Gerrit Philipp Mutz (chant) - DAWN OF WINTER par OLIVIER 'ZOLTAR' BADIN - 1666 lectures
Rare, DAWN OF WINTER l'est assurément. Mais même si le doom traditionnel a désormais son lot de groupes et de fans, lorsque ces Teutons ont commencé à férailler sous le nom de CEMETERY en 1990, pratiquer ce style était aussi branché que sauter à pieds joints au fond d'un ravin. Dix-neuf ans après, le groupe est pourtant toujours là et sort même, après dix ans (!) de silence discographique, un 'The Peaceful Dead' qui fera frissonner de plaisir le fan de REVEREND BIZARRE et SAINT VITUS. Cela méritait bien un petit point avec leur chanteur Gerrit, accessoirement aussi castrat pour les true metallers de SACRED STEEL...
Il vous a fallu plus de dix ans pour pondre votre deuxième album. Vous avez souffert du syndrome de la page blanche ou quoi ?
Non, de toute façon DAWN OF WINTER n'est pas un groupe qui fonctionne au même rythme que les autres. Nous ne répétons pas à date fixe plusieurs fois par semaine, nous ne faisons que peu de concerts, etc. Il y a longtemps, nous avons tous conclu un pacte : jouer du doom jusqu'à ce que l'un de nous en crève ! Ce qui veut dire que nous avons tout le temps du monde devant nous… Alors lorsque l'entre d'entre nous a une idée de textes ou de riffs, tout le monde se réunit, boit un coup, parle des derniers disques que nous avons entendus et, éventuellement, en fin de soirée quelqu'un rappelle à l'assistance qu'on a peut-être un ou deux nouveaux morceaux. Et une fois cet essai transformé, encore faut-il ensuite réussir à tous nous réunir à nouveau pour répéter, ce qui est difficile vu que nous avons tous des vies familiales et professionnelles qui nous laissent peu de temps libre. Par exemple, notre guitariste joue aussi dans MY DARKEST HATE. Et dans mon cas, en plus de mon boulot et de ma famille, je chante dans SACRED STEEL dont le planning est, à l'inverse, plutôt chargé, notamment parce que nous nous astreignons à sortir un album au moins tous les deux ans donc…
Vous avez formé DAWN OF WINTER en 1990, date où le style ‘doom traditionnel’ était tout sauf cool. Qu’est-ce qui vous a alors motivé ?
Tu sais, je n'ai de toute façon jamais vraiment écouté ce qui était cool ou pas. Sans le vouloir, j'ai toujours été attiré par les groupes méprisés par le grand public. Mais ce que j'ai beaucoup aimé avec le doom, c'est toute la culture qui s'y rattache. En fait, j'ai voulu jouer ce genre de musique le jour où j'ai découvert CANDLEMASS en 1986 et pendant les trois années et demie qui ont suivi, j'ai bataillé pour trouver des musiciens ayant envie de tenter l'aventure avec moi jusqu'à ce que je finisse par demander à mon meilleur ami, Oliver, de s'installer derrière une batterie, alors qu'il n'avait touché cet instrument, et de taper un coup de caisse claire toutes les minutes. Tout est parti de là… Sauf qu'en 1989, CANDLEMASS a commencé à prendre une mauvaise tangente, tout comme SAINT VITUS d'ailleurs dont l'album ''V' m'avait alors beaucoup déçu. Mais peut-être était-ce parce que je voulais alors qu'ils sonnent comme THE OBSESSED (le groupe de leur chanteur d'alors, Scott ''Wino' Weinrich-NDR) ! Bref, toujours est-il que le fait de voir mes inspirations principales perdre de leur pertinence m'a motivé encore plus à jouer de ce style, motivé alors par mes correspondants de SOLITUDE (avant qu'ils ne deviennent SOLITUDE AETERNUS), REVELATION et PENANCE.
