Aymeric et Nico - PRYAPISME par PAMALACH 77 - 2465 lectures
Pryapisme n'est pas simplement ce groupe fou furieux qui a réussi à sortir une des meilleures pochettes de l'année. Il n'est pas non plus simplement ce groupe qui est un gigantesque bouillonnement de folie -folie... il est aussi un groupe qui a une langue et un sacré sens de l'humour. VS a été chercher son chat avec les Pryapisme et a trouvé deux musiciens pour qui la passion n'est pas un vain mot. Vamos !
Tout d'abord, salut les Pryapisme. Je ne me remets toujours pas de la pochette de votre album. Comment vous est venue une idée aussi fantastique ? Aymeric-Salut! eh bien pour le chat, il y a plusieurs raisons à cela : la première est que nous répétons et enregistrons dans une chatterie peuplée d'à peu près une vingtaine de chats tout le temps. Le chat sur la pochette, Tabou, était un peu la mascotte, il pissait allègrement sur nos instruments, du coup lors de sa mort on a voulu lui rendre hommage en le mettant sur l'album. On a essayé plusieurs autres artworks, il y a eu pas mal d'essais mais rien qui nous convenait à tous, du coup lorsqu'il a fallu décider d'une pochette, on a demandé d'utiliser une photo de Tabou qui a posé pour un photographe pro (le talentueux Jerôme Pallé) dont le but premier était de faire des photos pour des magazines et des bouquins sur les félins. Et on est tombé d'accord quand on a vu la photo, ça collait nous semblait-il avec la musique.
Nico-De surcroît, "holocauste" dans le dictionnaire signifie aussi "le sacrifice d'un animal à la fourrure unie" ce qui collait bien avec Tabou. Et la sobriété de la pochette contraste agréablement avec le bordel de la musique. Petit détail qui tue, Tabou sur la pochette est en train d'uriner sur le matériel de Jerôme le photographe, ce qui explique son air bougon et renfrogné de gros chaton mignon.
Pensez-vous que le chat est un animal subversif ? L'animal du metal en quelque sorte. Aymeric-Je ne sais pas si le chat est l'animal du métal particulièrement mais je trouve que le chat a quelque chose de musical, et surtout de très changeant, il peut être très beau, gracieux et puissant et en même temps avoir un côté grotesque, presque ridicule. De tout temps le chat a été un animal à part, il a souvent été vénéré, ou alors craint, mais il ne laisse pas insensible, de la à dire qu'il est subversif, je ne sais pas mais je trouve qu'il colle plutôt bien avec le métal et certaine musique sombre. Le temps des loups et des dragons est révolu, maintenant ce sont les chatons qui sont "evil".
Nico-La question est surtout "le metal est-il une musique subversive?" ce que je ne pense pas. Mais le chaton a les cheveux propres, il glande pas mal à la maison et passe son temps à faire chier les autres en faisant le malin ce qui le rapproche beaucoup du metalleux moyen (je m'inclus dedans hein).
Votre musique est un gigantesque bain de musique toutes plus différentes les unes que les autres. Comment organisez-vous un tel bordel ? Aymeric-L'organisation des morceaux vient assez naturellement, on part souvent d'une idée et on brode autour selon nos envie du moment jusqu'à ce qu'on soit contents du résultat, peu importe le style en fait, on s'en fout un peu que ce soit le bordel tant que ça nous plaît mais tout ça prend énormément de temps car si la composition peut être plutôt rapide, les arrangements sont un vrai casse-tête pour arriver à quelque chose qui colle tout a fait à notre idée. Le fait est qu'on n'a pas de ligne directrice pour le groupe, on ne dit pas "Tiens, on va faire du bluegrass avec des grattes saturées!", on a des moments où l'on se retrouve pour composer ensemble, on boit du pinard et on bouffe du fromage et on fait ce que l'on sent sur l'instant, c'est pourquoi notre musique peut être à certains moments assez sombre et à d'autres plutôt humoristique, et même parfois les deux. On fonctionne sans doute aussi avec beaucoup d'images, quand on en parle les parties sont moins 'hip hop dark symphonique" que "east coast dark vador". On a des idées d'images ou d'ambiances et on tente de les mettre en musique.
