Eté 1987, Metallica, sans doute pour accélérer l'intégration de son nouveau bassiste, enregistre un mini album de reprises, parmi lesquelles "Last Caress" et "Green Hell", deux titres des Misfits. Dix-sept ans plus tard, le leader de Marduk dévoile son projet parallèle, Devils Whorehouse, encore une référence aux Misfits. "!" (mettre votre juron préféré), si de telles stars (Metallica, Marduk, et non Virginie Efira, Booba ou Michal) s'intéressent au groupe de Glen Danzig, ça doit être "achtment bien", du "métal extrême de la mort qui tue" ou du "true punk hatecore back in the streets New York Justice Tough Crew", avec ou sans les pitbulls, allons donc quérir une galette, vous dites-vous. Et c'est là que j'interviens avec un panneau "Vorsicht!" tel Super Dupont (ou plutôt Martin Lawrence, pour ne pas induire les agences de casting en erreur, imaginez un biopic de Darkthrone avec Will Smith, Ramzy et Mouss Diouf dans les rôles principaux...) veillant sur le porte-monnaie des ménagères.

Les Misfits, ce n'est pas ce que vous croyez, preuve en est la pièce à conviction n° 0422 WAU: des musiciens au look mi punk mi batcave, un logo tiré du magazine culte de Forrest Ackermann "Famous Monsters Of Filmland", et l'ambiance adéquate (soucoupes volantes, monstre aussi convaincant que la lutte de Jean Pascal Raffarin contre les petites galettes de pétrole en bottes de caoutchouc). Et puis ce crâne à l'air niais, le "Crimson Ghost", popularisé entre autres par Cliff Burton, un grand fan du groupe, rien à voir avec les démons, zombies, chirurgiens charcutiers utilisés par les jeunes d'aujourd'hui (Repulsion, Haemorrhage, Kreator, Vehemence...). Bref, les Misfits de Glen Danzig (chant, dictature et mauvais caractère), Jerry Only (basse, "légataire universel"), Arthur Googy (batterie), Doyle (frère de Jerry Only, guitare) sont plus proches des Cramps que de Minor Threat, et pour cause ce sont des contemporains des Dead Boys, Ramones, Heartbreakers, Dictators (la fameuse scène punk de la côte Est, qui gravite autour du CBGB et du Max Kansas City à New York). Ils baignent dans ce qu'on appelle la culture populaire américaine (rock'n'roll des années 50, pop des années 60, comics, cinéma bis), particulièrement la science-fiction et l'épouvante, au point de projeter des films avant leurs prestations, ou de jouer avec Screaming Jay Hawkins.

Après un projet avorté en 1978, "Static Age", les fans des Misfits devront patienter 4 ans (parmi eux, Henry Rollins de Black Flag, et Rick James, l'auteur du tube funk "Superfreak", et oui!) et une floppée de 45 tours pour découvrir le premier album officiel du groupe, "Walk Among Us". Treize titres pour 24 minutes, et quand c'est fini, on remet le disque. Pourquoi? Parce que c'est frais, vif, joyeux, en tout cas musicalement, Glen et ses amis passant du punk rock anglais de 77 ("I Turned Into A Martian", "Violent World", "Hatebreeders") au garage rock ("Mommy Can I Get Out And Kill Tonight?", "Nike A Go Go" qui plairait à Fonzy de "Happy Days"), avec une escale Oï ("Braineaters"). On trouve même des morceaux dignes de Blondie ("Skulls", "Astrozombies" qui emprunte le riff de "Stand Strong Stand Proud" de Vice Squad) et le morceau "Devils Whorehouse" justement. Pour les textes c'est plutôt l'univers de "Creepshow" ou "Tales From The Crypt", avec des morts vivants, tueurs psychopathes ("Skulls"), extra-terrestres assoiffés de sang ("Astrozombies" reprenant le thème de "Mars Attacks"). On a même droit à du bondage ("Devils Whorehouse", peut-être "Nike a go go" et "Vampira"), et de l'humour anthropophage ("Braineaters"). Avec Samhain, Mr Danzig est devenu plus sérieux, plus lugubre aussi, et les Misfits actuels attirent davantage l'attention par les produits dérivés, sad but true...


Rédigé par : Saul D | 1982 | Nb de lectures : 3321