Les Bad Brains sont au hardcore punk ce que Slayer est au thrash, Public Enemy au rap, les Beatles à la pop et le bon goût à TF1 (cherchez l'intrus...), incontournables références. Lorsque Phil Pestilence réalise un article sur le thrash metal et le hardcore dans Metal Hammer, c'est une photographie de H.R. plongeant dans la foule, en 1985, qui ouvre le dossier. Lorsque Metal Hammer crée une rubrique sur le crossover, "Hard To The Core", ce sont encore les rastas de Bad Brains qui l'inaugurent (89/90). C'est une cassette de Black Flag qui rassure Kurt Cobain sur le punk rock, mais c'est "Rock For Light" qui le maintient dans "le droit chemin". Et pourtant Bad Brains est en très mauvaise posture en 1982-83, après une tournée houleuse ("The Texas Incident"), le vol de tout leur équipement et surtout le désintérêt croissant de HR pour le milieu rock. Une petite présentation avant tout. les Bad Brains se composent de HR (Paul Hudson) au chant. Earl (son frère) à la batterie, Dr Know (Gary Miller) aux guitares et Darryl Jenifer à la basse. Quatre musiciens noirs de Washington DC, venus du jazz et du funk, plongeant dans le punk naissant et rencontrant le reggae à la fin des années 70. Les mentors du "harDCore" (Minor Threat, SOA...) et de la scène new-yorkaise (Cro Mags, Warzone, Beastie Boys....), qui dit mieux? Mais revenons en 1983 et leur rencontre avec Ric Ocasek, chanteur des Cars, après un concert à Boston. Mr Ocasek dote les Bad Brains de matériel adéquat et leur facilite l'enregistrement de "Rock For Light", premier album officiel des Cerveaux. Malheureusement la production, qui aurait convenu à un disque des Ramones, bride la furie des Bad Brains (écoutez les "ROIR Sessions" de 1982 où apparaissent d'ailleurs 8 titres de "RFL"). Ceci dit, ce n'est pas du Good Charlotte ou du Offspring, rassurez-vous. "Rock For Light" contient, si on enlève les 2 morceaux de 79 "How Low Can A Punk Get" (le point commun entre HR, les débuts de Megadeth, Johnny Thunders et Miles Davis, l'héroïne) et "At The Movies", reliftés, 10 inédits dont 4 titres reggae, apparaissant tous les 4 morceaux (si vous suivez, vous en déduisez qu'il y a 20 morceaux, pour 40 minutes de musique).
Aidé par le savoir-faire de Dr Know (et la section rythmique bien sûr), HR s'empare de chaque morceau comme d'une Ferrari à Indianapolis, l'hystérie le conduisant presque à l'extinction de voix ("Destroy Babylon", "Joshua's Song" qui dure 30 secondes, "Attitude", "Riot Squad", "I"). Cependant, comme Johnny Rotten, il aspire à autre chose, ce qui donne "Rock For Light" ou "Coptic Times", plus posés, avant de se réfugier une fois de plus dans l'univers rastafarien. Bad Brains transpose les percussions nyabinghi ("The Meek"), s'essaie au dub ("Jam"), au toasting ("Rally Round Jah Throne", pour les novices, le toasting est l'ancêtre du rap et du ragamuffin).
Et les textes de HR "Joseph I" ? Pas de démon cornu ou d'ode païenne ambiguë, du mysticisme (pour le reggae), de la subversion, de la sédition. 10 ans avant RATM, HR refuse de faire ce qu'on lui dit de faire ("We Will Not"), prédit des émeutes, et suggère des représailles, l'ex-alcoolique de la Maison Blanche (et Agnostic Front qui "prête allégeance" à un certain drapeau) ne risque pas d'apprécier. Et le mosh n'est pas né avec l'album "Among The Living" des New-Yorkais Anthrax, mais bien avec "Supertouch/Shitfun", alors que "Riot Squad" annonce Cro Mags et le NYHC tel qu'on le connaît.


Rédigé par : Saul D | 1983 | Nb de lectures : 3367