Adrien Grousset (Guitare) - HACRIDE par TONTON - 2796 lectures
« Pour ma part, je ne me vois pas sortir un disque d’HACRIDE sans qu’il y ait de surprises. Il faut que ça scotche sur place. Il faut surprendre sinon ça ne vaut pas le coup de faire de la musique. » Et c’est sans doute cette volonté de surprendre qui a permis à HACRIDE de s’inviter dans le peloton très fermé des pointures du métal français. Avec « Amoeba » nouvel album fraîchement atterri dans les bacs, HACRIDE qui a déjà fait couler beaucoup d’encre et de salive. Il était donc logique que VS en fasse couler d’avantage lors d’un entretien très instructif avec Adrien Grousset, guitariste du groupe Poitevin.
VS – Une actualité bien chargée pour HACRIDE ces derniers temps mais j’ai le sentiment qu’il n’y a pas eu de véritable break pour vous : d’abord la sortie de « Deviant Signal », ensuite la tournée qui en a découlée incluant votre prestation au deuxième VS
Adrien – Oui, c'est vrai qu'on a pas eu le temps de s'ennuyer entre la sortie de « Deviant », la tournée, l'enregistrement d' « Amoeba ». On a été pas mal sollicité et on n'a pas eu réellement de mois off. Ce n'est pas plus mal d'ailleurs parce que ça veut dire que nous sommes demandés et le fait d'avoir toujours une actualité en court nous permet de faire circuler le nom d'HACRIDE.
VS – Oui, mais est-ce que le fait d’être toujours sous pression n’est pas un peu dangereux. Après tout ce n’est pas l’idéal pour se remettre au travail et composer un autre album…
Adrien – Oui, c'est pas faux mais on savait très bien à quoi s'attendre quand nous avons débuté avec HACRIDE. Nous étions prêts à travailler dur et à gérer l'éventuelle pression qui en découlerait. C'est pas trop un problème pour nous. La pression, ça se gère.
VS – C’est vrai que les choses sont arrivées assez rapidement pour HACRIDE. Et justement à ce sujet, ne crois-tu pas que le fait d’être signé sur le même label que GOJIRA à l’international, vous a aidé d’une façon ou d’une autre à acquérir une certaine no
Adrien – Pour « Deviant… » ce n'était pas le cas. Maintenant il est vrai qu'avec la sortie d' « Amoeba » nous donnons beaucoup d'interviews aux médias étrangers et il est exact que le nom de GOJIRA revient assez régulièrement dans leurs questions. Maintenant je ne suis pas certain que tout le monde sache que nous sommes sur le même label qu'eux. Et si c'était le cas, il serait difficile pour moi de te dire si notre exposition médiatique vient de Listenable ou du tabac que fait GOJIRA partout où il passe.
VS – On va parler un peu de ce fameux nouveau disque. Alors tout le monde ne l’a peut-être pas remarqué mais «Deviant » était en fait un mini album à la base. N’as-tu pas le sentiment qu’ « Amoeba » est votre premier véritable album ?
Adrien – Si, tout à fait. « Deviant » avait été un peu conçu comme un mini mais sa durée était quand même relativement longue et il a suffit de peu de chose pour en faire un album. Pour « Amoeba » ça a été différent. On a travaillé pour lui donner une entité d'album, pour en fait un bloc et non pas une suite de morceaux indépendants les uns des autres. « Amoeba » a été composé comme un tout. « Deviant » avait été enregistré en une semaine et demi pour démarcher les labels. La démarche, la recherche musicale ont été totalement différentes pour le dernier puisque nous l'avons composé en 4 mois mais c'est également 4 mois qui nous ont été nécessaires pour l'enregistrement.
VS – J’ai aussi l’impression que vous avez voulu brouiller un peu les pistes en sortant des stéréotypes métalliques, tant sur le plan visuel que sur le plan conceptuel d’ « Amoeba »…
Adrien – C'est clair qu'on a voulu s'éloigner de l'image métal pour que l'album soit le plus ouvert possible pour que le public puisse l'aborder sans idées préconçues. On voulait que les gens se l'approprient et se fasse leur propre idée. L'artwork est assez abstrait . C'est bio, végétal mais en fait, chacun y voit ce qu'il veut. Hé bien nous voulions qu'il en soit de même pour la musique. Si bien qu'aujourd'hui, on nous donne aussi bien l'étiquette de post-hardcore, que de thrash moderne que de death metal. Bref, on en a eu de toutes les couleurs mais personne n'arrive vraiment à mettre le doigt dessus. Cette idée nous plait vraiment parce que ça veut dire que nous avons fait un album original qu'on ne peut pas cataloguer et ça veut aussi dire par là que nous avons peut être trouvé notre style.
VS – Il y a quand même un terme qui colle très bien à HACRIDE et sur lequel, tout le monde est d’accord. C’est celui de « progressif » même si cette appellation, elle-même, n’évoque pas grand chose à part la variation musicale.
Adrien – Oui, c'est vrai que le terme progressif nous convient du fait de cette idée de variation. On essaye de sortir des sentiers battus du point de vue des structures, des mélodies. On ne veut surtout pas s'enfermer dans une routine ou reprendre des choses qui ont déjà été faites. On a envie de faire avancer le métal à notre mesure.
VS – Tout ça vous conduit inévitablement à de nouvelles prises de risques. Est-ce que tu t’imagines un jour sortir un album qui n’innove pas par rapport au précédent ?
Adrien – Absolument pas.
VS – Même si vous trouvez un style propre qui sera identifiable par tout le monde au bout de deux riffs ?
