Je crois que c’est la première fois que j’entends parler d’un groupe croate. Alors oui, il y en a près de 300 répertoriés sur Metal Archives, mais c’est la première fois qu’un groupe de ce fier pays arrive entre mes pognes. Il faut dire que la Croatie est plus connue pour ses plages, ses criques et îles, ses monuments, ses putes et ses clubs de foot que pour ses groupes de metal. Et c’est là qu’on en vient à (DRAMA). Quintet provenant de Zagreb et formé en 2004, le groupe a pris son temps pour peaufiner ses compos, puisque "Zastor Tišine" est leur premier album, après une démo en 2006. Premier album sorti sur le label français Altsphere (ROTE MARE, SURTR). Chose originale, toutes les paroles sont chantées en croate. Le titre de l’album signifie d’ailleurs "Rideau de silence", et les titres, parmi d’autres "En contemplant la Tristesse", "Pluie", "Vide de l’Âme", "Jour Nouveau"… Autant dire de la joie de vivre. Pas étonnant que le groupe ait choisi le doom/death pour s’exprimer.

Après une intro romano à base d’accordéon et de violoncelle, j’ai commencé à craindre le pire. D’autant plus que le premier titre après cette intro débute avec un son très étouffé. J’avoue, j’ai pensé « qu’est-ce que c’est que ce groupe du tiers-monde qui atterrit dans ma platine » ? Heureusement, après seulement 20 secondes, le doute est dissipé. Dans le tiers-monde aussi, ils ont des studios de qualité. Le son, bien qu’un poil faiblard, fait ressortir tous les instruments, notamment la basse, et reste clair et propre. Le chant, principalement growlé ressort bien, sans être trop en avant.

Comme je le disais, (DRAMA) œuvre dans le doom/death. Mais le groupe a sa propre vision du genre. Partant d’une base plutôt old-school du type premiers albums de ANATHEMA/PARADISE LOST sans le côté niais de l’époque (pas de méprise, je l’adore ce côté niais), le groupe incorpore des éléments un peu plus rentre-dedans ou atmosphériques. Le tempo, sans être vraiment très rapide, est plutôt mid-tempo tout le long de l’album. On est assez loin du doom/death pachydermique et ultra lent de certains groupes. Les parties atmosphériques sont les plus nombreuses. Dès le quatrième titre (dont je vous épargnerai le nom, car en Croate), une longue plage sans distorsion et avec chant clair assez approximatif fait son apparition. Ce titre est rapidement suivi par une plage plus lourde et pesante. Cette plage est d’ailleurs soutenue par un violoncelle (violon ?). Dès le sixième titre, l’intensité retombe un peu avec cette ballade à deux voix, dont une chanteuse. Mais si l’intensité retombe, c’est pour laisser place à une émotion slave froide et poignante. Les morceaux suivants sont soit principalement atmosphériques, soit doom/death avec des passages plus calmes et éthérés ("Kiša"). Le quintet de Zagreb impose donc tout au long une mélancolie contagieuse, d’autant plus accentué par le contraste entre les parties pesantes et celles plus aériennes, mais encore plus tristes.

Cette dualité, doom/death avec passages plus atmosphériques/calmes permet de rompre un côté monotone imposé par une exécution propre, mais sans réelle originalité. (DRAMA) connaît ses codes, qu’ils soient du côté lourd ou calme, et les exploite parfaitement. Malheureusement, pendant les 67 minutes et 12 titres de l’album, on finit par regarder sa montre. Si la dualité permet de retarder au maximum cette situation, elle arrive inexorablement. La faute à un classicisme un peu trop présent. A une exécution banale. A une musique codifiée et finalement sans surprise. Pourtant, ce n’est pas mauvais, loin de là. Je me suis surpris plus d’une fois à dodeliner de la tête. Chaque écoute s’est faite sans déplaisir. Mais il manque un brin de folie, de surprise, pour transformer cet album de « c’est pas mal » à « ouais, ça le fait ». Mais pour un premier essai, c’est très encourageant. Comme quoi, il n’y a pas que de la mer turquoise et des maillots de foot à carreau en Croatie…


Rédigé par : Skay | / | Nb de lectures : 12682