Interview du chanteur et parolier de Messaline

Est-ce que avant de jouer/chanter dans ABSURD puis MESSALINE, tu écrivais déjà des textes ou histoires ? Ou est-ce que c'est apparu avec la création du groupe (parce qu'il fallait quelqu'un pour s'en occuper par exemple..)
Non, c'est venu en intégrant ABSURD en 1995. Je me voyais mal chanter des textes écrits par les autres, surtout que dans ABSURD j'avais « imposé » un style de musique très influencé par ANGE que je connaissais sur le bout des doigts (de la langue !). C'était plus facile pour moi de réfléchir sur l'univers musical en m'occupant des textes.

Généralement, au sein de MESSALINE, les paroles sont créées avant, en même temps ou après la musique ? Ou tout simplement, cela se produit durant ces 3 phases ?
Contrairement à pas mal de groupes, les ¾ des textes sont faits en amont, avant la musique. J'aime bien la musicalité des mots, des rythmes, ça donne déjà une idée sur le style de musique qui va être composée par-dessus. Il m'arrive aussi de faire du « yaourt » en répèt sur un nouveau riff, on enregistre et je me mets à l'écriture à la maison, paisible.

Pour quelqu'un qui ne connaît pas le groupe, quels sont les principaux sujets que vous abordez ?
J'aime bien les sujets historiques. Forcément des images défilent devant tes yeux lorsque tu bosses sur tel ou tel personnage. Ça te donne des possibilités. Apparemment j'ai dû faire un acte manqué dans notre prochain album « Éviscérer les Dieux » car je me suis aperçu que dans tous les titres il y avait un dénominateur commun : la Femme. Quand je disais que j'aimais bien les sujets hystériques !!! (rires)

Une fois les textes écrits, ils doivent être chantés; je suppose qu'il vous est déjà arrivé de devoir passer du temps à reformuler certaines phrases et certains passages pour qu'ils soient les plus simples et meilleurs possibles à chanter: est-ce un exercice vraiment difficile et épuisant, ou finalement pas si tortueux qu'on peut l'imaginer ?
Comme souvent j'écris avant la musique je rythme déjà mes vers. Donc c'est la musique qui s'adapte. Mais pour que ce soit plus « percussif » ou efficace souvent il m'arrive d'enlever des bouts, de supprimer des pronoms, les « le » « la »  « les». Dans le Rock, écrire des chansons apprend à être concis. Ne pas forcément faire des phrases sujet/verbe/complément. Fonctionner par mot qui amène des images.

En combien de temps écris-tu un texte ? Est-ce quelque chose de spontané, ou qui demande de la réflexion et du recul ? Certains ont besoin de 2 heures, une nuit, plusieurs jours... Tu te situes dans quelle tranche ?
Le plus dur c'est de trouver un thème qui puisse se développer sur quelques couplets, refrains. Pour moi, c'est ça le plus long ! Trouver une idée générale. Ensuite, je me replonge dans mes cahiers où traînent toujours des bouts de phrases, des mots qui sonnent et voir si je peux les recaser. Souvent, je mets des bribes de textes « au chaud ». Écrire c'est aussi exhumer de vieilles phrases. Une fois remontées à la surface, une après-midi fait l'affaire.

L'humour est presque toujours présent dans tes textes via des jeux de mots, des calembours ou des contrepèteries. C'est un passage obligé pour toi ou tu pourrais écrire un texte entièrement sérieux ?
J'ai peur de faire que des textes sérieux. Il y aurait un côté trop dénonciateur, éditorialiste critique de la société à la Bernie Bonvoisin que je trouve un peu daté, et pas forcément honnête. Il est difficile de brandir les étendards de la cause ouvrière et de l'extrême-gauche par exemple lorsqu'on fréquente le show-bizz et les bobos du XVème ….(je ne parle pas de moi évidemment !). Mettre une touche d'humour ou jouer avec les mots me permet de me justifier, de dire implicitement : «  eh oh ; même si je pense que c'est pas mal écrit je ne me prends ni pour Baudelaire ni pour Jean-Paul Sartre !! » (rires)

Souvent les appréciations sur un groupe portent en premier lieu sur la musique; quand des gens vous félicitent et vous complimentent pour vos textes, cela doit j'imagine, aussi vous faire plaisir, de nos jours les auditeurs ne prêtant peut être plus trop attention aux paroles; que pensez vous de cela ?
Oui ça me fait plaisir car, comme tu le dis, la normalité c'est que la musique passe avant le texte. Le texte est considéré souvent comme la cerise sur le gâteau et malheureusement pas mal de groupes se contentent de puddings indigestes ! (en anglais dans le texte !). Le plus difficile c'est d'écrire en français parce que ce n'est pas forcément une langue qui sonne Rock au départ, et tu as intérêt à écrire des choses pas trop nazes sinon c'est très vite catastrophique. Alors quand les gens te félicitent ça soigne ton égo…

Le livret d'un album est d'une grande importance; au-delà du fait qu'il contienne des photos et illustrations, c'est surtout la disposition des paroles qui le rend utile: l'auditeur se plonge davantage dans l'univers du groupe, l'appréhende un peu mieux, peut aussi interpréter les textes à sa manière ou s'y retrouver...C'est en définitive un élément indispensable au groupe, tu partages ce point de vue ?
Oui ! Avec MESSALINE nous ne sortons que des digipacks. Déjà je trouve que ça fait de beaux objets (c'est mon côté « vinyl » !), ensuite, il est indispensable d'avoir un livret. L'auditeur peut mieux décrypter les textes (de façon terre à terre parfois certains mots sont difficiles à capter dans un mix hard rock). J'aime aussi écrire des petits textes d'intro aux chansons, pour situer le contexte et donner des pistes d'interprétation à l'auditeur. Et enfin pour les jeux de mots ou les double sens c'est mieux d'avoir tout sous les yeux. Par exemple tu entends « oh templier oh templier ! » et finalement tu lis «  autant plier aux templiers… », tu saisis mieux où je veux en venir en les lisant.

Tu as compilé tes écrits dans un livre, est-ce que tu pourrais/voudrais écrire un livre juste pour le plaisir de la plume ?
Non, je ne pense pas être capable. C'est un peu comme mon job. Je fais des dessins de presse, une idée /un dessin. Il m'arrive de faire des strips pour faire passer un gag, voire une page. Mais je n'arrive pas à développer mon graphisme ou mon humour sur une BD. Je pense que dans notre musique c'est pareil, un texte, une compil de textes ça va, mais un bouquin, un roman… Je perdrais l'esprit de synthèse et je me délaierais dans du verbiage sans intérêt.. Mais ça c'est une autre…histoire !