- CERNUNNOS PAGAN FEST 5 - SKYFORGER + ATARAXIA + ODROERIR + FEJD + DORDEDUH + FINSTERFORST + BRAN BARR + VALLAND + SKYFORGER + NUMEN + MAEL MORDHA + BOANN par PRINCE DE LU - 2075 lectures
Festival tenu le 23 janvier 2011 à la Machine du Moulin Rouge (Paris)



Les affiches des Acteurs de l'Ombre, comme celles du Cernunnos 5, m'énervent prodigieusement. Si j'osais, je dirais même que ça fait chier. Voilà une orga parisienne qui se croit tout permis, qui fait venir des groupes d'Italie, de Lettonie, de Suède et j'en passe. Une orga qui nous propose une affiche qui sincèrement déchire et enterre toutes les tournées européennes pré-chiées style Heidenfest et Paganfest. Et il y a de quoi s'énerver quand on voit que seules 500 personnes auront fait le déplacement. Pas certain que l'orga puisse se remettre facilement du désaveu du public francilien. C'est dit, mais ça fait chier.



Il manquait peut-être ZE tête d'affiche. Skyforger n'intéresse que peu une jeune génération qui n'a pas été biberonnée au thrash et au heavy. Et pourtant les styles des groupes présents, s'ils ont une facette pagan en commun, brassent sacrément large. Du speed de Finsterforst au quasi-heavenly d'Ataraxia, du 100% metal de Skyforger au 10% metal d'Odroerir, du black assassin de Numen au violon de Fejd. Il y avait de quoi faire, pour une somme très raisonnable. Mais cela n'a pas suffi pour autant. Sans chaussons-téléporteurs, ce sera toujours un peu trop loin et pas assez bien.



Il faut aussi dire que la mode pagan touche à sa fin, enterrant avec elle groupes et labels qui se sont jetés sur le gros gâteau. Le metaleux festif qui avait suivi l'effet de mode, déjà peu intéressé par cette date peu houblonneuse dans l'esprit, se sera rabattu sur autre chose. En tout cas, quelle déception de voir bouder une si belle date, loin des clichés du style. Heureusement que d'autres auront fait un bien plus long voyage. Au hasard des allées, on surprend une conversation de Bordelais, on croise une veste en cuir avec un (gros) blason franc-comtois, on entend des gens aux accents étranges s'exprimant en anglais, on tombe nez à nez avec des Japonaises qui semblent un peu perdues. Merci à ceux-là d'avoir osé l'aventure, et je suis sûr qu'ils ne l'auront pas regrettée.



La Loco n'étant plus, c'est la Machine qui nous accueille. La configuration de la Mach' n'est pas pour autant une révolution. La grande salle et le bar principal n'ont pas bougé. La petite scène a été placé le long du mur, "sur le côté gauche" de l'ancienne installation, libérant l'escalier qui mène au bar. On retrouve rapidement ses repères et les tarifs des boissons auxquels on était hélas habitués. A six euros la bouteille de Grolsch, la salle continue de lutter contre l'abus d'alcool.



Les concerts du jour vont alterner entre les deux salles, avec parfois des recouvrements en début et fin de set. Il aura fallu faire des choix toute la journée entre ces dix minutes de recouvrement. L'avantage est que les groupes enchaînent sans temps mort, et que je n'aurai pas vu la journée passer. Le désagrément est qu'il n'y a pas Stille Volk pour aller manger, et qu'il va falloir sacrifier quelqu'un sur l'autel de la restauration médiévale. Bah, on verra ça plus tard. Sur le programme, les premiers groupes jouent 40 minutes, puis 45 minutes pour Dordeduh et Fejd, 50 pour Odroerir et Ataraxia et 1 heures pour la tête d'affiche.



