Les Acteurs de l’Ombre frappent fort en cette fin d’année 2015. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils soignent la promo de leurs poulains. Le packaging du dernier Moonreich – Pillars of detest – est encore de toute beauté, à l’image du dernier Déluge. De toute beauté certes, mais ne reflétant guère le fond du disque sous examen. Si le Mal est assis sur son trône, entouré de fauves imposants et majestueux, si le Mal se vautre dans les ténèbres, dans les teintes grises de la pochette, le Mal n’en demeure pas moins ouvert d’esprit !

Moonreich, dont c’est ici le troisième album (en plus de deux EP), ne m’a jamais totalement convaincu. Son black intelligent m’a toujours semblé manquer de puissance et d’un souffle d’originalité pour faire la différence. Ce Pillars of detest me laisse parfois un goût identique en bouche en dépit de qualités indéniables, notamment donc d’ouverture.

La musique de Moonreich est en effet intelligente. Son mélange de BM brut et d’influences post ou prog’ fonctionne plutôt bien. "Ad nauseam", qui ouvre l’album, repose ainsi sur ces bases, qui mixe ponts prog’ (vers les 4’20) et assauts plus typiquement BM. "Believe and behead" également, où la rythmique impulse une dynamique forte au morceau, juste cassée par des breaks post que n’aurait sans doute pas renié Aosoth ou DSO notamment. Loin cependant d’en être un copié-collé, le morceau recèle de belles mélodies (le pont vers les 4’) qui enrichissent très nettement le titre et en brise la monotonie. Idem encore sur "Long time awaited funeral" où la rythmique est justement entrecoupée de petits leads mélodiques qui relancent la mécanique tout en cassant le bloc d’agression continu (le pont encore vers les 5’50). Et si la voix demeure finalement assez classique pour le genre, mon principal reproche concerne le son et son manque total de puissance. Il est vraiment regrettable que des titres aussi bien construits, pertinents, soit la plupart du temps étouffés par un son qui manque cruellement de pêche… et de crasse. Car l’autre critique que l’on pourrait faire concerne sa texture même, trop propre à mon sens pour que les morceaux dégagent l’urgence et le désespoir voulu.

Si Moonreich peine parfois à mixer parfaitement ses influences post et prog’ au sein de ses morceaux (les longs et inutiles "Freikorps" et "Death wings majesty"), ces difficultés ne sont pas nécessairement récurrentes. Qu’il s’agisse d’un titre instrumental ("Sheïtan") ou d’un morceau chanté ("Pillars of detest – World shroud", "All born sick"), c’est lorsqu’il s’éloigne de ses influences les plus criantes (Aosoth ? DSO ?) que Moonreich est finalement le meilleur. "Pillars of detest", le titre phare de l’album, se distingue ainsi par une approche bien plus obscure, par une attaque plus vive et par une volonté de proposer un mélange personnel du meilleur effet, plus équilibré entre post, prog’ et BM. En se détachant de certaines contraintes, Moonreich me semble retrouver son essence même.

Moonreich livre ici un album de qualité, qui dévoile le meilleur de lui lorsqu’il s’éloigne de ses influences. Pour autant, le manque de puissance du son (trop propre par ailleurs) et la digestion parfois délicate de certains passages prog’/post amoindrissent son intérêt. Dommage.




Rédigé par : Raziel | 14/20 | Nb de lectures : 9706