Après avoir demandé à plusieurs membres de groupes français de donner leur point de vue sur la montée en puissance du leader actuel de notre scène métal, nous avons été intéressé d'en savoir plus sur le point de vue de certains journalistes français sur l'emergence de GOJIRA et son impact possible sur notre petite scène française.
Quel regard portes-tu sur le phénomène GOJIRA qui touche actuellement le monde du métal au niveau international ? Morgan Rivalin (ROCK HARD): Comme beaucoup de fans français, je ressens un certain sentiment de fierté. Cela faisait tellement longtemps que nous attendions qu'un jeune groupe metal hexagonal perce hors de nos frontières ! Comme chacun sait, les scènes scandinaves et germaniques sont archi fournies et de nombreux pays européens ont au moins une « locomotive ». Désormais, en Europe et même au-delà, lorsqu'on évoque la scène metal française, les discussions se mettent vite à tourner autour de Gojira. Il y a encore trois ans de cela, il nous fallait répéter, épeler, voire se résoudre à griffonner le nom du groupe sur un bout de papier pour qu'un confrère étranger comprenne le nom de la formation dont nous étions en train de lui parler… Heureusement, tout ceci a bien changé. Sans verser dans l'autocongratulation, j'ajouterai que cela fait rudement plaisir à mes collègues de Rock Hard ainsi qu'à moi-même de voir que Gojira, en qui nous croyons dur comme fer depuis déjà de longues années, bénéficie enfin d'un intérêt à la hauteur de sa musique. Mon très estimé rédacteur en chef Philippe Lageat me reparle souvent de la claque qu'il s'était prise au Divan du Monde, en 2001, et nous gardons tous un souvenir ému de l'énorme prestation délivrée par le groupe dans le cadre du VS Fest de 2003, à la Locomotive. Les « anciens » parmi vous se souviendront que cette affiche réunissant Gojira, Scarve et Loudblast avait également reçu l'honneur d'une couverture de Rock Hard à la même période. Souvenirs, souvenirs... C'est bien parce que nous avons suivi le parcours du groupe à la loupe pendant toutes ces années que nous nous réjouissons autant de le voir enfin rencontrer le succès qu'il mérite.
Jean-Charles Desgroux (CROSSROADS/ROCK ONE): Un regard rempli d'admiration, d'étonnement et surtout de très grande fierté. Je viens du même coin que ces gars-là, et c'est avant tout la fibre régionale qui l'emporte, un cran sensible au-dessus du simple chauvinisme ! Fuck, ces Frenchies ont quand même réussi à percer aux States et à gagner une telle reconnaissance partout ailleurs, et ils viennent d'un bled à cheval entre les Landes et le Pays Basque... Donc phénomène Gojira, oui : depuis le début des années 2000 en France (depuis quand un groupe avait fait la quasi-unanimité dans notre pays) et depuis deux-trois ans ailleurs.... Phénomène incroyable qui ne sera pas éphémère, j'en suis intimement persuadé.
Olivier Badin (TERRORIZER/ex-HARD'N'HEAVY): Sans vouloir minimiser ce qui s'est passé, je ne sais pas si l'on peut vraiment encore parler de phénomène à l'international. Si phénomène il y a, c'est bien au niveau français car rarement – voire jamais – un groupe de chez nous n'a réussi à avoir un tel impact hors de nos (petites) frontières. Le fait est qu'ils ont réussi là où (tous) les autres ont échoué. Mais je pense qu'il faudra attendre les résultats du prochain album pour voir si l'on a vraiment affaire à un ''phénomène' et non pas un ''feu de paille'. Une chose est sûre : cela fait du bien !
Comment expliques-tu le succès du groupe ? Olivier Badin (TERRORIZER/ex-HARD'N'HEAVY): Un ensemble d'éléments. Mais disons que globalement, je dirais que leur réussite tient surtout au fait qu'ils ont évité tous les écueils contre lesquels s'écrasent en général leurs compatriotes.
