- RAMMSTEIN + ELIXIA par FROGSKIP - 1695 lectures
11/12/04 - Velodrom - Berlin



C'est dans la partie Est de la capitale, dans un lieu plus coutumier à recevoir les fans de Jan Ullrich que de Lars Ullrich, que les fils prodigues de la RDA donnent leurs trois derniers concerts avant la fin de l'année. Le Vélodrome est un complexe sportif ultra moderne dont l'accès laisse une vue imprenable sur la piscine et le gymnase, mais doté d'un nombre impressionnant de buvettes… Pas de doute, on est outre-Rhin ! A l'intérieur, on se croirait dans les entrailles d'une soucoupe volante, mais l'acoustique du lieu reste cependant irréprochable.




C'est donc dans les meilleures conditions que l'on se laisse bercer en ouverture par le métal d'Exilia, jeune quatuor milanais dont la chanteuse aux dreadlocks blondes Masha fait preuve d'une remarquable palette vocale, ainsi que d'une énergie contagieuse, à en juger par la réception que lui réserve le public berlinois.



Une brève interruption et le temple de la petite reine s'assombrit de nouveau, tandis que six personnages en chemise blanche et cravate, l'air menaçant et armés de diverses armes de poing, viennent arpenter le devant de la scène. Rien de bien surprenant après tout, la réputation de Rammstein n'est-elle pas, autant en Allemagne qu'ailleurs, celle d'aryens fascisants, des Übermenschen inquiétants et impitoyables ? On en serait presque convaincus si la suite ne venait démentir cet a-priori imbécile et affirmer que dorénavant, tout ne sera qu'illusion.



Les premières notes de Reise Reise (qui se traduit par Voyage Voyage, un hommage masqué à notre Desireless nationale, peut-être ?!?) résonnent alors que tombe le rideau qui cachait jusqu'alors le vrai groupe : Perchés à deux mètres du sol en arrière-plan, ils se dévoilent sous leur nouveau jour, celui de troubadours traditionnels perdus dans la jungle industrielle : Le cirque Rammstein est arrivé en ville, et il nous réserve bien des surprises ! Si l'essence visuelle même du groupe reste inchangée, en revanche le ton est devenu beaucoup plus léger, voire auto-parodique : Richard, l'un des deux guitaristes, porte une chemise mi dompteur mi cavalier impérial du meilleur effet, Christoph le batteur est sapé comme une prostituée tristounette au porte-jarretelles usé période République de Weimar, Paul l'autre guitariste est entièrement vêtu d'un costume bavarois avec lederhosen et chapeau à plume, Flakke le clavier fou lui aussi en short en cuir joue de l'accordéon en Dim Ups, et il ne reste guère que le chanteur Till et le bassiste Oliver pour nous rappeler ce à quoi le groupe ressemblait auparavant.
Côté scénique, l'atmosphère est très marquée expressionnisme des années 20, avec un décor à la Fritz Lang que vient souligner le maquillage tout en clairs obscurs du groupe. D'ailleurs, si le celui-ci descend bien vite de son perchoir pour venir sur le devant de la scène, la batterie reste là-haut, posée sur un cube masquant une sortie de scène, d'où ne vont pas tarder à jaillir tout un tas d'accessoires au travers d'une vulve évoquant une scène rétro du « Parle Avec Elle » de Pedro Almodóvar…
Il y a un léger cafouillage vite rattrapé au début de Links 2-3-4, puis le rouleau compresseur s'élance, alignant les titres avec une efficacité redoutable : Du Riechst So Gut, Du Hast, Sehnsucht, Sonne, Ich Will confirment la surenchère visuelle et sonore. Les nouveaux morceaux, un peu faiblards à la première écoute, font l'objet d'une mise en scène bien rôdée : Keine Lust dépote, Moskau est enjoué (même sans la chanteuse de Tatu), et Mein Teil s'avère être le clou du spectacle, qui plus est inspiré d'un fait divers récent : Un cannibale allemand avait trouvé sa victime consentante sur Internet… Ainsi donc Till émerge de sous la batterie en tirant une marmite énorme montée sur roulettes, dans laquelle mitonne Flakke, son souffre-douleurs attitré. Habillé en boucher sanguinolent, il affûte son couteau-micro et passe la marmite au lance-flammes, avant de pourchasser sa victime qui clignote comme un sapin de Noël et court comme une dinde sous une pluie d'étoiles filantes ! On appréciera aussi un Los acoustique où tout le groupe est sur le devant de la scène, et durant lequel le même Flakke se lance dans une schuhplatter frénétique…
Bien sûr, le feu et les effets pyrotechniques restent un élément fort du spectacle, comme le confirme un Feuer Frei saisissant durant lequel Till, Paul et Richard embrasent les cieux, ou bien plus tard quand Till prend une douche d'étincelles. Les premiers rangs en sont quitte pour une séance de bronzage !



Enfin arrive la fin du set principal, avec un Amerika grandiloquent, pendant lequel Flakke fait des tours de piste monté sur une plate-forme à roulettes, et qui s'achève sur une pluie de paillettes rouges, blanches et bleues. On se croirait à un concert de Kiss au moment de Rock'n'Roll All Nite And Party Everyday…
Les deux rappels (fait rare, ce qui souligne l'aspect exceptionnel de ces concerts) donnent l'occasion aux six pyromanes de remettre ça entre autres avec Rammstein, et surtout de finir sur leur reprise du Stripped de Dépèche Mode, dont la référence au Métropolis de Fritz Lang n'échappe pas. Cette fois-ci, c'est Oliver qui part faire un tour de canot pneumatique, porté par un public multi-générationnel et loin d'être bourrin. Le spectacle de familles ébahies s'enthousiasmant presque naïvement sur Rein Raus (« Dedans Dehors ») et réclamant vainement un Bück Dich pourtant presque traditionnel (« Penche-Toi », durant lequel Till avait l'habitude de mimer la sodomie de Flakke et aspergeait abondamment le premiers rangs pendant de longues minutes), combiné à quelques notes de Mon Beau Sapin au clavier, et voilà que les mots « féerie de Noël » prennent un sens tout à fait différent…
Une explosion tient lieu de bouquet final et la scène est abandonnée pour de bon, avec en fond sonore un remix de Engel. Combien de clins d'œil nous a-t-on fait et combien de fois la boucle a-t-elle été bouclée ce soir ? On perd le compte mais le sentiment qui perdure c'est celui d'une renaissance du groupe, qui était sur le point de devenir sa propre caricature. Même si l'on regrettera l'absence de titres comme Asche Zu Asche et le fantastique Dalai Lama, délaissés au profit de morceaux moins forts du dernier opus, on n'en finit pas de s'extasier devant l'ingéniosité d'un spectacle calculé au millimètre près et paraissant pourtant presque désinvolte par moments, et surtout devant le caractère humanisé et humoristique d'un groupe qui au départ ne brillait pas par son côté déconne…
On les attend impatiemment chez nous en février…


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