Stéphane (Chant), Mathieu (Guitare), Julian (Guitare) - ATROPHY par ..::JU::.. - 1940 lectures
Chez VS, il n’y en n’a pas que pour les "gros" groupes ; la preuve avec les excellents Savoyards d’ATROPHY, qui ont sorti début 2010 leur 1er 'full length'. Et si leur musique est particulièrement plaisante et percutante, vous allez voir que le groupe n'occulte pas tout ce qui s'articule autour...
Petit entretien avec plusieurs membres d'ATROPHY...



Salut les Chambériens ! Votre 1er album, ‘Lexical Occultation 1.618 : The Veil from Beyond’ est sorti début 2010
Et même si chez VS on a été un peu long à la détente, je me suis pris une méchante baffe avec votre monstrueuse ogive. Peux-tu revenir rapidement sur l'histoire du groupe, en présentant les membres et les différents jalons de l'histoire du groupe ?Atrophy

Mathieu : Le groupe s'est formé en 1999 avec trois des membres actuels : Ludo à la batterie, Julian et moi aux guitares. Le chant et la basse ont été assurés par plusieurs musiciens successifs, et deux démos rendent compte de cette évolution stylistique. De nombreux morceaux n'ont jamais été enregistrés faute d'homogénéité : l'orientation musicale était mouvante jusqu'à ce que Jeff nous rejoigne en 2004, et Stéphane en 2006. "Lexical Occultation" reflète le travail que nous effectuons depuis avec ce line-up.


'Lexical Occultation 1.618 : The Veil from Beyond', donc, est sorti début mars via le label Great Dane.
Depuis la sortie de l'album, l'eau a coulée sous les ponts... Quelle est l'actualité du groupe actuellement ? Vous avez des plans ''concerts' dans un futur proche ? Des prémices d'idées pour le successeur de ''Lexical Occultation 1.618' ?
Nous sommes en train de composer un deuxième album qui sera le prolongement de "Lexical Occultation", tant dans la démarche de composition que dans l'élaboration d'un concept. Dans cette optique, nous faisons peu de concerts, sans toutefois cracher sur les différentes occasions de se produire sur scène.


J’ai cru comprendre que votre album était en réalité prêt (enregistré et mixé) depuis fin 2008... Et que vous aviez dû attendre mars 2010 pour voir Great Dane Records sortir l’album.
A quoi attribuez-vous ces délais ? Et, justement, étant donné la difficulté pour les groupes de Metal extrême à trouver un label, quel est votre opinion à propos de l'autoproduction ?
Mathieu : L'auto-production est un investissement humain et financier considérable, mais c'est le gage d'une évolution exempte de lest. Nous sommes très contents que Great Dane ait pris en charge le pressage des CD et l'impression des pochettes, mais nous avions déjà enregistré tout l'album à nos frais, mastering compris. Cela peut justifier le délai auquel tu fais allusion : le choix du mastering nous avait déjà pris du temps, car nous voulions rendre justice à un mix qui le méritait vraiment. Nous avons reçu le master définitif en avril 2009. Great Dane nous a contactés dans l'été et nous a proposés un livret 12 pages... Jusque-là, je n'avais dessiné que la pochette avant ! Restaient la réalisation de tout l'intérieur et le choix des photos, ce qui nous a pris quelques mois. Tout était prêt en janvier 2010. Le label a pris le temps d'examiner le projet avant de le presser et d'officialiser la sortie. D'où la sortie finale en mars 2010...