Déjà, plutôt que de se la jouer ''poètes maudits', ils ont eu l'intelligence d'accepter d'être pris en charge par un manager qui a su les mettre sur des bons plans, multiplier les contacts et surtout les faire tourner comme des sagouins. Plutôt que de se reposer sur leurs lauriers parce qu'ils avaient trois bonnes chroniques et deux concerts affichant complet comme nombre de leurs compatriotes, ils ont su continuer à bosser quand d'autres se seraient arrêtés.
Ensuite, ils ont bien su gérer leur succès. Dès qu'ils ont commencé à attirer du monde, ils ont eu l'intelligence de réinvestir immédiatement leurs premiers bénéfices dans une équipe technique stable, avec un ingénieur du son et un ingénieur lumières permanents, assurant à chaque fois un spectacle sans anicroche. Moralité : le bouche-à-oreille, déjà bien titillé par les albums, s'est emballé à force d'entendre tout le monde s'extasier sur leurs performances live.
Surtout, le groupe a su se confectionner une personnalité musicale à part mais cohérente avec leur démarche personnelle et leur discours. En évitant de tomber dans les clichés tout en assumant complètement le fait de jouer du death-metal, ils ont tiré leur épingle du jeu.
Et enfin, il y a l'aspect humain. Le côté très généreux de tout le monde, leur bonne hygiène de vie (pas ou peu d'alcool, pas de tabac, pas de fêtes tous les soirs jusqu'à plus soif, etc.), le fait qu'ils produisent eux-mêmes leurs albums dans leur propre studio, leur soutien à Greenpeace, etc. Tout cela fait d'eux des musiciens atypiques. Et donc attachants.
Morgan Rivalin (ROCK HARD): Selon moi, le succès rencontré à partir de "From Mars To Sirius" est avant tout lié à… "From Mars To Sirius" lui-même ! "Terra Incognita" et "The Link" avaient posé d'excellentes bases et le très bon DVD "The Link Alive" avait certainement drainé plus d'un curieux aux concerts du groupe. Mais "From Mars To Sirius" a placé la barre autrement plus haut. Et dire qu'il s'agit d'un album entièrement autoproduit… Ca laisse rêveur ! Il faut également souligner que très tôt dans sa carrière, le groupe est devenu un véritable monstre de live. Il n'y a pas mieux pour se faire un nom. En France, il ne fait donc aucun doute que l'acharnement du groupe et de son entourage (je pense notamment à son manager, Richard Gamba) a fini par payer. Quel metalleux qui se respecte n'a pas eu la possibilité de voir un jour Gojira jouer non loin de chez lui ? Sans doute pas beaucoup...
A l'étranger, le buzz a été alimenté à l'aide de prestations clés sur d'importants festivals ainsi que par la présence d'articles dithyrambiques dans des magazines influents et à la portée internationale que sont Kerrang! ou Revolver. A l'évidence, nos confrères étrangers ont été ensorcelés par la musique du combo. Leur curiosité a également peut-être été piquée par le discours écologique de Joe, aux antipodes de ce qui se pratique généralement dans les sphères metal, mais aussi tout simplement par les origines géographiques du groupe. Beaucoup semblent avoir été pris par surprise par l'arrivée de ce groupe débarqué de France… Aux Etats-Unis, le facteur « exotique » est visiblement quelque chose qui n'est pas à négliger et Gojira en bénéficie sans doute un petit peu. Et puis, il faut également ajouter à cela la bouche-à-oreille assuré par des personnalités du monde metal comme Randy Blythe de Lamb Of God. Le chanteur a découvert "From Mars…" quelque temps après sa sortie et n'a eu de cesse de claironner partout qu'il s'agissait de son disque préféré. Au fil des mois, et à la grande surprise des principaux intéressés, les déclarations élogieuses de la part de musiciens renommés n'ont pas arrêté de se multiplier. Depuis quelque temps déjà, il est devenu assez fréquent que les musiciens étrangers que nous croisons se mettent à nous parler de Gojira. A un point que nous ne serions pas étonnés de déceler l'influence du groupe sur les prochains albums de certains d'entre eux…