Le public s'est déplacée dès le début du fest, et il m'aura fallu piétiner un peu devant la salle avant d'y entrer. Du coup, j'ai raté Boann et débarque au début du set de MAEL MORDHA. Les Irlandais refont le déplacement, après leur bon concert de l'édition 2008. Leur metal celtique à tendance plombé dans la veine de Primordial va cette fois envahir la grande scène et déclencher les premiers headbangs. Toujours très humbles, les Irlandais sont juste là pour nous envoyer leurs riffs et le courant passe tout de suite avec ce grand chanteur timide. Légèrement peinturlurés de bleu et de rouge, portant les kilts, les musiciens maîtrisent leur sujet et tiennent bien la scène et leur public. La voix du réservé Roibéard va gagner en assurance tout le long du set et les derniers titres seront vraiment très bons. Ils étaient très contents d'être de retour à Paris, ça se voyait, et ils peuvent revenir quand ils veulent!



A peine Mael Mordha terminé, il faut trottiner pour aller écouter les Basques de NUMEN qui ont commencé depuis dix minutes. La petite salle n'est pas bondée, la formation affichant le plus fort taux de virulence de la journée. Le son n'est pas très bon non plus, les guitares se joignant dans une bouillie de fréquences. Il faudra suivre les compos en se basant sur la batterie, le synthé et la voix. Malgré cela, j'ai trouvé le set très prenant, une sorte de magie s'est dégagée de toute cette bouillie. Tout d'abord grâce à un chanteur complètement pris dans sa prestation et très expressif, s'égosillant avec énergie et fougue. Grâce aussi à un batteur qui envoie le pâté et des cordistes bien à leur propos qui suent sur leurs instruments. Le synthé vient ajouter quelques hurlements (qu'on entendait très peu) et des nappes parcimonieuses mais bien placées. Hormis un souci sur un ampli qui ampute le groupe d'un guitariste en fin de set, pas grand-chose à redire quant à la prestation des Espagnols. La musique de Numen semble avoir une sacrée gueule et c'est une belle découverte pour ma part: je repartirai avec un CD dans la besace. J'aimerai bien revoir le groupe dans de meilleures conditions et je ne suis sûrement pas le seul.



Nous ne verrons pas non plus la toute fin de Numen car il faut déjà galoper pour aller assister au set acoustique de SKYFORGER. La tête d'affiche joue deux fois cette année, en commençant par une prestation intégralement folk. Les kokles (le machin à cordes qui se joue instrument couché sur les genoux) et autres flûtiaux sont de sortie, ainsi que les habituelles tenues d'époque. Le groupe s'adjoint également d'un joueur de flûtiau supplémentaire qui vient apporter un très beau chant type "corse" (les personnes présentes comprendront mon allusion à son timbre grave et très sonore). Je pense que Skyforger ne s'attendait pas à un tel accueil pour ce set, mais il faut dire que nous ne nous attendions pas à être envoûtés de la sorte. Alternant morceaux dynamiques et chants plus posés, la formation nous aura fait voyager dans son folklore, nous accueillant dans la richesse de ses sonorités traditionnelles. Les multiples vocalistes parfaitement harmonisés, la maîtrise des instruments et cette simplicité au service de la musique qui caractérise le groupe vont nous créer un moment de magie rare. Émus par les acclamations du public, les Lettons nous ont promis de revenir avec des guitares électriques plus tard. Autant dire qu'on les attendait de pied ferme!



Hop, hop, souple sur les jambes, je descends l'escalier pour aller voir le milieu de la prestation de VALLAND. L'année dernière, les Franciliens nous ont livré un premier album aussi gaulois que bien réussi. J'espérais les voir exploiter au mieux leurs compos très efficaces. Ce fut chose faite aujourd'hui. Certes quelques copains avaient fait le déplacement et mettaient de l'ambiance devant la scène. Mais la musique du groupe a suffi à me convaincre à elle seule. Les instrumentistes maîtrisent bien leur sujet (on note au passage la présence du gratteux/hurleur de Nyseius à la basse), le groupe est bien dans son set et le chanteur apporte une bonne grosse dose d'énergie. Tous les éléments sont là pour passer un bon concert, hélas encore écourté. Je n'aurai même pas trop profité d'un p'tit coup de veuze avant de devoir filer.



