Premier album pour les blackeux polonais d’Outre, Ghost Chants attire d’abord le regard avec son bel artwork et son livret travaillé, tout en teintes noires, la cover recouverte d’un calque classieux. Lorsque l’écrin est de si belle facture, le contenu se doit d’être au moins à la hauteur. Et, globalement, c’est plutôt le cas.

Le BM de Outre est nerveux. Tendu comme un arc (ou comme un string). Méchant et efficace. Sept titres articulés autour de 36 minutes qui passent comme une guerre éclair. Pas un pet de gras, que du muscle. Mais aussi un cerveau car, de fait, si la scène black brutal n’est pas très loin, les circonvolutions et les arabesques à la Deathspell Omega ne sont pas non plus totalement ignorées (les premières minutes de "Departure" par exemple, la structure torturée de "Shadow" ; le côté « malade » de "Equilibrium" ou de "The Arrival").

"Departure", le premier titre, annonce la couleur. Le son est surpuissant, moderne, claquant. Il ne tolère aucune faille. Clair, il offre à entendre l’ensemble des instruments et leur puissance de feu. Le titre torture, rampe lentement durant de longues minutes, avec une intro qui fait doucement monter la sauce et qui explose sur le second titre, "Shadow". Les arrangements sont nombreux, en particulier sur la batterie où les cymbales sont mises à rude épreuve. On peut encore noter l’intro sombre et orageuse sur "The Arrival", la dernière grande pièce qui clôt l’album. Le structures sont bourrées d’information, la scène post est appelée en la cause à de nombreuses reprises (DSO encore) mais ce sont surtout ces riffs ultra nerveux qui captent l’attention. Ils tirent littéralement les morceaux vers l’avant, comme dans une fuite éperdue. La rythmique est à l’avenant, hystérique mais maîtrisée (remarquable sur le départ de "Lament" ou sur "Vengeance").

Le son est globalement lourd et tournoyant, comme chez Deathspell encore (particulièrement sur "The Fall"). Les riffs tournent en circonvolutions brutales et saccadées, comme s’ils virevoltaient dans les airs. La force d’Outre est de canaliser ce chaos apparent en un flux dévastateur et lancinant. Car les enchaînements sont techniques et nombreux ; ils paraissent pourtant très naturels, comme fondus dans la structure et mouvant de leur seule initiative. C’est là un tour de force que l’on ne retrouve, à mon sens, que chez les plus grands.

Cet album d’Outre est une réussite. Pour un premier essai, il est même assez remarquable. Sans véritable faille, sans originalité pure non plus c’est vrai, Outre délivre là un album très solide, relativement emballant et qui augure du meilleur pour l’avenir. Amateur de BM puissant, déstructuré juste ce qu’il faut, de BM fait de chaos maîtrisé, n’hésite pas, Outre ne te décevra pas.




Rédigé par : Raziel | 15/20 | Nb de lectures : 9959