Jean-Charles Desgroux (CROSSROADS/ROCK ONE): Le groupe possède une palette de qualités aussi fortes qu'uniques et sera inscrit dans la durée. Posséder, avant toute chose, une telle intégrité, est la base, selon moi, de leur personnalité. Talent, détermination, et ouais, intégrité. Gojira a beau s'ouvrir vers les autres et le monde qui lui tend les bras, il travaille en symbiose avec la même équipe depuis des années (manager, photographe, ingé-son, etc.) : c'est une affaire familiale, une petite P.M.E traditionnelle avec un savoir-faire, une éthique et un sens des valeurs inouïs. Gojira est la somme de quatre individus aussi précieux que talentueux, de musiciens accomplis en parfaite communion qui ont magnifiquement digéré de très nombreuses influences et qui ont su créer, littéralement, leur propre univers et leur propre son. Et l'adjectif clé de ce son, c'est INTENSITE !!! Un mot cher aux Américains, et on les comprend : intensité dans les émotions, dans la puissance, dans le don de soi... L'intensité c'est la générosité, le surpassement, l'ambition... Moi quand je vois, par exemple, Jean-Michel et sa basse, je suis scotché : non seulement le mec est bon, super bon, mais il se donne à 200%... Derrière Gojira, il y a un travail phénoménal, une alchimie extraordinaire et un véritable sens du songwriting, complexe mais accessible, direct, compact, intense quoi ! Travail de studio, mais aussi acharnement sur la route : jouer partout, tout le temps, donner des centaines de concerts... Et au bout d'un moment, si tu es si bon, ça paye. Le bouche à oreille fonctionne, et les contacts d'épaississent. Et puis grosse reconnaissance à Richard, leur manager, qui à mon avis est le Peter Grant du metal en France ! Rigueur et décisions... le poids des choix.
Crois-tu que la scène française puisse bénéficier de retombées liées au succès du groupe ? Jean-Charles Desgroux (CROSSROADS/ROCK ONE): Evidemment : pour la première fois, franchement, on est pris au sérieux ! Sans évidemment manquer de respect aux autres excellents groupes du circuit depuis des années, il n'existait pas de formation capable d'aller aussi loin qu'eux.... Là, pour tous les Européens et surtout les Américains (puisque c'est le coeur et le gros du marché metal...), la France existe. Et les artistes ricains interviewés à qui l'on demande s'ils connaissent un groupe de chez nous, ils gueulent spontanément "GOJIRA, fuck yeah !!!" comme ils peuvent gueuler "SLAYER !!!" : un cri de fanatisme ! Donc oui, aujourd'hui tout le monde connaît Gojira, reconnaît leur travail et leur singularité, et sait donc que notre pays existe et que l'on est foutrement capable d'enfanter des groupes aussi bons que ceux dont ils sont si fiers...
Olivier Badin (TERRORIZER/ex-HARD'N'HEAVY): Je crois que c'est déjà le cas. Rien que le fait que le mag' anglais pour lequel je bosse (TERRORIZER pour ne pas le nommer) ait décidé de faire leur couv' sur eux il y a dix-huit mois avant tout parce qu'ils voulaient être les premiers sur le coup (sous-entendu, les autres voulaient le faire aussi) est symptomatique. Il y a encore quelques années, quand j'étais à l'étranger, on me disait forcément « Ah oui, la France, Trust, ADX tout ça… ». Depuis ''From Mars To Sirius', on commence toujours par Gojira, si possible avec des étoiles dans les yeux. Et puis derrière, cela renchérit derrière sur tous les autres, les Kronos, les Destinity, les Antaeus, comme si d'un seul coup, toute une frange du public étranger découvrait que la France pouvait elle aussi avoir de bons groupes.
Morgan Rivalin (ROCK HARD): Oui, même s'il n'y aura jamais d'automatisme en la matière. Il serait trop facile qu'il suffise qu'un groupe rencontre du succès pour que l'ensemble de la scène dont il provienne se mette à bien fonctionner ! Mais si les groupes hexagonaux se donnent les moyens de leurs ambitions et, surtout, s'ils parviennent à cultiver une originalité qui les différencie clairement dans cette masse encombrée par les copies, je ne vois pas pourquoi l'avenir de la scène metal française ne serait pas assuré. Même si la musique de Gojira est faite de nombreuses influences plus ou moins visibles, des albums comme "From Mars To Sirius" ou comme le petit nouveau, "The Way Of All Flesh", n'en restent pas moins éminemment personnels.
