’Ozzy fait aujourd’hui complètement partie de toi, comme une partie de ton code génétique ?
C’est pas faux... mais je vais te dire un truc : avant même de jouer avec Ozzy à la fin des années 80, j’étais déjà un immense fan de ce mec, et avec mon petit groupe quand on jouait dans des petits clubs merdiques, on faisait des tas de reprises de Black Sabbath et d’Ozzy en solo, tous les trucs avec Randy... et c’était moi qui chantais -donc ça vient déjà de là ! Après, l’un de mes albums de Sabbath de chevet, c’est définitivement "Sabotage" : putain mec mais quelle voix ! La folie pure, complètement hallucinée ! A un moment je lui ai demandé «mais Ozz’, comment pouvais-tu chanter ainsi sur ce disque mec ?» et lui me répondait (Zakk imite à la perfection son mentor :) «Ce sont les drogues meeeec !!!» (RIRES !). «Ce sont ces putains de drogues qui me faisaient complètement tripper comme ça ! On étaient tous hystériques et de vrais malades mentaux ! Les droooogues !!!».

Tu t’es construit une image extrêmement forte : cette masse trappue de biker, bodybuildé, bardé de cuir et de chaînes épaisses, cette icône heavy-metal, le guitar-hero le plus assourdissant qui dépasse même Ted Nugent en terme de jeu et de grande gueule...
Une grande gueule ? Tu crois que j’ai une grande gueule ? Hé mec, ce gars dit que j’ai une grande gueule, t’y crois toi ? (Il se tourne vers son pote/roadie/lieutenant et est hilare, me tape fortement dans la main et fait sauter mon micro qui tombe par terre, manquant d’effacer toute la conversation !)

... Est-ce que c’est devenu difficile pour toi de conserver cette image et de devoir apprendre à vivre sobre ?
Oh j’ai arrêté l’alcool mais maintenant je sniffe de la glue ! Ca et les stéroïdes ! C’est toujours aussi dingue en fait ! (RIRES !). Il suffit juste de remplacer ça par autre chose, c’est aussi simple ! Les stéroïdes, les hormones de croissance, les pilules contraceptives, n’importe quoi, je prends tout ! (RIRES !)

Est-ce que le géant indestructible, tel qu’il est perçu par tes fans, a été sérieusement échaudé par tous les problèmes médicaux que tu as rencontré l’année dernière ?
On rigole parce qu’un des crédos de Black Label’ c’est que le suicide n’est réellement pas une option. On n’a pas le suicide dans le sang alors c’est impensable. Il faut alors que tu endures ton mariage et que tu supportes la douleur. (RIRES !) Quand je me suis marié, personne ne m’a dit «félicitations» ; c’est plutôt «courage, SUPPORTES LA DOULEUR !» ! Baah, on en rigole, mais c’est vrai que j’ai dû supporter trois caillots de sang dans mon artère pulmonaire -un seul suffit à mourir d’une embolie pulmonaire ; après mon père est décédé... la vie prend tout son sens par la façon dont tu la regardes : un verre de bière à moitié plein ou bien à moitié vide ? Il y a toujours de l’espoir quelque part, et c’est bien pour ça qu’on se marre tous ici tout le temps. Et tu sais quoi ? Il y aura toujours une merde qui va t’arriver sur le coin de la gueule à un moment ou un autre. Genre tu te réveilles ce matin pour interviewer Jimmy Page, tu es tout excité, fébrile, tu sors de chez toi et deux de tes pneus sont à plat et tu n’es toujours pas arrivé sur l’autoroute ! Et qu’est-ce que tu vas faire ? T’énerver ou te marrer un coup et changer les pneus ? Tu vas aller rencontrer ton héros alors magne-toi le cul et sors cette bagnole de là ! Tout est une question de mentalité. Comme dans Mission : Impossible : «votre mission, si vous l’acceptez...»

Gus G, le nouveau soliste d’Ozzy, est un très très bon guitariste. Mais au-delà du fait que tu n’es plus le partenaire privilégié d’Ozzy à ses côtés, je ne ressens, ne vois ni n’entends pas la moindre petite étincelle dans leur nouvelle relation. De l’efficacité, oui. De la magie, de l’amitié, de la folie, non. Moi je vois deux étranger sur scène. Crois-tu au plus profond de toi que tu rejoueras avec lui un jour ?
Concernant ma relation avec Ozzy, elle est bien plus grande qu’au simple niveau de la musique. Pour l’instant il est en tournée avec Gus G, Blasko et les gars : s’il me demande d’aller nettoyer les merdes de son chien, j’irai nettoyer les merdes de son chien ! Je l’aime tant. Là pour le moment on fait un break, ce qui me permet moi aussi de tourner avec Black Label. Je sais qu’Ozzy et Gus aimeraient bosser ensemble ainsi qu’avec d’autres gars sur cette comédie musicale basée sur Raspoutine : hey, s’ils ont besoin de moi pour quoi que ce soit, pour que je joue de la guitare, je rapplique illico. C’est comme pour tes parents : ce n’est pas parce que tu ne vis plus à la maison que tu ne les aimes plus ! Tu peux les retrouver pour les vacances ou juste les appeler pour leur souhaiter leur anniversaire ! En ce qui nous concerne, nous les gars du Black Label, on souhaite tout le meilleur à Gus -on ne lui veut que du bien. On veut que lui aussi atteigne le plus haut du championnat, comme moi au début.