Entre ‘The Peaceful Dead’ et ‘In the Valley of Tears’, la scène a beaucoup changé. Est-ce que cela vous a affectés ?
Certainement pas. Alors certes, à mon avis, la scène doom n'a jamais été aussi vivace qu'aujourd'hui. J'irais même jusqu'à parler d'âge d'or pour ce style ! Alors certes REVEREND BIZARRE n'est plus mais ce split a donné naissance à deux excellents groupes, THE PURITAN et LORD VICAR. Et puis il y a THE WANDERING MIDGET, APOSTLE OF SOLITUDE, BLOOD CEREMONY, JEX THOTH, THE DEVIL'S BLOOD etc. Mais toujours est-il que même si à l'extérieur de notre salle de répétitions, le monde explosait, cela n'aurait aucun impact sur nos compositions. Notre formule n'a pas changé, tout comme nos influences : SAINT VITUS, BLACK SABBATH, PENTAGRAM, MANILLA ROAD, CIRITH UNGOL, WITCHFINDER GENERAL, les vieux JUDAS PRIEST et MANOWAR, etc. Des noms mythiques que nous saluions déjà dans le livret de notre EP ''Celebrate the Agony' en 1993. Et en seize ans, rien n'a changé.
D’ailleurs pourquoi vous amuser à citer plein de groupes de doom dans les paroles de « The Music of Despair », le morceau d’ouverture de ‘The Peaceful Dead’ ?
Tout simplement parce que ce titre est un hommage au doom en général. Sans exagérer, je me serais sûrement tué il y a douze ans si mes disques de doom ne m'avaient pas accompagné dans ma dépression. Je me suis senti compris et surtout moins seul. Le doom m'a sauvé plus d'une fois et « The Music of Despair » n'est qu'une façon, parmi d'autres, de lui rendre hommage. Et puis vu que REVEREND BIZARRE s'étaient déjà amusé à ce petit jeu-là avec « Goddess of Doom », où nous étions cités entre MINOTAURI et SPIRITUS MORTIS, nous nous devions de leur rendre la pareille, ne serait-ce que par politesse…
Si je voulais jouer l’avocat du diable, je pourrais vous suggérer que le titre ‘The Peaceful Dead’ (‘les morts apaisés’) glorifie la mort, voire le suicide…
Tu ne peux pas glorifier ce que tu ne connais pas vraiment n'est-ce pas ?! Personnellement, j'espère qu'après ma mort, je pourrai errer tranquillement dans des contrées où ne règne que le silence. Je rêve d'ailleurs régulièrement de ça… à l'inverse, mon pire cauchemar serait d'être réincarné à l'infini, sans jamais pouvoir connaître le repos. C'est pour cela que j'envie souvent ''les morts apaisés' car eux ont su trouver la paix…
Sur votre site lastfm, on peut trouver toutes les sorties précédant ‘The Peaceful Dead’ en téléchargement libre. Acte militant ?
Euh… Tu me l'apprends ! Je suppose que notre batteur actuel, Dennis, est le responsable. Mais bon, cela ne me pose aucun problème, le plus important est que les gens puissent écouter notre le musique. Et puis tant que je sais qu'il existe des fans, des vrais, qui achèteront de toute façon derrière le CD ou le LP, cela ne pose pas de problème.
Vu le temps que vous avez mis à pondre ‘The Peaceful Dead’, faudra-t-il attendre une autre décennie pour pouvoir écouter son successeur ?
Peut-être. Nous devons répéter très bientôt, nous verrons alors si l'un d'entre nous a de nouvelles idées ou si nous préférons jouer des vieux morceaux ou tout simplement parler de ce que nous avons eu comme cadeau à Noël ! Plus sérieusement, j'espère que nous ne mettrons pas de nouveau dix ans à accoucher d'un nouvel album mais comme je te l'ai déjà dit : DAWN OF WINTER est là pour longtemps, donc nous ne sommes pas pressés…