MORBID ANGEL - Formulas Fatal to the Flesh (Earache) - 08/09/2012 @ 20h52
Les tensions engendrées par des divergences d’opinions ou de visions créatives, ajoutées aux rivalités liées à l’ego, touchent la plupart des groupes un jour ou l’autre. Bien entendu, Morbid Angel ne fut pas épargné et connut une période particulièrement trouble. Le noyau dur formé autour de Trey Azagtoth (guitare), Pete Sandoval (batterie) et David Vincent (chant / basse) d’apparence solide, fut pourtant déraciné pour la première fois après 5 albums (dont 1 live) passés à la postérité. Suite à de mystérieux différends, David Vincent partit rejoindre sa femme chez les tristement célèbres Genitorturer. L’annonce du départ de l’emblématique « frontman » secoua le monde du Death Metal en laissant les fans dans l'incertitude. Quant à Eric Rutan, le titulaire du poste envié de second guitariste depuis l’album "Domination" (1995) sentit qu’il était temps pour lui de donner un nouveau souffle à sa carrière. Fatigué de n’être qu’un pion de l’échiquier et avide de fonder SA chose, il créa Hate Eternal devenant à son tour une pointure pour les années à venir.

Sans vouloir faire de mauvais esprit, on sent dans les interviews de Trey Azagtoth qu’il désirait reprendre le contrôle de son groupe. Selon lui, trop de gens ont voulu dévier la musique du groupe de sa trajectoire originelle et un remaniement s’imposait comme un juste retour des choses. Après audition des candidats au poste de bassiste-chanteur, il jeta son dévolu sur le jeune Steve Tucker, fraîchement débarqué du groupe de Death / Thrash Ceremony (une formation éphémère, bien connue aujourd’hui pour avoir abrité Pat O’Brien et Trym Torson le temps de quelques démos). En 1998, l’ange morbide revint enfin à la surface en dévoilant son nouveau visage avec le très attendu « Formulas Fatal to the Flesh ». Le titre suit comme de coutume l’ordre de l’alphabet, la 6ème lettre F est citée 3 fois et fait allusion au chiffre 666, l’idée de base pour ce nouvel album. Cependant, le satanisme semble bien loin des préoccupations de son auteur qui apparaît serein et optimiste, à mille lieues de la noirceur que l’on ressent en écoutant ce disque.

En effet, la création de « Formulas Fatal to the Flesh » marque le début d’une longue recherche spirituelle pour Trey Azagtoth, au travers de ses lectures philosophiques, l’étude des mythologies et la méditation. Cultivé, l’homme l’a toujours été et eut souvent l’occasion de le démontrer dans ses textes ou sa musique. S’il choisit ici d’utiliser (parfois) le Sumérien, une des plus anciennes langues écrites, c’est avant tout pour mieux honorer les « Grands Anciens » et ainsi suivre ses idéaux. En laissant les expérimentations de "Domination" (1995) et les tensions derrière lui, il effectue un retour au passé aussi bien musicalement que spirituellement. Rassurez-vous, tous les éléments qui ont fait de Morbid Angel le monstre que l’on connaît, sont ici présents dans les compositions et montrent un véritable condensé de leur savoir-faire, sans pour autant verser dans la nostalgie d’une époque révolue.

La variété au niveau des rythmes tour à tour rapides, mid tempo et Doom nous ramènent quelques années en arrière, à l’époque où l'extraordinaire « Blessed are the Sick » (1991) explorait des territoires encore vierges. Par l’intermédiaire de brûlots comme « Heaving Earth » et « Prayer of Hatred » qui ouvrent l’album, la musique nous plonge directement dans des profondeurs abyssales. Une ambiance « lovecraftienne » se dégage des compositions les plus riches, entrecoupées de breaks lourds complétés par d’étranges soli venus d’ailleurs. Des interludes mystiques permettent aux compositions de respirer même si, hélas, l’exercice de style n’est pas aussi réussi que sur le classique de 1991. Heureusement, le mélange de brutalité et de complexité, hérité de « Covenant » (1993), se remarque sur de nombreux passages (« Hellspawn », « Umulamahri »…). Dans cette cadence infernale, les morceaux n’en finissent pas de nous surprendre à l’image de « Covenant of Death » où des rythmiques lancinantes et des riffs syncopés défilent dans le chaos.

Sur le live « Entangled in Chaos » (1996), une maîtrise de l’intensité hors du commun redonnait toute sa splendeur aux compositions plus anciennes. Fiers de leur précédente offrande, les musiciens mirent un point d’honneur à retranscrire une énergie et une urgence proche de leurs prestations scéniques. Histoire de garder le meilleur pour la fin, le groupe exhuma un vieux morceau encore jamais enregistré jusqu'alors, « Invocation of a Continual one » composé de paroles personnelles qui sont interprétées brillamment par Trey. De par son feeling « old school » et ses accélérations Thrash radicales, ce désormais classique, aurait pu figurer sans problème sur un de leurs premiers disques. Quand le morceau semble terminé, un break relance la machine pour nous écraser sous une lourdeur terrifiante accompagnée d’un solo hypnotique de fin d’apocalypse.

