SODOM – Expurse of Sodomy + Persecution Mania (Steamhammer) - 27/10/2003 @ 15h31
Au cours des 80s, l' Allemagne était la terre de prédilection du métal brutal, grâce à des labels comme Noise Records/Modern Music et Steamhammer/SPV, avant d'être supplantée à partir des 90s par le thrash / death scandinave. L'ex-RFA a enfanté des incontournables du thrash tels que Destruction, Kreator et Sodom, féroces et sans concessions dès leurs jeunes débuts, comparé à leurs plus folkloriques compatriotes de Tankard, Rage, Grave Digger, Helloween, Running Wild, etc. A partir d'influences communes (Venom et Motörhead surtout), ces groupes vont mettre en ébullition la scène européenne et l'influencer durablement. Les années 86-87-88 sont cruciales et voient les parutions majeures que sont "Infernal overkill", "Eternal devastation" (Destruction), "Pleasure to kill", "Terrible certainty" (Kreator), et surtout "Persecution Mania" (Sodom), précédé du maxi "Expurse of sodomy". Il est bon de ressortir ces deux derniers joyaux des oubliettes, et de rappeler combien ils méritent de figurer au panthéon des oeuvres ultimes du thrash.

Formé autour de deux jeunes enragés répondant aux noms de Thomas Such (a.k.a. Angelripper, basse/chant) et de Christian Dudeck (a.k.a. Witchhunter, drums), fans de Tank, Venom et Anvil, le duo Sodom sort plusieurs démos dont les cultissimes "Victims of death" (1983) et "Witching metal" (1984). Malgré les sorties pour SPV de leur premier mini-LP "In the sign of evil" (1984), puis de l'album "Obsessed by cruelty" (1986), peu produits et fleurant bon le black/punk pré-pubère (chant gueulé dans un anglais douteux, guitares aigues au jeu chaotique, magie noire clichesque, look de bikers) mais néanmoins cultes, Sodom a du mal à stabiliser son line-up avec une vague de guitaristes remerciés tour à tour (Grave Violator, Destructor, etc). Dans la presse et pour les détracteurs de l'obscur, le duo se fait régulièrement traiter de musiciens ratés aux côtés de Venom. Tout change avec l'arrivée de Frank Godszik a.k.a. Blackfire, qui apporte plus de concision, et surtout de vraies guitares, aux compos d'Angelripper/Witchhunter.

Le maxi 3-titres "Expurse of sodomy" (1987) est un premier avertissement: Sodom s'est trouvé, et va faire mal. Le titre-phare "Sodomy and lust" au riff black rugueux (et aux textes explicites et crus !), la rythmique thrash soutenue de "Conqueror" et surtout l'épique "My atonement", à l'intro ténébreuse arpèges/orgues, dévoilent le nouvel atout que constitue Blackfire, aux riffs inspirés et aux soli agressifs, sans oublier une production enfin adaptée. Les textes d'Angelripper deviennent moins basiques, avec un chant caverneux et monocorde plus maîtrisé. Witchhunter joue mieux, s'appuyant sur un son de batterie personnel, aux toms très secs.

La même année, le trio enfonce le clou avec "Persecution mania", qu'il enregistre au très en vogue MusicLab de Berlin, assisté par Harris Johns (Tankard, Voivod, Pestilence, plus tard Immolation), un des grands noms de la production métal du moment, au même titre que le seront Scott Burns ou Colin Richardson plus tard. Propulsé en ouverture, "Nuclear winter" donne le ton de l'album: on se prend en pleine poire un thrash / death aux racines black évidentes, mené par des guitares graveleuses, soutenues par une basse distordue et une batterie galopante. Le speed est de mise sur les deux premiers couplets, puis un bridge puissant, au riff heavy millésimé Blackfire, calme le jeu avant un solo volontairement confus pour rester 'evil'. Une structure classique, directe mais qui ne rate pas sa cible, et qu'on retrouvera à l'identique sur le titre suivant, "Electrocution". Puis surprise (car c'est la première fois qu'un représentant du métal ultime se prête à ce genre d'exercice), une reprise très personnelle, façon black thrash, et réussie, du "Iron fist" de Motörhead, influence majeure et vénérée de Sodom. S'ensuit le fulgurant "Persecution mania", à la batterie omniprésente (double et roulements continus), au refrain entêtant, et mis en valeur par des delays sur le chant. Ce titre introduit le thème de la guerre du Vietnam, qui va devenir récurrent dans le concept Sodom (quoique les concernant, le mot est peut-être exagéré...). Sur "Enchanted Land", la même structure que sur "Nuclear winter" est rebalancée, et toujours aussi sauvage.

