Quand le Punk/Rock se démocratise...
Qu’on aime The Offspring ou non, à l’instar de NoFx, Bad Religion ou Green Day, les 4 teigneux auront marqué de leur empreinte l’univers Punk des années 90. Incarnant plus ou moins le renouveau du Punk/Rock américain, les hymnes imparables de nos Californiens auront bercé bon nombre d’enfance et d’adolescence, moi le premier.
"Ignition" en 92, et surtout "Smash" en 94, avec ses tubes interplanétaires, ‘Come Out and Play’ et ‘Selfesteem’ en tête, font partie de ces albums incontournables, symboles d’une époque, pierres angulaires d’un style.

4 ans après cet incroyable succès, vendu à plus de 10 millions d’exemplaires dans le monde, un peu plus d’un an après le très bon (mais mal aimé) "Ixnay on the Hombre", après avoir enchaîné les tournées aux 4 coins de la planète, les 4 Californiens sont enfin de retour. Et après quelques déclarations ménageant le suspens dans les Rock Sound et compagnie, on (les fans de l’époque) appréhendait tous de voir nos gentils punks revenir sans inspiration, grisés par trop de succès, ou la tête grosse comme un melon.
Et autant dire qu’ils nous ont tous bien bluffés.

Album controversé, "Americana" sera l’album du changement. De la rupture, diront certains. De la reconnaissance, répondront d’autres.
R.I.P., pour les fans de la première heure.
Et pourtant, "Americana" sera de nouveau un carton phénoménal, tant en terme de ventes d’albums, qu’en reconnaissance médiatique.

Comme bon nombre de fans de l’époque, je subissais les affres et sévices des radios FM, qui nous balançaient à longueur de journée diverses calomnies musicales, Menelik et Brandy & Monica en tête, le tout enrobé de comédies musicales niaises au possible. Crise amplifiée par le tube de l’époque, ‘My Heart Will Go On’ de la castafiore québécoise, qui nous cassait inlassablement les oreilles, tandis qu’Aerosmith s’offrait une seconde jeunesse, en se faisant plébisciter avec ‘I Don't Want to Miss a Thing’.

C’est pourtant via cette même FM, qui, avant l’avènement d’internet, faisait encore la pluie et le beau temps en terme de musique, que j’entendis les premières notes de "Americana"’. Avec le mega-tube ‘Pretty Fly (for a white guy)’.
Give it to me baby, Hun hun hun hun,
Give it to me, baby, huhu, hunhu,
And all the girl say, I’m pretty fly for a white guy
A la première écoute, j’ai manqué m’étrangler. Bordel, mais c’est quoi ces hun hun tout nazes ? Elle est où la gniak du groupe ? C’est quoi ce son, ils ont laissé tomber le punk, ou quoi ? Z’ont pu assez de thunes pour finir la piscine dans le jardin ?

Puis, rapidement, l’efficacité du titre, le côté simple et punchy, m’ont ramené à la raison.
Représentatif de l’évolution du groupe, et d’"Americana", ce titre est un condensé de ce que The Offspring propose à ses fans en cette fin de siècle : un son beaucoup plus pop et équilibré (aseptisé, diront certains), des titres basiques (simplets, diront certains) et efficaces, et surtout des rythmes revus à la baisse, mais diablement énergiques, pour pouvoir plaire à un max de monde (des vendus, diront certains).
Moins de Punk, plus de rock/Pop. Et cela va marcher, et même cartonner, car ce single va passer en boucle sur toutes les radios, permettant à l’album de se vendre à plus de 12 millions d’exemplaires dans le monde.
Carton renforcé ensuite par le second single du groupe, seul titre pourri de l’album à mon sens, ‘Why Don’t You Get A Job ?’, qui avec ‘Pretty Fly’ propulsera le groupe en tête des charts et diffusions radiophoniques durant presqu’un an.

Alors, fini le Punk/Rock ?
Non, bien heureusement ! Clairement, le groupe s’est calmé, assagi. Mais demeure ancré dans le Punk/Rock d’antan, et l’album comporte encore quelques titres rapides et totalement en phase avec l’identité du groupe, comme l’excellent ‘Have you Ever’, ‘The Kids Aren't Alright’, ‘No Brakes’, ou le funny ‘Walla Walla’.

"Americana" n’atteint certes pas (à mon sens) le niveau des incontournables "Ignition" ou "Smash", mais est tout de même un excellent album. Varié, bourré de titres ultra efficaces et énergiques, il s’écoute avec plaisir, accompagné d’un mojito ou d’un magret de canard cuit au barbecue.
Décrié par les fans de la première heure (cela se comprend), il symbolise également l’entrée du groupe dans l’univers "grand public", amplifiée par la signature du groupe avec une major (Columbia Records).
Il aura surtout permis à The Offspring de franchir un cap commercial et médiatique, propulsant le groupe sur le devant de la scène, lui offrant tournée mondiale et succès. C’est d’ailleurs uniquement à partir de cette période que le groupe figurera dans les diverses nominations et récompenses, tels que les MTV Awards ou autres Music Awards. Symptomatique de l’industrie musicale, qui attend qu’un groupe acquiert une popularité médiatique pour s’y intéresser, alors même que "Smash" aurait largement dû y figurer.

La suite des aventures sera nettement moins glorifiant. Peut-être grisé par un tel succès, ou peut-être simplement dépassé par les évènements et le carton planétaire, le groupe va ensuite avoir du mal à rééditer l’exploit, ses albums suivants déclinant peu à peu.
Je ne compte plus le nombre de personnes m’ayant dit écouter aussi du Metal, en citant The Offspring. Ça nous fait marrer, mais pour la personne habituée à la variété commerciale des ondes FM, The Offspring représentait tout de même une certaine violence musicale.
Et bien que fan de sonorités plus extrêmes à l’époque, j’ai tout même pris mon pied durant de longues heures avec "Americana", un album simple, certes un peu commercial, mais foutrement plaisant.
Il s’agira d’ailleurs du dernier album du groupe que j’ai acheté, ‘Conspiracy Of One’, aux allures de copie ratée, me poussera à laisser tomber les Californiens...


Rédigé par : ..::Ju::.. | 1998 | Nb de lectures : 2374