L'annonce du passage d'Exodus au Korigan à Luynes (juste à côté d'Aix en Provence) suite à la non-confirmation de la date parisienne initialement prévue aura fait à n'en point douter quelques heureux parmi les thrasheurs sudistes. Pour une fois que l'on était pas obligé de partir en pèlerinage à Paris, on allait pas bouder notre plaisir. Et pourtant...Oui, pourtant, cette soirée restera malheureusement en demi-teinte à cause d'un public autant inexpressif que peu connaisseur.
Passons tout de suite sur l'organisation à l'arrache du concert et sur le temps d'attente assez long à l'entrée (il faut dire qu'il n'était pas possible d'acheter son billet à l'avance) qui en aura peut-être incommodé certains mais qui était quand même un moindre mal à payer pour avoir une telle affiche dans la région, seule date d'Exodus en France rappelons-le, et ceci avec une préparation réduite par la force des choses à son strict minimum.
Bref, une fois entré les réjouissances peuvent enfin commencer avec très clairement deux concerts, et donc deux publics différents, d'un côté les deux jeunes groupes français et de l'autre, Biomechanical et Exodus.
C'est à Ibogaïne qu'il incombe d'ouvrir les hostilités devant un public qui, à mon grand étonnement, et heureusement d'ailleurs, ne l'est pas vraiment, hostile. On craignait le pire pour ces jeunes metalleux donc le metalcore énergique bien qu'un peu linéaire est quand même très éloigné du thrash old school des légendaires Exodus. Toujours est-il que le groupe possède une assez bonne énergie et s'en sort plutôt bien dans son registre même si j'avoue être resté assez hermétique à leur musique. La soirée se poursuit sur un ton sensiblement différent, plus nuancé et subtil, avec l'entrée en scène de Sonny Red, groupe auquel je suis également peu réceptif. Autant dire les choses comme elles sont. Ce n'est pas vraiment un style que j'apprécie donc mon opinion est à prendre pour ce qu'elle est. Même si la musique en elle-même est plutôt variée, plus que celle du groupe précédent, et intéressante dans l'absolu, elle est vraiment trop éloigné du metal traditionnel auquel je reste attaché pour pouvoir m'atteindre. Si les parties les plus agressives ne sont pas désagréables, le gros problème vient, comme pour tous les groupes de cette mouvance, du chant clair qui n'a strictement rien de metal (ce qui ne veut pas dire qu'il n'est pas de qualité) et qui m'aura sur le moment donné un petit peu envie de m'enfoncer un clou dans l'oreille ce qui, avouons-le, n'est quand même pas très agréable. Toujours est-il que le groupe était appliqué et qu'il a joué le jeu avec un certain courage, aidé en cela par une fan-base indéniable (ouvrir pour Exodus au vu de leur style n'était pas quelque chose de simple). Même si les petites tentatives d'humour du chanteur tombaient un petit peu à plat on lui reconnaîtra tout de même une certaine énergie. Pour un amateur de ''metal ouvert'' (comme on dit) qui mélange allègrement influ hardcore et metal dans une optique technique et pseudo-intello, c'est certainement un groupe à suivre. Tel le bourrin que je suis (faute avouée à demi pardonnée), leur show m'a plus laissé perplexe qu'autre chose.
Vient ensuite l'énorme sensation du moment venant tout droit d'Angleterre. J'ai nommé les terriblissimes et ô combien sympathiques Biomechanical, un des meilleurs groupes de heavy-thrash moderne sur le marché dont le deuxième album The Empire Of The Worlds, découvert grâce au magazine Classic Rock, m'avait littéralement laissé sur le cul.
Le groupe arrive remarquablement bien à retranscrire sur scène leurs morceaux (on pouvait avoir quelques craintes à ce sujet tant ils sont techniquement démonstratifs en studio, y compris au niveau du chant) et rien que pour ça, chapeau bas les mecs. On a eu droit à une leçon magistrale d'un futur grand malheureusement très peu connu encore en France. Espérons que la situation évoluera avec la sortie de leur troisième album au début de l'année prochaine. Hyper technique et puissant (un peu comme du Nevermore mais avec de plus grosses couilles), moderne (limite power même au niveau des riffs) mais en même temps assez old school, notamment le chant qui comporte pas mal de screams assez impressionnants. Une sorte de croisement improbable en fait entre Phil Anselmo et Rob Halford qui en aura certainement destabilisé plus d'un mais qui m'aura personnellement plus qu'impressionné. Il était d'ailleurs probablement préférable de connaître les morceaux avant tellement les compos de ce groupe partent parfois dans tous les sens. Biomechanical jouera principalement des morceaux de leur deuxième album et terminera son set par une reprise de Painkiller à vous réveiller un mort. Un combo qui possède une bonne attitude sur scène et dans lequel règne manifestement une excellente ambiance. A suivre de très près et à revoir pour un show plus long et dans de meilleures conditions.
