MACHINE HEAD - The Burning Red (Roadrunner) - 22/01/2012 @ 10h35
AAAAAh… il est de ces adages qui se transmettent uniquement de bouches de metalleux à oreilles de metalleux. Vous en connaissez certainement plusieurs, qui semblent déjouer le temps et restent, malgré les époques, comme de saines et saintes vérités.
Il en est un qui nous intéresse plus particulièrement ici, et qui concerne ce satané et fameux troisième album.
Il est vraiment rare de trouver un musicien qui vous dise « Ah le troisième album ? On s’en branle c’est juste un chiffre. On joue de la musique avant tout pour nous sans nous soucier de ce qui se passe à l’extérieur du groupe.» (Toute ressemblance avec un groupe existant n’est que pure coïncidence).
Vous avez déjà certainement lu ce type de propos d’artistes inspirés, recyclant les lieux communs avec une facilité déconcertante. Mais les faits sont là, le troisième album est très important dans la carrière d’un groupe.
On sait bien que lorsqu’on y regarde de plus près, ce mystérieux troisième album est souvent la pierre angulaire de la discographie des grands groupes.
Il n’est pas nécessairement le meilleur mais il est toujours important. Nul doute que la carrière de Slayer n’aurait pas été la même si « Reign in blood » avait été composé plus tard dans leur carrière.
Cet adage n’avait certainement pas échappé à Rob Flynn et Machine Head, qui plaçaient de grands espoirs dans ce « Burning red » et avaient mis tous les moyens de leur côté pour que cela soit une réussite.
Pourtant, et avant que la composition ne débute, les choses semblaient (comme souvent avec MH) partir un peu en quenouille. A la surprise générale et à la fin d’une tournée triomphale, Logan Mader décidait de quitter le groupe. Après Kontos, MH voyait un autre de ses piliers quitter la mêlée.
Le problème c’est qu’ici, Machine Head perdait à la fois un musicien, un compositeur et un élément primordial en terme de présence scénique.
Logan était très apprécié du public, il avait vraiment une façon personnelle d’occuper l’espace et son charisme servait beaucoup à l’image du groupe.
Ajoutez à cela le caractère sympathique du gars « stone » en permanence avec un look bien étudié, et vous obtenez un gros vide lorsque ce type de personnage se barre.
Son successeur avait donc fort à faire et sans être méchant, on peut dire que Arhue Luster n’arrivera jamais à faire oublier le dreadlocké guitariste.

MH vivra mal le renvoi de Mader.
Au tout début, Robb Flynn pourrissait Mader de la pire des façons en l’accusant d’à peu près tous les maux de la planète. C’est là qu’on s’est aperçu que le père Flynn avait la rancune tenace puisqu’il a été jusqu'à dire lorsque Logan intégra Soulfy :

« Logan pompe la célébrité à Soufly de la même manière qu’il a pompé la nôtre. J’espère seulement pour lui que la bite à Max a bon goût. »
Robert Flynn

La poésie et Robert ont, comme vous pouvez le constater, fait toujours un excellent ménage.
Nonobstant ces quelques difficultés, les pistoleros (enfin Rob quoi) s’attelèrent à la compo du nouvel opus. Une étape difficile comme le relatera le barbichu.
En effet, Machine Head a toujours eu des riffs d’enfer dans ses compositions. Force est de constater qu'à ce niveau-là, « The burning Red » est moins bon que ses glorieux prédécesseurs. La faute au départ de Mader ? La question se pose encore.

Quoi qu’il en soit Machine avait quand même décidé de mettre les petits plats dans les grands. Ross Robinson comme producteur (même s’il commençait à baisser un peu niveau notoriété), nouveaux looks et assurance affichée.

« Tous ceux qui s’habillent comme s’ils sortaient d’une station shell me rendent malade. »
Robb Flynn ‘99

