HOLLENTHON - Domvs Mvndi (Napalm) - 27/04/2013 @ 21h45
Les premiers samplers Metallian et le développement de Napalm records nous ont permis de découvrir l'underground autrichien. Expérimentations et souffle épique caractérisent cette génération, lui conférant une certaine aura. Souvenez-vous par exemple des réactions, justifiées, à la sortie de The Art of Dreaming de Golden Dawn... Mais à mon sens, le potentiel de cette scène ne s'est jamais pleinement exprimé, faute de moyens, d'une plus grande exposition et peut-être de maturité. Irrévocable chez la plupart, le choix de ne jamais tourner n'a rien arrangé (Abigor par exemple). En dépit de leur polyvalence et de leur relative solidarité, les musiciens autrichiens m'ont toujours donné l'impression de se brider, de se contenter d'un éphémère succès d'estime alors qu'ils pouvaient prétendre à mieux. La réussite formelle d'Hollenthon relève de l'exception, surtout sachant que le projet n'était pas censé aboutir. Retour sur une naissance laborieuse.

En 1994 le guitariste/hurleur Martin Schirenc maquette des idées en marge de son groupe régulier, les cultissimes Pungent Stench (death groovy avec mentalité de grindeux). Ray Wells (Pazuzu, Raventhrone) et d'autres membres de l'ABMS (Austrian Black Metal Syndicate) l'incitent à développer ce side-project. L'année suivante, Martin Schirenc participe incognito, sous le patronyme de Vuzem, à la compilation autoproduite Norici Obscura Pars, réunissant Golden Dawn, Knechte des Schreckens, Pazuzu, Pervertum et Trifixion. Les réactions encourageantes lui permettent d'envisager une suite. Mais privilégiant son activité de producteur, Martin Schirenc laisse Vuzem prendre la poussière. En 1998 Silenius de Summoning débloque la situation en faisant écouter une rehearsal au boss de Napalm records. Enthousiaste, ce dernier fait une offre que Martin Schirenc ne peut refuser, Pungent Stench ayant entre temps splitté. Changeant quelque peu d'orientation, l'Autrichien renomme son projet Hollenthon (nom d'un petit village près de Vienne d'où le groupe est originaire). Nous voilà renseignés. Maintenant parlons du contexte.

En l'espace de quelques années, la scène metal s'est incroyablement diversifiée, absorbant à la manière d'une éponge toutes les influences possibles et imaginables. Paru à l'été 1999, Domus Mundi aurait pu n'être qu'un album de plus. Mais la créativité et le talent de Martin Schirenc vont faire la différence, l'Autrichien nous sortant de son chapeau ce 1er opus aussi imprévisible qu'excitant. Dans l'intention, sa démarche est comparable à celle de Christopher Johnsson de Therion (celui de Lepaca Kliffoth et Theli) et consiste à mélanger expérimentations et traditions. Dans le rendu la différence est nette, car le style d'Hollenthon est plus énergique et sonne moins clinique, plus spontané. Entouré de sa femme Elena (parolière et chanteuse) et du batteur Mike Gröger (Raventhrone, futur Collapse 7), Martin Schirenc échafaude un dark metal au sein duquel de larges influences heavy 80s (Vestige par exemple) côtoient l'extrême qui a fait sa réputation. Le spectre de Samael plane sur Enrapture dont les riffs épais nous rappellent son passé au sein de Pungent Stench, alors que la frénésie black metal de Reprisal nous renvoie à ses récentes activités de producteur (Golden Dawn, Raventhrone).