Toujours pas de pause, car il faut maintenant partir voir BRAN BARR brûler les planches de la grande scène. Après leur dernière prestation en 2007 ici même, les Franciliens reviennent nous asséner leur metal celtique, avec cette fois (enfin) le nouvel album à défendre. Sur scène, Bran Barr n'immerge pas le spectateur dans son concept. La formation est avant tout là pour se faire plaisir et faire plaisir, comme le personnifie rapidement son chanteur. Les titres sont enchaînés avec énergie et une bonne qualité de mise en place. Il aura juste manqué le feu sacré pour vraiment faire basculer la foule. Si Yoltar et Nesh, couverts de leurs cottes de mailles, sont présents physiquement et animent la scène, il en est tout autrement des membres restants du groupe. La violoniste est pardonnée, cygne noir venu apporter la grâce sur des planches envahies par de pileux pillards. Nesh est hélas excentré sur la gauche, dispersant son énergie sur le côté. Yoltar se fait plaisir, mais il est un peu seul au centre de la scène. Il aura fallu attendre les trois derniers titres pour voir le bassiste, Hades, se lâcher, apportant un regain de vitalité bienvenu au set. Trop en retrait, trop timorés, pas certain que Bran Barr ait pu convaincre les sceptiques ce soir. Malgré tout la prestation fut tout de même bonne.



Bon, là, j'ai craqué. Je suis peut-être un vieux tromblon, mais j'ai lâchement profité de Finsterforst pour aller me poser cinq minutes. Avec les chevauchements, j'aurais seulement vu 20 minutes du concert des Allemands et je ne voulais pas rater une miette de Dordeduh. Désolé pour les Germains, mais c'était pour moi le meilleur sacrifice possible, surtout que leur metal énergique était le moins intéressant pour mes oreilles aujourd'hui. Nous en avons profité pour goûter aux plats médiévaux, qui sont comme chaque année un régal.



Le ventre plein et un peu reposés, nous voilà prêts devant la scène quand DORDEDUH foule les planches. Les musiciens sont prêts et Les tulnics (les grandes trompes) sont de sortie. Et c'est sur le mugissement de deux monstres que commencent le set des Roumains. Hupogrammos se saisit ensuite de sa guitare pendant que ses comparses poursuivent la convocation des esprits de la forêt, frappant sur le tambal (le cymbalum) et une table de percussion en bois. Il égrène quelques notes, poussent les premiers appels aux ondes électriques. Il est rejoint par les autres musiciens derrière leur basse et leur guitare. Dordeduh a commencé depuis trois minutes et la magie qu'on appréciait dans Negura Bunget a déjà enveloppé la salle. Ils tiennent nos âmes au creux de leurs mains et vont jouer avec. Après cette magnifique mise en bouche, Dordeduh va incarner "Cunoasterea Tacuta" tiré du Om de Negura Bunget, un morceau de son récent EP. Puis le groupe va nous terminer au sol avec un superbe fleuve musical de près de 20 minutes. Rien à redire, les mots seraient superflus de toute façon. Les Roumains nous laissent béats et rêveurs. Toujours une très belle maîtrise, dans une prestation taillée au millimètre, le tout au service d'une musique ensorceleuse. Comme pour Skyforger, le groupe arrive humblement et nous sert son art en toute simplicité. Un art si beau qu'il est difficile de ne pas être touché. P'tain, que c'était bon.



C'est avec douleur que je vais devoir procéder au second sacrifice de la journée. A mon grand regret, je ne verrai pas Fejd. D'après les échos de mes camarades, les Suédois vont offrir un très beau set dans une petite salle bondée. Vous saurez me pardonner très bientôt, car pendant ce temps je recueillais les propos de Richard Loudin (Bran Barr, Nydvind) qu'il aurait été dommage de laisser filer sans lui causer un peu. Bientôt en ligne sur VS!



