YDI - A Place In The Sun (Blood Bubble) - 16/02/2013 @ 21h10
Avec YDI, on entre dans la catégorie des groupes "confidentiels", ceux qui n'ont pas pu tourner suffisamment ou qui n'ont pas pu sortir de disque de leur vivant. Tenez-moi cette torche, oui, là, au-dessus de la dalle, que je nettoie un peu, je la fais coulisser... c'est bon, on peut entrer dans la crypte. Selon le fanzine local COUNTERATTACK, vu que YDI a effectué son premier concert le 31 décembre 1982, on peut supposer que le groupe s'est formé avant soit en 1982, en l'absence d'éléments plus précis.
YDI, comme PURE HELL (glam/punk des années 70), MCRAD, RUIN, FOD, ELECTRIC LOVE MUFFIN, SADISTIC EXPLOITS ou AUTISTIC BEHAVIOR, vient de cette bonne vieille ville de Philadelphie, qui nous a donné Grace Kelly, Edgar Allan Poe, Kevin Bacon et le Philly Sound des années 70, ancêtre du disco. Chuck (basse), Mike (guitare) et Howard (batterie) sont rejoints par Jackal (chant ex The Legion Of Decency avec un certain Nikki Bones, dont le vrai nom est peut-être Brian, voilà ce qui arrive quand on fouille dans la crypte sans équipe de recherche) afin de conjurer l'ennui et le dégoût que leur inspire la ville.

Comme ses collègues (d'ailleurs YDI participe à la compilation sortie chez Rhino "American Hardcore"... et au film) sur tout le territoire, le groupe est influencé par le rock des années 70 (Alice Cooper, The Stooges) et la vague punk/oi anglaise (Cockney Rejects notamment). Jackal, par ailleurs, est impressionné par les Misfits, Bad Brains et (un intrus) Venom.
Après avoir placé 2 titres sur la compilation locale "Get Off Our Backs We'll Do It Ourselves" ("Enemy For Life", "I Killed My Family") parue sur le label Red Records et où figurent aussi Mc Rad, Autistic Behavior, FOD, Ruin, YDI enregistre une démo 15 titres, effectue quelques concerts sur la côte est (Harrisburg, New York avec Minor Threat, Washington DC avec Black Market Baby, Philly avec Negative Approach, sans oublier le fameux concert de Longmarch Hall à l'automne 1983 avec Antidote, Void, Iron Cross, Necros et Rude Awakening), impressionne favorablement Bob Mould de Hüsker Dü et Tesco Vee des Meatmen (excusez du peu). Le EP autoproduit "A Place In The Sun" sera l'ultime témoignage de leur période hardcore. YDI enchaîne quelques dates avec les Meatmen en 1984 ou la première partie de Samhain au Rock Hotel à New York (premier concert de Samhain, avec Lyle Presslar ex-Minor Threat qui quitte ensuite le groupe), mais le manque de moyens pour jouer en dehors de la côte est scelle la fin du groupe.

YDI enregistre, toujours en autoproduction, l'album "Black Dust" en 1985, Nikki Bones a remplacé Chuck et Eric Hardlonger a remplacé Howard. Le groupe pratique ce qu'il appelle le "Voodoo metal".
Finalement Mike (le guitariste pour ceux qui suivent encore) part en Arizona, provoquant le split de YDI, mais selon notre ami Jackal, le groupe s'est reformé récemment et a même joué en première partie des Bad Brains en octobre 2006, un rêve devenu réalité pour le chanteur de YDI, qui avait assisté au premier concert des Cerveaux à Philadelphie, en 1981. Howard n'est plus de la partie, mais il joue parfois avec les rescapés de Pure Hell, mais cela est une autre histoire.

Retour à 1983 et "Une Place Au Soleil" sans Adeline qui quitte la série, et j'ai encore trébuché dans la crypte, Howard est revenu, c'est pas formidable, ça ? Et mieux encore, scoop, au lieu de se trémousser avec Tokio Hotel et Michel Polnareff dans la capitale, YDI s'est contenté de jouer avec quelques vétérans du côté de Philly (je ne cite plus les noms des groupes, allez piocher plus haut) avec un invité très peu connu, Sab Grey, pour une reprise de "Crucified" de Iron Cross... flashback de 24 ans en arrière, comme tout bon flashback qui se respecte... Au niveau des textes, on est loin des Val De Marne Riderz, du barbecue festif dans le premier clip de Snoop Doggy Dogg, ou alors YDI ce sont les chiens déchaînés qui se ruent sur les tables et effraient les convives (faut visionner "What's My Name" pour comprendre, ben oui, faites un effort... bon d'accord, allez regarder "Master Killer" de Merauder, mais ça n'a pas le même effet).