Quelles formations françaises vois-tu suivre le chemin tracé par GOJIRA ? Morgan Rivalin (ROCK HARD): Malheureusement, en dehors de nos frontières, j'ai bien peur qu'aucun autre groupe français ne bénéficie pour le moment d'un intérêt semblable à ce que Gojira a rencontré au cours des dernières années. Mais cela pourrait sans doute changer assez vite.
Personnellement, dans des registres très différents, j'apprécie beaucoup Lazy, Demians ou bien encore Klone, mais ceux qui lisent régulièrement Rock Hard savent que nous trouvons de grandes qualités à de nombreuses autres formations françaises. En tout cas, nous attendons le prochain groupe qui sortira un disque de la trempe de "From Mars To Sirius" de pied ferme !
Olivier Badin (TERRORIZER/ex-HARD'N'HEAVY): Difficile à dire. Personnellement, je ne pense pas que cela favorisera les groupes déjà ''établis' ou trop dans les rails on va dire. Nous avons de bons combos de thrash, de death mélodique, de black sympho etc. le problème que chaque pays s'est ''professionnalisé' ces dernières années et est donc en mesure de fournir SA bonne copie d'un DIMMU ou d'un SLAYER. Aujourd'hui, avec la masse incroyable de skeuds qui sortent, il faut ce ''plus' qui fait la différence.
Mais disons que si demain un groupe français original avec une véritable personnalité musicale propre émerge dans l'underground et fait ce qu'il faut pour se faire connaître, il aura plus de chances d'être reconnu.
Jean-Charles Desgroux (CROSSROADS/ROCK ONE): Il existe un paquet de formation françaises que j'adore personnellement, entre autres Zuul FX, GTI, Phazm, Lofofora, Aygghon, Headcharger, Punish Yourself, Oversoul... Mais honnêtement, je n'en vois pas d'autres en vue avec une telle personnalité et un destin aussi favorable... Certains ont le potentiel; je pense à Dagoba évidemment qui est un sérieux challenger. Mais Gojira est unique. Ce qu'ils ont accompli depuis toutes ces années est incroyable et je sais que ce n'est que le début. Ils ont aujourd'hui accompli tous leurs rêves les plus fous, mais ils ne savent pas encore jusqu'où ça va aller !!!
Depuis peu, on commence à critiquer le groupe en France. GOJIRA ferait-il naître des sentiments de jalousie ? Jean-Charles Desgroux (CROSSROADS/ROCK ONE): Malheureusement oui. La jalousie naît chez les gens frustrés, aigris, ignares, complaisants et peu tolérants. Pourquoi n'a-t-on pas le droit d'être fier d'un de nos groupes ? C'est un syndrôme assez français, ça : la peur, la honte, le refus du succès. Il faut se cacher, il y a un complexe, une retenue. Sans bien entendu être prétentieux, vaniteux, ronflant ou quoi que ce soit, on a le droit de s'épanouir, d'être heureux ! Pour beaucoup, dépasser le cadre de l'album autoproduit et des tournées cantonnales, c'est un plan marketing... Alors les cons (et bordel il y en a un paquet, je me marre/ou pleure selon l'humeur en lisant quelques commentaires de news sur VS...), oui les cons continueront à clâmer sans rien connaître à rien que Gojira fait du commercial ou sont des vendus... Arf ! Moi Gojira, je bande pour eux : des années sur les routes françaises à constituer une fan-base considérable, des chroniques dythirambiques partout, des albums magistraux, une ouverture à Bercy, trois tournées US (dont une colossale avec Lamb Of God, Machine Head et Trivium !!!), avoir "From Mars To Sirius" dans le Top 5 de l'année de la rédaction de Revolver aux US (le plus gros mag ricain de metal), la participation de Joe à Cavalera Conspiracy (moi je mouille déjà lorsque j'interviewe mes idôles, dont Max, mais alors JOUER avec lui dans un groupe ? Come on !), partager la scène avec Metallica (un commentaire, les aigris ???), avoir Randy Blythe en guest sur son nouvel album, etc, etc. Tout ça sans avoir jamais fait de compromis artistiques, de rester aussi simple, gentil, humble et honnête ? Critiquez, critiquez, de toutes façons vous ne connaîtrez jamais dans votre vie le 100ème de l'extase que peuvent ressentir ces mecs-là en s'épanouissant dans leur passion.
