Nous vous avions parlé de "Death Metal Angola" il y a plusieurs mois déjà (et en exclu'...) avec l'interview de son réalisateur Jeremy Xido. Depuis cette date, le film a suivi son petit bonhomme de chemin et continue d'être diffusé dans les festivals du monde entier ! Mené par la motivation de son réalisateur, le film a rencontré (et rencontre encore) un bon succès critique et commercial... jusqu'à faire entendre ses rugissements au public parisien qui a eu la chance de le voir dans le cadre de L'étrange Festival 2012 avec deux diffusions exclusives couplées avec le film de Matthieu Canagier " A l'est de l'Enfer".
Je suis bien conscient que j'aurais pu vous parler du film plus tôt... mais ce n'est pas ici une simple chronique du film que Vs vous propose mais un mini dossier agrémenté de deux interviews de BLACKSOUL et BEFORE CRUSH, deux groupes ayant joué dans le film ! Entre les difficultés pour joindre les groupes et les divers problèmes qu'ils ont rencontrés pour répondre à nos interview (leur quotidien n'est évidemment pas tout à fait le même que le nôtre...) plusieurs mois ont passé... mais bon, maintenant on y est, et on ne va pas se priver de revenir sur ce film incroyable, car vous l'aurez compris, j'étais parmi les chanceux présents au "Forum des images" l'un des soirs de la projection du film.
Si vous avez lu l'interview du réalisateur Jeremy Xido sur VS, vous savez qu'il a eu l'idée de ce documentaire complétement par hasard, alors qu'il était venu en Angola pour réaliser un reportage sur la construction des chemins de fer en s'intéressant plus particulièrement aux liens qu'entretenaient les travailleurs chinois avec les travailleurs africains.
Un jour où Xido buvait un verre dans un bar paumé de la campagne angolaise il a rencontré et tapé la discute avec un certain Wilker Flores, solide gaillard dreadlocké, partageant son temps entre la gestion de son orphelinat et la musique Death Metal. Intrigué par l'évocation de ce style de musique, Xido demanda alors plus d'explications à Wilker qui lui donna rendez-vous le soir même dans un "bar" du coin pour lui faire une petite démonstration...
Le soir même, perdu au milieu de la pampa et près d'une ancienne usine désaffectée uniquement éclairée par les phares d'un camion, Wikler improvisa devant un Xido médusé une sauvage interprétation guitare/voix de SON Death metal, le tout devant une myriade de gamins et de potes rameutés pour l'occasion.
Comment se pouvait-il que le Death Metal, ce style musical brutal et typiquement occidental ait trouvé son chemin jusque dans la campagne africaine et trouvait du sens pour ce jeune humaniste profondément altruiste, travaillant tous les jours avec sa femme à donner un semblant d'avenir aux orphelins qu'il accueillait dans son "centre" ? Xido laissa immédiatement tomber son idée initiale et se mit à la recherche des autres groupes de la région... car à Huambo, il n'y avait pas que Wilker qui aimait et jouait du Death Metal.
"Death Metal Angola" parle bien sûr de plusieurs groupes de la région, mais il s'intéresse aussi à l'orphelinat de Wilker et de sa femme Sonia, et à l'organisation du premier festival de "Rock" à Huambo. Pas uniquement basé sur la musique, "Death Metal Angola" montre les ravages de la guerre avec les foules d'orphelins qui ont perdu leurs parents et se retrouvent sans ancrage et sans perceptives, égarés dans les ruines d'un pays dévasté.
L'orphelinat de Sonia et Wilker accueille donc une partie de ses enfants victimes de la guerre, mais ils n'ont pas hélas les moyens d'accueillir tous les gamins qu'ils souhaiteraient.
Ceux qui sont accueillis connaissent tous par contre la passion de Wilker pour ce qu'ils appellent le rock, et ils en donnent à la fin du film leur vision et leur interprétation à travers des poses "Air guitar" et du Headbanging furieux. Si tous n'aiment pas, la plupart trouvent cool cette façon de jouer de la musique, Wilker donnant des cours de guitare aux plus intéressés d'entre eux. Désireux de se servir du rock pour aider son pays à panser ses plaies, Wilker et Sonia se lancent dans le pari fou d'organiser le premier festival de rock à Huambo.