A la sortie de cet album, Machine Head avait un look catastrophique.
Ils étaient tous vêtus de pantalons bizarre et de vestes fashions qui, grâce à dieu, n’ont jamais débarqué sur nos belles côtes européennes.
Le hurleur avait aussi décoloré ses cheveux à la « Chino Moreno » ce qui lui donnait une allure très, très néo Métal. Cela n’a pas échappé à Kerry King qui critiqua le look et le nouvel album des MH, argumentant que le groupe ne savait certainement plus où aller.
Cette déclaration marquait d’ailleurs le début des hostilités entre Flynn et King, les deux guitaristes allant se pourrir la gueule pendant plusieurs années après ça.
Mais comme le soulignait Tonton Kerry, le problème n’était pas vraiment dans les tenues, mais dans le changement très brutal au niveau de l’image.
J’avais vu la tournée pour l’album « The More things Change » quelques mois plutôt et on ne peut pas dire qu’alors c’était la même mayonnaise.
Ce sacré Robert avait quasi fait toute la tournée avec le même coupe-vent bleu qu’il gardait autant sur scène qu’en dehors.
Avec ses trois énormes chaînes qui pendaient à son pantalon et ses Vans utlra pourries, le gars ne manquait pas d’allure. Adam Duce était tout aussi classe et McClain expérimentait des coupes de cheveux qui auraient dû être interdite par la convention de Genève.
Bref, le caractère hardcore ressortait bien à l’époque et on était beaucoup à préférer le MH crasseux que le nouveau MH fluo.

Bref, avec leur nouveau look à la « j’en ai marre de vivre » et Ross Robinson, les MH freaks sentait bien que ça partait mal.
Les gars avaient beau dire qu’ils allaient continuer à faire du MH, on sentait bien qu’ils voulaient passer à l’étape supérieure… et dans le mouvement néo si possible.

Quoi qu’on en dise, on peut pas vraiment taxer Machine Head d’opportunistes car ils ont toujours eu ce côté urbain qu’avaient aussi les Deftones par exemple.
La seule différence, c’est que Machine était un groupe de métal à tendance Hardcore qui hurlait plus qu’il ne rappait, et qui avait musicalement plus de points communs avec les Cro Mags qu’avec Korn par exemple.

Car même si beaucoup de leurs fans aimaient le néo, la plupart étaient des métalleux qui aimaient plus Slayer que Marylin Mason.
Rien à voir avec les rigolos qui polluaient les concerts des Deftones à Paris à l’époque.
Machine a donc foncé tout droit dans la direction qu’ils avaient choisi.
Ciao à Slayer et Poison Idea et bonjour l’indigo Ranch et les Addidas.
Au regard de ce qui s’est passé dans la suite de leur carrière, cette décision a bien failli leur coûter très cher.

Car malgré les très bonnes ventes, cet album a déçu… et pas qu’un peu.
D’une part parce que Robb Flynn avait un peu trop ramené sa fraise en parlant de « chef-d’œuvre » et de conquête du monde, et d’autre part parce que l’album correspondait à ce que les fans redoutaient.
Je reviens sur l’assurance de Flynn car même s’il avait toujours été assez sûr de lui (du moins en interview), là, il pulvérisait les records.
Les gonzes ont été jusqu'à dire qu’« Hanneman avait dit qu’il avait envie de tuer des gens en écoutant cet album ».
De deux choses l’une : ou bien le blondinet Germanique manie très mal l’ironie ou bien il était sacrément défoncé lorsqu’il a déclaré cela à MH (les aficionados de Slayer le savent : Avec Jeff, les deux cas de figures sont parfaitement envisageable).

Je me souviens qu’à l’époque je connaissais un abominable jacky qui adorait les groupes que je détestais férocement. Lorsque ce sinistre personnage est venu me trouver pour me dire qu’il avait écouté le dernier MH et qu’il avait adoré, je me suis dit que l’album devait vraiment sonner comme de la merde.
Il m’a alors fait écouter sur son ghetto blaster « From this day » en me disant que c’était le morceau le plus rapide de l’album. J’en avais presque les larmes aux yeux en écoutant ce morceau qui pour moi était le chant du cygne du MH que j’aimais.
Mais comme j’étais un fidèle, j’ai acheté l’album.

Dès les premiers morceaux, on s’apercevait de l’impact du « son Robinson » sur MH.
Certes, le son général était crade mais il manquait singulièrement de définition et ne rendait pas hommage à l’épaisseur habituelle qu’obtenaient les boys.
Le mix de la batterie était lui aussi très spécial, en particulier le charley qui groovait vraiment comme une casserole Tefal.
Le sympathique Mac Clain semblait avoir oublié sa double pédale à Dallas et en s’essayant au jeu « pachydermique », il négligeait toutes les finesses qui faisaient pourtant toute la richesse de son jeu.
Bref, Robinson faisait sonner MH comme tous les copains qui étaient passés avant.
Je ne passe pas sous silence qu’il n’y avait pas que la prod qui a fait de cet album ce qu’il est. Il y a aussi les chansons.