Vous êtes originaire de Chambéry, dans les Alpes du nord.
J'ai l'impression que la scène Metal Extrême n'est pas très prolifique dans les Alpes. Excepté la brasserie du Mont Blanc, il y a-t-il beaucoup d'endroits (salles, bars, MJC) dans les environs pour se défouler sur les planches ? Comment faites-vous pour propager vos créations musicales et vos décibels ?
Mathieu : Il y a en effet peu d'endroits où se produire autour de Chambéry, mais je doute que ce constat puisse être différent dans beaucoup de villes en France. En revanche, tu te trompes quant à l'activité du bassin chambérien, lequel se trouve être un véritable vivier de très bons groupes de Metal (pour n'en citer que quelques-uns : Nehëmah, Evohe, Nahar, Hate Supremacy, Nerv, Malmort, Innerty...). Les efforts déployés pour subsister en dépit de l'absence de structures (locaux de répétition, scènes) n'en sont que plus remarquables.
Stéphane : Les deux salles pouvant accueillir des groupes sont le Brin de Zinc et la Brasserie du Mont-Blanc, qui nous laissent leur lot de surprises, mais malheureusement les programmations d'ordre métallique sont bien trop rares.


Je le disais en préambule, j’ai vraiment apprécié votre dernier album en date, je le trouve à la fois bien brutal, très accrocheur, et paradoxalement assez mélodique.
J'ai lu sur un certain nombre de chroniques que vous étiez à « classer » avec Atheist ou Death. Que pensez-vous de ce type de comparaison, est-ce que ces deux ''monstres' font partie de votre paysage musical ? Et d'abord, que pensez-vous des étiquettes dans le monde du Metal Extrême, ne trouvez-vous pas cela frustrant ou incongru d'être parfois réduit à une simple case musicale ?Atrophy

Mathieu : Le système d'étiquettes est grotesque, et ne touche malheureusement pas que le métal extrême. Force est d'admettre qu'il peut sembler utile : comment s'y retrouver, au milieu de cette nébuleuse d'artistes, qui, pour la plupart, s'appliquent à renouveler le langage musical ? Le danger évident de ce cloisonnement est, d'une part, la disparition d'un nécessaire éclectisme, et d'autre part, la propension au préjugé facile ; mais quiconque s'aventure de manière sérieuse dans l'exploration de la susdite nébuleuse saura faire fi du catalogage.

Les deux groupes que tu cites ont écrit de fortes belles œuvres, qui nous ont indéniablement marquées. La comparaison est très flatteuse, et si notre musique tend aujourd'hui à arpenter d'autres univers musicaux, il ne faut pas oublier cet héritage, car on ne part jamais de rien : « Nous sommes des nains juchés sur des épaules de géants », dixit Bernard de Chartres.


Bien qu’accrocheuse et résolument violente, votre expression musicale est également imprégnée de technicité, de par des accords, des enchaînements ou des riffs travaillés et complexes.
Quel que soit votre instrument respectif, vous jouez tous de façon très technique, précise et talentueuse. Depuis combien de temps jouez-vous de votre instrument respectif ? Est-ce que vous répétez souvent tous ensemble ?
Mathieu : Les répétitions ont tendance à s'espacer lorsqu'aucun concert n'est en vue. Nous pouvons nous le permettre depuis que le niveau de nos compositions est en deçà de notre niveau instrumental, ce qui n'a pas toujours été le cas, il faut l'admettre. Ludo, Julian et moi jouons ensemble depuis plus de dix ans et la connivence avec Jeff et Stéphane, qui nous ont rejoints depuis, est manifeste. Mais ... Comment parler de travail, lorsqu'un jam se termine par une tartiflette ?


Si bien évidemment la musique demeure au centre du propos, avec Atrophy la thématique visuelle et textuelle n’est pas à négliger, et représente une part importante de l’œuvre du groupe.
Le titre de l'album, en premier lieu, interpelle : ''Lexical Occultation 1.618: The Veil From Beyond'... Peux-tu nous en dire plus, particulièrement à propos du Nombre d'Or (1,618), que l'on retrouve dans le titre, mais également un peu partout dans l'artwork (via le symbole Phi) : quelle est la signification pour vous de sa présence dans le titre de l'album, en quoi est-il intégré dans l'album au niveau de la thématique ?
La thématique du nombre d'or nous séduit depuis longtemps, de part le lien qu'il semble établir entre chacune des pierres qui constituent le vaste édifice cosmique. Je te rassure, nous ne sommes pas versés dans l'ésotérisme de comptoir ; ce que nous avons cherché à traduire dans l'album est le point de rupture entre équilibre et désordre. Peuvent y prendre part deux protagonistes : le hasard et la logique, que le nombre d'or semble concilier.