En effet, ce n'est qu'à partir d'Exodus qu'il n'y aura plus qu'une seule batterie sur cette très petite et très basse scène. Bref, jusqu'à Exodus les musiciens ne pouvaient quasiment pas bouger ce qui rend à cet égard la prestation des trois premiers groupes encore plus remarquable.
On notera également avec satisfaction le fait qu'il n'y ait pas eu d'incident majeur à ce niveau là alors que, pourtant, la proximité entre la batterie et le premier rang, et donc le pogo, était tout de même assez inquiétante.
Le temps d'enlever la première batterie et Exodus débarque enfin sur la scène du Korigan alors qu'il est déjà minuit passé. Le concert démarre très fort avec le cultissime Bonded By Blood suivi du titre Raze issu du dernier album. Le groupe poursuit ensuite avec une set-list assez classique faisant la part belle au premier et au dernier album. En plus de Bonded By Blood, Exodus jouera bien évidement le morceau Exodus mais également And There They Was None avec ses choeurs (oh oh oh) d'un autre age, A Lesson In Violence, Piranha et Strike Of The Beast. On regrettera tout de même qu'un titre comme Metal Command n'ait pas été joué contrairement à d'autres dates de cette tournée européenne. En contrepartie, le groupe jouera trois morceaux de l'avant dernier album Tempo Of The Damned. En plus des désormais classiques War Is My Shepherd (le titre le plus taillé pour la scène qu'ils ont pu écrire dernièrement, une boucherie totale!) et Blacklist on a donc eu droit également à Scar Stangled Banner auquel j'aurais personnellement préféré un petit Shroud Of Urine (si, ça, c'est pas du titre!).
Les nouveaux morceaux passent haut la main le cap de la scène que ce soit aussi bien Deathamphetamine qu'I Am Abomination ou Magnum Opus et ses terribles I Don't Give A Fuck. Tellement évident mais tellement bon. Même si le chant du nouveau hurleur Rob Dukes est sur la longueur un poil linéaire, ce dernier rempli toutefois fort bien son rôle de Bulldog et on regrettera surtout que le public ait été aussi amorphe et peu communicatif durant le set d'Exodus. Que le public ne connaisse pas Biomechanical, c'est compréhensible, pour Exodus, ça l'est quand même beaucoup moins et force est de reconnaître qu'un concert de thrash où le public ne chante quasiment pas, ne bouge dans l'ensemble même pas la tête, c'est quand même assez singulier. Pire que ça, la fosse s'est même bien vidée tout au long du show d'Exodus. Il est vrai qu'il était assez tard et que l'on était en semaine mais même ceux qui sont restés donnaient un petit peu l'impression de ne pas connaître vraiment le groupe, contrairement à l'un de nos compagnons de fin de soirée qui avait amené un magnifique LP de Forbidden à faire signer à Paul Bostaph.
On ne peut pas dire que le public français aura fait une forte impression à Rob et au vu de la carrière du groupe et du line-up affiché (rappelons tout de même qu'il y avait Paulo à la batterie et Lee Althus d'Heathen à la gratte en plus de Gary Holt, seul membre historique du groupe) on aura été quelques uns à avoir honte à la fin du concert.
Le qualité du son a connu a connu des hauts et des bas durant la soirée mais dans l'ensemble on a pas spécialement à se plaindre. Il a toujours était meilleur que pour Slayer à Bercy ce qui, il est vrai, n'était pas très difficile.
Si l'on met de côté les préférences musicales de chacun, tous les groupes (Biomechanical en tête) ont plutôt fait un bon show en fonction de leurs niveaux respectifs. Le seul absent aura été le public qui bien que physiquement présent (l'affluence était plutôt correcte même si Exodus mérite bien évidemment mieux) était manifestement ailleurs. En espérant que le 19 janvier, au Jas Rod, le public de Deicide soit plus ''vivant''.