Thomas Billerey (Guitare) - MINUSHUMAN par ZESNAKE - 2688 lectures
MINUSHUMAN vient de sortir son second album intitulé "Bloodthrone" via Season Of Mist. Après un premier album autoproduit déjà acclamé, le quintette de Bergerac a de nouveau frappé fort pour son second opus, poussant encore plus loin son Thrash atmosphérique à la fois percutant et mélodique. "Bloodthrone" est un disque sélectionné par VS, c'est donc une bonne occasion pour s'intéresser de plus près au prometteur groupe français avec cette interview de Thomas (Guitare lead et compositions).
La musique de MINUSHUMAN présente des influences diverses et variées, des ambiances personnelles, et il n’est pas aisé de la classifier. Comment définiriez-vous votre style ?
C'est toujours difficile de se donner une étiquette précise. On aime se qualifier de « thrash atmosphérique » pour exprimer l'idée qu'on évolue dans un univers teinté d'ambiances et de brutalité, mais ça reste une appellation comme une autre. Nos racines sont évidemment situées plutôt dans la scène thrash / death, mais j'espère néanmoins qu'on a su se créer une identité qui nous est propre, teintée d'univers parfois très différents.
Quelle a été la méthode de composition de Bloodthrone ? Similaire ou différente de celle de Watch The World Die ?
On a procédé de la même façon que pour Watch The World Die. J'ai composé pas mal de matériel de mon côté, en attendant que les compositions créent une sorte de cohérence naturelle entre elles, une sorte de logique, qu'elles m'embarquent en quelque sorte dans une atmosphère particulière. J'avais eu pas mal d'idées durant les sessions du premier album, que j'ai également tenté de creuser. Une fois arrivé à un ensemble équilibré, j'ai soumis ces compos au groupe et on a foncé leur donner vie en répétition sur une période d'environ un mois, puis enchaîné sur l'enregistrement.
Il y a un petit truc qui m’a sauté aux oreilles lors de l’écoute de Bloodthrone, c’est la ressemblance frappante entre le riff de départ de « Another All » et celui de « The Sixth Mass Extinction » sur le premier album. C'était voulu, c'est une pure coïncidence ou c'est moi qui déraille ?
C'est une coïncidence volontaire on dira. Le riff rappelle effectivement par certains aspects celui de « The Sixth Mass Extinction », mais il reste tout de même bien différent, il n'exprime pas forcement la même chose, même s'il s'en approche. Je l'avais en tête et j'en voyais la filiation, et il m'a inspiré le morceau « Another All », qui est au final bien différent de son ancêtre. Mais il crée un lien entre notre premier album et Bloodthrone d'un certain point de vue.
J’ai trouvé que Bloodthrone était un album plus catchy et plus groovy que Watch The World Die, moins axé sur les atmosphères (même si elles sont toujours présentes) et avec une volonté de créer du « tube ». Suis-je dans le vrai ?
Si tu considères certains morceaux comme des tubes potentiels, c'est plutôt une bonne nouvelle ! Comme je te disais, on n'avait pas d'idée précise sur comment devait sonner l'album et comment il devait s'inscrire vis-à-vis du précédent. On a pas voulu s'enferrer dans ces questions d'ailleurs. On a simplement tenté de faire un disque cohérent et peut être plus « straight to the point », sans se poser plus de questions. On a juste pris un maximum de plaisir quand on a commencé a bosser les nouvelles compositions ensemble, et tout s'est mis en place naturellement. Ces nouveaux morceaux sont aussi plus ouverts qu'auparavant, laissant plus de place au groove justement. Peut-être aussi que le groupe est plus armé qu'hier, l'expérience du premier album aidant. Concernant les atmosphères, je les trouve pour ma part au contraire particulièrement présentes sur ce nouvel album, peut être sous une forme quelque peu différente par contre.
Tout comme Watch The World Die, Bloodthrone a de nouveau été enregistré au Conkrete Studio. Etait-ce une « solution de facilité » ou ce studio correspond parfaitement à vos attentes ?
Mobo est juste un très grand Monsieur, et le solliciter pour ce nouvel album nous a semblé plus qu'évident. En plus d'être un super professionnel, il est surtout humainement quelqu'un de rare. Il fait partie intégrante de l'alchimie de ce nouvel album, tant le chemin qu'on a parcouru ensemble fut intense et exigeant. Il a une sensibilité musicale et une créativité impressionnantes, et ceux qui sont passés entre ses mains savent à quel point il s'investit dans les projets auxquels il participe, et le soin qu'il prend des gens.
Quelle est la signification du titre de l’album, ainsi que sa pochette ? Chercheriez-vous à conquérir le trône du roi du Metal français en y laissant votre sang ?
La pochette représente un trône ensanglanté, fièrement dressé au milieu d'une vaste étendue mi-liquide, mi-désertique. On peut l'interpréter de différentes façons. Nous souhaitions mettre en avant l'idée que l'Homme règne désormais sans partage et sans scrupule d'aucune sorte sur le monde, le dévastant et le pillant dans le sang. Chaque morceau suit cette idée et la met en scène, sans être un concept album pour autant. Mais on ne cherche aucunement à détrôner qui que ce soit sur la scène metal française, si tant est que quelqu'un en réclame le titre !