Les paroles conçues par Jackal et Mike sont surtout des cris de rage, rage contre les préjugés, sociaux ou raciaux ("Categorized"), rage contre un emploi subi, des perspectives d'avenir glorieuses et des collègues/ voisins qu'on adore ("Not Shit", "Another Day"), confrontation violente ("Out For Blood", bagarre entre bandes, ou contre la police ?), rêves futuristes brisés par la réalité ("1983"). On pourrait imaginer quatre bombes à retardement ambulantes (pas celles de Blitz ou GBH) dans les rues de Philadelphie, mais arrivent trois messages d'espoir ("Get Up And Fight", "Zombie Youth", "Why Die") à savoir il ne faut pas sombrer mais se battre, survivre encore et toujours. A mon grand regret, je n'ai pas pu trouver le texte de "Friends", peut-être dans ce grimoire bousculé tout à l'heure et qui est tombé en morceaux comme le squelette vaincu par Conan le Barbare (non je n'ai rien fumé).

Reste la musique émanant de ce disque poussiéreux, enveloppé d'une bulle de sang. Le son de YDI rappelle la vieille garde (hardcore) punk américaine, les précurseurs comme Black Flag (avant Rollins), Misfits, Avengers, Verbal Abuse et pas vraiment les louveteaux affamés de Minor Threat, Crucifix ou Jerry's Kids. Et pourtant les Philadelphiens ne sont pas avares de salves échevelées de cinquante secondes avec cris de rage assortis (adeptes de Disorder et des premiers groupes grind, c'est pour vous) comme "Not Shit", "Friends" ou "Categorized".
On comprend mieux les moulinets de Jackal en concert. Mais la particularité, selon moi bien sûr, de YDI, est l'adaptation (surprenante) du son Oi au hardcore US, et ceci sans brailler "J'ai des bretelles, un Fred Perry, des Sta Press, Oi! mon frère, Oi! ma soeur".

L'ambiance de la cité de l'amour fraternel, les rugissements du père Jackal et les compositions de Mike, Chuck et Howard, voilà la recette, et on notera que du côté de la Grosse Pomme, certains s'habillent en skinheads, se revendiquent skinheads... et jouent du thrash metal, même s'ils reprennent "Crucified".
Certes, YDI n'est pas seul sur ce créneau, The Effigies à Chicago, Necros dans l'Ohio et Negative Approach à Detroit se sont inspirés des Cockney Rejects, Blitz et autres citoyens turbulents (rappel, dans l'hexagone à cette époque on a notamment la compilation "Chaos En France" et en Italie Nabat fait parler de lui, d'ailleurs écoutez les premiers enregistrements tels "Lavoro", "Asociale", et comparez avec "A Place In The Sun"...).

Mais retournons à ce disque antédiluvien en ces temps de Christophe Willem et d'umbrellisme insistants, revenons au Oï!core de YDI, on notera l'équivalent de ""upertouch/ Shitfit" (Bad Brains, je rappelle) qui se nomme ""et Up And Fight/ Zombie Youth", à ceci près que la partie la plus rapide, le "Shitfit" de YDI, est au début. Ensuite on dégustera des titres plutôt Oi! ("Another day" et son intro à la basse, "Mad At The World"), on attaquera la pièce maîtresse et peut-être le morceau le plus connu "Out For Blood" (refrain posé, couplets en furie) et on terminera ce repas de gastronome par le superbe "Why Die", avec les morceaux de lead de Mike (ponctuant chaque phrase de Jackal), qui rappellent Rocky George.
Je sors de la crypte, avec le disque enveloppé dans une poche plastique, et comme dans "Cold Case", encore une affaire résolue, on peut ranger le dossier, la vérité a éclaté.

Blood Bubble Records 1983 (réédition Parts Unknown records, 2004 ou 2005, sur la compilation "Out For Blood").

L'EP en écoute intégrale: YDI - A Place In The Sun


Rédigé par : Saul D | 1982 | Nb de lectures : 3156


Auteur
Commentaire
forlorn
Membre enregistré
Posté le: 14/06/2014 à 17h53 - (30993)
C'est toujours dommage de croiser une chronique sans commentaire. J'apprécie la démarche de Saul D (voir sa première phrase) qui met en valeur cet enregistrement grâce aux anecdotes et à la contextualisation.

Alors après musicalement ça n'est pas ma came, mais c'est toujours intéressant de parfaire ses connaissances. Ne manque plus qu'une poignée de commentaires par des fans du genre.

A noter que l'EP est désormais en écoute intégrale.

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