Samedi 11 novembre 2006 - La Locomotive - Paris

Le mois de novembre est un mois terriblement chargé niveau concerts Metal sur Paris et quelques-uns en font les frais (comprenez annulation), comme par exemple BEYOND FEAR + VICIOUS RUMORS, qui devaient jouer le lendemain à l'Elysée Montmartre. J'avais donc un peu peur pour cette affiche, mais mes craintes se sont vite envolées : en ce samedi 11 novembre (et donc férié), le public parisien s'est déplacé en masse, la Locomotive est bien remplie. La deuxième surprise, c'est le public en lui-même, d'une moyenne d'âge plutôt basse. Et dire qu'on a tôt fait de dire qu'il n'y a pas de public Heavy Metal ! Eh bien ce soir, on s'aperçoit qu'il est bien là et qu'il est en train de se renouveler !

Quand FIREWIND entre en scène, le public parisien est déjà chaud, le groupe reçoit un accueil comme j'en ai rarement vu pour un groupe à cette place sur une affiche. FIREWIND, je connais un peu, j'avais kroniké leur premier album (« Between Heaven and Hell »), et là, ils viennent d'en sortir un troisième (« Allegiance ») avec un nouveau chanteur. Leur set est très très carré, les musiciens ont une bonne présence scénique, même si j'ai eu peur au début en voyant le frontman avec son bonnet, qui faisait un peu « tache » par rapport aux autres… dès qu'il a commencé à chanter, j'ai compris que ce nouveau chanteur de FIREWIND ne faisait pas semblant. Renseignements pris, ça ne m'étonne guère, il s'agit tout simplement d'Apollo Papathanasio, chanteur également d'EVIL MASQUERADE, MEDUSA, et aussi ex-MAJESTIC ! Le son est massif et FIREWIND distille un Heavy Metal puissant qui comble la foule. Apollo ne manque pas de jouer avec le public pendant les soli et il est rapidement dans sa poche.

C'est ensuite au tour des Palois de MANIGANCE, d'entrer sur scène. Ce groupe, tout le monde connaît, car fer de lance du Metal français, je l'avais déjà vu en première partie d'ADAGIO et j'avais bien aimé. On se rend vite compte que le son est moins puissant que pour FIREWIND, les guitares manquent un peu de pêche. Malgré cela, MANIGANCE donne un très bon set (quoiqu'un peu court), principalement axé sur le dernier album en date (« L'ombre et la lumière »), avec quelques incursions vers « Ange ou démon » et l'excellent « D'un autre sang » (« Mourir en héros » et « Maudit »). Musicalement, rien à redire, c'est du Heavy Speed très bien exécuté, sorte de mélange entre la scène Heavy Metal française des années 80 (SORTILEGE, ADX…) et la scène Speed mélodique finlandaise actuelle (STRATOVARIUS, SONATA ARCTICA, THUNDERSTONE…), mais scéniquement, c'est un peu lisse, disons que les musiciens manquent de présence scénique (par rapport à FIREWIND et surtout à DRAGONFORCE comme nous le verrons plus tard). Néanmoins, le public (et votre serviteur) passe un très agréable moment.