Quels sont les sujets traités par les paroles de Bloodthrone ? Tournent-elles autour d’un concept bien précis, ou prennent-elles plusieurs directions?
On aborde le thème évoqué précédemment sous différents angles, à travers plusieurs manifestions des errances humaines. Par exemple, un titre comme « The Size Of An Ocean » rappelle que la vague peut à tout moment venir remettre les compteurs à zéro et effacer toute trace des hommes, quelle que soit la puissance qu'ils possèdent pour s'y préparer. Le titre « Three Mile Island » fait malheureusement écho à la catastrophe de Fukushima, et traite des évènements survenus en 1979 dans cette centrale nucléaire américaine. « Forgotten Fields » aborde l'idée que le monde devient hideux et effrayant, et qu'il n'est plus que terres dévastées et abandonnées. D'autres titres, comme « The Architect » ou « Godspeed » sont plus axés sur les méandres de l'esprit. Les sujets de grande inquiétude ne manquent malheureusement pas.
Est-ce que des influences extra-musicales (cinéma, livres, jeux vidéo…) interviennent dans l’univers de MINUSHUMAN, que ce soit un niveau musical (notamment au sein du travail sur les ambiances) ou au niveau des thèmes abordés par les paroles ?
Oh bien sûr, la culture dans laquelle tu baignes t'inspire directement ou indirectement, et tu en es toi même une petite réalisation. Mais je pense que nos idées sont nourries plus par l'actualité que par différents ouvrages ou films. Il y a forcement des ponts entre tous ces sujets, le cinéma ou la littérature puisant souvent leur inspiration dans leur époque, comme pour en garder des traces et en conserver une mémoire. Dans notre cas, la principale source reste ce qui se passe autour de nous aujourd'hui.
Quel est le concept derrière le clip de « The Day We Died » ? D’ailleurs c’est la seconde fois que vous diffusez un clip avant même la sortie de l’album, pourquoi employer cette démarche ?
Nous avons écrit le scénario ensemble avec Batiste Combret, puis réalisé le clip sous sa direction et celle de Alain Chasseuil, et fait de nouveau appel à Anthony Miossec comme acteur. L'idée motrice est celle d'un homme, débarqué dans une étendue désertique, et se sentant suivi, traqué par quelque chose, quelqu'un, et sentant cette présence de plus en plus pressante, l'obligeant à fuir sans réfléchir droit devant lui. Je ne voudrais pas aller trop loin dans l'analyse du scénario, qui a été pensé plus comme celui d'un mini-métrage à part entière, et laisser chacun y comprendre ce qu'il veut. Nous avions effectivement diffusé notre premier clip « Liquid », d'abord en avant-première au Rocksane à Bergerac puis sur Internet avant la sortie de l'album, car nous souhaitions proposer notre musique sans trop attendre, le moment nous semblant venu, sans trop y réfléchir. Pour « The Day We Died », c'est Season of Mist qui a souhaité réitérer la démarche, et je trouve ça vraiment positif. Nous avons à nouveau projeté le clip en avant-première dans la même salle le 1er juillet de cette année.
Vous avez signé chez Season of Mist pour la sortie de Bloodthrone. J’imagine que vous êtes heureux de travailler avec le célèbre label marseillais et que la collaboration se passe bien, surtout après vos petits tracas avec Trendkill ?
C'est évident que nous sommes ravis de faire partie de leur écurie ! L'équipe de Season of Mist est vraiment pro' et les chosent tournent dans le bon sens. On a vraiment bien accroché humainement, et ils montrent un réel intérêt pour ce nouvel album. Leur évolution sur les années force également le respect, devenant le label incontournable qu'il est aujourd'hui. C'est vrai qu'on a eu quelques soucis et quelques heurts dans notre parcours, comme bon nombre de groupes, et qu'on a fait le choix à l'époque de le dire, prenant de fait le risque d'être tant soutenus que vertement critiqués, et c'est bien compréhensible. Chacun aura eu le temps à l'époque d'avoir un avis sur la question. C'est loin derrière nous maintenant, et nous ferons évidemment en sorte de ne pas nous retrouver dans une situation similaire à l'avenir.
Quel a été l’impact de Watch The World Die, comment avez-vous perçu les réactions positives à l’époque de sa sortie, et comment vous-ont-elles permis d’avancer ?
L'album a reçu un accueil très enthousiaste, tant sur les webzines que sur Internet en général, et il a semblé qu'il y a eu une véritable adhésion à ce qu'on proposait. Et ce qui fait rudement plaisir est de voir qu'il vit toujours 3 ans après. Le titre « All Keeps Falling Down » par exemple a reçu écho assez dément. C'est bien sûr un carburant pour travailler d'autant plus et avancer. Il nous aura permis de croire d'autant plus en notre envie, de prendre confiance, et de nous structurer d'avantage. L'arrivée de Loïc de Musica Diaboli en tant que manager fut une étape déterminante également, qui fit avancer les choses de manière drastique et qui met depuis une énergie incroyable au service du groupe. S'en est suivi donc la signature chez Season, puis notre partenariat avec Avocado Booking qui s'occupe désormais de nous pour l'Europe . J'espère que ce nouvel album nous permettra de continuer sur cette lancée et nous donnera l'occasion de faire encore de belles choses à l'avenir.
