MONOLITHE - Epsilon Aurigae (Debemur Morti) - 21/12/2015 @ 07h40
Après IV albums longue-durée (c’est le cas de le dire) -et des petits à-côtés regroupés sur la compil Monolithe Zero-, il est temps pour MONOLITHE d’entamer un nouveau cycle et de révolutionner son univers, tout du moins sur la forme. Abandonnant son chiffrement romain (comme d’autres) en vigueur de Monolithe I (2003) à Monolithe IV (2013), MONOLITHE le groupe de Doom français le plus ambitieux va donc en profiter pour abandonner également son schéma de composition, qui jusque là avait donné naissance (hors EP) à des morceaux dépassant 50 minutes, formant chacun un album. L’occasion pour la formation menée par Sylvain Bégot d’expérimenter de nouvelles choses grâce à des morceaux plus distincts et plus courts. MONOLITHE se distinguait pourtant également par la maîtrise de ses longs morceaux, cohérents et truffés de cassures savamment dosées et de mouvements parfaitement menés. Epsilon Aurigae, premier disque du nouveau cycle dont le successeur devrait paraître assez vite, va donc retrouver des schémas plus conventionnels issus du Funeral Doom dont le groupe puise une partie de ses influences, en plus de son côté spatial bien apocalyptique qui fait une des nombreuses forces de MONOLITHE depuis ses débuts.

Le travail et la recherche de la perfection restent de mise pour un album dont les 3 morceaux proposés durent chacun exactement 15’00, pas une seconde ne dépasse. On se souviendra ici de KALISIA et de son Cybion qui durait précisément 1h11’11’’. Avec trois morceaux de 15 minutes, Epsilon Aurigae fait donc figure de n’importe quel album de Funeral Doom. Mais MONOLITHE a un truc en plus, des trucs en plus même, trucs qu’il a développés sur ses 4 premiers albums, sans occulter les EPs Interlude Premier et Interlude Second (ce dernier étant toujours pour moi ce que le groupe a fait de mieux). Et si Epsilon Aurigae bouscule donc énormément la forme, il ne va donc pas changer spécialement le fond. Non, MONOLITHE n’a pas changé et continue à développer son univers musical particulier, son son, ses compos, ses ambiances. Rythmes et riffs hypnotiques et pesants, vocaux profonds et déclamés, passages mélodico-dissonants, synthés sidérants et ambiance SF à la 2001SO sont toujours de mise. Mais l’ensemble prend cette fois place dans un cocon plus accessible, plus digeste, même si tout amateur de Doom un tant soit peu « expérimental » n’avait eu aucun mal à se plonger dans les morceaux de 50 minutes. MONOLITHE n’aère donc pas spécialement son propos, il le rend juste plus malléable, plus facile à retenir, et c’est d’ailleurs ce qui fait la Force de Epsilon Aurigae.

"Synoecist" se pose d’ailleurs directement comme un des meilleurs « morceaux » de MONOLITHE, sachant que le groupe devrait proposer d’autres pièces plus « courtes » à l’avenir. "Harmony of Null Matter", l’unique morceau de Interlude Second, remplissait déjà bien cet office (en 36 minutes tout de même) mais ici, le paysage sonore est quelque peu différent. Alors que le groupe développe comme d’habitude tous ses éléments typés Doom/Death et ses particularités propres comme les passages dissonants, "Synoecist" convainc bien vite de par l’ambiance particulièrement grandiose que le groupe a choisi de mettre en avant ici. Jamais les synthés n’ont été aussi en exergue sur un « morceau » de MONOLITHE, conférant à cette piste de 15 minutes 0 secondes une aura épique bienvenue (le final est un régal). Le groupe ne fait rien de neuf et reste reconnaissable entre mille grâce à son « Stanley Kubrick Doom », mais est en grande réussite. Et le fait d’avoir affaire à une piste courte rend donc le propos de MONOLITHE plus accrocheur, on multiplie plus facilement les écoutes et on retient aisément les moments forts de cet excellent morceau d’ouverture qui fait quand même un tiers de l’album. Et même en 15 minutes seulement, on retrouve les singularités de composition de MONOLITHE qui accompagnait ses morceaux plus longs, comme ces riffs menant des mouvements ou des cassures jubilatoires, ici le splendide passage quasi-tribal vers 9’45.

