VS a profité du passage à Paris des Allemands ENDSTILLE pour leur proposer un track-by-track du nouvel album que nous avons pu écouter en exclusivité.

Titre de l'album
Mayhemic Destructor: en 1813, il y a eu une grande bataille à Leipzig entre Napoléon et le général prussien Blücher, où Napoléon fut vaincu. C'est pour "1813". "Infektion" c'est vraiment au sens d'infecté, comme par un virus. Cette infection se développe pendant un siècle et nous conduit aux Prussiens qui ont déclenché la première guerre mondiale. Et le "1913" sur la pochette fait référence au "2013" de Navigator. Après, c'est à toi de faire le lien.

Track by Track

1 – Anomie (3'35)
L'anomie est un mot inventé au XIXème siècle par le sociologue français Emile Durkhein, et qui caractérise un état de désagrégation d'une société dû à la disparition de ses valeurs. Le mot est également utilisé en allemand. Le morceau est court et tendu comme un string qui va péter. Seul le refrain bondissant nous sort la tête de l'étau.

MD: Tout le monde s'assoit et attend le prochain album. "Comment vont-ils sonner maintenant?", tu vois (rire). Et nous voulions montrer que ceux qui participent à la composition dans Endstille sont toujours là. Seul le chanteur est parti et il n'était pas le compositeur. Et le morceau démarre comme du Endstille, du 100% Endstille. C'est un morceau très simple, direct dans la gueule et les gens vont adorer ça. Nous la jouerons ce soir.
Zingultus: Les paroles évoquent la dérive sociale pendant la première Guerre Mondiale. Ce n'était pas l'anarchie, mais une disparition des règles sociales.

2 – Trenchgoat (4'03)
Enchaînement très direct avec "Anomie". Du Endstille plus rentre-dans-le-lard avec trémolos à fond la caisse, et notamment le trémolo dans les aigus qui sert de support au refrain. Il ne faut pas plonger nos Allemands dans la boue des tranchées, ça les énerve!

Zingultus: celle-ci a été écrite par Cruor. Je n'ai aucune idée du sujet des paroles, mais le titre est le meilleur (rire).
MD: Nous avons placé ce titre en second, car il colle très bien avec "Anomie". Cela fait deux punchs dans la face dès le début.
Zingultus: c'est un titre plus direct.
MD: Oui, plus direct. Peut-être plus classique pour Endstille.

3 - Bloody H (The Hurt-Gene) (3'40)
L'intro surprend avec son speech à effet mégaphone. On note aussi l'apparition d'un voix chantonnant gravement sur le refrain, dans un morceau au riff thrash accrocheur. Ce titre est assez onirique dans l'album.

Zingultus: Ce titre est à propos d'une grande bataille, dans la forêt de Hürtgenwald, dans un lieu près d'Aix-la Chapelle (NDR: juste avant l'offensive des Ardennes de décembre 1944, les Américains vont sacrifier des milliers d'hommes pour ne finalement pas réussir à prendre une forêt de faible intérêt stratégique, du gros gâchis). Cela a été la plus grande défaite militaire de l'histoire américaine. Les Américains l'ont évoqué en disant "c'est comme le Hurt-Gene" (NDR: certains psychiatriques avancent que certaines personnes sont génétiquement programmés pour faire souffrir ceux qu'ils aiment). Hurt-Gene, et la ville se nomme Hürtgen. J'ai trouvé le jeu de mots très drôle et j'ai décidé de l'utiliser pour évoquer cette bataille.

4 – The Deepest Place on Earth (5'33)
Le socle du morceau est du Endtille assez traditionnel avec son lot de trémolos et d'abnégation avec une double qui pilonne en continu. Le groupe parvient toujours aussi facilement à poser ses riffs répétitifs. Des chœurs guerriers viennent scander le refrain. Puis le morceau gagne en vitesse de frappe et s'envole lors de la mise en place d'un blast impitoyable. Le titre monte dans les tours jusqu'à ses derniers instants, laissant le souffle coupé par son emballement étouffant.

MD: Ce titre est en fait composé de plusieurs parties et certaines sont très anciennes. Dans les années 90, nous avions notre autre groupe Tauthr. Et la seconde partie du titre vient de Tauthr. Nous l'avons "retrouvée" et rejouée, et nous sommes dit qu'elle était super. Cruor a écrit les paroles et je ne peux trop rien te dire à leur sujet. Mais ça doit parler de l'endroit le plus profond de la Terre (rire).

5 – When Kathaaria Falls (3'55)
Un morceau massif qui écrase l'orteil à maintes reprises. Le premier riff évoque d'autres titres tellement c'est un classique du groupe.

Zingultus: C'est un morceau très personnel. Généralement, je n'aime pas expliquer mes écrits. Je ne veux pas en parler.