Adrien – Hé bien cela voudra dire que nous sommes arrivés à notre but mais nous ne nous reposerons pas dessus pour autant. Prends par exemple un album de SYL. Tu sais dès le premier accord que c'est lui et qu'il va encore approfondir son style, qu'il va innover. Pour ma part, je ne me vois pas sortir un disque d'HACRIDE sans qu'il y ait de surprises. Il faut que ça scotche sur place. Il faut surprendre sinon ça ne vaut pas le coup de faire de la musique.
VS – En parlant de surprise, je me vois mal faire cette interview sans parler de cette reprise d’OJOS DE BRUJO qui en a surpris plus d’un et moi le premier. Je n’avais pas le sentiment que les musiques latines faisaient partie de vos influences habituelle
Adrien – Bah si complètement. Je suis un gros fan de flamenco mais aussi des musiques latines en général comme la Samba ou la Bossa-nova. Ça a toujours influencé mon jeu de guitare et je sais qu'Olive qui est à la base un batteur de jazz est également amateur de musique latine pour les polyrythmies qu'on y trouve. On peut même parler d'influence majeure pour le groupe et c'est pour ça que la reprise de « Zambra » s'est posée comme une évidence. Et puis, lorsque je compose, j'essaye toujours d'adapter des cellules rythmiques venant de cultures diverses hispanisante, arabisante, latino, etc…
VS – On est un peu familier avec le style arabisant dans le métal mais pour le flamenco qui présente un jeu de guitare extrêmement typé, c’est un peu nouveau non ? Sorti des DOORS, j’ai pas le sentiment que ça soit répandu.
Adrien – En fait, oui et non. Les gammes et l'harmonie flamenco sont très présentes dans le métal. Prend un guitariste comme Paco de Lucia, pour parler du plus connu, et donne lui une guitare électrique avec une saturation et tu remarqueras que ses riffs seront proches de DEATH.
VS – Il va pas jouer du MESHUGGAH quand même (rires)
Adrien – Justement, si tu écoutes bien « Zambra » il y a toute une partie très déstructurée et axée sur les polyrythmies que j'ai seulement adaptée à partir des voix de la version originale. On peut dire que l'utilisation des polyrythmies et des dissonances dans le métal est naturellement présente dans le métal. Je pense que les membres d'OJOS DE BRUJO ont ressenti ce lien et ont tout de suite comprit que « Zambra » pouvait aussi bien sonner métal que néo-flamenco.
VS – Ça a dû vous faire plaisir que les membres du groupes aient voulu participer à la reprise ? Ça donne une idée assez claire de l’intérêt qu’ils vous ont porté.
Adrien – Oui c'est vrai mais ça n'a pas été sans difficulté. Ça nous a pris environ huit mois entre la prise de contact et l'aboutissement de cette reprise. Ils étaient très enthousiastes et on l'était tout autant vu, qu'à la base, ils n'écoutaient absolument pas de métal. Ce sont les membres d'OJOS DE BRUJO, eux-même, qui nous ont demandé de déplacer la date du mastering. Ils voulaient que le titre soit sur l'album et nous ont promis de faire le maximum pour nous envoyer leur enregistrement à temps. On a donc eu les voix le dernier, dernier jour. On a reçu les bandes à 11h et on masterisait à 14h. Depuis on n'a plus de nouvelles vu qu'ils sont retournés à leur tournée mondiale en première partie de Ben Harper.
VS – Pour changer de sujet, on vous a comparés à MESHUGGAH, SYL et plus récemment à TEXTURES. Est-ce que ces comparaisons ne brident pas d’une façon ou d’une autre la perception qu’on peut avoir de votre musique ?
Adrien – Si, tout à fait. D'ailleurs je dois t'avouer que les comparaisons avec STRAPPING et MESHUGGAH commencent à me courir sévère et celle de TEXTURES encore plus. Non pas que je n'apprécie pas TEXTURES, au contraire je trouve que c'est un groupe énorme…
VS - … à mon niveau, j’ai pas le sentiment qu’HACRIDE et TEXTURES fassent la même musique mais je dirais plutôt que la démarche musicale des deux groupes est similaire.
Adrien – Alors oui, tu as exactement mis le doigt dessus. C'est exactement ça parce que musicalement, je ne vois aucun rapport entre eux et nous. On nous envoie des interviews de Hollande, de Belgique où l'on nous catalogue de « TEXTURES français » et je trouve que cette étiquette ne nous convient pas.
VS – Oui mais ne t’inquiètes pas, on cataloguera bientôt TEXTURES d’ « HACRIDE hollandais » (rires)
Adrien – Je ne sais pas si j'ai raison ou pas mais, à mon sens, le seul point commun entre nous réside dans une même démarche progressive bien particulière, une même façon de penser la musique. Quand j'écoute TEXTURES, je ne retrouve pas du tout HACRIDE. Ou alors c'est que j'ai un problème d'oreille.
VS – Pour parler d’un futur proche, je sais qu’une tournée est en cours. Beaucoup de dates sont déjà planifiées.
Adrien – Oui, pour le moment on a environ 20/25 dates jusqu'en juin mais je pense que d'autres dates seront bookées par la suite. Dans un premier temps, on va principalement se concentrer sur la France avec une paire de passages en Suisse et en Belgique. Et puis, dès septembre, on va s'attaquer à l'étranger.
VS – Je crois qu’on a bien fait le tour. As-tu un p’tit message pour la petite communauté de VS ?
Adrien – Hé bien merci à toi, à toute l'équipe de VS ainsi qu'à tous les internautes de VS parce que je sais qu'ils nous soutiennent à fond et ça, c'est très important pour nous. Trop de groupes oublient que, s'ils font de la musique, c'est parce qu'il y a des gens pour les écouter et aller les voir sur scène alors un grand merci à tous ceux qui nous soutiennent.