Après un intro sans saveur, débutaient quelques notes que nous connaissions bien : celle du riff d’intro qu’utilisait MH lors de leur première tournée.
Nul doute que si MH avait fourmillé d’idée, il n’aurait pas recyclé ce vieux riff néanmoins excellent.
Il ne fallait pas patienter longtemps avant que MC Robert ne se mette à rapper (avec un flow excellent, il faut le reconnaître) sur ce titre mid tempo plutôt bien balancé. Bon, évidemment ce n’était pas « A thousand lies » mais dans son style, le morceau était très bon.
Arrivait ensuite « Nothing left » (promis comme une « vraie tuerie ») qui avec son riff lourdaud pataugeait dans la semoule.
Malgré un petit break sympathique, rien de bien vraiment bandant sur ce titre.
Heureusement que « The blood, the sweat, the tears » rattrapait le tout. Avec son couplet disco et son refrain fédérateur, la chanson était le hit de l’album.
« Silver » possédait de bons lyrics et une jolie mélodie. Rob Flynn y chantait vraiment bien et montrait qu’il avait vraiment fait des progrès au chant.
« From This day » continuait dans la lignée de « Desire to fire » et Flynn ressortait sa panoplie du parfait toasteur pour un titre encore riche en saveur Hip hop.
« Exhale the vile » était défini comme un classique, un cadeau aux fans. Malheureusement, il ne suffit pas de coller deux harmoniques naturelles pour faire un classique. « Davidian » était très loin.
Suivait ensuite la fameuse cover « Message in the bottle » qui changeait un peu des habituelles « Alan’s on fire » ou « Hard times ».
Passer de « Pig champion » à « Sting »… ça se passe de commentaires.

« Devils whit the king’s cards » était dédicacé à Logan. A noter que c’était la première fois (et on l’espère la dernière) que MH jouait un riff Grunge et ce en plein milieu pour « pimenter » la sauce. Pas vraiment une réussite.
« I Defy » était une chanson pas vraiment inspirée et ne faisait que confirmer que les boys devaient être dans un sacré « ego trip ».
Heureusement que « Five » avec son riff à la « Old » redonnait le sourire. Le groupe semblait enfin se mettre un peu plus en danger et en particulier Rob Flynn qui se livrait dans ses lyrics comme jamais il ne l’avait fait auparavant.
Arrivait alors le titre éponyme « The Burning Red ».
Largement détesté par les fans, ce titre restait très bon et offrait un vrai moment d’émotion avec une envolée finale tout simplement grandiose. Machine Head réussissait à nous faire frémir… mais hélas en tournant complètement le dos à son passé.
MH a voulu faire son « Load » mais il a oublié entre-temps de faire « Master… », « And Justice… » et bien sûr le « Black album ».
Cependant l’album se vendit très bien, ce qui permit au MH de tourner avec les cadors du NU (Coal Chamber, Slipknot) tout en s’offrant une exposition maximale (le groupe voyant son logo apparaître à plusieurs reprises dans la très célèbre série des « Sopranos »).

Nos petits cœurs de metalleux sentaient bien que MH se laissait éblouir par les lumières du music bizness.
Ils ont surfé sur la vague (et en ont bien profité) mais ils se sont cassé la gueule et ont failli s’écraser sur les coraux.
Là où les deux premiers albums étaient des réussites artistiques, le troisième trahissait en dépit de toute considération stylistique, des facilités de compostions, un manque d’inspiration et de hargne mais… un renouvellement.

Vous vous demandez certainement pourquoi cet album est dans les « remembers » alors que je l’ai pas vraiment épargné sur ces quelques lignes.

Est-ce que cet album en dépit de tous ses défauts a sa place dans les albums qui ont marqué le Métal ? La réponse est oui.

Si Machine a sorti de très bons albums par la suite (si on excepte « Supercharger » bien sûr) c’est certainement parce qu’ils ont assumé ce virage à 180° et qu’ils n’ont pas fait à la place de « Burning red » un « Burn my eyes » bis.
« The Burning Red » est donc une pierre angulaire chez Machine Head car cela leur a permis de s’égarer avant qu’ils ne redéfinissent leur sens des priorités. Dans ce sens, « Silver » a autant d’importance que « Block ».
Gageons aussi qu’il demeure quand même une poignée de bons morceaux sur ce skeud et quelques belles rimes quand, bien sûr, Rob cesse de se tutoyer le chibre.

