MORBID ANGEL (+GOROD+EXECUTION) – 9 Novembre 2014 à Limoges (CCM John Lennon)

C'est par un dimanche d'automne bien pluvieux et bien sinistre que Morbid Angel, légende mondiale du Death Métal, précurseur du style avec Death, Obituary ou Deicide vient enfin nous rendre visite dans la capitale Limousine de la porcelaine moche et de...rien d'autre.
Mieux vaut tard que jamais ! Et s'il y a des gens qu'on peut remercier pour leur persévérance et leur longévité ce sont bien Bruno Blancher et toute l'équipe de Execution Management qui font vivre la scène Métal Limousine depuis 23 ans !
Grâce à ces passionnés, le public Limougeaud a pu se délecter de concerts de Cannibal Corpse, Marduk, Napalm Death, Cradle Of Filth, Entombed, Arch Enemy, Mayhem, Obituary...et j'en oublie ! Les râleurs et ceux qui clament qu'il ne se passe jamais rien à Limoges en seront pour leurs frais.
L'association souhaitait depuis longtemps accrocher Morbid Angel à son tableau de chasse, c'est désormais chose faite. 400 personnes se sont donné rendez-vous au CCM John Lennon pour accueillir la légende de Tampa.

Quitte à se faire plaisir en accueillant Morbid Angel autant assurer également la première partie, car Execution, c'est également un groupe formé en 1989, ce qui les range d'emblée parmi les précurseurs du Thrash/Death Français en compagnie des Loudblast, Supuration ou Mercyless...certains se rappellent sans doute de leur présence sur la mythique compil' Brutale Generation ou de Eternal Dreams, album concept sorti en 1999. Et si le groupe a connu une période de flottement, il n'a jamais lâché l'affaire. C'est justement sur Ocean, extrait de Brutale Generation qu' Execution fait son entrée. L'accueil du public est chaleureux, le groupe n'ayant plus joué en live depuis deux ans. Il s'agit là de leur premier concert avec un line up rafraichi et l'enthousiasme est palpable parmi les membres du groupe. Execution pratique un Death Métal Atmosphérique où les claviers occupent une place importante, créant une ambiance sombre et mélancolique. Si les racines Thrash et Death Métal du groupe sont bien présentes, Execution pioche également dans le Heavy Métal (certains soli et harmonies de guitare) et dans le Black Métal. Comprenant de nombreux riffs aux structures complexes mais efficaces, les compos ne cherchent jamais la facilité. Dans sa démarche de piocher dans tous les sous-genres du Métal Extrême, Execution m'a toujours fait un peu penser à Misanthrope. Un concert court mais efficace laissant entrevoir d'un vrai retour de Execution. Du nouveau matériel discographique devrait apparaître prochainement.

C'est au tour des bordelais de GOROD de fouler les planches. Soyons francs : je connaissais très mal ce groupe, quelques morceaux glanés ici et là tout au plus. Etant consciencieux, j'ai écouté plus attentivement pendant la semaine précédent le concert. Sur disque j'ai eu beaucoup de mal à rentrer dans leur univers : un Death ultra technique, rapide et brutal parsemé d'influences jazz et progressives. Sur scène, ça passe beaucoup mieux, bien plus frontal et immédiat que ce à quoi je m'attendais. Le son bien équilibré, puissant sans être agressif permet d'apprécier le jeu subtil et complexe des deux guitaristes et du bassiste (qui affichera un large sourire pendant TOUT le concert). Le batteur, rapide et précis agrémente son jeu de roulements et de cassures rythmiques bien inspirés. Quelques passages plus barrés, au feeling très « Voivodien » offrent des moments bienvenus de respiration. Le chanteur fait le job et occupe bien la scène. Si Gorod est très brutal, il ne sombre jamais dans la débauche de blast beat et l'ultra agression si fréquente dans la scène actuelle. Une certaine personnalité donc et au final, un concert que j'ai plutôt apprécié.

