Quand Ludo tombe en panne d'internet, ça donne une interview manuscrite envoyée par la poste, interview que bous avons décidé de vous faire partager telle quelle. L'occasion d'avoir quelques réponses à certaines de nos questions existentielles et d'en savoir plus sur la collaboration du groupe avec Fabrice Lambot qui a également accepté de répondre à quelques questions.
Parlons d'abord du VS-Fest auquel vous avez participé le mois dernier. Qu'en as tu pensé ? Es tu satisfait de la prestation du groupe ?
As-tu eu le temps de discuter avec des membres des autres groupes à l'affiche ? Y-a-t-il des groupes de cette affiche que tu apprècies et avec lesquels tu aimerais de nouveau jouer ?
la nouveauté des concerts de la tournée "Imago" ce sont ces videos diffusées durant toute la durée du concert. Peux-tu nous en dire plus ?
Une bonne partie de ces images semblent provenir de vieux films médicaux. Peux-tu confirmer cela ? Pouquoi un tel choix ? Je suppose que l'ordre de ces images n'ai pas anodin...
L'album est sorti depuis plusieurs mois et pourtant le groupe n'a donné en tout et pour tout que trois concerts ? t-a-t-il une raison à cela avez vous du mal a trouver des dates ? Peut-on espérer d'autres dates d'ici la fin de l'année ?
Revenons sur "Imago", il est maintenant sorti depuis plusieurs mois. Avec le recul en es-tu totalement satisfait ?
D'où vous est venu le choix du thème de l'album ? Pourquoi ce choix ?
ces jours-ci sort le DVD du "Sang du chatiement" de Fabrice Lambot, l'occasion de revenir un peu sur votre collaboration avec lui... Comment l'avez vous connu ?
Comment est venue l'idée de travailler ensemble ?
Je pense que composer des musiques de films a une grande influence sur la musique de S.U.P. C'est flagrant sur Imago avec notamment l'instrumental "Imago" et la plus grande présence des synthés. Quel est ton sentiment là dessus ?
La musique du "Sang du chatiment" semble encore plus electro que celle de "Insanity, non ?
Fera t-elle l'objet d'un bootleg tout comme celle de "Insanity" ?
Avez vous d'autres projets en cours avec Fabrice Lambot ?
En dehors de ça, quels sont les projets du groupe ? Le prochain album est-il déjà en projet ?
Pourquoi n'y-a-til pas eu de bootleg 13 ? Es tu SUPerstitieux ou c'est simplement une erreur ?
Une idée sur ce que contiendra le prochain bootleg ?
Un dernier mot ?
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Passons Maintenant à l'interview de Fabrice Lambot. Fabrice, peux-tu nous parler de ton parcours ? Comment en es-tu venu à réaliser des courts-métrages ?
Je suis fan de cinéma depuis tout petit et j'ai toujours voulu être réalisateur. Mon père avait acheté une caméra super 8 et faisait des petits films de vacances. Adolescent j'ai pu emprunter la caméra et tourner quelques courts amateurs avec des copains. Après mon bac j'ai voulu faire une école de cinéma (idhec) mais mes parents n'avaient pas les moyens, j'ai donc fait une maîtrise de langues à Amiens où je suivais aussi des courts de théorie du cinéma souvent barbants mais parfois excellents. Et plus que tout j'allais au ciné plusieurs fois par semaine depuis tout petit et mon adolescence dans les années 80 a été bercé par le ciné fantastique italien, les premiers films de John Carpenter, etc. J'ai ensuite créé un fanzine, Atomovision, consacré aux vieux films fantastiques, et six numéros ont été publiés entre 1995 et 1997. Ce fanzine a eu beaucoup de succès auprès des fans, mais prenait trop de temps et je bossais à côté, sans oublier ma vie de famille. De 1996 à 2000 j'étais à mon compte, tenant une boutique de cinéma spécialisée dans le fantastique sur Paris : SF Collector. Et en 2000, après des mois de contact avec Jean-Pierre Dionnet, avec qui je devais collaborer pour des projets de long-métrage fantastique, je me suis dit qu'il était temps de relancer mon ambition de cinéaste. J'ai donc écrit un scénario : Le Sang du Châtiment, et signé avec une boite de prod sur Paris qui m'a royalement plantée au bout de quelques mois. De colère, j'ai écrit Insanity, un court métrage horrifique glauque, que je suis allé tourner en Argentine.