... Oui mais tu comprendras qu’il n’y a quand même plus du tout cette même magie qu’avec toi...
Je comprends mais à l’époque les gens pouvaient dire la même chose me concernant en comparaison avec Rand’ (Randy Rhoads, nda), ou lorsque Jake E.Lee l’a remplacé... Ce sont tous des standards. Ce sont des places de guitariste très convoitées, être le lieutenant d’Ozzy Osbourne ! On jugera bien sûr le prochain album, il n’a pas fait grand-chose sur celui-ci puisque la majorité de l’écriture était déjà achevée. Il faut que Gus laisse sa propre empreinte, et c’est sur le prochain que tout le monde réalisera enfin ce qu’il est...

Oh je n’ai aucun doute sur ses capacités ni sur son talent indéniable... mais la complicité qu’ils peuvent partager ensemble sur une même scène ? Ce que les fans peuvent ressentir ; je l’ai vu plusieurs fois l’année dernière, et il n’y avait rien... il ne rentre vraiment pas dans tes shoes, ça ne colle pas !
Ah ça c’est parce que j’ai des petits pieds ! (RIRES !) Gus fait une énorme pointure !

Il ne fait aucun doute que chez la plupart des gens, peu d’entre eux se rappelleront éternellement de Jake E.Lee, de Brad Gillis ou encore de Joe Holmes ; il ne restera que deux guitaristes dans la carrière solo d’Ozzy : Randy Rhoads et toi.
Probablement, probablement. Mais comme je le disais, il faut lui laisser sa chance, le temps qu’il brille vraiment. On est vraiment des fans de Gus.

Tu es perçu comme l’un des tout derniers guitar-heroes de notre époque...
Ouais on n’est plus que quelques gars à encore porter des capes. Les guitar heroes ! (RIRES !) Portons nos sous-vêtements par-dessus nos fringues ! Imagines Slash comme ça ! (RIRES !)

... Es-tu néanmoins régulièrement impressionné par de nouveaux gars sur scène ?
Ouais les gars dans Dragonforce sont incroyables. Vraiment, complètement dingues. Les mecs de Trivium, In This Moment, ouais ils déchirent - les mecs de Five Finger Death Punch savent jouer, Avenged Sevenfold aussi... Comme je l’ai dit, tout est cyclique, une fois de plus, comme dans la mode, les fringues, tout : regarde lorsque Slash est arrivé, à ce moment-là tout le monde essayait de jouer plus vite que son voisin, de façon pyrotechnique ! Et le serpent se mordait la queue ; Slash est arrivé, et d’un seul coup ce fut «blues and booze». Tu vois ce que je veux dire ? Non pas que Slash ne soit pas un guitariste technique, mais le style qu’il a apporté : c’était avec classe et attitude. Bien sûr peut-il être un shredder, comme sur le solo de «Paradise City», mais regarde sur «Sweet Child O’Mine» ou «Welcome To The Jungle»... Quand tu l’entends tu le reconnais de suite -tout est question de chansons et d’attitude ; çà oui Slash a ramené tout ça au premier plan. Et le cycle continue : aujourd’hui on en revient à ces incroyables solos de guitare ! Et c’est génial parce que les choses changent tout le temps ! Je suis un fanatique absolu de Zeppelin ; regarde en arrière : à l’époque il y avait Hendrix, Jimmy Page, Jeff Beck, Clapton... non en fait il y avait d’abord Eric Clapton, qui était déjà une icône, avant Hendrix... et donc toute cette ère de guitar-heroes, avec aussi Tony Iommi. Et ensuite Eddie Van Halen est arrivé... et il a complètement détruit la planète !!! What the fuck ???!!? Qu’est-ce que c’est que ça ? Ca ne ressemble même plus à de la guitare ! Puis Randy Rhoads, Dimebag... A l’époque de Jimmy Page tu avais une action ; suivie après par une réaction ! Et ainsi le punk-rock ! Pas de solo, fuck you, etc ! Fuck Led Zeppelin, fuck Black Sabbath, fuck Fleetwood Mac, fuck Elton John, fuck you all motherfuckers ! Mais c’est ainsi qu’ils étaient, vraiment. Rien à foutre des solos ! Vous voulez vous entraîner ou vous foutre en l’air ? Rien à foutre ! Tout était dans l’attitude, et c’était une chose formidable ; parce qu’il y avait une réaction.

Ne crois-tu pas qu’il y ait plus d’esprit dans ce que tu fais, toi et Slash, plutôt que chez un mec comme Paul Gilbert par exemple ?
Je suis pote avec tous ces gars, tous, Paul... Personnellement j’adore aussi ce genre de jeu. Je suis allé voir John McLaughlin en décembre dernier ; c’était géant ! Il a soixante-dix ans et bon dieu il shredde, incroyable ! Et Paco De Lucia est lui aussi toujours aussi incroyable ! J’écoute tout ça. Peut-être que si je n’étais pas guitariste moi-même, je n’écouterais pas tous ces styles si différents. Peut-être n’écouterais-je qu’AC/DC et serait incapable de savoir si ces mecs sont bons ou pas. Mais c’est aussi pourquoi on aime tant ces groupes : Black Sabbath, Led Zeppelin, AC/DC, Van Halen... on n’aime pas que le solo de la mort de Randy Rhoads : le plus important ce sont les chansons, et le solo c’est la cerise sur le gâteau. «Stairway To Heaven» est une putain de chanson ; et son solo est probablement le meilleur de tous -pareil pour «Hotel California» : c’est vraiment la touche finale absolument parfaite. Quand tu vas voir Led Zeppelin, tu n’y vas pas que pour Jimmy Page, même si c’est un Dieu : tu y vas pour l’Expérience Zeppelin. Pareil pour Guns N’Roses ou Sabbath : c’est l’expérience du groupe qui se tient. Et la musicalité de chacun bien entendu. Mais c’est vraiment ça qui m’a attiré dans tous ces groupes.


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