En prévision de l'établissement d'une SMAC dans l'agglomération Nîmoise dès 2012, la Municipalité a eu la riche idée de mettre en place une série d'actions de préfiguration visant à fédérer public et réseau d'associations locales autour de ce projet d'envergure.
La perspective de voir la vie culturelle Nîmoise sortir à court terme du créneau bodega/corrida devient une réalité. Outre l'apparition prochaine de cette fameuse salle susceptible d'accueillir des tournées aguichantes, le metalleux languedocien peut déjà revêtir ses habits de lumière et rentrer dans l'arène du XTREM RAKAN FEST. Olé!
L'association Rakan musiques à l'origine de l'événement a su tirer le meilleur parti des largesses de Nîmes Métropole ; le plateau du Campaign for musical destruction est ainsi à l'affiche du festival accompagné pour l'occasion d'une brochette de formations locales. Le cadre de la rutilante salle des fêtes de Milhaud semble un peu impersonnel au premier coup d'œil – disons fonctionnel – mais les membres de l'association occupent vaillamment les lieux pour une organisation qui se révèle rapidement sans failles. On pourra toujours ergoter sur le running order qui alterne têtes d'affiche et groupes locaux sur deux scènes sises aux extrémités de la salle, le fait est que rien n'a été laissé au hasard – jusqu'à la délicieuse bière artisanale bio disponible à la pression.
Dès mon arrivée, une charmante hôtesse m'invite à rejoindre d'autres pigis... vaillants reporters pour une séance d'interviews avec Barney. Me voilà rassuré, s'il peut parler, il peut chanter! (NdA : Barney était aphone lors de la date de Genève la veille) Autant économiser la voix de notre sémillant britannique et s'humecter de houblon devant la fin de la prestation de JOHNNY BEAVERS. L'énergie est au rendez-vous pour ce groupe entre stoner et punk-rock dont le style tranche un peu avec le reste de la programmation. Chouette attitude sur scène et joli son, on en demande pas plus à ce stade, même si la moitié du public est encore sur le parking à répandre canettes et mégots sur le parvis de la salle.
A la pause je finis par comprendre la particularité du running-order et réalise que WAKING THE CADAVER a déjà joué sur la grande scène – rien de regrettable. Plus loin, au détour d'un stand, je croise un Rotpiet ravi de l'accueil réservé à son « Death row » sur les pages de VS. La causerie est bientôt interrompue par le départ du set de MACABRE qui constituera la bonne découverte de la soirée en dépit des nombreuses imperfections du spectacle. Typiquement le genre de groupe charismatique avec cette coloration Crossover/death, un humour décalé, un chant atypique et un univers évoquant les serial killers sur le mode Cartoons. Les gars alignent quelques jolis pains, le son flirte ci et là avec la bouillie sonore mais peu importe, MACABRE dégage une réelle présence. Lance Lancioni (guitare, micro oreillette) prend le temps de présenter les morceaux et nous régale des « Nightstalker », « Nero's inferno » et autres « Vampire of Düsseldorf » de sa bande qui aligne vingt-cinq ans d'existence au compteur. Encore une discographie à choper d'urgence.
Nouveau changement de scène et transhumance du public à l'autre bout de la salle. Un duo de Vseurs taille justement le bout de gras dans le coin ; RDB et Vinzzz pour ne pas les nommer. L'occasion de mettre des visages sur l'avatar de Proust et le gif animé de Vinz/La haine. Toujours marrant de constater à quel point nos interventions sur le web nous reflètent peu, ou mal. Enfin, bref je préfère souvent les gens à leurs simulacres. Du coup, le début de RIGHT TO THE VOID m'échappe un peu. Euh...m'échappe totalement en fait. Le groupe Gardois joue quasiment à domicile et déploie son death/thrash mélodique avec aisance. Malgré tout je suis pas franchement dans le truc et de loin tout cela évoque un old-Dark Tranquillity gonflé aux hormones. Un petit pain suédois épicé à la provencale.
Dès les premières notes de « The Purge » une vibration secoue l'ensemble de la salle. Pas la peine de se demander si les gars d'IMMOLATION sont en forme ou non, ça va cartonner comme d'habitude. Bob Vigna est vraisemblablement mon guitariste (de death?) préféré, autant grâce à son jeu de scène incroyable que par l'extravagance de son phrasé. La qualité de reproduction des titres est jouissive - Majesty and decay, Power and shame, Close to a world below, World agony, Passion kill, Immolation – autant d'occasions de se laisser molester par leurs riffs hypnotiques et massifs. Front-man vigoureux, Ross Dolan (1m80 ; 1m60 de chevelure) affiche toujours une bienveillante bonhommie sur scène, preuve s'il en est besoin qu'il est inutile de faire la gueule pour jouer une musique malfaisante. L'apogée de la soirée pour moi. Un bémol, le set est absolument trop court et dénué de rappel. Frustrant.
Le changement de scène s'effectue rapidement - bien trop rapidement pour que le public retrouve une contenance après s'être fait immolé en beauté – si bien que les Marseillais de BRUTAL REBIRTH commencent leur show avec « Enter the death row » devant une assistance réduite à peu de choses. Les musiciens s'appliquent consciencieusement pour retranscrire toute l'intensité du dernier album, du coup leur jeu souffre au départ d'une certaine crispation. Fort heureusement les curieux finissent par gonfler les rangs devant la scène et la robuste mécanique de leur death à l'ancienne peut se délier. Le rendu sonore est très satisfaisant, aussi gras que distinct ; un mélange qui produit des merveilles sur les titres mid-tempo. A revoir dans une petite salle bondée puant la bière et la sueur.
L'orga semble particulièrement à cheval sur le respect du timing, peut être trop vu que les balances de NAPALM DEATH résonnent brièvement pendant le set précédent. Les habitués des festivals se tournent vers le fond de la salle en se demandant s'il faut déserter les lieux immédiatement afin de ne pas rater le départ. Pas de chevauchement au final mais à nouveau une très brève transition avant le énième concert des tontons grindeurs. A croire qu'ils passent plus de la moitié de l'année sur la route.
On nous avait prévenus, la set list de cette nouvelle tournée ferait la part belle aux plus vieux titres de leur répertoire, chose confirmée dès le deuxième morceau avec « Hung » quasi méconnaissable. Le souci c'est que la démarche ne me convainc pas du tout. Si Fear, Emptiness, despair demeure mon album préféré de ND c'est grâce à cette sourde pesanteur qui l'anime, sa violence oppressante très industrielle. Passé à la moulinette de la nouvelle orientation stylistique du groupe (çad tripler le tempo de tous les titres), ça perd pas mal de substance à mon goût. La remarque vaut pour « If the truth be known, World keeps turning » ou « Greed killing », disons tous les titres phares de la période classic death du groupe. Les multiples hurlements porcins de Mitch Harris qui fonctionnent très bien sur les morceaux les plus récents y sonnent un peu surfaits et la gratte de Pintado manque désespérément. En somme, je me satisfais pleinement d'un petit « When all is said and done » groovant pour tortiller doucement du derche sans risquer de prendre une rangers pointure 46 sur le coin de la gueule. Enfin je chipote parce qu'il faut bien leur reprocher quelque chose de temps en temps. Après tout le pit est en fusion comme à leur habitude ; même les plus stoïques des spectateurs remuent frénétiquement le pied droit, un filet de bave aux lèvres et les yeux injectés de sang. What else? Un nespresso et une autre tournée en 2011.