Si Jésus s'est fait baptiser sur les bords du Jourdain, l'onction de votre dévoué serviteur s'est faite sur une plage californienne où crapahutaient une bande de chevelus débraillés qui jouaient au cerf-volant avec une poupée gonflable dans un clip du Top 50. Grosses guitares, cheveux gras, soleil, sales mioches… Le fan de 12 ans Parker Lewis que j'étais n'a pas résisté longtemps avant de grappiller ses quelques deniers pour se payer la K7 2 titres (oui, ça a existé!) de "Everything About You". Un petit effort, un bon bulletin de notes et Môman Cobra m'offre ce "America's Least Wanted", un album qui gardera à jamais l'arôme aigre des salles de classes en préfabriqué de mes années collège! Héhé!

1992, en ce temps-là je me contrefoutais totalement du Metal… mais l'époque n'était pas très excitante; le Glam pailleté crevait doucement, le Grunge n'avait pas encore débarqué toutes ses troupes et Les GUNS'N'ROSES partageaient l'Empire du "Hard Rock" avec METALLICA… Bref, les sulfateuses à riffs s'encroûtent et deviennent un peu trop fréquentables. Pourtant, les blagues de potaches de UGLY KID JOE ne vont pas tarder à mettre un peu de couleur dans tout ça. Doigts dans le pif, majeurs tendus et rots à la bière; tel est le menu de cet album de UGLY KID JOE… le premier s'il on considère "As Ugly As They Wanna Be" comme une démo. Au-delà de l'attitude de grosse poilade cradingue, on découvre un groupe de talent sachant explorer divers horizons musicaux: Punk, Hard, Blues, Pop, Folk et bien évidemment METAL!

La recette de UGLY KID JOE pour secouer son monde; une musique directe, assez sucrée mais qui laisse un arrière-goût bien fort. Un mélange idéal entre l'aspect festif de MÖTLEY CRÜE, le côté crachat dans la gueule de MOTÖRHEAD et le groove carabiné d'un GUNS'N'ROSES sous Juvamine… sans oublier un esprit sale gamin teinté d'un certain cynisme que l'on retrouve partout dans les paroles braillées par la voix de Whitfield Crane. Si Bart Simpson se tapait un bœuf avec Beavis et Butt-Head, ça sonnerait irrémédiablement comme ce "America's Least Wanted" et ces treize titres, ces treize tubes!

Treize chansons qui naviguent entre gros Metal baveux - "Goddamn Devil" et son final ultra catchy ou Panhandlin' Prince qui pue le tabac froid, la bibine et les effluves d'un club topless – un peu de Glam "Don't Go" qui donnerait une mi-molle à Shaka! Et enfin quelques titres plus Pop/Folk - "Mr. Recordman" et ses reflets Simon & Garfunkel qui font écho à "Busy Bee" au cours de laquelle on souligne les talents de chanteur du père Whitfield, fils caché de Lemmy et Vince Neil. Un album bourré de 20.000 idées et gavé d'un groove phénoménal ancré dans une attitude bien cool sans prise de tête. Les morceaux coulent d'eux-mêmes. Les grattes dégobillent des litres de solos couillus et n'oublient jamais de balancer le bon gros riff qui tache "So Damn Cool"! La basse vrombit de partout et la batterie matraque des refrains tous plus entêtants et joyeux les uns que les autres… On se siffle cet album comme une bonne roteuse bien fraîche en plein cagnard! Et les petites touches de piano bien Rock'n'Roll qui jalonnent les titres font office de bulles dans cette gluth!

Qui pourrait rester de marbre sur le final de Panhandlin' Prince ou ne pas headbanguer sur le tube absolu qu'est "Everything About You"?! Haaaa! Réécouter cette rondelle c'est du bonheur garanti, le must pour se croire plongé dans "Wayne's World"!
Megateuf!!!

Chose diablement appréciable, "Amercia's Least Wanted" bien qu'âgé de dix-sept printemps n'a pas pris une ride (ou si peu). J'imagine volontiers qu'un gamin de 2009 élevé à MSN et PSP pourrait parfaitement prendre le même panard qu'un bézot de 92! Cette galette n'est pas kitsch ou beauf, elle a gardé sa fraîcheur originelle, la prod en béton y est sans doute pour quelque chose… je préfère me dire que c'est la qualité de la zik qui fait office de conservateur! Un bon coup de pompe dans les miches!

Metal? Hard Rock? Glam craspec? Groupe de branleurs? A vous de choisir votre camp, mais il serait fort regrettable de gommer la richesse de l'album. Varié toujours efficace, la grande classe. UGLY KID JOE sur ce premier opus a brassé des sonorités multiples mais a su donner une cohérence à l'ensemble si bien qu'un titre purement "molard et pogo" cohabite parfaitement avec le gros Funk Starsky & Hutch de "Same Side" ou le mielleux "Cats In The Cradle" - aimable reprise du titre de Harry Chapin datant de 1974 sur laquelle quelques galoches ont été roulées! Hahahaha!

Au-delà de la nostalgie (dont je fais très certainement preuve), "America's Least Wanted" est un putain d'album qui – je pense – à injecté le virus Metal chez pas mal de lardons à l'époque où il est paru… Injection qui sera nettement plus forte trois ans après avec la sortie du formidable "Menace To Sobriety", album plus sombre, plus Metal, moins "gamin" que ce premier opus. Mais ça, on en reparlera plus tard…

Bref, je ne puis que vous inviter à exhumer cet album et retrouver l'insouciance de vos années biatcol, l'époque où vous preniez plus de plaisir à secouer la tête et à assimiler les codes du Metal sans trop les comprendre (index+auriculaire dressés? Ca veut dire quoi? J'sais po, mais c'est cool!) qu'à jouer à Kid Chameleon sur Megadrive!


Rédigé par : Cobra Commander | 1992 | Nb de lectures : 2335