En deuxième partie, l'instrumental doom "Procession to Golgotha" installe une pesanteur religieuse, évoquant la dernière marche du Nazaréen sous le poids de sa croix, les cymbales de Witchhunter sifflant telles une flagellation. Annoncé par cette intro, "Christ Passion", traitant de l''aveuglement et de l'illusion dans la chrétienté, rentre en heavy, explose en black/death malsain, et alterne efficacement ces deux cadences jusqu'à la fin. Les riffs de Blackfire sont simples, mais imparables à chaque changements de rythme. Lancé par une batterie locomotive, le débridé et très motorheadien "Conjuration" cavale, et, à l'image de son idole Lemmy sur "Stay clean", Angelripper s'offre un solo de basse sur ce morceau au riff unique. L'album se termine avec "Bombenhagel", morceau culte toujours réclamé par les fans allemands de Sodom lors des concerts. Et pour cause, il s'inspire des bombardements intensifs sur Berlin à la fin de la 2è guerre, et de l'abandon du peuple allemand par la communauté internationale, vécu comme une punition ("...they left us to our fate..."). Après plusieurs chorus, le solo final de Blackfire reprend l'hymne patriotique (et c'est un euphémisme...) "Deutschland über alles", ce qui a fait subir à Sodom les foudres des anti-nazis. Comme pour Slayer, l'amalgame fut vite fait, et le groupe devra souvent s'expliquer sur scène avant de jouer ce titre. Aucun texte encore en allemand sur "Persecution mania" (ça viendra plus tard), mais un chant anglais délicieusement passé au hachoir par l'accent d' Angelripper, donnant tout leur charme aux vocaux ! Concernant le visuel, c'est la première apparition du soldat au masque à gaz, qui deviendra la mascotte de Sodom.

"Persecution mania" contient le plus bestial du style Sodom, et reste une des meilleures ventes de leur carrière. Il sera supporté par une tournée avec les américains de Whiplash (le "Sodomania Tour"), immortalisée sur "Mortal way of live"(1988), premier double live de l'histoire du thrash, c'est à souligner. "Persecution mania" et "Expurse of sodomy" y figureront dans leur intégralité, mais malheureusement, à cause d'un sous-mixage de la guitare, le rendu y est faiblard. "Agent orange" (1989), l'album suivant (chroniqué aussi dans 'Remember'), grâce à un son surgonflé, donne toute puissance aux idées de Blackfire. Mais à part quelques brûlots ("Agent orange", "Magic dragon"), Sodom vire aussi vers le thrash facile style chansons-et-bières, avec des côtés chantés lourdingues ("Remember the fallen", "Tired and red") et des passages typiquement métal germanique assez pénibles ("Ausgebombt"). La tournée correspondante sonna le glas de Sodom, avec le départ de Blackfire, parti exercer ses talents chez Kreator (sa griffe s'entend d'ailleurs sur "Coma of souls"). Pour ma part, j'ai lâché l'affaire pour la suite de leurs aventures (non sans prêter une oreille attentive aux efforts suivants), Blackfire ayant emporté avec lui la recette magique. Ma préférence va vers "Persecution mania", et de loin, car sur cet album sont combinés habilement inspirations dark (un mélange bien dosé de black, death et heavy sauvages) et professionnalisme de studio, faisant de lui la réponse européenne idéale à "Reign in blood" (pour contredire Loufi dans sa kro...). Et comme résultat, Sodom réussit à offrir ce que Venom avait raté: Rendre le bourrinage audible, puissant, maîtrisé, efficace et vraiment 'evil'. Il est certain que plus de quinze ans après, le domaine du son s'est amélioré (masquant souvent la perte d'originalité) et que cet album fera sûrement sourire, voire s'esclaffer, le fan de In Flames ou Cradle Of Filth. Mais il représente pour moi (et pour beaucoup) mes meilleurs moments de headbanging adolescent, lorsque le thrash connut son âge d'or. Son charme agirait-il encore aujourd'hui ? On peut en discuter...

SPV avait eu la bonne idée de regrouper sur un même CD "Expurse of sodomy" et "Persecution mania", agrémentés d'une version modernisée du titre "Outbreak of evil" (à l'origine sur "In the sign of evil"). Les versions vinyl des premiers Sodom étant pratiquement introuvables, et ce CD étant épuisé, une édition 2CD en import (2000) le reprend, avec les albums "In the sign of evil" et "Obsessed by cruelty" sur le deuxième CD. Un package d'anthologie à ne pas rater....


Rédigé par : Blacksun | 1987 | Nb de lectures : 3033


Auteur
Commentaire
Dominator
Invité
Posté le: 06/11/2003 à 02h55 - (631)
Très bonne critique. Je suis d'accord avec ce que tu as écrit. J'ai suivi Sodom depuis leur premier mini-LP (~1984). Cet album ainsi que le maxi "Expurse of Sodomy" sont les points forts du groupe.

Blacksun
Invité
Posté le: 07/11/2003 à 14h38 - (641)
Thanx (>Dominator). Pour revenir sur l'anglais douteux de Sodom, je n'ai toujours pas réussi à traduire le "expurse" du titre du maxi. Quelqu'un a une idée ?

Loufi
Invité
Posté le: 07/11/2003 à 19h36 - (642)
A priori, c'est un mot inventé (involontairement ?) par le groupe...

