ANTROPOFAGO.
Vous connaissez ?
Le Brutal Death à connotation technique, ça vous plait ?

J'avoue avoir découvert ce groupe montpelliérain il y a peu.
Mais, l’intensité et la qualité impressionnante de leur premier album m’ont inexorablement conduit à essayer d’en savoir plus sur ce groupe, afin de vous faire partager ce coup de cœur...

Hello les Montpelliérains ! Première question, obligatoire et même logique, au vu de la qualité de votre album :
J'ai cru comprendre que votre album était pour l'instant uniquement disponible en numérique. Avez-vous prévu de sortir 'Beyond Phobia' en version physique prochainement ? (j'espère que Oui...) Peux-tu nous en dire plus ?
Melmoth : Salut à toi, et à l'équipe VS Webzine.
Gordon : Salut et merci a toi pour cette interview !
Melmoth : En effet, l'album est actuellement disponible uniquement en version numérique chez emusic (http://www.emusic.com/album/Antropofago-Beyond-Phobia-MP3-Download/12364946.html), mais il sortira également en version physique d'ici deux semaines environ.
Gordon : Même si les mp3 sont monnaie courante de nos jours, je ne conçois pas de sortir un album uniquement sous ce format. Sinon on aurait fait comme pour la démo, on aurait pris le parti de le distribuer gratuitement.

Vous avez enregistré cet album "à la maison", c'est bien ça ? Peux-tu nous en dire plus, que ça soit sur le processus de composition, comme celui de l’enregistrement ?
Comment trouvez vous le résultat final (au niveau du rendu sonore) ?
Gordon : Pour la composition ça a été assez simple, vu que je compose 99% des riffs seul. Un ou deux riffs proviennent de notre ancien batteur. Pour l'enregistrement, en effet on a tout fait à la maison. Nous avons utilisé une boîte a rythme pour le coté pratique et budgétaire, et aussi parce que Vincent, notre nouveau batteur, est arrivé alors que l'album était bien avancé.
Les guitares et la basse ont été faites chez moi, et Melmoth a fait le chant chez lui. On a juste envoyé les pistes au mixage à ASTRALIS studio chez Nicolas Blond, qui a bien rattrapé le son. Merci a lui!
Melmoth : Oui, il a fait du très bon boulot. On se retrouve à l'arrivée avec un album de Brutal Death dans lequel tous les instruments sont audibles et discernables, et c'était une priorité pour nous.
Gordon : J'arrive encore à écouter l'album, donc ça veut bien dire que c'est pas trop mal en qualité sonore. Il y a quelques trucs que j'aurais fait autrement, mais bon... c'est toujours comme ça. On rectifiera sur le second album.

Le premier album, en général ça représente toujours quelque chose de particulier pour un groupe. Quels étaient vos souhaits et/ou vos attentes, avec ce premier album ?
Gordon : Pour moi ça représente trois ans de boulot personnel, à chercher des musiciens assez bons pour assurer les parties, et crois moi, sur Montpellier, ils courent pas les rues les deatheux! Après pour les autres, le projet est assez frais, vu que le groupe c'est lancé fin 2009. Je sais pas trop comment ils voient tout ça.

Personnellement, j’ai pris une énorme baffe, avec ‘Beyond Phobia’.
J'y retrouve tout ce que j'aime (brutalité, mélodies, efficacité, ambiance), sans les fréquents effets de bords (redondance, démonstration technique impersonnelle/soporifique, essoufflement).
D'où ma question piège : c'est quoi, le secret de votre potion magique ? Comment faites-vous pour aboutir à un résultat aussi cohérent et équilibré ?

Melmoth : Que ce soit pour la démo, comme pour l'album, l'expression qui ressort de quasiment toutes les chroniques, c'est la « baffe », la « claque dans la gueule ». J'en déduis que ça doit vraiment être le sentiment qui se dégage à l'écoute de 'Beyond Phobia'... Et ça fait super plaisir!

