Décembre 1990, j'ai 15 ans, ma vie est rythmée par le lycée et les interminables allers-retours en bus domicile/bahut, bahut/domicile. Pour tromper l'ennui, je gave mon walk-man Sony des oeuvres de Maiden, AC/DC et surtout Metallica, que du classique de chez classique, je ne connais pas grand-chose d'autre. A l'époque, pas d'internet, pas de hardos dans mon lycée catholique où tout le monde ne jure que par les Pixies et Depeche Mode, et pas trop de presse spécialisée dans mon bled. Un gars de ma classe, fan de free jazz et autres, vient me voir au départ du bus et me tend une vieille BASF copiée:
-"Tu devrais écouter ça!
-Mouais, c'est quoi, encore Uzeb ou Mac Laughlin?
-Non, c'est "Reign In Blood" de Slayer, tu connais?
-Bien sûr que je connais, tu crois quoi?"

Je n'avais jamais écouté Slayer, j'introduis la cassette, play, et là BLAM!!!!!, pendant une demi-heure jusqu'au final "do you wanna die???!!!!", BLAM BLAM BLAM BLAM!!!!!

Le samedi qui suit je me rends chez l'unique disquaire de SAINT-NAZAIRE, pas de "Reign In Blood", par contre un exemplaire de "Seasons In The Abyss", je prends. Le vendeur me conseille aussi d'acheter un autre truc, "Rust In Peace" de Megadeth, retour à la maison, écoute attentive... frissons... émotions... technique... puissance, le match "War Ensemble/Holy Wars" est serré, ces skeuds sont des tueries et ma vie vient de changer. A partir de maintenant, tout mon pognon et mon temps libre seront consacrés au metal.

Tout ça pour dire que Slayer tient une place particulière dans mon petit coeur de rocker, malgré quelques albums décevants et les déclarations pénibles de Monsieur King (qui a la plus grosse? en gros). Après cette lonnnnngue introduction, j'en viens au skeud. On ouvre le boîtier et on découvre ces couleurs sales, glauques de Larry Carroll, pochette pas top à première vue puis carrément géniale quand on s'y attarde, beaucoup plus réussie que les précédentes pour ma part et sûrement la plus belle de Slayer. Les paroles sont en lettres gothiques sur fond gris et cet aigle, putain ça en impose. 4 photos des membres du groupe, ils regardent ailleurs, faut pas les emmerder.


C'est parti, "War Ensemble", rapide de chez rapide, Dave Lombardo écrase tout, le son est excellent (Andy Wallace, pour moi le producteur metal américain), rêche, sec comme un coup de trique, la caisse claire éclate à chaque coup, pas de quartiers, les morceaux s'enchaînent sans pause, alternant le speed et le mid tempo, toujours cette batterie, mais comment fait-il? On en arrive à "Dead Skin Mask" avec cette intro entêtante et chargée en feedback, "...please stay alive, and I promise I won't keep you long, I'll keep you forever...", ce morceau est une tuerie. "Halowed Point", l'un des titres les plus rapides de Slayer, suivi par le mammouth "Skeletons Of Society" et on enchaîne jusqu'à "Seasons In The Abyss", LE morceau épique de Slayer, dont le clip est devenu un classique. Ce disque est très varié mais assez homogène, pour la première et dernière fois sauf erreur de ma part, les deux gratteux se sont impliqués à fond sur les compos, les soli sont soignés et pertinents. L'interminable tournée qui suit est devenue légendaire et a assis Slayer comme un groupe implacable, Dave Mustaine pleurait pour ne JAMAIS jouer après eux sur le Clash Of The Titans américain, malgré le turn over des groupes. L'année suivante, huit titres sur dix sont repris sur "Decade of Aggression", signe que cet album a marqué les esprits.

Presque vingt-deux ans que cet album est sorti, il n'a pas pris une ride. Pour moi cette année 90 aura été une révélation, souvenez-vous: "Painkiller", "The American Way", "Act III", "Empire", "Cow-Boys From Hell", "Lights Camera Revolution", "Enjoy The Violence", "Coma Of Souls", "Spiritual Healing" et j'en passe...
"Seasons In The Abyss" et "Rust In Peace" ont écrasé toute concurrence et signé par là même l'arrêt de mort du thrash des années 80.




Rédigé par : Hammerbattalion | 1990 | Nb de lectures : 2379