Morgan Rivalin (ROCK HARD): J'ai l'impression qu'il se fait critiquer depuis déjà plusieurs années ! La jalousie est sans doute quelque chose d'inévitable dans leur situation et il n'y a qu'à parcourir les commentaires publiés sur VS pour se rendre compte que c'est une réalité…
Mais vis-à-vis de cela, les membres du groupe me semblent réagir avec beaucoup de philosophie. Leur présence en couverture de magazines doit faire croire à certains que désormais, ils sont à l'abri du besoin. Les tournées américaines en font rêver plus d'un alors que l'immense majorité des groupes qui se produisent sur ces plateaux ne sont, au mieux, que chichement dédommagés… Pour en avoir déjà parlé avec les intéressés, je ne crois pas m'avancer en disant que Gojira est encore loin de rouler sur l'or, voire même de pouvoir vivre « facilement » du produit de son Art...
Olivier Badin (TERRORIZER/ex-HARD'N'HEAVY): Bien sûr. C'est un sentiment non seulement très français (nous sommes des éternels râleurs) mais surtout typique des musiques undergrounds où les fans sont hardcore et toujours prêts à soutenir la scène mais trop souvent enclins à se complaire dans leur soi-disant misérabilisme. Et surtout, dès qu'un de ''leur' groupe a du succès, ils s'en sentent dépossédé et n'accepte pas de le partager avec les autres, alors qu'ils étaient souvent les premiers à se plaindre juste avant du manque d'intérêt que suscitait ''leur' passion.
Par contre, même si cela sera toujours (hélas) présent, je suis fataliste et je considère que cela est inhérent à tout groupe qui marche. On pourrait même dire que c'est une forme de reconnaissance… :-) En fait, si GOJIRA laissait tout le monde indifférent ou n'avait que des fans transis, cela ne serait pas bon non plus. Surtout que personne n'est infaillible.
As-tu eu l'opportunité de rencontrer le groupe. Si oui, as-tu une anecdote à raconter à ce sujet ? Olivier Badin (TERRORIZER/ex-HARD'N'HEAVY): J'ai eu la chance de les rencontrer pour la première fois au Splendid, lorsqu'ils s'appelaient encore GODZILLA et qu'ils tournaient en première partie d'IMMORTAL. Donc oui, j'ai quelques anecdotes sous le bras si tu veux… ;-)
J'en retiendrai une : leur manager Richard m'a très généreusement proposé de rédiger la bio ''officielle' qui accompagnait le CD promo de ''From Mars', juste après ma visite dans leur studio. Plutôt que d'être payé, je lui ai juste demandé un petit échantillon de ce qui avait fait le bonheur de mes papilles gustatives lors d'un mémorable petit-déjeuner pris au soleil et en tenue de combat SVP (caleçon/t-shirt) au studio des Milans… C'est-à-dire un pot de confiture de cerises noires 100% bio de leur village. Et crois-moi, jamais mes tartines n'ont été aussi bonnes… :-)
Jean-Charles Desgroux (CROSSROADS/ROCK ONE): Oui, je les ai rencontrés quelques fois. En général, les artistes français ne se la jouent jamais rock-star à deux balles. Mais là, Jean-Michel, Christian, Mario et Joe, ce sont les types les plus doux, respectueux, sincères, calmes, et gentils que j'ai pu rencontrer. Un style de vie sain, une vie équilibrée... La première fois que je les ai interviewés, c'était dans leur fief. J'étais en week-end chez moi à Biarritz et l'opportunité de passer une journée avec eux s'est présentée, à la fin de l'enregistrement de "From Mars To Sirius", début mai 2005. Vingt minutes en bagnole, un petit chemin dans les bois après la nationale, on roule doucement et là, une clairière, un vieux corps de ferme retapé, un havre de paix. On a passé des heures à discuter de tout, et bien sûr ils m'ont fait écouter deux titres finis, "Backbone" et "The Heaviest Matter of the universe" dans leur studio flambant neuf. Grosse émotion, grosse impression ! Et là où j'étais plus que comblé, c'est quand ils m'ont annoncé que j'étais le premier en dehors d'eux quatre à écouter les premiers titres !!! Même leur manager n'avait pas encore eu cet honneur !!! Sinon, être backstage avec eux à Bercy pour le Unholy Alliance Tour 2, ça aussi c'était émouvant : j'ai essayé de capter quelques vibrations de ce qu'ils pouvaient bien ressentir en étant là... et c'était déjà magique, imaginez pour eux...