Les roadies installent un immense logo Morbid Angel en fond de scène ainsi que deux backdrop représentant la gravure moyenâgeuse du verso de Covenant : l'ambiance de messe noire est posée !
Sur cette tournée, les Floridiens rendent hommage à leur troisième album : Covenant, sorti en 1993, chef d'oeuvre incontesté du Death Métal et accessoirement meilleure vente du groupe (500 000 exemplaires ! Les temps ont bien changés !).
Les musiciens arrivent sur scène en toute simplicité : au son d'une introduction grandiloquente, l'un après l'autre et fiers comme des dieux Vikings : Tim Yeung, Destructhor, le cousin mach...Trey Azagthoth et David Vincent, le champion du monde toutes catégories des poseurs.
Un constat s'impose dès les premières notes de Rapture : le son est monstrueux, précis, aucune fréquence n'en bouffe une autre. Les niveaux des instruments sont réglés au millimètre, le confort d'écoute sera optimal durant tout le set.
Ses énormes capacitées ayant été (à mon humble avis) sous exploités sur Illud Divinum Insanus, j'étais curieux de découvrir Tim Yeung sur les anciens titres du groupe et je n'ai pas été déçu : autant à l'aise sur les rafales de doubles pédales à 200 à l'heure que sur les ralentissements cryptiques, il est impressionnant de maîtrise et de brutalité ! Si il traite les parties de Pete Sandoval avec un profond respect, il les transcende par quelques petites touches personnelles et une frappe de mule proprement hallucinante !
Covenant sera joué dans l'ordre. Après Pain Divine, David Vincent fait le constat qui s'impose : « We still live in a world full of shit !», une belle clairvoyance qui introduit une version dantesque de ce morceau, sans doute un de mes préférés du disque !
Sur la droite de la scène, celui que je suppose être Trey Azagthoth (n'ayant pas vu son visage de tout le concert, planqué qu'il était derrière une impressionnante crinière!) déroule palm muting lourds et ravageurs et tremolo picking bien malsains dans la plus pure tradition du style. Mais c'est particulièrement sur les soli qu'il impressionne : maltraitant son vibrato et usant et abusant du tapping, il mérite largement sa réputation de guitar hero.
Morbid Angel enchaîne les titres sans défaillir, le public est visiblement conquis et s'emballe à l'annonce de l'énorme Angel Of Disease dont la mélodie diabolique restera dans toute les têtes à la fin du concert.
Destructhor, le colosse à gauche de la scène, loin de faire de la figuration, rivalisera de talent et de précision d'exécution avec Trey Azagthoth. Visiblement décidé à casser sa guitare en la soulevant à l'aide de sa barre de vibrato, il y arrivera presque sur le dernier titre, cassant plusieurs cordes d'un coup sur un solo bien furibard !
Après une version rampante de God Of Emptiness, incontournable du groupe et dernier titre de l'album, Le groupe enchaîne sur Where The Slime Live, extrait de Domination, lançant ainsi la deuxième partie du concert.

J'imaginais la suite en forme de « best of » des 4 premiers albums...tout faux !
A ma grande surprise, la période Steve Tucker sera honorée par le biais de trois titres passant en revue chacun des trois albums auxquels a participé le remplaçant de David Vincent. Excellente initiative tant cette période, bien que décriée par certains, comporte son lot d'excellents morceaux.
Mais il est vrai que la personnalité et le charisme de David Vincent sont une composante bien trop importante de l'identité du groupe pour pouvoir s'en passer. Malgré un côté poseur indéniable et un égo surdimensionné qui se voit comme le nez au milieu de la figure, le bassiste de Morbid Angel en impose grave ! Impeccable à la basse et impérial au chant, Vincent appartient à cette race de chanteurs de Death Métal en voie de disparition qui, bien que pratiquant un chant growlé, possèdent un timbre et un grain de voix immédiatement reconnaissable.
Après Existo Vulgoré, extrait du controversé Illud Divinum Insanus, le St Anger du groupe, Morbid Angel terminera son set par Immortal Rites (grandiose !) et Fall From Grace.
Rideau ! Bien que l'absence de classiques comme Chapel Of Ghouls, Maze Of Torment ou Lord Of All Fevers And Plagues...en ai laissé quelques uns sur leurs faims (dont un peu moi, j'avoue !), difficile de se plaindre de la leçon de Death Métal reçu ce soir. Au final l'enthousiasme d'avoir vu un grand groupe dans des conditions parfaites l'emportera largement.
C'est définitivement mon école ! Ce Death Métal respectueux de ses racines Thrash, privilégiant l'impact immédiat et l'installation d'ambiances troubles et malsaines à la démonstration technique et l'hyper brutalité !
Moi, mon Death Métal, je le veux gras, saignant et blasphématoire ! « Que les Goules attaquent l' église, qu'ils éclatent le saint-prêtre et qu'ils retournent la croix vers l'Enfer !!! »

SET LIST MORBID ANGEL:

Rapture
Pain Divine
World Of Shit (The Promised Land)
Vengeance Is Mine
The Lion's Den
Blood On My Hands
Angel Of Disease
Sworn To The Black
Nar Mattaru
God Of Emptiness
Where The Slime Live (Domination)
Bil Ur-Sag (Formulas Fatal To The Flesh)
Ageless, Still I Am (Gateways To Annihilation)
Curse The Flesh (Heretic)
Existo Vulgoré (Illud Divinum Insanus)
Immortal Rites (Altars Of Madness)
Fall From Grace (Blessed Are The Sick)

Tous mes remerciements à Bruno Blancher d'Execution Management pour sa disponibilité et Emmanuel « L'Infâme Supûtre »Troutaud pour les photos.