Gordon : Tout est résumé dans ta question.
Je ne cherche pas à montrer que je sais bien jouer de la guitare. Je sais ce dont je suis capable, et, question égo, je suis tranquille, je ne suis pas là pour prouver quoi que ce soit techniquement. Je suis là pour faire des chansons de qualité. Ni plus ni moins. Donc des fois c'est technique, d'autres fois non, il y a des ambiances, de la brutalité et de l'efficacité, comme tu as dis. Je me fous de ce que fait le voisin, je fais la musique que je veux.
Et j'ai des goûts variés et souvent bien loin du Metal. Avant tout, on doit pouvoir chanter les riffs. Les mélodies auront toujours LA place principale dans Antropofago. Le tout est de bien placer les blast beats. Trop de blast tue l'intérêt. Des variations vient l'intensité.
Melmoth : Je crois qu'avant tout, le secret, c'est de garder une certaine ouverture d'esprit, et de ne pas s'enfermer dans des « codes » musicaux. On n'est pas là pour faire le même album que untel ou untel, cela ne sert à rien... L'innovation est un maître-mot dans notre processus de composition, autant pour Gordon au niveau des mélodies, que pour moi au niveau des textes que j'écris, de ma manière de les placer, et des samples que j'ajoute aux morceaux.

A l’écoute de 'Beyond Phobia' on ne peut s’empêcher de penser à la scène Brutal Death américaine, qui produit des clones à la chaîne ...
Et on a le sentiment qu'Antropofago est décidément un cran au dessus. Que représente cette scène pour vous, plutôt source d'inspiration, ou d'écoeurement ?
Gordon : Toute cette scène me gave profondément... les mecs sont en solo du début a la fin... Et la musicalité, la dedans? Les chansons? A un moment il faut arrêter de se branler la nouille, c'est pas parce que tu joues vite que ta musique est intéressante...

Je crois que la thématique de ‘Beyond Phobia’ s’articule autour de l’exploration des différentes peurs de l’être humain ; chaque titre étant basé sur une phobie précise.
Peux-tu nous en dire plus ? La raison de cette thématique, les principales craintes abordées ...
Melmoth : Oui, en effet, 'Beyond Phobia' s'articule autour des phobies. Pour une raison de cohérence avec le nom du groupe, on avait axé les lyrics de la démo sur l'anthropophagie, ainsi pour que les titres sortis entre la démo et l'album. Là, avec 'Beyond Phobia' on essaie de s'éloigner un peu des clichés gore du Brutal Death, en essayant d'y insuffler un peu de réflexion sur la nature humaine, et l'exploration de tous ses aspects, notamment les plus sombres. C'est donc par les peurs que nous avons décidé de commencer.

Je crois également que vous avez en tête de poursuivre l'exploration de ce thème sur votre prochain album ?
Melmoth : Hum, non, pas exactement, mais il en sera la suite logique. Dans cet album (baptisé provisoirement 'ÆRA DEMENTIÆ') nous explorerons les folies, en commençant par « Paranoid Visions (Part II) », qui fera le lien avec le premier album.


Avez-vous axé les textes autour des compositions, ou bien est-ce la musique qui s'est calquée sur les thèmes des paroles ?
Melmoth : J'écris mes textes une fois que le morceau est entièrement terminé. Ce procédé permet de faire en sorte que la structure naturelle du morceau, tel qu'il a été composé, ne soit pas dénaturée. Et ça me permet aussi de m'imprégner de l'ambiance de chaque morceau, afin d'y insérer le thème adéquat.
Tu parlais du secret pour avoir « un résultat cohérent et équilibré », ça en fait peut-être un peu partie...

Vous aviez eu d’assez bonnes critiques sur le net, avec votre précédente démo (éponyme). Il me semble qu’il en est de même avec l'album. Que représentent pour vous ces chroniques/avis publiées sur des blogs, webzines ou sites perso ?
Est-ce que vous y accordez une réelle importance, ou bien les avis des "pros" (presse papier spécialisée) vous semblent-t-ils plus « importants » ?
Gordon : Ben euh... dis moi si je me trompe... le mec qui écrit dans un magazine papier, il fait pipi et caca comme toi non? Alors pourquoi son avis serait plus important que le tien, toi qui écris pour un webzine ? :D Seule la passion de la musique doit diriger l'avis.
On a eu des bonnes critiques, des très bonnes critiques, une ou deux où bon... tu te demandes ce que le mec écoute d'habitude... :D Mais on peut pas toujours être d'accord, on joue le jeu, et si on nous donne l'occasion de défendre notre point de vue, on le fait avec respect.