Nico-Ce qui est certain c'est qu'on tâtonne beaucoup avant de trouver des trucs intéressants. Et quelques fois même on ne trouve pas de mélange satisfaisant et on essaie de partir sur une autre idée. Vu que je suis la Drama Queen du groupe, on se prend la tête assez régulièrement aussi, ce qui donne l'ambiance bien malsaine qui se dégage de certains titres.
Pouvez-vous nous dire comment est né le groupe ? Aymeric-En fait le groupe a été monté par deux copains de lycée (Ban et moi), on a commencé il y a 10 ans, et non le but premier n'était pas de draguer les minettes mais bien de faire du bruit dans le garage. Ensuite avec le temps, il y a eu pas mal de personnes qui se sont greffées au projet puis le groupe a vraiment trouvé son identité avec l'arrivée de Nico il y a 4 ans. Même si le groupe est aujourd'hui un trio, la participation d'Alex à la basse et au violoncelle a également bien compté pour donner une couleur plus instrumentale au disque. Dès le début, on voulait faire une musique assez personnelle sans forcement chercher d'étiquette précise mais plutôt se donner l'occasion de jouer avec l'ensemble des influences des musiques qu'on écoute et de faire des ponts entre des ambiances différentes qui a priori ne se rencontrent pas. On a développé ces idées avec le temps et on s'est enrichis avec les différents musiciens qui sont venus jouer avec nous et on a finalement trouvé une sorte d'équilibre en trio.
Nico-Je n'ai malheureusement pas pu assister à la naissance du groupe mais les quelques preuves restantes comme la démo "Or bleu" et ses breaks jazzy à la batterie électronique (avec au moins deux vélocités: coups puissants et coups de fiottes) valent encore le coup d'être entendus aujourd'hui…
Il n'est pas rare que les groupes qui jouent le même style de musique que le vôtre soient des bêtes de technique. Est-ce que le Shred est quelque chose qui vous plaît ? Aymeric-Non pas particulièrement, au contraire cela nous fait plutôt marrer, on trouve cela assez crétin et c'est pourquoi il y a des parties comme ça dans l'album, c'est juste une vaste blague. Nico ne peut pas s'empêcher de branler son manche avec des chorus ultra cliché dès qu'on lui balance un accord majeur, la plupart du temps on lui dit "non Nicolas, enfin…" mais des fois, quand on vient de finir une partie de Volfied ou windjammers, on lui accorde le droit de mettre sa partie "shred kéké"(NDLR : Bien belle expression) dans une compo. Il ne faut pas en abuser mais une fois de temps en temps, ça recentre le débat : lorsqu'on bataille sur comment faire sonner la 4ème croche de la 22ème mesure en mode phrygien sur la partie "Kanye West meets la pub de maison du café" , au lieu de disserter sur le bien fondé de notre évolution harmonique par cadence de quinte augmentée, on met un bon chorus bien gay et on n'en parle plus.
Nico- Oui je plaide coupable pour la branlette. Mais c'est une vaste supercherie vu que les autres branlent un max tout le temps et font style "haha c'est le gros bigleux qui branle son manche homo" juste qu'ils n'ont pas le courage d'assumer le LEAD. Oui, le LEAD, cheveux au vent, le floyd prêt à péter la première corde de sol venue, le switch de la wah qui ne s'actionne pas… tout ce danger, cette folie, ce sacerdoce qu'est la guitare LEAD. Tiens bon, anecdote de folie: sur les 3 soli de l'Album, j'étais saoul.
Quelles sont vos influences en matière de musique ? Aymeric-Je pense que par rapport à nos compositions dans Pryapisme Ban apporte une grosse influence de musique classique et contemporaine, Nico plutôt une influence métal et rock progressif des 70's et moi plutôt l'influence des musiques électroniques, indus et jazz. Sinon on écoute tous beaucoup de musique, je crois que à part la chanson qui n'est vraiment pas notre tasse de thé (et encore…), on est influencés par à peu près tous les styles, de la bossa au black metal, du 8bit au krautrock, de la dance au klezmer ou de l'indus au be-bop. Peu importe l'étiquette tant que ça nous fait réagir, je crois qu'on aime autant John Zorn que Daft Punk.
Nico- J'ai tendance à aimer autant "Cindy Cendrillon 2002" que "les plus beaux hits par Cazoul vol.1".