Morgan Rivalin (ROCK HARD): J'ai rencontré le groupe à plusieurs reprises, principalement au cours des deux dernières années. J'ai déjà eu l'occasion de l'écrire dans Rock Hard, mais voir Gojira dynamiter les planches d'un club à Austin, au Texas, était un grand moment. Ce jour-là, la mine émerveillée de Mario Duplantier croisant un fan vêtu d'un t-shirt Gojira avant même l'ouverture des portes valait tous les discours. La dédicace d'un morceau d'un groupe texan à « Gojira, ce groupe venu de France pour nous botter le cul ! » seulement quelques instants après la fin du concert de Lamb Of God, qui avait vraiment frappé un grand coup ce soir là, avait également quelque chose d'irréel… C'était une journée riche en émotions, et ce à de très nombreux niveaux !
Mais j'ai aussi envie de vous toucher deux mots au sujet de la voiture de Mario. A l'occasion d'un récent passage au Studio des Milans, j'ai pu me rendre compte des secousses infligées au moteur de celle-ci (qui ne sont d'ailleurs pas sans rappeler les riffs saccadés chers au cœur du groupe). Je souhaite donc profiter de cet espace pour lancer un vibrant appel : mobilisons-nous et offrons-lui un kit de bougies neuves !!!
Es-tu fan de GOJIRA ? Jean-Charles Desgroux (CROSSROADS/ROCK ONE): A ton avis ???
Morgan Rivalin (ROCK HARD): Pour ceux qui ne l'auraient pas encore compris, la réponse est « oui ». Cela s'est fait progressivement. J'avais déjà pris une jolie gifle en découvrant Godzilla totalement par hasard en 1999, à l'occasion d'un festival gratuit organisé à quelques kilomètres de chez moi (le célèbre Festi'jeunes d'Olonne-sur-Mer, en Vendée), mais même si certains de mes amis étaient déjà complètement accros à "Terra Incognita", c'est à la sortie de "The Link" que je suis véritablement devenu fan. Il y a quelque chose qui m'a aussitôt parlé dans la musique et dans le propos de ce groupe, quelque chose de quasi viscéral. Aujourd'hui, Gojira est pour moi l'une des rares formations metal que je connaisse qui tienne le même discours à la ville qu'à la scène. Ce sont aussi des musiciens qui, en dépit de toute l'attention qu'on peut leur témoigner aux quatre coins du globe, sont restés on ne peut plus nature, dans tous les sens du terme. Alors, dans ces conditions, comment ne pas avoir envie de continuer à répandre la bonne parole ?
Olivier Badin (TERRORIZER/ex-HARD'N'HEAVY): Oui, mais d'une façon atypique qui, j'espère, ne va pas paraître trop ''snob'. Disons que grâce à mon boulot, j'ai eu la chance de les rencontrer plusieurs fois hors scène. Cela me fait donc toujours un peu bizarre lorsque j'écoute leur musique car cela me fait alors instantanément penser à des moments… Pas forcément très rock n'roll on va dire. Mais je suis avant tout fan de la petite famille GOJIRA et de l'aventure qu'ils vivent tous ensemble depuis trois ans maintenant. Ce genre de réussite m'a redonné foi en la musique, me fait croire que non, tout n'est pas encore qu'une question de gros sous et de modes dans ce milieu. En gros, ils m'ont redonné l'envie de croire que oui, c'est (parfois) possible qu'un excellent groupe, à force de boulot et d'abnégation, réussisse à avoir un véritable écho populaire et fasse bouger les mentalités, et ce sans se compromettre.
Rien que pour ça, je leur dois une fière chandelle et donc je suis fan.