Comme chacun le sait, la carrière d’ARCH ENEMY décolla considérablement lors de la sortie de « Wages Of Sins » en 2001. Si l’arrivée d’Angela Gossow n’est pas étrangère à cette soudaine surexposition, il est bon de se rappeler qu’il y eu une vie avant son intégration. Une première partie de carrière excellente au demeurant, trouvant son aboutissement artistique à travers l’album « Burning Bridges », 3ème du nom et dernier avec Johan Liiva. Sorti dans une période faste pour le Death mélodique, « Burning Bridges » marque à l’instar de bons nombres de disques, en cette année 1999, un tournant décisif pour l’essor du genre et de ses géniteurs. Mais avant d’aller plus loin, voici un petit rappel des faits :

1995 : Formation du groupe par le guitariste Michael Amott (ex-CARNAGE, ex-CARCASS et actuel SPIRITUAL BEGGARS). Le musicien s’entoure pour l’occasion de son frère Christopher Amott (ARMAGEDDON) lui-même guitariste, du batteur Daniel Erlandsson (ex-EUCHARIST) et du chanteur Johan Liiva (ex-FURBOWL).
1996 : Sortie du premier album « Black Earth » et gros carton au Japon. Notons que Michael assura la basse alors que Johan Liiva fut crédité à ce poste donnant ainsi l’impression d’un véritable effort de groupe.
1997 : Le groupe entre en studio en compagnie du bassiste Martin Bengtsson (ARMAGEDDON) et du batteur Peter Wildoer (DARKANE, ARMAGEDDON) présent ici en tant que musicien de session.
1998 : Sortie de l’album « Stigmata » qui bénéficie d’une plus large audience grâce à la signature sur le label Century Media. Daniel Erlandson revient in extremis pour enregistrer le titre « Beast Of Man » qui fut rajouté au track-listing à la dernière minute.
1999 : Sortie de « Burning Bridges » produit, comme pour les précédents, par Fredrik Nordström aux non moins célèbres studios Fredman. Le groupe trouve enfin SON bassiste en la personne de Sharlee D’Angelo (MERCYFUL FATE, WITCHERY, …).

En 1999, le Death mélodique (appelé jusqu’alors Heavy / Death Metal) explosa médiatiquement devenant plus qu’un style hybride aux yeux de tous. 3 disques, découverts grâce aux samplers des magazines nationaux, vont me plonger dans le désormais fameux « son de Göteborg ». Les excellents « Colony », « Projector » et bien entendu « Burning Bridges » faisaient la une de la presse spécialisée et particulièrement des hors-séries consacrés au Metal extrême. 3 albums, produits de main de maître par le même artisan dans le même studio, représentent à eux seuls la fin d’une époque ayant enfanté les plus grands classiques du genre. A défaut d’être son plus grand succès commercial, « Burning Bridges » symbolise l’entrée d’ARCH ENEMY dans la cour des grands.

Musicalement, « Burning Bridges » propose le meilleur d’un groupe dont les réputations techniques n’étaient déjà plus à prouver. En tête de cette « dream team », il est impensable de ne pas évoquer les compétences exceptionnelles des 2 frangins. En livrant un véritable travail d’orfèvre, les guitaristes brillent par leur aisance à alterner des parties jamais avares de complexités avec une fluidité exemplaire (découvert sur le sampler du Hors-série Death Metal, le morceau « Demonic Science » détonne avec ses riffs rampant et vicieux avant un surprenant final aux confins du Metal Progressif). Sur la majorité des titres, les rythmiques incisives sont légion dévoilant un héritage Heavy / Thrash porté aussi bien sur la fougue que la précision (le départ tonitruant de « The Immortal » et l’enchaînement avec « Dead Inside » et ses breaks mélodiques sur-vitaminés). L’aîné assure, comme aux grandes heures de CARCASS, de magnifiques leads enrichissant les riffs de son touché légendaire quand son cadet démontre toute sa dextérité sur les soli les plus hallucinants (les duels de « Silverwings » et « Seed Of Hate » revisitent l’esprit des 80’s). On peut dire que, chez les Amott, le « shredding » est une affaire de famille.

Nouveau dans ce collectif mais musicien confirmé depuis ses apparitions aux coté de King Diamond notamment, le bassiste Sharlee D’Angelo gagne, par son talent, une place de choix au coeur de cette élite. Désormais bien installé, le batteur Daniel Erlandsson martèle ses peaux sans retenue et nous prouve que la puissance à l’état pur n’impose aucune limite (« Pilgrim », « Angelclaw », …). Pour sa 3ème participation consécutive au micro d’ARCH ENEMY, Johan Liiva résume à lui seul le Death de tradition Suédoise et nous inflige son dictat par un « growl » hurlé totalitaire. En 1 mot : Jouissif ! Pour le grand final, ARCH ENEMY n’a pas lésiné sur les moyens en s’offrant les services du claviériste Per Wiberg (sur le massif titre éponyme). Le compère de Michael au sein des SPIRITUAL BEGGARS agrémente cette pièce Doom d’orchestrations « vintages » desquels émane un savoureux parfum 70’s. Notons qu’il aura l’occasion de s’illustrer plus tard en tant que « guest » sur d’autres albums d’ARCH ENEMY mais aussi et surtout en intégrant les rangs d’OPETH.

Comme nous l’avons vu dès l’intro, « Burning Bridges » symbolise la fin d’un cycle. En effet, Johan Liiva fut remercié après la tournée laissant la place vacante à la féline Angela Gossow. Changement aussi parce qu’à partir de l’album « Wages Of Sin » le producteur Andy Sneap prit de plus en plus d’importance dans le son du groupe, d’abord au mixage puis comme producteur exécutif sur les 2 disques suivants. Pour revenir à « Burning Bridges », son impact se mesura lors de la tournée Européenne réunissant autour d’ARCH ENEMY pas moins que DARK TRANQUILLITY, IN FLAMES et CHILDREN OF BODOM, la crème de la crème. Je n’ai malheureusement pas eu l’occasion d’y assister mais je sais qu’elle éveille pas mal de souvenirs chez certains. Nostalgie quand tu nous tiens. N’oublions pas également les liens privilégiés qu’entretenaient déjà ARCH ENEMY avec le pays du soleil levant d’où naquit un « Live » l’année suivante (« Burning Japan Live 99 »).

« Burning Bridges » est sans conteste une œuvre majeure de la scène de Göteborg. Un album de Metal racé et puissant doté d’un remarquable sens de la mélodie. Un disque parfait de bout en bout où rien n’a été laissé au hasard, pas même la production qui reste encore aujourd’hui un modèle du genre. Bref, si par malheur vous ne le connaissez pas encore, sachez que son écoute vous est vivement conseillée !


Rédigé par : vincesnake | 1999 | Nb de lectures : 2188