L'entrée en scène de DRAGONFORCE est assez singulière : un chronomètre égraine trois minutes et des poussières, pendant que nous est balancé le « Raining blood » de SLAYER dans son intégralité. A l'issue du compte à rebours, les musiciens entrent en scène et c'est parti pour un concert de folie ! J'avais déjà vu DRAGONFORCE en première partie de W.A.S.P. il y a deux ans, j'avais bien accroché, mais ce n'était rien en comparaison de ce soir. Ce groupe est vraiment hors norme ! Rien qu'au niveau du matériel par exemple : sur le pied de micro du guitariste, il y a un porte canette, sur lequel il y a une kro avec une paille, comme ça, il peut boire tout en nous sortant de soli de la mort. Mais surtout, DRAONFORCE est le seul groupe (à ma connaissance) à utiliser un trampoline… oui, vous avez bien lu ! Les deux guitaristes s'en servent pendant tout le show pour faire des bonds, tout en jouant, la folie. Pour de plus amples détails, je laisse la parole à mon confrère Nelson Monfort qui saura mieux vous décrire cette exercice de style :
« - Oui Shaka, c'est hallucinant ! Les guitaristes de DRAGONFORCE sont beaux, surtout l'asiatique avec ses longs cheveux, même si l'autre possède un charme plus sauvage. Attention, il s'élance justement sur le trampoline, c'est parti ! Magnifique prise d'élan, l'envol est parfait, on dirait qu'il flotte dans le ciel, ses cheveux claquent dans les airs, superbe chandelle ! La réception est délicate, surtout avec cet instrument de musique dans les mains qu'on appelle guitare électrique, mais elle est… fantastique ! C'est même une triple vrille qu'il nous offre, on dirait une toupie, c'est incroyable chers spectateurs et tout ça sans une seule fausse note, c'est hallucinant, it is fantastic, wonderful, magic… les mots me manquent, j'en perds mon anglais et pour la première fois de ma vie, j'ai presque envie de me taire pour profiter du spectacle ! »
Euh… merci mon cher Nelson. Bon, il a assez bien décrit l'aspect « athlétique » de la performance de DRAGONFORCE. Musicalement, on peut dire que DRAGONFORCE ne fait plus du Speed Metal, mais de l'Ultra Speed Metal… ils feraient presque passer HELLOWEEN pour un groupe de Doom ! Le chanteur possède une bonne voix, globalement moins aiguë que la moyenne dans ce style qu'est le Speed Metal, même si au final, un peu « banale ». De toute façon, une très large place est accordée aux duels de guitares. Le clavier n'est pas oublié, il se déchaîne derrière son instrument et vient même de temps en temps rendre une petite visite à ses camarades avec son clavier portable et on peut dire qu'il n'est pas en reste, il gesticule comme un cinglé. Il nous offre d'ailleurs un solo d'anthologie, façon jeu vidéo, génériques de dessins animés (« Les Simpson »…), à vitesse supersonique (lui aussi). DRAGONFORCE est un groupe anglais et pourtant pendant tout le concert, nous avons droit à des phrases en français de la part des guitaristes ou du chanteur, souvent pour se vanner entre eux (genre « il a une petite bite », « fils de pute »…). Il faut dire que le bassiste est français ce n'est autre que Frédéric Leclercq (MALADAPTIVE, ex-HEAVENLY…). Celui-ci a l'air très bien intégré et il s'éclate bien. A noter que le batteur, caché derrière son énorme batterie a lui aussi un jeu impressionnant qui ne faiblit à aucun moment.



Pour résumer, DRAGONFORCE c'est un Speed Metal ultra Speed, des musiciens qui ne se prennent pas au sérieux, qui se donnent à 100% (à les voir sauter et bouger dans tous les sens comme ça, je me disais qu'ils ne tiendraient pas tout le concert eh bien si, ils l'ont fait, ils étaient même encore plus déchaînés à la fin !), mais qui assurent derrière comme des bêtes techniquement, un contact avec le public comme j'en ai rarement vu. C'est bien simple, les slams et autres stage diving n'ont pratiquement pas cessé. La plupart sont l'œuvre des jeunots de 14/16 ans, qui grimpent sur scène pour headbanger, faire de l'air guitar, se prendre en photo avec leur portable… A la fin, il y a même plus de monde du public sur scène que de musiciens, cela ne semble pas gêner le groupe (même si le chanteur préférerait qu'il y ait plus de filles qui montent). J'ai rarement vu une communion pareille entre un groupe et le public et pourtant, j'ai fait quelques concerts dans ma vie ! Encore mieux qu'en première partie de W.A.S.P. ! Faut dire que la moyenne d'âge du public n'était pas la même !

Cette soirée restera donc dans les annales et dans les mémoires du public Metal parisien, la soirée parfaite : grosse affluence, concert énorme… A mon sens DRAGONFORCE a toutes les cartes en main pour devenir un groupe majeur dans les années à venir, capable de toucher un large public, en tout cas, ce soir, il était intouchable.