6 – Satanarchie (3'55)
Titre plus ambiancé, où les blasts succèdent à des passages plus atmosphériques mis en musique par des arpèges. Une voix claire énigmatique intervient parfois, apportant un ton décalé, très détaché du reste de l'album.

Zingultus: c'est un hommage à Aleister Crowley.
MD: Do what thou wilt shall be the whole of the Law. Nous avons aussi fait un jeu de mots entre Satan et anarchie. On n'est pas le genre de groupe à se prendre trop au sérieux. C'est toujours cool de jouer avec les mots.
Zingultus: Et l'intérêt est aussi de provoquer.
MD: Le seul truc pour lequel nous sommes intransigeants, ce sont les groupes avec des claviers (rire). On nous a proposé un support local pour un show et un groupe s'est présenté avec un clavier et on a dit non (rire).

7 – World Aflame (4'47)
Lancé par un sample, le morceau ne perd pas de temps. Tête dans le guidon, les trémolos sont encore de sortie pour un titre qui asmathe. Seul le refrain offre une mélodie où s'accrocher un minimum. Un pont central vient briser l'élan guerrier, avec son début où la basse est très présente et assez entraînante. Drôle de sensation d'avoir envie de dodeliner de la tête sur du Endstille, et non de la secouer violemment. Le pont sert de piste d'envol au final du titre que vous imaginez bien complètement pas doom!

Je les chambre un peu avec la partie de basse centrale qui donne envie de danser et voilà les deux colosses en train de se dandiner sur le banc en rigolant bruyamment
MD: Cruor est le bassiste et il joue ce qu'il veut. Oui, c'est un peu dansant, mais ça rendait très bien sur cette partie plus aérée. Iblis était toujours contre les parties thrash dans les morceaux. Maintenant nous sommes libres et nous pouvons jouer ce que nous voulons (rire).
Zingultus: On rigole, mais les paroles sont très sérieuses sur ce titre. Dans ce texte, j'essaie d'expliquer mon problème avec le monde. Je suis tellement saoulé par ce monde que parfois j'ai envie d'y foutre le feu pour le nettoyer. Le feu purifie tout. Il y a tellement de gens qui ne respectent plus rien, j'en ai vraiment marre. Je voudrais qu'il y ait plus de respect sur cette planète, que les communautés arrêtent de se faire chier les unes les autres.

8 – Wrecked (5'47)
Le démarrage du titre se fait avec un riff lourd purement thrash, qui me fait penser aux vieux Kreator. Et puis on repart dans l'écrasement, le pilonnage, le massacre de bébés phoques à la pelle. Le chœur mâle d'un autre monde qui résonne dans le refrain du morceau donne une dimension presque rituelle au titre.

MD: J'ai quelques amis dans mon entourage qui ont gâché leur vie (gâché=wrecked) en faisant des trucs stupides. La majorité sont tombés dans la drogue. Et tous sont devenus de parfaits connards. Ce morceau est pour tous ces gens.

9 – Endstille (Völkerschlächter) (10'44)
C'est un très long titre qui déclame un paquet de noms de dictateurs sur fond de double. Endstille démontre encore sa maîtrise dans la mise en place d'atmosphères lancinantes, en terminant par un tour de force de plus de 10 minutes qui joue sur un seul et unique riff. C'est le chant ou son absence qui casse la redondance, les instruments tournant en boucle sur une rythmique. Des effets sonores sont ajoutés en fond par la guitare. Une pièce minimaliste qui ne produit aucun ennui grâce à son dynamisme, voire qui crée une sensation de vide quand elle s'arrête: du grand art!

MD: "Völkerschlächter" signifie "boucher de peuples". L'idée est venue juste après l'enregistrement de Verführer, dont tu te souviens de la pochette avec le Kaiser Wilhelm (NDR: je vous laisse en allemand "Empereur Guillaume", ça claque un peu plus). Il y est déguisé en boucher. Et on a dit "ah, c'est un völkerschlächter. Ouais, gardons cette idée pour le prochain album". Et nous avons décidé d'utiliser ça pour le dernier titre "Endstille". Et pour l'idée des paroles, il nous a paru bien de faire une liste des dictateurs.



Enstille dépeint toujours son univers avec la même palette de couleurs, mais encore une fois les Allemands parviennent à apporter les variations suffisantes pour rendre l'ensemble toujours aussi vivant. Plus aucune véritable surprise dans leur art désormais bien connu, mais une agréable découverte à chaque nouvelle toile. j'ai encore trop peu d'écoutes au compteur pour un avis définitif, mais j'ai bien plus envie de réécouter cet album que son prédécesseur. Un bon signe...

La suite très bientôt sur VS avec l'interview du groupe réalisée à cette occasion.