En général le « Metal à chanteuse », hors extrêmeries à la ARCH ENEMY, s’inscrit toujours dans un sous-genre bien particulier que ça soit le Power-Prog, le pur Metal sympho/orchestral, le goth voire le doom/death ou même l’electro/indus. Mais comme partout, il y a des exceptions, des formations bien décidées à ne pas suivre les démarches habituelles. ASYLUM PYRE, parti d’un Metal plutôt teinté de Power-Prog pour Natural Instinct? (2009) pour s’ancrer dans un Metal tout de même aisément classifiable en « Metal gothique », ne fait donc rien comme les autres. Ni sympho, ni vraiment prog, ni spécialement doom, ni 100% électro, ASYLUM PYRE se joue des codes. Sa production n’est ni réellement moderne, ni foncièrement passéiste. Le chant de Heidi n’est ni lyrique à la NIGHTWISH, ni doux à la THE GATHERING. Si on peut peut-être le classer aux côtés de formation comme DELAIN qui donnent dans un Metal à chanteuse simple mais efficace avec tout de même quelques aspérités, le groupe parisien a bel et bien trouvé sa voie depuis Fifty Years Later (2012). Et non pas 50 mais 3 ans plus tard, ASYLUM PYRE va confirmer ses bonnes dispositions grâce à Spirited Away, troisième full-length et deuxième à sortir chez Massacre Records.

ASYLUM PYRE est donc bien loin des productions aseptisées et du Metal finalement trop mainstream même si bien sûr, nous ne sommes pas dans un registre extrême, mais un registre tout de même Metal. "Second Shadow" balance donc d’emblée des riffs assez râpeux et même lourds. On demeure loin d’un son Death-Metal mais les guitares raclent pas mal tout du long des 50 minutes de cet album. On pourrait ainsi penser qu’ASYLUM PYRE tente de revenir aux racines du Metal à chanteuse des années 90 qui était souvent assez proche du son Doom, mais Spirited Away n’est pas un album « old-school ». D’ailleurs, des oripeaux électro sont là pour le prouver ("Only Your Soul", "Unplug My Brain" avec ses voix vocodées, le début de "At My Door" et "Instants in Time"), même s’ils sonnent un peu kitsch parfois (les synthés de "Only Your Soul"). Pour le reste, on a donc le droit à du Goth-Metal à chanteuse assez cossu et accrocheur, notamment grâce aux refrains très bien menés ("Second Shadow", "Unplug My Brain", "Spirited Away"). Des hits apparaissent alors bien vite ("Second Shadow", "The Silence of Dreams", "Shivers"). Mais ASYLUM PYRE ne se contente pas d’aligner les morceaux faciles et efficaces et des petites surprises jalonnent les 13 morceaux (interludes compris) de "Spirited Away". "Only Your Soul" nous propose donc des compos tendant fortement vers le mélodeath et des vocaux extrêmes se font même entendre, de même qu’un court passage qui lorgne du côté de SAMAEL. Et ce n’est rien à côté du très tranchant "Shivers" aux accélérations salvatrices et lui aussi marqué par quelques chants extrêmes ; et surtout du départ et de la fin de "Soulburst", carrément brutöl avec des growls (!), le tout encadrant un morceau très riche et original et super bien arrangé de bout en bout, une piste vraiment progressive qui montre qu’ASYLUM PYRE est inspiré et a des idées à revendre.

Souvent Meutal, Spirited Away n’en demeure pas moins un album de Dark/Goth Metal qui se la joue donc cool, et ASYLUM PYRE est aussi en réussite de ce côté, outre les bonnes ambiances de "Spirited Away" on retrouve deux quasi-ballades bien menées et assez belles, le très posé et acoustique "The White Room" et le final "Fly" avec son chant masculin prenant. En 50 minutes, Spirited Away n’est pas exempt de longueurs ou de morceaux tout simplement moins marquants ("Only Your Soul", le plus heavy "At My Door", "Instants in Time"), mais globalement ce 3ème opus d’ASYLUM PYRE est une bien bonne œuvre de « Metal à chanteuse ». En s’affranchissant de certains codes du genre que ça soit sur le fond et sur la forme, le groupe parisien est parvenu à sortir un album de Goth-Metal assez singulier, qui comporte tout ce qu’il faut pour se distinguer de la masse (excellents morceaux, passages plus croustillants très judicieux, variations remarquables et aspérités surprenantes) en plus d’une certaine maîtrise instrumentale et vocale à saluer. Ce n’est pas l’album de Metal à chanteuse du siècle et je pense qu’ASYLUM PYRE peut encore progresser, sachant que les choix de son et le chant ne convaincront peut-être pas tout le monde. Loin des albums de Metal à chanteuse qui sortent par palettes en espérant sur un malentendu obtenir le succès de WITHIN TEMPTATION et NIGHTWISH, la formation française a pris des risques qui sont assez payants, faisant de Spirited Away un album léché et efficace pour les fans du genre, et une curiosité à tester pour les autres.




Rédigé par : ZeSnake | 15/20 | Nb de lectures : 7636