Vous semblez avoir une forte envie de faire quelque chose de personnel que cela soit au niveau de votre musique, image et même présentation. Est-ce que le classicisme ambiant vous fatigue un peu ? Aymeric-C'est vrai que je suis personnellement assez lassé de pas mal de chose qui passent à la radio ou à la TV et je ne trouve pas grand intérêt dans la plupart des musiques mainstream, où j'ai un peu l'impression d'écouter des productions ultraformatées, cela dit, en cherchant un peu il me semble aussi qu'il y a de plus en plus de groupes qui sortent et quand on arrive à faire le tri, il y a une énorme production de projets originaux, qui sont justement tous sauf classiques. Il faut savoir chercher mais grâce à internet, je découvre des projets monstrueux toutes les semaines et ce peu importe le style. Il est sûr par contre qu'on ne souhaite pas faire quelque chose de formaté, ou alors volontairement pour changer d'ambiance juste après. On essaie dans la mesure du possible de ne pas être consensuel ; avec une pochette originale qui ne laisse pas entrevoir ce que l'album contient par exemple. Pour la présentation, on n'est juste pas de grands communicants, loin s'en faut, du coup on essaie juste d'être naturels d'où les blagues pourries et l'humour bas de plafond. C'est juste qu'on ne saurait pas vraiment faire autrement. On essaie de ne pas trop se prendre au sérieux tout en proposant une musique qui nous plaît.
Il semble y avoir une "scène" localisée chez vous. Peux-tu nous en parler un peu et selon toi, à quoi doit-on cette émergence ? Aymeric-Oui, il paraît que Clermont est la ville du rock, j'entends ça à longueur de journée mais je ne suis pas sûr de comprendre vraiment. Il est sûr par contre qu'il a énormément de musiciens sur Clermont, et de vraiment talentueux, du coup il y a énormément de groupes vraiment intéressants, mais pas seulement dans la veine rock- il y a pas mal de projets métal, jazz ou électro qui mériteraient vraiment plus d'écoute. Des groupes comme Dr RAVIOLI, TARANG, KUNAMAKA, BABAYAGA ou DRIFTING BOX CELEBRATION par exemple sont des projets clermontois vraiment excellents. Clermont n'est pas une très grande ville mais la proportion de musiciens est extraordinairement grande, il y a tellement de groupes que dans le tas il y a forcement du très bon. il me semble que le nombre de groupes recensés par rapport à la densité de population est un des plus importants de France, cela explique sans doute en partie l'importance de cette scène, qui manque tout de même cruellement de lieux de répétition et de salles de
concert.
Nico-Moi qui suis le seul non-Clermontois du groupe, je dois dire que cette ville est plutôt chouette, y a pas mal de concerts tout le temps avec des gens plutôt gentils et ouverts. Y a même l'ami Igorrr qui vient de s'y installer, lassé de la grisaille parisienne(NDRL : Pléonasme). C'est dire.
Est-ce que vous seriez capable de composer un morceau "classique" dans sa forme ? Aymeric-Je pense qu'on serait capable de composer un truc bien classique avec couplet refrain pont solo de 3min30 mais cela ne nous amuserait pas vraiment au-delà de l'exercice de style. Je crois qu'on écoute tellement peu de ce genre de musique, qu'on serait quand même bien emmerdés pour faire quelque chose d'écoutable. Et pis il nous faudrait sûrement du chant. Amène-nous Britney Spears et on veut bien essayer de lui faire un tube… ou Chantal Goya sinon. On enfilerait des bottes en croco, du vernis rouge pute, on mettrait des cravates sur nos vocodeurs et le tour est joué, ah non merde il faut quand même écrire un morceau…
Nico-Je suis assez sûr qu'on aurait quand même du mal à écrire des lignes de chant "tube". C'est dur d'écrire de la vraie bonne grosse merde. Y faut du métier et mettre sur sa carte de visite "auteur-compositeur-parolier SACEM".
L'univers cinématographique semble avoir une influence certaine sur votre musique. Est-ce que c'est un vecteur que tu apprécies beaucoup et quels sont tes films de prédilection Aymeric-Oui on est tous de gros fan de cinema, et les ambiances cinématographiques nous influencent beaucoup dans notre travail musical, on adorerait d'ailleurs faire de la musique de film. Il est d'ailleurs quasi systématique que nous regardions un bon film en fin de répèt, ou un nanard putride à défaut de se mettre d'accord. Pour les influences je citerai en ce qui me concerne JODOROWSKY, SION SONO, TSUKAMOTO, JEUNET et CARO, JEAN COCTEAU, GASPARD NOE et "Les Maîtres de l'Univers" avec Dolph Lundgren qui est un véritable chef-d'œuvre de cinema transgressif, ou la vision structuraliste lacanienne côtoie avec brio la pensée fondamentale de kierkegarrd tout en énonçant un pamphlet rétrograde mais néanmoins sympa sur la théorie des supercordes.