Dominator
Invité
Posté le: 08/11/2003 à 04h28 - (643)
Je suis d'accord avec Loufi. Ca semble être un mot inventé. Si tu lis les paroles de "Sodomy and Lust" (et autres chansons), plusieurs phrases n'ont aucun sens en anglais. Étant parfaitement bilingue, je me demande si Sodom ne voulait pas utiliser le mot "expurgate" qui veut dire supprimer en français. La phrase "Expurse of innocence and helplessness" semble indiquer "la suppression de l'innocence...". Cependant, ce mot ne vas pas avec "helplessness". Peut être que Sodom voulait plutôt dire "Explosion" comme dans "Explosion de sodomie" ou "Explosion d'impuissance" (helplessness). Bizarre…

the rat in the cellar
Invité
Posté le: 13/11/2003 à 15h32 - (648)
Persecution Mania est a mes yeux le meilleur album Thrah jamais sorti, et je le classerais numero 2 de mes album favoris (le premier etant high Voltage d'AC/DC (version europeenne).
Sodom uber Alles !!!

Monarch
Invité
Posté le: 14/11/2003 à 12h52 - (650)
Personnellement, je rajouterai le Human de Death et aussi le violent de Kreator, mais sinon THRASH TEUTON FOREVER !!!

Judge Fredd
Invité
Posté le: 21/12/2003 à 19h37 - (683)
Excellente chronique très complète qui m'a rappelé de très bons souvenirs... Un album vraiment puissant et génial. Que dire de l'énorme morceau Nuclear Winter...
L'album Agent Orange mérite également une attention toute particulière même s'il est un peu différent.

nico92
Invité
Posté le: 05/02/2004 à 15h58 - (719)
Je n'ai jamais été un grand fan de Sodom mais j'adore l'album "better Off Dead"... "The saw, is the law", arrghhh !!! Une tuerie. P****, 14 ans déjà !!
"Agent Orange" est sympa aussi.

Thrashdeathblack
Membre enregistré
Posté le: 25/04/2007 à 02h21 - (3783)
le meilleur de sodom avec "agent orange"...et il débocha sur un putain de live...;)

Persecution Mike
Invité
Posté le: 02/09/2008 à 21h58 - (26267)
Les 3 derniers albums de SODOM sont du niveau de Persecution Mania.

Le groupe s'est bel et bien repris.

maximum rocknroll
Invité
Posté le: 19/03/2009 à 21h56 - (26585)
Sodom à l'époque était énorme. Un batteur encore plus mauvais que celui de Venom (voir le solo sur le double live), des paroles dans un anglais encore plus mauvais - et une vraie barbarie musicale. C'était le temps des radios libres - j'avais mon émission de métal. J'ai été viré pour avoir passé Blasphemer, tiré du premier mini-LP - trop bruyant, trop n'importe quoi...
Pour ces deux disques en question - ils sont excellents. Tom Angelripper est plus grand que Lemmy !

Mr Perfect
Invité
Posté le: 30/07/2010 à 12h51 - (27031)
Superbe krosauf que pas d'accord avec le fait que Sodom vaut rien sans Backfire.
Sodom c'est mieux et c'est tout.
hate de les revoir au motocultor

Dittohead
IP:90.32.145.19
Invité
Posté le: 12/05/2013 à 09h33 - (29338)
Une belle claque à l'époque. Je me souviens m'être dit "merde ils ont appris à jouer!" après les 2 premiers assez chaotiques...

Morbid Tankard
Membre enregistré
Posté le: 12/05/2013 à 15h57 - (29352)
SODOM, c'est comme le cochon : tout y est bon.



Fred / INHUMATE
Membre enregistré
Posté le: 12/05/2013 à 16h03 - (29354)
"Masturbate to kill myself" (Blasphemer). Quand "In the sign of evil" est sorti, c'était de la pure folie ce truc !!!! Juste fantastique !
Pour moi leur meilleur sortie c'est le maxi "Expurse of sodomy", plus posé, moins chien fou, basique, du grand SODOM mature quoi !



jaquouille
Membre enregistré
Posté le: 13/05/2013 à 07h27 - (29360)
très bon album, même si je lui préfère agent orange... perso j'ai suivi le groupe encore sur better off dead puis j'ai lâché l'aventure... les nouveaux albums n'arrivent pas à me convaincre
tom mène sa barque depuis tellement longtemps... RESPECT



Fred / INHUMATE
Membre enregistré
Posté le: 13/05/2013 à 16h37 - (29361)
Pareil enf ait ! J'ai aussi acheté "Better off dead" qui m'a pas emballé et depuis, même quand il est annoncé que c'est un retour aux sources, etc... j'accroche plus comme avant. Dommage !




Ajouter un commentaire

Pseudo :
Enregistrement Connexion






Niveau de modération : Commentaires non modérés par l'administration du site

Ce commentaire est soumis à la lecture et à l'approbation des modérateurs. S'il ne suit pas les règles suivantes : Pas de pub, pas de lien web, pas d'annonces de concerts, il ne sera pas retenu. Plus d'infos

Proposez News | VS Story | F.A.Q. | Contact | Signaler un Bug | VS Recrute | Mentions Légales | VS-webzine.com

eXTReMe Tracker