Eh bien, que se passe-t-il entre "Rock for Light" et "I Against I" pour Bad Brains? Notre ami Paul Hudson quitte discrètement New York, avec son frère, pour revenir à Washington DC. C'est le premier split de Bad Brains, HR veut monter deux projets, un groupe reggae, ZION TRAIN, et un groupe plus rock, H(uman) R(ights), plus exactement HR, qui deviendra Human Rights (qui phagocytera Zion Train, ceci dit rien n'est simple avec le père Hudson). Rappelons que le reggae est une vieille (enfin, de 6 ans) obsession de Paul Hudson, et depuis 1982, il essaie de convaincre Darryl et Gary de transformer Bad Brains en zélateurs du contre-temps.

A DC, Paul Hudson fonde le label Olive Tree records, qui abritera les groupes Outrage, Scythian, Revelation et Press Mob, il (HR) recrute David Byers (ancien The Enzymes), et commence à composer. Le problème est que la vente d'herbes n'est pas encore légale à Washington DC, donc le "rasta way of life" de Mister Hudson le conduit de temps en temps derrière les barreaux. Parfois gênant en cas de concert ou de tournée, mais HR restera HR. Au moment où sort "It's About Luv", Paul Hudson trouve ces morceaux dépassés, le groupe enregistre le EP "Keep Out Of Reach", avant de se tourner de plus en plus vers le reggae, avec un line up de plus en plus instable. Entre-temps, HR (le chanteur, pas le groupe) finit par rejoindre Darryl et Gary au printemps 85, pour plancher sur "I Against I".

Une vingtaine d'années plus tard, on retrouve le même cas de figure, HR et Earl mettent de côté provisoirement leur groupe, The Dubb Agents, pour "construire une nation" avec Darryl Jenifer et Dr Know, cette fois sur le label des Beastie Boys, Oscilloscope. Bon, mais alors, l'Aâââmûûûr de quoi ça cause? Malheureusement ni SST ni David Byers ne m'ont faxé les textes, ce que j'avais demandé à leur attachée de presse Daniela Lumbroso, donc, comment elle n'est pas attachée de presse ? Je comprends mieux, alors. Je crois deviner ceci dit que "Free Our Mind" parle de libérer les esprits (les textes consistent en ces trois mots), "Happy Birthday My Son" semble évoquer les démêlés de HR avec la police et ses problèmes d'argent et l'ensemble du EP est consacré à la lutte des opprimés (enfin certains, mais ceci est une autre histoire).

Musicalement on entre dans le monde du post punk, ce qui peut expliquer l'intérêt du label SST Records (Minutemen, Black Flag et autres projets plus expérimentaux). Remarque, Dischord ou Alternative Tentacles se distinguent aussi par leur ouverture d'esprit. Or donc ques, que peut-on écouter sur "It's About Luv" ? Quelques badbraineries comme "Free Our Mind" (en concert ceci dit un morceau un peu indigne d'un HR), les excellents "It'll Be Alright" & "We're Gonna Get You" (hardcore pied au plancher, avec ceci dit une touche plus pop et une basse un peu funk pour le second), du reggae (l'intro dub "Roots", "Happy Birthday My Son" et "It's About Luv"), du funk très pop ("Who Loves You Girl" qui rappelle vaguement Talking Heads et les Slits) et du punk (très) mélodique ("Let's Have A Revolution" avec solo de saxo en prime, les fans de X Ray Spex apprécieront "Heaven Forbid" qui renvoie à "Shitfun" des Bad Brains, en plus pop).

Concernant la touche reggae, on sent que Aswad et Steel Pulse (période bien "commerciale" on va dire, genre 83-85 pour les 2 groupes) sont passés par là, et on peut se demander comment HR peut refuser une offre de major (raison officielle du split des Bad Brains en 84) mais proposer une musique assez proche de ce que les grosses maisons de disques veulent. Est-ce que la réponse à cette question est le single "Keep Out Of Reach" ? Vous le saurez au prochain épisode...


Olive Tree Records, 1984, réédition SST records, 1987.




Rédigé par : Saul D | 1984 | Nb de lectures : 3884