Lundi 03 novembre 2014 - Le Vox - Toulon

Le Vox à Toulon est une salle pouvant contenir environ 500 personnes. Mais ce soir, elle ne sera remplie que de 270 métalleux pour l'unique date française d'OVERKILL sur leur tournée européenne regroupant aussi DARKOLOGY, ENFORCER et PRONG. Ce qui n'est pas si mal étant donné que le concert a lieu un lundi et que le public du Sud-Est n'est malheureusement pas réputé pour se déplacer en masse aux dates qui sortent un peu du lot, comme celle-ci. Saluons au passage les efforts de Trendkill, pour l'organisation de ce concert et de tant d'autres dans le Sud-Est.

Cette affiche à quatre groupes est ce soir amputée de DARKOLOGY. Ce qui n'est pas pour me déplaire. Quatre groupes, je trouve que ça commence à faire trop. Trois, c'est largement suffisant. Et dans trois styles de metal bien distincts sur cette date, ce qui est encore plus appréciable.

Les suédois d'ENFORCER débutent les hostilités avec leur heavy / speed metal très influencé par les premiers MAIDEN (et un peu par ANVIL). Ils n'ont clairement pas inventé l'eau tiède mais comme sur album, leur musique est éminemment sympathique, et on sent que l'hommage est sincère. La seule originalité d'ENFORCER ce soir est de jouer sans bassiste (pour des raisons inconnues). Ils sont néanmoins à fond, surtout le chanteur / guitariste, qui n'arrête pas d'enchainer les poses les plus metal possible et qui arbore le même look que K.K. Downing de PRIEST dans la première moitié des années 80, Flying V incluse. Leurs titres sont plutôt efficaces dans le genre, notamment « Take Me Out of this Nightmare » et « Midnight Vice » qui restent bien dans le crâne. Ils s'adonnent aussi à l'exercice de la reprise, avec « Countess Bathory » de VENOM. Cover chantée par le second guitariste (la voix du chanteur étant trop fluette pour se frotter au répertoire de Cronos) pour un résultat anecdotique, qui pose surtout la question de l'intérêt de faire une reprise quand on a trois albums à son actif et seulement 30 minutes de set. Un bon échauffement ceci dit que ce concert d'ENFORCER, et le public a été plutôt réceptif.

Place ensuite à un tout autre registre, avec le thrash hardcore fusion de PRONG, qui est en « special guest » d'OVERKILL sur cette tournée. Un guest qui se trouve être un vrai co-headlining, puisque PRONG joue 1h10 au final, ce qui doit équivaloir à la durée moyenne de leurs concerts en tête d'affiche. Une bonne frange du public est là pour soutenir le groupe New-Yorkais, qui bénéficie d'un son correct. Tommy Victor est tout sourire et nous gratifie régulièrement de ses petits sauts dont il a le secret. Il s'adresse souvent à nous en français, ce qui rajoute encore plus de sympathie au personnage. Son jeune batteur, coincé au centre de la petite scène du Vox, fait très bien son job. Tandis que Jason Christopher à la basse est plus hardcore dans l'esprit, avec une attitude plus agressive que les deux autres. PRONG nous offre deux extraits de « Ruining Lives », son dernier méfait en date sorti cette année, qui m'a un peu moins convaincu que son excellent prédécesseur « Carved Into Stone » (qui a droit lui aussi à deux morceaux joués). Les classiques sont au rendez-vous, ce qui fait forcément très plaisir : « For Dear Life », « Beg to Differ », « Lost and Found », « Unconditional », « Rude Awakening » et pas moins de cinq titres de « Cleansing » pour fêter les 20 ans de ce disque culte. Ces derniers sont joués plus vite que les version originales, ce qui est dommage, ça leur fait perdre du groove. Nous avons eu droit à un superbe concert de PRONG au final.
En fin de soirée, j'ai eu le plaisir de pouvoir discuter avec Tommy Victor, les musiciens de PRONG squattant tranquillement devant la salle. Et j'ai rarement rencontré un musicien aussi avenant. Tommy est d'une coolitude absolue. Il m'a fait part de quelques anecdotes intéressantes. Comme le fait que jouer avec Glenn Danzig paye beaucoup mieux que jouer avec Al Jourgensen. Que ce même Danzig détestait John Christ (le guitariste des quatre premiers albums mythiques de DANZIG), que ce soit son jeu de guitare ou son son. Et Jason Christopher (aussi charmant hors-scène que renfrogné sur scène) me dira à quel point il est plus heureux de jouer avec PRONG qu'avec cette drama queen de SEBASTIAN BACH.