A ce metal polymorphe, Martin Schirenc incorpore de multiples influences extérieures: orchestrales, lyriques, folkloriques et même ethniques. C'est le 2ème point fort de Domus Mundi. Outre son mordant, cet album consistant surprend par son liant. Bien que chaque titre possède sa propre griffe, le tout reste cohérent. Aucun arrangement n'est artificiel ou gratuit, et tout repose sur une solide charpente metal. Pourtant en seulement 8 morceaux Martin Schirenc nous fait voir du pays. Des orchestrations menaçantes d'Enrapture aux choeurs lyriques de l'épique Eclipse, on découvre les richesses d'un album astucieux aux attraits culturels certains.
Après une escale en terre celtique (l'instrumental Interlude, avec flûte et biniou), l'Autrichien n'hésite pas à nous emmener au Moyen Orient (le très réussi Homage), chez les Amérindiens (l'hymne Vestige, tout en percussions) ou en Océanie, un haka surplombant Reprisal (le titre le plus agressif de l'album). Cette polyvalence se retrouve vocalement, les chants grégoriens ou ethniques relayant les vocaux typés black de Martin Schirenc (qui assure aussi en chant clair). En retrait, sa femme Elena n'est vraiment mise en avant que lors du dernier titre (Eclipse).

Ce 1er album d'Hollenthon représentait le défi le plus ambitieux de sa carrière et Martin Schirenc l'a relevé avec panache, qui plus est en se chargeant de pratiquement tout lui même, du processus de composition à la production en passant par le visuel et l'interprétation. Concernant ce dernier point, je regrette que les crédits ne soient pas plus détaillés, notamment sur le plan vocal. A-t-il fait appel à des guests ou n'a-t-il utilisé que des samples? Mais bon c'est le genre de détail qui n'intéresse que moi, l'essentiel n'est pas là. Le visuel est une réussite (Mortui vos salutant!) et les compos tuent, en partie grâce à une production taillée sur mesure, avec le grain et le zeste de folie qu'il faut pour éviter le rendu aseptisé de certaines formations power. De la lourdeur des riffs aux mélodies en passant par les soli, les parties de guitares sont moins basiques qu'elles n'en ont l'air de prime abord. A noter l'usage d'acoustique sur Homage et de pédales d'effets sur Lure. Quant à la section rythmique, un morceau comme Vestige la sollicite énormément, voir l'énorme break de basse ou la virevoltante partition de Mike Gröger, percussions à l'appui. Pour conclure, Martin Schirenc n'emploie les arrangements qu'à bon escient, renforçant l'impact de Domus Mundi. Un signe de maturité.

Aussi épuisé par cette expérience qu'avide de retourner jouer à poils sur scène, Martin Schirenc va reformer Pungent Stench dans la foulée. Mais le succès de Domus Mundi l'annonce, l'entité Hollenthon refera parler d'elle...

Homage: http://www.youtube.com/watch?v=Jr0a85-FwGU
Vestige: http://www.youtube.com/watch?v=uD_LyqytDyI
Reprisal: http://www.youtube.com/watch?v=y_4p0kGuk5Q


Rédigé par : forlorn | 1999 | Nb de lectures : 2124


Auteur
Commentaire
jaquouille
Membre enregistré
Posté le: 28/04/2013 à 09h18 - (29273)
une grande claque à l'époque que le groupe n'a pas vraiment réussi à confirmer à travers les albums suivants



Youpimatin
Membre enregistré
Posté le: 28/04/2013 à 10h54 - (29275)
Fabuleux projet !! J'ai appris pas mal de choses avec cette chro, merci Forlorn ;-)
En revanche, je crois qu'il a utilisé des samples (il me semble avoir la banque de son en question dans mes fichiers)
Et j'aime aussi beaucoup la suite car réussir à imbriquer Metal et orchestrations n'est pas si facile et là, Martin s'en tire avec brio

mydrin
Membre enregistré
Posté le: 28/04/2013 à 11h38 - (29277)
Quel groupe et quel album, merci pour la chronique



lolo
IP:92.151.177.140
Invité
Posté le: 01/05/2013 à 21h52 - (29287)
Pas d'accord avec jaquouille : pour moi, With Vilest... est une super confirmation, même si c'est vrai qu'il est moins varié que Domus Mundi. En revanche, c'est vrai, Opus Magnum et le mini qui ont suivi sont décevants c'est vrai (mais la plus grosse déception reste évidemment l'annulation du concert au Glazart - avec God Dethroned et je ne sais plus quel groupe de Black en TA - faute de préentes, snif...)

Dodo la saumure
IP:92.130.235.223
Invité
Posté le: 13/03/2016 à 12h30 - (31920)
@lolo : endstille

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