Certains compositeurs de musique électro-acoustique ont fabriqué des sons synthétiques, via ordinateur, dont les différentes fréquences sont basées sur le nombre d'or, à l'image d'un certain Akio Hizume. Était-ce quelque part un peu votre souhait d'essayer d'approcher musicalement l'homogénéité mise en valeur par ce symbole, via l'assemblage précis de rythmes et d'harmonies données ?
Ou bien vous êtes-vous simplement rattachés à l'aspect purement métaphysique de ce symbole, en articulant vos textes autour de cette ''proportion divine' et de ses interprétations diverses ?
Atrophy
Notre démarche de composition n'est pas celle de Akio Hizume, comme elle n'est pas non plus celle de Webern ou d'un Schöenberg post-1923 (dodécaphonisme). Les mathématiques n'entrent pas dans l'élaboration des riffs ou des structures, nous ne jouons pas une musique qui se calcule. Utiliser des suites de chiffres pour créer ce que l'oreille ne percevra jamais comme tel est, à mon sens, une ineptie, de même que le serait un livre en braille en couleurs. Ces recherches sont intéressantes, mais on s'éloigne du sens fondamental de la musique, laquelle est déjà bien assez codée dans le métal.


Les textes sont tous empreints de la même thématique, axée sur une sorte de voyage ou de réflexion énigmatique autour du fonctionnement de l’Esprit.
AtrophyMais peux-tu nous en dire plus également ? Sont-ce à la base les tourments et les interrogations de l'être humain et de son esprit qui vous ont inspirés, ou bien d'avantage un constat résigné du fonctionnement et de l'aveuglement de la nature humaine ?
Un peu des deux... En réalité, l'un conduit à l'autre : c'est parce que l'homme se pose des questions qu'il est amené à s'en poser de nouvelles ! Et si l'avènement de cette conscience est une prouesse remarquable de la nature, elle en est aussi la destructrice, d'où le thème équilibre/désordre omniprésent dans l'album.
L'esprit humain est à la fois la plus grandiose et la plus abjecte des choses de cet univers.

Il y a-t-il une forme de recherche spirituelle ou philosophique à travers ces thématiques et ce voyage à la frontière du rationnel et de l'irrationnel ?
En fait, c'est plutôt un questionnement, car nous ne saurions prétendre pouvoir livrer une analyse du monde objective et universelle.
Libre à chacun de s'en approprier les interrogations.Atrophy


Durant la préparation de cette interview, j’ai lu plusieurs chroniques positives relatives à votre album, dont notamment une tirée de Metallian assez enthousiaste.
Je suppose que ce type de retour fait toujours plaisir. Mais d'une manière générale, est-ce que le fait d'avoir de nombreux retours positifs (magazines, mais aussi webzines) joue un rôle en termes de publicité ou de communication ? En voyez-vous les impacts ou les conséquences directes à votre niveau ?
Je n'en ai pas l'impression ; au risque de paraître cynique, la chronique qui m'a apporté le plus est celle du webzine Thrashocore, laquelle ne nous brosse pas dans le sens du poil. L'analyse qui y est faite de l'album est plus pertinente que beaucoup d'autres critiques dithyrambiques. Il est évident que les commentaires élogieux font plaisir, mais leur portée publicitaire semble ténue ; tout cela reste difficile à mesurer en réalité.


Au niveau des concerts, vous avez partagé l’affiche avec bon nombre de groupes internationaux reconnus (Suffocation, Vader, God Dethroned, pour ne citer qu’eux).
AtrophyQu'est-ce que cela vous a apporté : est-ce une opportunité d'apprentissage bienvenue, ou une forme de reconnaissance ? Que représentent les concerts pour vous, préférez-vous la quiétude des studios, ou la sueur des planches ?
Mathieu : L'avis est différent d'un musicien à l'autre. Pour ma part, l'acte de composition et la concrétisation en studio me comblent plus que ne le fait un concert. On peut penser que la scène apporte une dimension humaine, un contact avec le public mais je trouve ce contact étrange, faussé et incomplet.
Partager la scène avec Suffocation fut une réelle tuerie, les musiciens sont incroyables ! Avec les autres groupes que tu cites, le rapport était plus froid, nous regrettons un peu cette distance qu'il y a souvent, et qui ressemble à ce contact étrange dont je parlais plus haut.


