PAGAN FEST - 16/12/2006 - La Locomotive (Paris)
crédits photo: Romain Mallard

Cela faisait un petit moment qu'une affiche ne m'avait pas alléché à ce point. Pensez-donc, voila une occasion unique de voir en France les roumains de NEGURA BUNGET et une première occasion de découvrir nos voisins de ELUVEITIE. Si on ajoute à ça une tripotée de groupes celtisants de notre crû, on peut facilement expliquer la foule qui se presse dès l'ouverture des portes sous une bonne petite pluie bien froide de décembre. Les pré-ventes se sont écoulées durant la dernière semaine et il fallait donc jouer serré pour les retardataires qui voulaient acquérir une des 100 places restantes. Ca va être sold-out sous peu et nous tiendrons à grand peine à 400 personnes dans la salle surchauffée.

NEMETON a l'honneur d'ouvrir le fest, de la plus belle manière. Les bretons, dont la seule sortie officielle "Brezel" date de 2002, débarque sur scène en jouant du biniou et du tambour. La procession grimée comme les guerriers pictes est accompagnée de deux porte-drapeaux et traverse la salle par la foule. Menaçant le public d'un lourd marteau de guerre, le groupe pousse des hurlements guerriers qui vont tout de suite mettre l'ambiance. Les porte-drapeaux et le chanteur s'occuperont du spectacle tout au long du set. La mise en scène est vraiment impeccable et la communication avec le public est tout de suite établie, ce qui est toujours difficile pour le groupe d'ouverture. Musicalement, NEMETON est dans un registre pagan assez brutal, avec de grosses touches death. Le guitariste exécute des passages de biniou entre les morceaux, ce qui ajoute à l'ambiance celte de l'ensemble. J'ai bien aimé la voix de Gremlins du chanteur, même si elle a pu indisposer certains vieux grigous. Le groupe était dans son set et ça bougeait bien, ce qui est primordial pour chauffer la salle. Je me suis payé la démo pour découvrir leurs titres plus avant, car l'exécution sur scène était par moments assez hésitante. L'unique guitariste était assez fébrile, situation qui s'est encore dégradée sur la fin du set après un problème technique de guitare. NEMETON va toutefois livrer un set efficace et qui va accrocher le public d'entrée de jeu. Seul reproche, même si la fosse a plutôt apprécié, la sempiternelle reprise de Slayer "Raining Blood" était largement dispensable dans un temps de jeu aussi court.

Vient ensuite le tour de HEOL TELWEN, premier groupe à flûtiau de la soirée. C'est aussi le moment de finir le remplissage de la salle. Le reste de tickets est parti pendant le premier set et nous nous retrouvons serrés comme des sardines en boîte. Le guitariste/chanteur se charge des parties de bombarde et laisse les autres flûtiaux à l'ex-Aes Dana habitué du poste. Les chants sont partagés entre ces messieurs et le bassiste (je crois). Bref, tout cela pour vous dire que HEOL TELWEN se met en quatre pour faire vivre ces titres pagan celtiques au maximum. Et cela a grandement payé. J'ai trouvé la prestation techniquement impeccable et très prenante. Il se passe des choses sur scène, entre les différentes interventions et le plaisir évident de jouer des zicos. La communication avec le public est simple mais bien faite. HEOL TELWEN a été pour moi un groupe très efficace ce soir et a enlevé l'adhésion du public avec facilité. Je me suis d'ailleurs cassé les dents à essayer d'acheter leur album, qui était en rupture de stock au stand dès le début de leur set. Si c'est pas un signe ça! HEOL TELWEN a assuré sa prestation ce soir et l'audience les en a bien remerciés, avec une excellente ambiance assurément. Bravo, messieurs!

Le taux de compression dont nous étions les victimes m'a fait lever le pied par la suite et me réfugier plus dans le fond de la salle. Donc c'est d'un peu plus loin que nous assistons au set de WARGASM. J'avoue que c'est la prestation qui m'a le moins accroché ce soir. Mais c'est uniquement une question de goût et leur présence black/heavy épique sur une affiche plus portée pagan. La nuance peut paraître faible, elle était plus palpable sur les lieux. La prestation de WARGASM a par contre été techniquement nickel. Le groupe, armé d'un nouveau line-up, a déroulé ses titres avec la rigueur nécessaire pour qu'ils rendent puissamment bien et le public s'y est bien retrouvé. La communication avec la fosse est d'ailleurs très bonne avec le nouveau chanteur, qui a bien dû finir lessivé en fin de journée, organisation oblige. WARGASM aura la chance le lendemain d'accompagner NEGURA BUNGET à Lyon pour la seconde date française avec THE OATH. Le groupe travaille dur et cela paye!

Les flûtiaux sont de retour avec AES DANA. Le groupe nous aura fait des frissons, annulant pas mal de concerts ces derniers temps pour cause de soucis de santé. Intégrant un nouveau préposé aux instruments traditionnels, AES DANA va dérouler un set puissant et agressif, comme à son habitude. Je n'ai pas constaté d'où j'étais la fébrilité du nouveau flûtiste et l'ensemble m'a paru bien en place. Par contre, AES DANA souffre d'un souci de présence scénique et d'un manque de lien avec son public qui devient plus évident au fil de concerts. Surtout si on compare à HEOL TELWEN passé juste avant, AES DANA se contente d'enchaîner les titres et, de mémoire, aucun mot n'a été adressé au public en dehors du chant. Du coup, le set m'a paru longuet par moments, manquant de vie. En dehors de ça, l'accueil a été évidemment excellent pour le groupe dont le dernier album vaut le détour. Le groupe a gagné sa place élevée sur cette affiche, sans contestation possible.