Nico-Tiens quizz cinema pour tes lecteurs: dans quel chef-d'œuvre du cinéma anglo-saxon se trouve la réplique "bang bang baketi bang bang... bang...". Vous avez 1 heure.(NDLR : Le gagnant se verra offrir une heure de coaching Muscu/Kickboxing avec Seb on Fire)
Arrivez-vous à reproduire facilement en live ce que vous avez gravé sur disque ? Aymeric- C'est là où le bât blesse, pour certains morceaux, c'est jouable en les réarrangeant un peu, et grâce aux machines on peut balancer pas mal de samples. Mais certains sont trop compliqués à jouer en live à trois vu le nombre de pistes utilisées sur l'album. Il faut admettre que le passage en live est relativement compliqué vu qu'il faut changer de son toutes les 20s, donc Nico avec sa guitare joue des claquettes sur ses pédales, et finit de temps en temps par jouer une partie métal en son clair, Ban se goure et finit par jouer sa partie synthé 80's avec un son de vibraphone et il m'arrive hélas de balancer des sons de cheval mort à la place d'une partie 8bit, mais heureusement avec la batterie il m'arrive rarement de jouer des blast sur un chabada. Bref c'est assez laborieux, le public doit voir des gougouttes qui perlent sur nos visages poupins à chaque changement de morceaux. il y a quand même des morceaux qui fonctionnent bien en live, parce qu'il y a plus d'énergie alors que le disque reste quand même un peu froid sur certaines parties. On essaye de composer le prochain album avec l'idée de le jouer en live directement.
Nico-On en chie des fois pas mal, mais hop, un coup de vibrato et ni vu ni connu je t'embrouille. C'est vrai qu'on essaie pour le nouveau disque de mettre moins de pistes partout, qu'on ait pas à répéter 6 mois pour réapprendre à jouer les morceaux enregistrés. On verra le résultat final, rendez-vous dans 6 ans à la fin du mix.
Je suis sûr que vous devez à la fois beaucoup déconner en repet mais aussi être très sérieux quand vous vous attaquez aux arrangements de certains morceaux. Comment gérez-vous cette schizophrénie ou plutôt cette bipolarité des émotions ? Aymeric-Oui je crois que tu as bien cerné les personnages, tout dépend de
certains facteurs, si la console est branchée, c'est effectivement délicat de s'y mettre, tu comprends bien qu'il faut à tout prix finir Probotector sans continues avant la fin de la journée parce que sinon on aura perdu notre mojo! En général, quand on s'y met, on peut tout aussi bien avancer à fond sur un morceau en quelques heures que mettre une journée entière sans avoir enregistré quelque chose de bien, je ne sais pas bien à quoi ça tient, si ce sont les chats qui nous donnent de l'inspiration, la météo ou un bon Bordeaux cru bourgeois, mais des fois ça marche et des fois non, et on sait maintenant que certaines fois on ne sortira rien de bon, et on file direct noyer nos remords dans des shoot them up.
Nico- On procrastine à mort quand même. Mais bon c'est la faute de Konami.
Qu'est-ce que veut dire votre nom au fait ? Aymeric-Le priapisme est une maladie pas franchement réjouissante qui offre à son bénéficiaire la faculté d'avoir une érection continue pendant de longues et douloureuses journées, autant dire que même si ça paraît particulièrement "kikoo lol", il semble que ce soit un vrai supplice et nous compatissons allègrement à la douleur des concernés. Autant te dire tout de suite que nous avons trouvé le nom il y a longtemps, alors que nous étions jeunes et influençables, au cours d'une soirée brainstorming particulièrement arrosée, les choix au final étaient: Chocopops, Les fleurs de montagne (je l'aimais bien celui-la), Patrick Topel et les Pas Tractopelle et Pryapisme, bon, après mûre réflexion on a choisi PRYAPISME.
Le mot de la fin est pour vous. Aymeric-Salut à toi, et merci pour tout le poisson.
Nico- Achevez- moi à l'anthrax,
que j'atteigne le climax,
sur un solo de sax.