Epsilon Aurigae, c’est donc du MONOLITHE en plus épique et en légèrement plus lumineux, qui pour la forme fait donc évoluer ses morceaux de manière plus « condensée ». Après l’ouverture "Synoecist", le groupe confirme sa bonne forme sur la clôture "Everlasting Sentry", là aussi porté par les parties de synthé qui se font carrément symphoniques par moments, tandis que riffing et voix demeurent bien lourdes. L’art de MONOLITHE sait donc toujours se faire envoûtant et prenant quelque soit la forme utilisée, et tout comme "Synoecist" on s’accrochera plus facilement à de grands moments de "Everlasting Sentry" (avec encore un break classieux vers 9’45…) plutôt que de devoir farfouiller dans un morceau de plus de 50 minutes. Même si ce morceau est parfois un peu redondant, on peut déjà affirmer que la nouvelle direction prise par MONOLITHE est auréolée de réussite, même si au fond rien n’a changé dans le style. Dommage par contre qu’entre ces deux beaux quarts d’heure se trouve l’instrumental "TMA-0" que j’ai trouvé un peu en demi-teinte. Bon déjà moi et l’instrumental ça fait deux… et ça va forcément coincer sur un morceau Doom de 15 minutes, qui s’avère vite répétitif (ce qui n’a jamais été un reproche ni pour du Funeral Doom, ni pour MONOLITHE) et surtout assez ennuyeux, malheureusement, "Synoecist" et "Everlasting Sentry" ayant bien plus d’aspérités auxquelles s’accrocher que cette plage qui ne fait au final qu’enchaîner riffs lourds et passages mélodiques avec des synthés stellaires en fond.

Les amateurs de performance reprocheront peut-être à MONOLITHE d’avoir finalement cédé à la facilité en revenant à des schémas Funeral-Doomesques plus traditionnels, mais le groupe français n’en a pas pour autant perdu sa personnalité, bien au contraire, que ça soit dans son style résolument cosmique façon 2001SO ou son aspect fignolé et parfaitement structuré, la différence est qu’il est développé et exprimé sur des morceaux faisant 15 minutes et non 50. Rien de surprenant quand on connaît MONOLITHE et ses 4 précédents albums sur le bout des doigts, mais le jeu en vaut la chandelle, même si on aurait sans problème repris une nouvelle pièce dépassant 50 minutes pour la décortiquer. Il est vrai qu’après un Monolithe IV qui n’était pas ce que le groupe avait produit de mieux dans sa version « très longue durée », ce changement va relancer le groupe en bousculant ses propres codes, et peut-être même attirer à lui un nouveau public, qui cherche quelque chose de plus abordable et qui se laissera plus facilement emporter par des "Synoecist" et "Everlasting Sentry" de 15 minutes qu’un "Monolithe III" de 52 minutes, même si intérêt et styles sont finalement les mêmes. Reste donc que MONOLITHE n’a pas pris de risques et n’a pas profité de ce changement de forme pour faire évoluer le fond, et que seuls 2/3 de l’album valent le coup, mais ce sont les 2/3 les plus épiques que MONOLITHE a jamais produit. Epsilon Aurigae est un effort à confirmer de par son successeur qui devrait logiquement le compléter, en attendant, c’est tout simplement du très bon MONOLITHE qui s’exprime d’un autre façon, mais toujours avec classe dans son Doom cosmique maîtrisé et unique.



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Rédigé par : ZeSnake | 15/20 | Nb de lectures : 9209




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