Que retenez-vous de la période DARK POETRY ? Etait-ce en quelque sorte un prélude à MINUSHUMAN ?
C'était en effet un bon préambule à MINUSHUMAN, qui nous a permis de faire nos armes tant sur scène que sur album, et qui nous aura considérablement soudés humainement. J'en retiendrai énormément de choses, bien sûr, tant sur le plan des rencontres que des moments de pur plaisir pendant des concerts assez mémorables. C'est une chance pour nous que de pouvoir capitaliser sur cette expérience commune pour d'autant plus profiter de ce qui s'ouvre à nous avec MINUSHUMAN.
Quelle importance donnez-vous aux concerts par rapport aux enregistrements studio et aux phases de composition ? L’approche de la musique de MINUSHUMAN en Live est-elle différente de celle sur album ?
Je pense que ce sont deux mondes absolument liés mais nettement différents. Un morceau fonctionnant sur album peut avoir un rendu bien différent en live, et vice versa, et on a tous nos morceaux favoris dans le set, avec lesquels il se passe un truc particulier. Je pense aussi que chaque personne se rendant à des concerts y va pour des raisons bien à lui ; soit pour prendre de l'énergie, soit pour écouter de la musique live, soit pour voir un véritable show, tout à la fois ou pour plein d'autres raisons, et qu'il faut donc essayer de répondre à toutes ces envies à la fois en trouvant un bon équilibre entre l'exécution des morceaux et le show. On essaye de faire de notre mieux pour que quelque chose se passe avec les personnes devant nous et qu'elles prennent du plaisir autant que possible.
Quels sont les projets pour MINUSHUMAN pour le futur, hors tournées ? Peut-être va-t-on voir apparaître un side-project ?
Pour le moment, pas de projet concret de side-project en vue, on est tous focalisés sur MINUSHUMAN, mais rien ne dit que ça n'arrivera pas un jour. Pour l'avenir proche nous sommes concentrés sur la sortie de l'album ces prochains jours et ses premiers retours. Rien ne dit non plus qu'on ne vas pas réactiver DARK POETRY un jour ou l'autre...
Comme la plupart des groupes en 2011, vous êtes très présents sur les divers réseaux (my_____, Twitter, Facebook...). Est-ce une corvée peu productive que de tenir ces sites à jour, ou est-ce nécessaire dans la mesure où ça contribue grandement à vous faire connaître? Quel est ton avis sur la question épineuse de ces réseaux « sociaux »?
C'est loin d'être une corvée, sauf quand certaines interfaces de certains sites dont je tairai le nom se mettent à changer pour une version absolument merdique qui fait perdre un temps fou… ! C'est au contraire un réel avantage pour diffuser sa musique et rentrer en contact avec pas mal de monde, et le temps consacré à ces tâches est toujours productif. C'est même bon signe que d'y consacrer un temps croissant. Mais ce n'est évidemment pas une fin en soi, c'est simplement un outil. C'est vrai que le monde entier a suivi cette frénésie du social networking depuis 4 ou 5 ans, mais c'est comme tout, ça finira dans 2 ou 3 ans comme une simple option d'un nouveau mode de communication, comme le téléphone qui est devenu une option sur les smartphones et non leur raison d'être première. Par contre, ça participe à une certaine vision du monde qu'on a tout-à-fait le doit de critiquer fortement et fermement, qu'on peut résumer à la question du péril du droit à la vie privée. C'est in fine une mutation inévitable des modes de communication, qu'on le veuille ou non.
Etant donné que vous êtes un groupe français, je ne peux pas vous poser la question habituelle «connaissez-vous des groupes français ?»… A la place, vous n'aurez pas quelques projets plus underground à nous conseiller ? Ou peut-être un coup de cœur récent parmi des groupes plus « connus » ?
Je peux citer des groupes suisses ?! J'ai récemment pris une énorme claque avec KRUGER, qui est passé pas loin de chez nous à Périgueux, et qui démonte ! Je les avais vus il y a un bon moment et ce qu'ils proposent aujourd'hui est vraiment classieux. On vient de partager la scène avec SKELETONWITCH qui nous ont mis à tous une belle claque également ; je les connaissais principalement de réputation et j'en suis devenu totalement addict. Sinon, les derniers TOWNSEND sont bien sûr en rotation constante dans ma playlist.
Merci d’avoir répondu à nos questions. Les lecteurs de VS sont tout ouïs pour le mot de la fin. Qu’as-tu à leur dire pour les convaincre définitivement d’investir dans votre nouvel album ?
J'espère simplement que ceux qui ont apprécié notre premier album trouveront leur compte avec Bloodthrone et que les curieux sauront pencher leur oreille dessus ! Merci à VS et à ses lecteurs, j'espère à très bientôt sur la route !