Tu sembles assez porté sur le gore... D'où te vient ce goût pour l'horreur ?
J'ai toujours aimé les films d'horreur, en particulier le ciné bis italien des années 80 (les films de Lucio Fulci, Dario Argento, les giallos de Sergio Martino, etc.) mais le fait qu'Insanity soit un film assez gore est surtout né de la colère que j'avais de mettre fait planter par un producteur. Et comme ce premier court-métrage était en grande partie autoproduit, je me suis dit qu'il fallait marquer le coût et faire un film qui retienne l'attention des festivals et de la presse spécialisée, ce en quoi ça a marché, même si je suis conscient des défaut du film inhérents à l'esprit « commando » qui l'a animé.
Tes films sont réalisés en Argentine ? Pourquoi tourner là bas plutôt qu'en France ? D'où te viennent tes relations avec ce pays ?
Comme je l'ai dit, je me suis fait planté par le producteur avec qui je devais faire Le Sang du Châtiment (une version antérieure du scénario qui fut ensuite remodelé pour la version actuelle). J'en ai parlé à Uriel Barros, mon frère de sang qui est argentin et que j'ai connu çà Buenos Aires où je me rendais régulièrement, mon épouse étant argentine. Bref, Uriel souhaitait travailler dans la production, et il m'a dit qu'on pourrait tourner un court-métrage pour moins cher qu'en France, grâce à un taux de change avantageux et une équipe super motivée. On a donc créé Metaluna Productions avec deux amis en France, et je suis parti tourner Insanity à Buenos Aires en mai 2002. Une fois qu'Insanity a commencé à circuler dans les festivals et les bureaux de production français, j'ai écrit un autre scénario, « Le pénitent », pour lequel j'ai signé en 2003 un contrat avec une boite de production française. On a travaillé pendant des mois sur le film avec cette boite de prod, puis j'ai senti petit à petit qu'il y avait un problème de budget. Et j'ai donc ressorti « Le Sang du Châtiment » du placard et l'ai réécrit avec mon co-scénariste Jean Depelley. Metaluna Productions a amené le budget nécessaire au film, environ 15000 euros, et on est parti tourner encore une fois en Argentine pour donner plus de valeurs de production à ce projet.
Comment se réalise un court métrage comme "Le sang du châtiment" ? Combien de personnes travaillent dessus ? Combien de temps cela prend t-il ?
Une fois le scénario terminé et validé par la production, on entame la pré production. Sur « le sang… », je suis donc allé à Buenos Aires une fois pour lancer le projet avec l'équipe technique principale (producteur exécutif, directeur de la photographie, cameraman, effets spéciaux), puis on a fait le casting. Je suis ensuite reparti là-bas 3 semaines, dont 12 jours de tournage. On était environ 25 sur le tournage pour l'équipe technique, plus les comédiens. Sur les 25 personnes, il y en avait déjà 7 rien que pour les effets spéciaux de maquillage.
Les méchants de tes films ne le sont jamais vraiment. Ils le deviennent à cause de quelque chose qui leur est arrivé. Est-ce un hasard ou bien est-ce vraiment réfléchi ?
C'est un point intéressant que tu soulignes, mais en fait ce n'est pas vraiment cet aspect précis qui m'intéresse, c'est plutôt l'idée de rupture et de changement. Comment un évènement peut influer sur une personne et transformer radicalement son existence, pour une descente aux enfers évidemment. On retrouve cette idée dans mon projet de long métrage.
Quels sont tes maîtres en matière de cinéma d'horreur ? Quels sont tes films cultes ?