Le timing étant impeccablement respecté, les suisses de ELUVEITIE vont donc arriver à l'heure sur scène (à leur montre). C'était la grande interrogation de la soirée: comment le collectif de huit musiciens allait-il parvenir à rendre sa musique sur scène? Avec élégance et talent, tout simplement. ELUVEITIE a donné une prestation de rêve, une méga-grosse baffe qui va laisser des marques. Le mix entre les instruments traditionnels et le métal est vraiment superbe et la mise en place impeccable va donner à leur set un air de tête d'affiche avant l'heure. Le chanteur séparait sur scène la vielliste (?) et la violoniste (miam), fragiles jeunes femmes, d'une horde de guerriers barbares et déchaînés (les jumeaux sont excellents). Les musiciens s'adonnent à cœur joie au headbang et font participer le public à la grande fête qu'ils mettent en branle. Les interpellations de la fosse en français hésitant (ils sont germanophones) était excellentes. Puisant leurs titres dans leurs deux sorties "Vên" et "Spirit", ELUVEITIE va nous laisser orphelins après un temps de jeu qui paraissait bien trop court. Quand on aime, on ne compte pas et la salle entière en a clairement redemandé!! Bravo aux suisses pour cette démonstration et merci d'avoir confirmé votre talent. Revenez quand vous voulez!

Et, comme pour le concert de SECRETS OF THE MOON, la salle s'est inexplicablement vidée en partie pour NEGURA BUNGET. Je peste encore de cette attitude irrespectueuse, les parisiens préférant se rabattre au bar pour papoter (et ils sauront se plaindre dans deux mois que les groupes ne viennent plus en France alors qu'ils réagissent comme des enfants gâtés gavés de concerts). Pour faire les beaux il y a du monde, mais pour réellement assister à un concert... NEGURA BUNGET faisait le déplacement spécialement en France pour deux dates. Nous tenions là une occasion unique de voir le groupe sur scène. Les gens qui ont réussi à rentrer dans la salle et qui ont loupé ce set sont simplement des couillons. C'est d'autant plus les boules pour ceux qui sont restés dehors. Tant que je suis à râler, je trouve encore plus irrespectueuse l'attitude des autres couillons qui restent dans la salle et, n'en ayant rien à foutre de la musique, qui papotent très fort pendant que le groupe joue. Quand le groupe bourrine on n'entend pas trop, mais c'est très très chiant pendant les plages plus atmosphériques. Vu les conversations insipides qui se tenaient autour de moi, je n'ai qu'un conseil à vous donner: restez chez vous avec votre chaîne hi-fi et laissez votre place aux autres! La foule parisienne me sort parfois par les trous de nez, tellement elle se croit un peu tout permis et manque d'humilité et de jugeote. Je reviens au live report...

La similitude avec SECRETS OF THE MOON ne s'arrêtait pas à une histoire d'affluence dans la salle: j'ai été encore une fois hypnotisé par l'heure de jeu des Roumains. NEGURA BUNGET a livré un set planant, arrivant à mettre en place les ambiance de ses albums et notamment du fabuleux petit dernier "Om". Le guitariste/chanteur Hupogrammos a un charisme incroyable et il est plutôt touchant et rigolo avec son anglais hésitant assumé. Et, dès l'introduction, il va placer les hurlements d'introduction de "Om", à glacer d'effroi le plus stoïque des vendeurs de glace. Les parties agressives et les parties atmosphériques se mêlent dans un pagan furieux et très personnel, emmené par les voix torturées et les chœurs guerriers. Les parties de batterie de Negru sont vraiment atypiques et collent parfaitement à l'ambiance que met en place la petite bande. Le bassiste Sol Faur et les musiciens de session (guitare et claviers) vont également participer à nous faire voyager dans les forêts enneigées de Transylvanie. Les mots me manquent, car le set de NEGURA BUNGET était vraiment placé sous le signe de l'émotion et du ressenti. Le groupe va piocher avec brio dans ses différents albums, privilégiant évidemment le superbe (déjà) quatrième. Difficile de réaliser à la fin du set que c'est déjà fini. Le retour à la réalité doit pourtant se faire. Nous venons de voir NEGURA BUNGET sur scène et le moment était important. Même s'il n'est pas unique (je l'espère fortement), ce premier set aura tenu du rêve éveillé.

Et hop, nous voila déjà dehors, il n'est même pas 22h. Le concert-goûter de la petite Loco a son charme qui nous laisse la soirée de libre. Mes petits agacements sont oubliés. Je préfère me remémorer les excellents moments de cette journée: NEGURA BUNGEt magiques, ELUVEITIE exceptionnels et HEOL TELWEN très bons. Les autre groupes n'auront pas démérité du tout, mais mes trois chouchous du fest sont déjà trouvés. Après un au-revoir aux camarades, je m'éloigne vers les transports en souhaitant très fort qu'un Pagan Fest II de cette ampleur voit le jour... ben demain. Je ne fais rien demain, justement. Allez l'orga, c'était génial!!!