A CANOROUS QUINTET fait parti de ces pionniers malheureux du death mélodique qui se sont vus voler la vedette par plus doués qu'eux. Formé à Stockholm en 1991, le groupe connait une période d'instabilité (1993/1994) avec de nombreux changements de musiciens. Ce démarrage diesel leur coutera très cher, car lorsque l'EP As Tears (1995) se fait remarquer, les ténors du genre AT THE GATES, DARK TRANQUILLITY et IN FLAMES atteignent des sommets de créativité et la reconnaissance critique. 2 questions se posent: Aimez-vous l'école Gothenburg? Que vaut vraiment A CANOROUS QUINTET?

Lancé sur le marché en 1996 par No Fashion (Dissection, Katatonia, Marduk), leur 1er album « Silence of the World Beyond » témoigne de réelles qualités mais passe inaperçu. Résultat 2 ans plus tard les Suédois jouent déjà le quitte ou double avec leur 2ème album « The Only Pure Hate ». Après le Abyss Studio de Peter Tägtgren, la formation semble vouloir durcir le ton en investissant à l'hiver 1997 le fameux Sunlight Studio de Tomas Skogsberg (ENTOMBED, DISMEMBER, GRAVE).

Le premier contact avec ce 2ème album n’est pas flatteur. Simpliste et dénué d’intérêt, son artwork n'arrive pas à la cheville de son prédécesseur. « The Only Pure Hate », difficile de faire plus explicite. On s'attend donc à un album plus direct et violent. Notre intuition se confirme dès les premières secondes, avec le brutal « Selfdeceiver » (dont les lecteurs de Metallian se souviennent peut-être). Pas d'intro atmosphérique ou de mélodies, bien au contraire, les Suédois attaquent fort d'entrée. L'arrivée du mid tempo nous permet de souffler, de revenir vers le death mélodique.

L’écoute n’est pas déplaisante mais l'alchimie sur laquelle reposait le premier album a presque entièrement disparu. Il y a de bonne idées sur « The Only Pure Hate », mais elles ne sont pas exploitées comme on le souhaiterait. La production de Tomas Skogsberg semble noircir le tableau, le son se veut trop compressé pour laisser vraiment vibrer les notes comme elles le devraient. Une production plus lourde que par le passé, plus épaisse, qui, même si elle fonctionne sur les gros riffs, manque de dynamisme et de subtilités.

Futur batteur des vikings d’AMON AMARTH, Frederik Andersson mène la charge, sachant se mettre en retrait lorsque c'est nécessaire. Comme souvent dans le metal, le bassiste Jesper Löfgren fait les frais du mixage. Les riffs des gratteux Linus Nirbrant et Leo Pignon sont proprement exécutés (la saturation faisant penser au classique Peavey 5150, si employé alors dans le milieu). Futur OCTOBER TIDE (side-project de membres de Katatonia) et SINS OF OMISSION, le vocaliste Mårten Hansen n'a certes pas la classe d'un Mikael Stanne, mais il ne s'en montre pas moins performant. A noter qu'il partage l'écriture des textes avec Frederik Andersson.

Mais revenons à l'écoute de « The Only Pure Hate ». Certains titres se démarquent, comme « The Complete Emptiness » plus lent et plus sombre. « Red » possède également un riff accrocheur teinté de mélancolie me faisant penser aux Allemands de NIGHT IN GALES. Les leads et soli parsemant l'album sont le principal lien rattachant les Suédois à leur passé plus mélodique, à l'image d' « Embryo of Lies », « The Void » ou encore « Everbleed », dont les guitares acoustiques apportent un soupçon de finesse à un ensemble un peu trop bourru mais qui s'achève avec un dernier coup d'éclat: « Land of Lost ».

Sur ce 2ème album, les Suédois ont le cul entre 2 chaises et ça s'entend. En choisissant de quitter l'école de Gothenburg pour se rapprocher de celle de Stockholm, A CANOROUS QUINTET aurait pu trouver un second souffle. Leurs compositions ne manquent pas d'arguments, il s'en faut parfois d'un rien pour mettre le feu aux poudres, mais elles sont inégales et victimes d'une production décevante. Après un EP témoignant d'une réelle personnalité et un premier album efficace, dans l'air du temps, « The Only Pure Hate » ne concrétise pas les espoirs placés en eux.

Pire, cet enregistrement en demi-teinte précipite la chute du groupe qui splitte en 1999, ses membres se dispersant aux 4 vents. A noter toutefois que 3 d'entre eux (Linus Nirbrant, Jesper Löfgren et Frederik Andersson) vont s'investir dans GUIDANCE OF SIN, formation plus death n' roll qui connaitra un destin similaire. « The Only Pure Hate » n'est cependant pas la fin de toutes choses. En effet 7 ans plus tard, le quintet se réunit sous le nom de THE PLAGUE. Une Demo plus tard et à la faveur d'une signature chez Metal Blade, ils se renomment THIS ENDING. Mais une fois de plus l'histoire va se répéter (2 albums et 1 EP)....

Pour en revenir à « The Only Pure Hate », la version originale est désormais relativement difficile à trouver (No Fashion Records oblige), mais certains d'entre vous seront peut-être heureux d'apprendre qu'une compilation nommée « The Quintessence » (comprenant la discographie intégrale agrémentée de divers bonus) est sortie en 2013 chez Cyclone Empire. Les curieux peuvent s'y essayer, mais aujourd'hui se pencher sur A CANOROUS QUINTET relève de la nostalgie et de la dévotion pour l'école de Gothenburg. Si vous aimez des groupes tels qu' ABLAZE MY SORROW ou NIGHT IN GALES vous ne serez sans doute pas déçus.

Selfdeceiver (The Purest of Hate): https://www.youtube.com/watch?v=HezVmGSTt7k
Land of Lost: https://www.youtube.com/watch?v=yDVrvm_9CLI


Rédigé par : Strat | 1998 | Nb de lectures : 2033