Comme je le disais au début de la chro le troisième album est capital… même s’il n’est pas très bon. Machine Head a su renaître de ses cendres et « Enter the phoenix » apparaît à ce titre comme un morceau prophétique.

« It's all about
The blood, the sweat, the tears
Attribute to the strength
All through the years »



Rédigé par : Pamalach 77 | 1999 | Nb de lectures : 2186


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Commentaire
Solo Necrozis
Membre enregistré
Posté le: 27/04/2010 à 21h39 - (27002)
Très bonne chronique, très instructive pour les kids comme moi qui n'ont connu cet album que quelques années après...A la lumière de cette chronique je vais de suite lui accorder une écoute plus attentive.



Blind
Membre enregistré
Posté le: 22/01/2012 à 14h08 - (27143)
Très bonne chronique oui mais avec Pamalache on est habitué. Sinon concernant l'album proprement dit, je me souviens qu'en 1999 je n'entendais plus vraiment de metal chez moi et je venais plutôt de me mettre au punk rock. Et ce n'est que deux ans plus tard, vers 2001 et la découverte réelle du néo et des quelques restes de metal pur et dur que j'avais acquis dans ma prime jeunesse, que je me suis dit que j'allais écouter ce Machine Head. C'est vrai que sur le moment je n'ai pas accroché plus que ça puisque j'écoutais plus accaparé par les KoRn, Slipknot et autres Sepultura période post-Arise. Et paradoxalement je n'ai réécouté ce Burning Red qu'après, quand "Supercharger est sorti". Alors même s'il n'est pas un album inoubliable, ce troisième MH s'écoute de temps en temps non sans déplaisir. Faut dire que je n'ai pas tourné ma veste vis-à-vis du néo metal (je déteste l'appellation "Nu Metal").



vincesnake
Membre enregistré
Posté le: 22/01/2012 à 16h27 - (27151)
Un album qui était génial à sa sortie mais qui fait bien tache aujourd'hui comparé à ses 2 prédécesseurs ou encore Throught the age et the blackening...

TarGhost
Membre enregistré
Posté le: 22/01/2012 à 22h12 - (27162)
The worst of...
Non, à bien y réfléchir, c'est "Supercharger" le pire album de Machine Head.

hainemijuré
Invité
Posté le: 11/03/2012 à 17h26 - (27187)
Acheté dès sa sortie et revendu aussi sec.



RBD
Membre enregistré
Posté le: 17/05/2012 à 17h44 - (27478)
Eh ben moi j'aime bien cet album, même plus que "The Blackening". Acheté à l'époque (je me souviens, il était sorti en plein été), je n'avais pas d'a priori sur le virage Néo annoncé. Le son de Ross Robinson, très reconnaissable ici encore, et sa manière de pousser un groupe au bout, apportait de la fraîcheur. Il a permis à Flynn de fendre l'armure - tout en restant très grande gueule, c'est clair. Oui, ce look nouveau était risible mais il faut voir ce qui était dans le vent à l'époque. Si MH se donnait une attitude plus à la mode, ils avaient l'air sincèrement bien dans leurs pompes (Vans (r)) à faire cela et cet enthousiasme était communicatif.

Certains effets sont trop appuyés, la reprise de The Police est un massacre qui n'ajoutait rien, le son est ultra daté fin des années 90 Neo-Metal-triomphant. N'empêche que certains titres me font encore très plaisir, et pas forcément ceux qui ont le plus marqué la populace ("Nothing Left", "Devil with...", "Five"). Prématurément vieilli, mais inoubliable.



GabinEastwood
Membre enregistré
Posté le: 08/08/2013 à 10h46 - (29709)
J'adore le groupe, j'adore Supercharger mais là non !! Franchement entre les compos qui se ressemblent toutes et pas inspirées du tout et cette reprise de Police massacré (Sting a dû apprécier ...)

Je ne l'ai pas réecouté depuis des années, et curieusement hormis The blood, the sweat & the tears, rien ne me manque



Velvet Kevorkian
Membre enregistré
Posté le: 12/11/2014 à 14h00 - (31436)
Le début de la fin pour MACHINE HEAD.

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