Me voici de retour pour ODROERIR. J'arrive en plein milieu du premier morceau alors que le pit... s'est transformé en une ronde de farfadets! Mais que fait Vigipirate, ce sont sûrement les effets d'un attentat au gaz psychotrope! Ah non, les danseurs sont volontaires et exécutent une jolie danse médiévale. C'est ça, Odroerir, un moment de poésie au milieu de l'avalanche de décibels. Partisan de la plénitude du groupe sur album, j'étais assez inquiet du rendu scénique. Et je dois avouer que je me suis fait assez rapidement chier. C'est certes très personnel, mais l'absence d'énergie déployée ici n'est vraiment pas ce pour quoi je vais à des concerts. Comme sur opus, les guitares restent en retrait pour laisser s'exprimer les nombreux chants. C'est certes très beau mais cela ne me faisait pas vibrer. Les amateurs auront apprécié la bonne humeur du groupe, la vocaliste tentant même avec succès de parler au public en français.



Direction la petite scène pour découvrir les Italiens ATARAXIA. J'avoue ma totale inculture du projet, qui a pourtant à son actif une palanquée d'albums. C'est donc avec la plus grande curiosité et les yeux grands ouverts que je vois débarquer sur scène un bonhomme en fuseau et haut de jogging avec un bandana qui s'installe derrière le clavier. Un peu ahuri, je constate que le reste du groupe a l'air normal, le percussionniste s'installe derrière la chanteuse et le joueur de luth (était-ce un luth?) se place sur le côté de la scène. Démarre le set, la mélodie s'élève au son du claquement des cordes. Et la voix opératique de la chanteuse me prend à la gorge. On pense rapidement à un Dead Can Dance plus torturé. Je pense surtout rapidement à quitter l'endroit, désolé. L'exécution des morceaux semblait très bien, mais ce n'est vraiment pas pour moi. Je sais, je ne suis un insensible.



Par contre, ce qui me sensibilise, c'est de me prendre des watts dans la tronche. Et là, j'en attends beaucoup de SKYFORGER pour leur second assaut de la journée. Il y a un peu plus de trois ans, les Lettons nous avaient reçu avec un son tellement fort qu'il aurait fait rugir Manowar. Je préviens donc mes comparses que les vieux sont un peu sourds et enfoncent bien mes bouchons auditifs. Et en fait, non, j'ai pu les ressortir un peu; Skyforger envoie du riff en restant dans la limite du raisonnable. Les grattes vont même un peu manquer par moments par rapport au volume du flûtiau. Mais qu'importe, nos Baltes sont à nouveau sur scène et toujours heureux de l'être. Ils vont copieusement piocher dans leurs sorties, et notamment leur petit dernier Kurbads pour nous ratatiner la façade. Skyforger, c'est comme un troupeau de mammouths qui s'assoit sur votre dos. Avec joie et humilité, la tribu va aligner les riffs de son "metal de daron", mélange vivifiant de heavy, de thrash et de musique traditionnelle. Peter est toujours aussi souriant, affublé de sa fourrure noire sur les épaules et son bandana qui le fait ressembler à un membre de ZZ Top. Zirgs tient toujours la basse en faisant moultes grimaces, nous balançant des voix death et des chants graves de toute beauté. Kaspars jongle toujours entre le micro, la cornemuse et les flûtes. Bref, Skyforger n'a pas changé en trois ans et c'est exactement ce que je souhaitais. Quel set! Bon sang de bois, quel pied pendant une heure!!



Bravo évidemment aux groupes, mais surtout bravo aux Acteurs de l'Ombre d'oser organiser une date pareille dans le contexte morose actuel. Le public ne suit hélas pas, et je crains que la perspective d'une nouvelle édition ne se soit assombrie d'un coup dimanche par désaffection du public. Oh je sais, il y avait grand-mère à aller voir et il faisait froid dimanche. Ne vous inquiétez pas, vous pourrez rester bientôt bien au chaud devant votre écran.


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