Je me doute que vous êtes surement amateurs, voire fans d’Atheist ou de Suffocation, mais au niveau de vos affinités musicales, avez-vous des groupes/artistes de prédilection, en dehors du Metal extrême ?
De par votre style musical, et votre maitrise instrumentale, avez-vous des attirances personnelles pour d'autres styles, tels que le Prog, ou le Jazz par exemple ?
AtrophyMathieu : Puisque tu parles de Jazz, sache que je considère ce style comme une source d'inspiration inépuisable. La richesse harmonique d'une suite d'accords de Bill Evans, les progressions tonales de Coltrane ou de Blakey sont autant d'enseignements fondateurs. Le jazz fusion et le prog ont su en confondre la richesse avec des sons plus électriques et des systèmes de riffs : Jeff Beck, Weather Report en jazz fusion, Ozric Tentacles ou plus récemment Porcupine Tree pour le prog.
La même démarche a été adoptée par certains groupes de Metal comme Exivious. En dehors de ses goûts extrêmes, Stef s'évade plus avec des groupes issus d'un milieu plus hardcore tel Neurosis, Isis, Pelican... ou encore des trucs comme Tool.
Jeff et Ludo regroupent toutes ces différentes influences en incorporant le heavy.
Julian : Citons également la musique classique comme celle de J.S.Bach qui est, à mon sens, une influence majeure et durable dans le développement de la musique occidentale. Et même dans la musique du monde, que l'on peut appeler ou définir aujourd'hui comme musique ethnique, et qui traduit bien le rôle particulier des musiques de traditions orales dans les rapports que les hommes entretiennent avec le sacré.


Pour terminer, petite question axée sur les supports de communication.
La démocratisation d'Internet a considérablement évoluée, et comme beaucoup, vous avez adopté les nouveaux outils apparus depuis. Quel regard portez-vous sur ces nouveaux médias ? Que pensez-vous de ces nouveaux modes de communication, qui permettent un gain de temps, peut-être au détriment de la chaleur des relations humaines ?
Certains groupes rejettent et critiquent notre société de consommation basée sur le capitalisme à outrance, tout en utilisant en parallèle ce type de média, clairement orientés sur le profit. Qu'en pensez-vous ?

On peut critiquer un système tout en étant piégé par son fonctionnement et se trouver obligé, pour ne pas s'aliéner tout-à-fait, d'en cautionner une partie. Myspace n'encourage pas, dans son principe, la société de consommation pour qui s'en sert avec bon sens.
Tout vient de là : ce n'est pas l'outil qui est dangereux, mais la manière dont les gens vont s'en servir. Ce qui peut faire peur, c'est de savoir la plupart des gosses devant un écran plus de trois heures par jour, sans regard critique. Ce sont les consommateurs de demain...
Notre utilisation des nouveaux médias est anecdotique ; c'est facile à créer, beaucoup de gens ont le réflexe de consulter ce support avant les autres, mais l'efficacité est discutable.
C'est en envoyant des CD que nous sommes rentrés en contact avec Great Dane, après avoir perdu du temps avec le net.


Je vous remercie énormément pour le temps que vous avez consacré à répondre à mes questions.
Cette dernière question est pour vous, je vous laisse cet espace pour nous faire part de vos prochaines dates de concert, ou bien pour adresser un mot aux lecteurs de VS. Merci, et peut-être à bientôt au détour d'un concert ...
Nous vous remercions de nous avoir accordé cette interview et d'avoir apprécié notre disque, Atrophy espère croiser votre route au détour d'un concert ou d'un bon verre.
Ne téléchargez pas les albums, achetez-les ! Permettez aux groupes de continuer à nous fournir de l'excellente musique.


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ATROPHY > Du Son
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