D’ailleurs, avec la démocratisation d’Internet dans nos mœurs, les pratiques ont évoluées, apportant certains avantages et inconvénients.
A quel degré Internet vous a aidé et permis de vous faire connaître ? Imagineriez-vous faire la même chose sans les outils Internet et informatiques ?
Gordon : Avec presque 45 000 écoutes sur notre myspace en quelques mois, on peut dire que ça nous sert grandement ! Après, c'est sur il y a des cotés moins positifs, mais soyons honnêtes : Si on voulait vendre des millions d'albums, est-ce qu'on ferait du Brutal Death ?? J'espère juste qu'on vendra un peu de cd pour nous permettre d'avancer tranquillement. Payer le studio pour le second album. Pas plus. Je suis plutôt réaliste comme garçon.

J’ai cru comprendre que vous aviez signé un partenariat avec un label hollandais, Miceli Records. En quoi consiste ce partenariat, quelles en sont les finalités ?
Melmoth : Les gars de Miceli Records sont venus nous chercher via myspace. Encore une fois, merci internet... Ils ont été emballés par la démo, et nous ont proposé de distribuer l'album. On a une relation assez libre avec eux, c'est plus un distributeur, finalement, qu'une maison de disques à part entière. Liberté des deux côtés, ça nous va bien.
Pour l'instant, nous n'avons pas trop de retombées pour évaluer leur travail, mais si ça marche bien avec eux, peut-être signerons-nous pour le deuxième album.

On ne peut nier que vous êtes assez ‘technique’ dans votre exécution et votre style musical, qui, s’il laisse la brutalité s’exprimer, demeure très travaillé.
Que ce soit les instruments à cordes, à caisse ou à voix, vous avez tous une sacrée maîtrise instrumentale. Comment et à quelle fréquence vous entraînez-vous respectivement ? Travaillez-vous votre technique en dehors des répèts ?
Gordon : Vu qu'on répète tous les deux mois, il y a intérêt à ce qu'on s'entraîne à la maison... Antropofago est avant tout un groupe où les membres s'exercent chez eux. On va en répète pour mettre tout ça en place. Mais tout est écrit avant. Donc oui, gros travail à la maison pour tout le monde. C'est aussi pour ça que j'ai embauché des musiciens a l'aise techniquement. Pas de mauvaise surprise a l'arrivée comme ça.

Concernant les beuglements, je trouve que Melmoth évolue dans un style bien particulier ... Comment en est-tu arrivé à hurler de cette façon, par choix ou naturellement ? As-tu une ''technique' particulière pour crier ainsi ?
Melmoth : Oui, c'est un type de chant qu'on retrouve peu dans du Brutal Death. Je me sens en effet plus proche de Jeff Walker (Carcass) que de n'importe quel chanteur de Brutal Death. C'est à la fois un choix et quelque chose de naturel. Chanter de cette façon m'est venu naturellement, c'est en fait une évolution toute simple du chant Thrash traditionnel (à la Sepultura, par exemple), de plus en plus poussé au fil des années. Et l'originalité qu'apporte ce chant au sein d'un combo Brutal Death fait que par choix, je n'ai pas envie d'imiter les autres en faisant des growls inaudibles, du pig-grunt, ou des choses entendues mille fois.
Si un jour, un morceau me donne envie d'y mettre une partie en chant clair, pourquoi pas? C'est pas parce que les autres font quelque chose qu'il faut absolument la reproduire. Antropofago a une patte, un style, qui vient en partie de cette voix particulière.

Les concerts sont souvent une bonne façon de faire parler de soit tout en se défoulant un peu. Il ne me semble pas qu’Antro ait effectué beaucoup de dates jusqu’à présent.
Est-ce quelque chose que souhaitez (ou souhaiteriez) développer un peu plus, ou bien les concerts ne sont-ils pas votre priorité ?
Gordon : On a mis du temps à avoir un line-up prêt pour le live. On a eu un changement de batteur et ensuite un changement de guitariste. Là, ça y est, on est prêts, mais maintenant, les live ne se présentent pas trop, ou sont annulés. Donc on prend notre mal en patience, et j'en profite pour finir de composer le second album. Nous sommes un jeune groupe, même si on a tous un passé solide de musiciens. Ça viendra, je le sais. On a le temps.