Devant financer le projet de leur poche, le couple réussit le tour de force de réunir plusieurs groupes "metal" du pays malgré une organisation calamiteuse, des problèmes en cascades et un destin qui semble tout faire pour que rien ne se fasse ce jour-là.
Et pourtant au final, le festival a lieu, pour le plus grand plaisir des groupes, des autochtones et des dieux du Binaires. Une putain de motivation sans faille qui donne lieu à un événement incroyable, superbement rendu à l'écran.
Si "Death Metal Angola" ne s'adresse pas qu'aux Metalleux, il va sans dire que quand on aime la musique cornue, le film en est encore plus passionnant et intéressant. Xido rencontre tout le long du reportage de nombreux musiciens et plusieurs groupes. En leur donnant la parole et en allant les filmer chez eux, il filme des scènes d'une incroyable force où les musiciens interprètent d'une manière vraiment incroyable leurs compositions survitaminées.
Alors pour être tout à fait clair, la dénomination "Death Metal" peut sembler un peu étrange quand on entend les groupes jouer. La plupart joue un metal agressif et énergique, mais je n'ai pas beaucoup entendu de Blast Beat, pas tellement de double pédale et pas vraiment de mesures complexes ou hachurées. On retrouve par contre des voix gutturales habitées, des rythmes simples mais joués très durement et des riffs guerriers et belliqueux à souhait.
Le premier groupe que l'on voit s'appelle "Blacksoul" et c'est dans leur "salle de répétition" qu'on découvre ces musiciens affables et souriant expliquant pourquoi le Death metal est LA musique qui leur correspond le mieux.
Dès lors qu'ils se mettent à jouer, le constat est sans appel, la musique est pour ces jeunes la catharsis de sentiments douloureux, le désinfectant salvateur qui vient soulager des plaies encore béantes et qui ne cicatriseront peut-être jamais. Il suffit de lire la traduction des lyrics du chanteur, l'entendre vociférer de sa voix sauvage pour comprendre que nous ne pourrons jamais vraiment comprendre ce besoin viscéral qu'ont ces mecs de jouer du metal... la musique les porte, les transcende et les élève.
La batteur de ce groupe est d'ailleurs particulièrement impressionnant. J'ai rarement vu un mec cogner avec autant de hargne sur ses toms... et plus le temps passe et plus on se dit que c'est peut-être "quelqu'un d'autre" qui cogne à ce moment-là.
Sans égaler à mon sens la force de cette séance, la plupart des musiciens de ce film nous donnent ici une leçon de passion et des leçons de vie. Comment ne pas être profondément écœuré quand on sait que l'un d'entre eux A TERMINE EN PRISON lorsque ses patrons (en l'occurrence, l'armée angolaise) ont appris qu'il jouait du Death ? Définitivement, le monde est fou.
Entre les sourires, les larmes, les joies et les peines d'un pays qui n'en a pas encore terminé avec ses fantômes et ses démons "Death Metal Angola" dresse un portrait à la fois tendre et brutal d'une génération qui tente de se remettre debout. Une véritable ode à la vie avec du gros son en bande son... le Metal c'est DÉFINITIVEMENT une musique pour tout le monde.
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Moshimosher Membre enregistré
Posté le: 13/02/2014 à 16h45 - (708)
Vivement qu'il soit en DVD ! :) (Enfin, j'espère...)
bn IP:212.243.94.245 Invité
Posté le: 14/02/2014 à 09h30 - (709)
ouaip pareil j'aimerais bien visionner ça !
Warhammer Membre enregistré
Posté le: 14/02/2014 à 10h08 - (710)
le trailer donne vraiment envie. Quand on sait ce que l'Angola a subit et subit encore...
grozeil Membre enregistré
Posté le: 15/02/2014 à 09h11 - (711)
Carrément, super trailer, j'aimerai bien voir ça aussi.
Invité IP:109.190.51.150 Invité
Posté le: 16/03/2014 à 13h39 - (789)
" j'aurais pu vous parler du film plus tôt."
quoique, certes ça donne (très) envie mais on ne peux pas le voir tant qu'il ne sera pas sorti en DVD