En matière de cinéma d'horreur, je citerai évidemment Dario Argento, Lucio Fulci, Mario Bava, mais en fait j'aime tous les genres de films d'horreur, et même plus largement tous les styles de films. Je suis assez bon public, même si j'ai un peu de mal avec une grosse partie de la production française actuelle. Parmi mes films cultes, je peux citer Johnny Got His Gun de Dalton Trumbo, Begotten – un film expérimental hallucinant d'Elias E. Merhige -, King Kong de 1933, The Thing de John Carpenter, les Hitchcock, les Kurosawa, les films de Brian de Palma, etc
La progression entre "Insanity" et "Le sang du châtiment" est très importante. On te sent près à réaliser un long métrage. C'est en projet ?
En fait j'ai omis de signaler qu'en parallèle à ces courts métrages et au projet « le Pénitent », j'ai un producteur à Paris qui me suit depuis Insanity. Et suite au Sang du Châtiment, il a effectivement pensé que j'étais prêt – ce que je pense aussi – pour réaliser un long métrage. Je lui ai soumis 3 projets (une biopic d'Anatole Deibler, bourreau français du début du siècle, un film d'épouvante intitulé Terre d'abîmes et une adaptation d'un roman intitulé La Profondeur des Tombes, ce dernier étant le seul tombé à l'eau car l'auteur demandait des droits déments pour l'achat du roman) mais finalement il y a quelques mois je lui ai amené un autre projet dont je suis raide dingue. C'est l'adaptation d'un roman français, d'un écrivain du nord aussi, et pour le moment le projet est sur de bons rails.
Vis-tu du cinéma ou du moins exerces-tu un métier dans ce domaine ou bien la réalisation de films est-elle un loisir ?
J'ai travaillé dans ce domaine pendant plusieurs années, mais j'ai repris un boulot « normal » en 2000, que je vais sans doute quitter dans les prochaines semaines. Depuis des années, j'ai établi un plan très précis de ce que je veux faire, avec le soutien à 100% de mon épouse, pour arriver à tourner un premier long métrage. A ce jour tout avance suivant nos espérances.
Quelle importance accordes-tu a la musique dans tes films ? Que penses-tu du travail de David Lynch par exemple pour qui la musique est très importante dans ces films (je pense par exemple à Lost Highway) ?
Je n'ai pas cité David Lynch jusque maintenant, mais il est évidemment un réalisateur majeur, je pense qu'il me fait peur donc je ne le cite jamais. Il est trop talentueux et original. Je n'ai évidemment pas la prétention de lui arriver ne serait-ce qu'à la cheville, et je me vois plus dans l'esprit d'un metteur en scène comme Jean-Jacques Annaud, en toute modestie bien sûr. Ce que je veux dire c'est que je me vois plus comme un conteur que comme un « auteur », même si évidemment comme on l'a dit précédemment il y a des points communs dans mes scénarios et films.
La musique est capitale pour un film. En tant que réalisateur, je me considère comme un chef d'orchestre qui doit mettre en harmonie les différentes composantes du film (les comédiens, techniciens, musiciens) pour que le résultat final soit à la hauteur des attentes de chacun, et des miennes bien sûr. La collectivité est super importante, ce n'est pas un boulot perso et il faut écouter les avis de tous, et cela inclut les gens qui écrivent la musique du film.
Musicalement, comment te situes-tu ? Te considères-tu comme un "metalleux" ?
Yes, man. Je suis un metalleux à 100%. Hormis un peu de musique latino, j'écoute principalement du métal. J'ai commencé par Iron Maiden et AC/DC, et en 1983 j'ai eu un méga choc avec Metallica et son « kill'em all ». Le même jour avec mon frangin on avait acheté ce 33t en import, ainsi que le « black metal » de Venom, le premier album de Torch et le « melissa » de Mercyful Fate. La tuerie totale ! J'ai des centaines de 33t et cds que j'écoute religieusement. Mes derniers achats : le Ministry et « monotheist » de Celtic Frost qui est un putain de disque. Mais bon si je n'écoute pas une fois pas jour « imago » je suis malade….SUP est mon groupe préféré. Etonnant non ?