Où vous éclatez-vous le plus : lors du processus de création/enregistrement, ou bien sur scène ?
Gordon : J'adore composer, je déteste enregistrer, et j'adore le live. Le seul live qu'on a fait, on s'est vraiment éclaté! le public a été super réceptif, c'était la guerre! Vivement qu'on remette ça...
Melmoth : La scène, c'est vraiment ce qui nous prend les tripes. Tout ce que l'on fait, c'est pour la scène. On ne fait pas des lives pour vendre des albums, on fait des albums pour pouvoir les jouer en live.

Quelle est l’actualité du groupe, actuellement : planification de dates de concerts, écriture de morceaux, farnienté ..?
Et niveaux projets, à moyen et long terme, vous avez des envies, des souhaits particuliers ?
Gordon : Comme j'ai dis plus haut, je finis l'écriture du second album. On regarder pour des dates. On est en train de regarder pour faire un second clip, et on compte bien sortir le second album début 2012.

Qu'est-ce qu'on pourrait vous souhaiter de mieux ? Avoir Gorod en première partie d'un de vos concerts ? Ou d'ouvrir sur la prochaine tournée européenne d'Obscura ... ?
Gordon : Gorod en première partie d'un de nos show ? Hérésie!!! On ouvre pour eux quand ils veulent, sur le temps de tournée qu'ils veulent, et avec le sourire! C'est LE groupe de Death français que j'aime. Technique, mélodique... excellent.
Pour Obscura, pareil. Quand ''Comsogenesis' est sorti j'étais en train de composer la fin du premier album. Et j'ai eu deux réactions : déjà une grosse claque dans ma gueule!! Et ensuite, le sentiment de me dire que le Brutal Death avec des mélodies avait une bonne place à prendre sur la scène extrême, et ça m'a beaucoup rassuré.
Soyons réalistes, on a plus de chance d'ouvrir pour Gorod que pour Obscura ;)

Puisque ‘Beyond Phobia’ traite de différentes phobies de l’être humain, je vais me confier à vous, j’ai une phobie : celle d’avoir oublié d’aborder certains sujets dans cette interview ...
Est-ce qu'il y a un point ou un sujet que j'ai oublié d'aborder, et que vous avez à cœur de préciser (artwork, histoire du groupe, changements de line-up, ...) ?

Gordon: Oui, la pochette de ''Beyond Phobia'... ! J'adore notre Artwork !! (NdJU : oui, moi aussi j'approuve !! ) C'est Vincent Cassar (Unreal visions) qui s'en est chargé, et il fera aussi le second.
Melmoth : Cette pochette nous ressemble, puisqu'elle s'éloigne elle aussi des clichés Brutal Death. J'y retrouve un peu le sentiment d'oppression qui se dégage de l'album. Et à l'intérieur du livret, les photos du groupe ont été réalisées par l'artiste montpelliéraine Buffet Froid, qui a fait du très bon travail elle aussi.

Et d'abord, vous, personnellement, c'est quoi votre phobie principale, celle qui vous empêche de dormir la nuit .. ?
Gordon : Le seul truc qui m'empêche de dormir la nuit, c'est mon fils Léo qui vient de naitre. Et je t'assure que même pour un biberon à 4h du mat', je suis content de me lever!! Et les couches pleines de merde, c'est Brutal Death comme concept !! ;)

Un grand merci pour votre disponibilité et vos réponses, et un grand merci également pour cette baffe implacable qu’est ‘Beyond Phobia'
Je vous laisse le mot de la fin, vous pouvez raconter tout ce que vous voulez, je ne censurerais pas ..
Gordon : Merci à toi pour cette interview, pour la chronique, merci à tous ceux qui nous supportent ! La scène française se porte bien avec des groupes comme INSAIN, VEILS OF PERCEPTION, DETOXED, WHISPERING TEARS, arrêtez de cracher systématiquement sur les produits français, soyez chauvins, vous l'êtes sur tant d'autres chose inutiles...

Melmoth : Restez à l'écoute, sur http://www.antropofago.net pour vous tenir informé de la sortie physique de l'album, ainsi que pour les dates de concert. Merci à VS Webzine de nous accorder cet espace de liberté, et merci aux metalheads qui nous soutiennent. Stay brutal !