En plus d’être un incroyable compositeur doublé d’un guitariste hors pair, Trey Azagtoth prouve qu’il a toujours eu le nez fin pour choisir ses collaborateurs. Steve Tucker parvient à imposer son style et remplace au pied levé le charismatique David Vincent en achevant de faire taire les plus sceptiques. L’indétrônable Pete Sandoval reste une référence qui a influencé moult générations de batteurs et nous gratifie d’une excellente prestation de surcroît. Le rustre s’essaye même à jeu tribal en phase avec le concept sur des instrumentaux (electro) placés à la fin. La production surpuissante dirigée par notre chef d'orchestre et à domicile SVP (Tampa, Florida, Morrissound studio, what else?) rend parfaitement justice à l’atmosphère et la violence sonore qui en découle. N’oublions pas le visuel « Fantastique » de la pochette, réalisée par Nizin Lopez qui illustre parfaitement cette lave en fusion prête à jaillir.

A cheval entre tradition et modernité, « Formulas Fatal to the Flesh » permit à ses géniteurs d’entamer une nouvelle étape de leur évolution, dans un contexte qui ne leur était pas forcément favorable. Une succession de morceaux forts et inspirés, au sein d’un ensemble homogène, leur évite de tomber dans le piège de l’album transitoire voire inégal. Pour continuer sur leur lancée, le groupe sortit en 2000 un « Gateways to Annihilation » plus aventureux, dévoilant un véritable esprit d'équipe renforcé par le retour d’Eric Rutan et l’intégration de Steve Tucker dans le processus de composition. Le résultat de ses recherches mystiques et l’aboutissement de ses réflexions métaphysiques donnait à Trey Azagtoth l’occasion d’offrir à nouveau, toute sa confiance aux siens. Serait-ce la voie de la sagesse ?


Rédigé par : vincesnake | 1998 | Nb de lectures : 3243


Auteur
Commentaire
Niederwoet
IP:89.85.119.56
Invité
Posté le: 09/09/2012 à 08h05 - (28016)
Un classique...qui allait enfanter L'ALBUM de Morbid Angel trois ans plus tard ! "Gateways to annihiliation".

INVITED
IP:109.28.37.28
Invité
Posté le: 09/09/2012 à 09h43 - (28021)
MORBID UN JOUR MORBID TOUJOURS!!!!

aldo
IP:83.141.167.109
Invité
Posté le: 09/09/2012 à 10h44 - (28023)
Leur meilleur et de loin !!!

nocturnus1977
Membre enregistré
Posté le: 09/09/2012 à 12h06 - (28029)
Excellent album... je suis un gros fan des compos et du trip



mioumiou
Membre enregistré
Posté le: 09/09/2012 à 13h40 - (28030)
J'ai toujours eu un peu de mal avec ce son que je trouve un peu brouillon et qui met pas assez en valeur les compos mais ça donne un côté true pas dégueu.

Nekromantik
Membre enregistré
Posté le: 09/09/2012 à 14h10 - (28031)
@Niederwoet + 1

Que dire de plus sur ce FFF ?? un classique! Le jour et la nuit si on le compare au petit dernier!





Blind
Membre enregistré
Posté le: 09/09/2012 à 18h28 - (28039)
J'ai toujours préféré largement la période David Vincent (A, B, C et D, I est vraiment à part) à la période Steve Tucker bien que G est toujours plus ou moins bien passé chez moi mais ce F restait bien en dessous pour ma part, surement la prod qui ne rend pas vraiment grâce à ses compos assez complexes. Mais je me le suis remis ce matin et le charme a, enfin serais-je tenté de dire, opéré. Du coup je vais essayer de me le repasser un peu plus souvent parce que je crois que je suis toujours passé à côté.



olivier
IP:89.3.12.243
Invité
Posté le: 09/09/2012 à 21h05 - (28040)
Excellent album, le meilleur aprés A et C.

GabinEastwood
Membre enregistré
Posté le: 10/09/2012 à 09h00 - (28045)
Rien à faire, j'ai essayé de le réecouter après avoir relu la chronique (ca faisait un bail que je ne me l'étais pas remis) mais je n'accroche toujours pas ... comme toute la période Tucker, où sont passés cette brutalité et ce côté direct qui a fait la gloire du groupe ?

Au lieu de cela on a droit a des longs morceaux où l'on perd le fil tellement c'est alambiqué, Getaways relèvera un peu le niveau cependant.

Pour moi Domination est le dernier grand album du groupe sans contestation



Nem Vapeur
IP:159.84.102.192
Invité
Posté le: 10/09/2012 à 11h28 - (28046)
Acheté à l'époque, pas ma tasse de thé.

Je l'ai toujours considéré comme un des albums faibles du groupe et je le trouve assez mal construit cet album.

choupikon
IP:91.88.201.119
Invité
Posté le: 10/09/2012 à 13h53 - (28047)
le son de batterie triggé à outrance...
le gros défaut de ce FFF

schrissse
IP:78.113.245.117
Invité
Posté le: 14/11/2012 à 12h21 - (28392)
Enfin une kro de FFF, l'Album de morbid ! monstrueux tout comme gateways !

Velvet Kevorkian
Membre enregistré
Posté le: 28/11/2014 à 12h30 - (31479)
Découverte de l'ange morbide avec cette album, qui reste mon préféré de toute leur excellente discographie.



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