OVERKILL fait son entrée scénique sur l'intro grandiloquente de son dernier album « White Devil Armory ». Très bon disque au demeurant, même si je le trouve un peu moins inspiré que ses deux remarquables prédécesseurs. Comme sur WDA, « XDM » est enchainée avec « Armorist ». La scène du Vox n'est pas grande et avec le drum riser conséquent de Ron Lipnicki (totalement caché derrière sa batterie), la place allouée aux musiciens est exigüe, ce qui réduit le jeu de scène. Jolie surprise en deuxième morceau avec « Overkill », vieille pépite du premier album. « The Electric Age », l'avant-dernier OVERKILL, est aussi représenté avec « Electric Rattlesnake » et « Black Daze », mid-tempo sympathique mais pas vraiment indispensable non plus.
Les classiques sont évidemment de la partie, « Wrecking Crew » et « Rotten to the Core » font à ce titre toujours un putain d'effet en live ! Autre surprise / curiosité, la ressortie des vieux fonds de tiroir de « End of the Line » issue d'« Under the Influence », qu'ils n'avaient pas dû jouer depuis une éternité. C'est au cours de ce morceau que Derek Tailer (guitare rythmique) rencontre des soucis techniques, ce qui oblige ensuite Dave Linsk à se lancer dans un solo de guitare (un peu trop masturbatoire) avant d'enchainer sur « Long Time Dyin' » (du mésestimé « From the Underground and Below »). Malheureusement le seul titre tiré d'un de leurs disques des années 90. Ils jouent aussi « Under One » de « W.F.O. » habituellement sur cette tournée (autre pépite ressortie pour l'occasion) mais les soucis techniques l'ont fait passer à la trappe ce soir, grrr.
« Pig » du nouvel album passe moyennement bien l'épreuve de la scène. Ce qui n'est évidemment pas le cas d'un gros classique comme « Hello from the Gutter ». « Bring Me the Night » et « Ironbound » viennent nous rappeler au bon souvenir de « Ironbound », disque sorti en 2010 et qui a remis OVERKILL sur les bons rails du thrash. « Bitter Pill » du dernier opus passe très bien, elle, l'épreuve de la scène et amène un peu de variété à cette setlist quasi exclusivement constituée de purs morceaux de thrash. Le concert se termine par une doublette magique avec « Elimination » et « Fuck You », cette reprise des SUBHUMANS qui est toujours autant une thérapie de groupe en live, à tendre son majeur en l'air et à gueuler à pleins poumons « fuck you ! ».

Un très bon concert d'OVERKILL à l'arrivée, même si je l'ai trouvé un peu moins définitif que celui auquel j'avais assisté à Villeurbanne en 2010. De par sa setlist déjà. Ils ont choisi de privilégier les trois derniers albums. Pour le dernier en date c'est compréhensible, mais jouer deux titres d'« Ironbound » et « The Electric Age » est un choix plus discutable. J'aurais préféré deux classiques de plus à la place. Après, c'est normal qu'avec plus de 30 ans de carrière et DIX SEPT albums au compteur, il reste forcément quelques standards sur le carreau, et sur un concert d'1h30 ça crée obligatoirement des frustrations. Personnellement, j'aurais adoré entendre « Deny the Cross », « In Union We Stand » et « Horrorscope ». Mais bon, on ne peut pas tout avoir dans la vie.
Autre point, j'ai senti le groupe moins dedans qu'il y a quatre ans. Est-ce la taille exigüe de la scène qui les a gêné ? Les problèmes techniques de Derek Tailer (qui était totalement blasé après ça) qui ont gâché la fête ? Ou l'âge tout simplement (Blitz et D.D. Verni ont la cinquantaine bien entamée) ? En tout cas, je les ai senti un peu en pilotage automatique au fur et à mesure du concert (alors que l'entame de show était plutôt énergique). Néanmoins, Blitz reste un frontman sacrément charismatique (avec son éternelle gestuelle qui s'amuse à mimer certaines paroles des chansons) et sympathique (toujours souriant et bon esprit dans ses interventions entre les morceaux).
Dommage également que le son ait été trop fort et pas assez clair. Il fallait vraiment s'éloigner et s'excentrer de la scène pour bien entendre les différents instruments et surtout la voix de Blitz.

Résultat des courses : les groupes de ce soir ont globalement assuré comme il fallait. Le public a correctement répondu présent (même si une petite centaine de spectateurs supplémentaire aurait été fort bienvenue). Des dates comme celle-là, variée et de qualité, on en redemande encore dans le Sud-Est !

Un grand merci à Mr Crash pour ses photos.