Venons-en à ta collaboration avec SUP. Depuis quand les connais-tu ? Comment en-êtes vous arrivés à travailler ensemble ?
Nous y voilà, c'est sans doute ce qui intéressera les fans du groupe. Tout a commencé quand mon frangin a acheté « Room Seven » un disque que j'avais trouvé excellent même si la prod n'était pas top. Puis je me suis jeté sur « chronophobia », parce que j'avais aimé « room seven », mais surtout parce que j'ai été littéralement hypnotisé par la pochette du cd et le titre de l'album. Sensation difficile à décrire mais qui m'arrive rarement. Quand j'ai vu la pochette dans un magasin à Paris, le disque venait de sortir, j'ai été vraiment littéralement envouté. J'étais en pleine écriture de la première version du Sang du Châtiment et le cd tournait en boucle sur ma platine. Car en plus le concept de l'album m'était très personnel (mes liens avec mon frère) et évidemment musicalement c'était un album incroyable. En décembre 2000, j'ai été voir SUP jouer à Compiègne où j'habite, et on s'est rencontré après le concert. Je leur ai filé le scénar en leur disant que je voulais qu'ils fassent la musique, si ça les intéressait. On est devenu potes instantanément. Et puis nos relations n'ont fait que grandir, évidemment en ce qui concerne le travail de la création des bandes sonores des films, mais aussi et surtout pour une amitié de plus en plus forte et profonde entre nous. Je suis super content de ce qu'ils ont écrit pour mes courts. Je pense qu'à un certain niveau le fait qu'ils aient élargi leur musique pour mes films a eu un effet sur Imago (la présence des synthés notamment) et il est clair que je ne conçois les musiques de mes prochains films qu'avec Fab et Ludo. Je ne ferai pas de concession là-dessus, et tant qu'ils seront partants ils feront la zic pour mes films.
Comment se passe le travail avec un groupe. Sur quelle base de travail le groupe part-il ? Montres-tu des images ou donnes-tu juste le thème du film... Y-a t'il des contraintes de minutage imposées au groupe ?
En fait une fois que le tournage est sûr à 100%, ils lisent le scénar, puis je leur fais parvenir le storyboard, qui est un outil très intéressant pour donner une idée du visuel du film. Celui du Sang…était particulièrement travaillé et abouti. Mais en fait c'est surtout à partir du rough cut du film (premier montage) que Fab & Ludo travaillent. On se réunit ensemble, on regarde le film, on discute des ambiances, des endroits où je veux de la musique,etc. Parfois je leur passe des cds de musiques de films où il y a des sons qui m'intéressent, et disons que j'essaie de donner une idée générale de ce que je veux. Mais c'est en fait très facile car Fab & Ludo sont de vrais cinéphiles, on a beaucoup de goûts communs en terme de cinéma, et ils comprennent vite ce que je veux dire. Je ne suis absolument pas musicien et c'est donc parfois difficile de transcrire ce que je souhaite, mais ils anticipent et dépassent largement mes attentes. Ensuite ils passent du temps à composer, me soumettent plusieurs morceaux ou sons et je dis oui ou non, et on avance comme ça jusqu'à avoir une maquette qui soit top, ce qui va vite. Pas mal de morceaux restent sur le bord du chemin mais pourront resservir pour d'autres projets, et puis ça me fait des super collectors !!!
As-tu d'autres projets de prévus avec S.U.P. (ou sans) ?
J'aimerais réaliser un vidéo clip pour « Metamorphosis » mais vu leur emploi du temps c'est hard. Mais le plus important c'est bien sûr qu'ils fassent la musique de mon premier long-métrage (et il y a d'ailleurs une scène de concert où ils joueraient, on en reparlera plus tard).
Un dernier mot ?
Merci beaucoup pour l'interview. Je pense que le projet de long métrage sur lequel je travaille est très original et plaira sûrement aux gens du nord et aux fans de SUP, c'est tout ce que je peux dire pour le moment, mais « stay tuned ».