C'est une affiche bien contrastée qui allait nous attirer hors de nos tanières en cette veille de printemps. D'un côté le thrash metal pur et dur de KREATOR bizarrement placé en tête d'affiche, de l'autre le métal froid et ténébreux de CELTIC et dans le rôle d'outsiders venues compter les points, LEGION OF THE DAMNED et WATAIN. Une distribution qui allait ameuter près de 800 personnes et présenter la singularité d'une moyenne d'age du public nettement plus élevée que d'habitude. Les tontons du métal avaient sortis leur perfecto de la naphtaline pour répondre présent à un événement historique dont parlerait plus tard dans ce live-report.
C'est en élève studieux que j'arrive à 18h30 précise pour l'ouverture des portes. Ou tout du moins, j'en étais persuadé jusqu'à ce que je constate que la majeure partie du public était déjà rentrée. Bizarre, bizarre… Hélas mon incrédulité est de courte durée puisque LEGION OF THE DAMNED entame son set alors que je gravis les marches de l'Elysée Montmartre. Les Hollandais ex-OCCULT seraient-ils finalement les premiers à jouer ? Que nenni mes bons amis, il se trouve que l'organisation du concert n'a rien trouvé de plus logique que de commencer les hostilités en avance au lieu de l'heure prévue. Résultat, une majeure partie du public a raté WATAIN et le groupe norvégien qui a eu tout juste le temps de jouer quatre morceaux a eu le plaisir de jouer son micro set devant une audience aussi faible que le bon sens des organisateurs. Cela témoigne d'un manque total de respect pour le groupe comme pour le public mais ils s'en cognent sûrement vu que la salle était bien remplie en cette soirée.
Ce p'tit coup de gueule étant passé, parlons un peu de LEGION OF THE DAMNED et de sa performance. Oui, on peut bel et bien parler de performance quand un groupe repompe sans vergogne autant de riffs en un seul set et qu'il devrait reverser la totalité de ses royalties à SLAYER. Ceci étant dit, ça se laisse écouter volontiers, les zicos semblent y croire et assurent le spectacle. A tel point qu'on aimerait y croire autant qu'eux. Ça ne sera pas le cas. Dommage…
Après une pause qui semble interminable les lumières s'éteignent, les fumigènes crachent leur brouillard artificiel sur la scène de l'Elysée Montmartre, pour laisser place à l'événement de la soirée, pour ne pas dire de l'année. En cette insignifiante soirée de mars 2007, CELTIC FROST joue le premier show de sa carrière à Paris. La malédiction qui avait privé le public parisien du grand FROST pendant toutes ses années arrive à son terme ce soir sur les premiers accords de « Tottengot ». Je constate d'entrée de jeu que les Helvètes ont eu la bonne idée de virer l'éclairagiste qui avait illuminé comme un 14 juillet le set du Hellfest. L'œil unique du démon du « Satan I » de Giger nous observe ; il luit, hypnotique dans la lumière bleuté des spots. Le set qui suit est épique et retrace la légende CELTIC FROST sur ses premiers et sur le dernier enregistrement. Le groupe est accordé plus bas qu'à son habitude. Au passage les titres gagnent une lourdeur écrasante qui cloue tout le monde sur place. Le public parisien est frappé d'une apathie studieuse. Tout le monde observe religieusement l'avènement du « Gel Celtique » et si la voix de Tom Gabriel Warrior n'est pas à son zénith personne ne reviendra sur le charisme qui se dégage de la scène. Comme à son habitude, ce même Warrior ne communiquera pas avec le public. C'est Martin Ain qui fera office de maître de cérémonie nous prodiguant athéisme et respect des morts. Après un set de soixante-dix minute que nous étions quelques-uns uns à attendre depuis 1983, les divins Suisses quittent la scène sans effusion, ni sourire. Le meilleur set de CELTIC FROST qu'il m'ait été donné de voir de CELTIC FROST vient de se terminer. Du moins, jusqu'à la prochaine fois.
KREATOR en tête d'affiche, c'est la grande surprise et sans aucun doute la plus mauvaise affaire qu'il soit pour les vétérans teutons. Fort heureusement le pronostique qui me faisait dire que la salle allait se vider sitôt le set de CELTIC FROST terminé, s'avère complètement faux. Pourtant, le challenge d'imposer un thrash métal sautillant à la suite d'un set aussi lourd et sombre, est d'envergure. Et les choses ne s'arrangent pas lorsqu'on constate que Mille n'est pas au top de ses capacités vocales. Qu'importe les Teutons se démènent et arrivent à communiquer un brin d'enthousiasme à un public venu en nombre pour les acclamer. Difficile de ne pas éprouver un peu de nostalgie en pensant que KREATOR fêtera le 1er décembre de cette année le vingtième anniversaire de son premier concert à Paris (c'était au Rex Club avec VOIVOD). Pourtant, la fibre nostalgique ne sera que passagère et je quitte sans regrets les lieux avant la fin d'un show de KREATOR en deçà de leurs dernières prestations auxquelles j'avais assisté.
C'est la tête encore pleine des riffs pachydermiques du grand FROST que je retrouve la pluie parisienne ; un temps de circonstance en quelque sorte.