- JADALLYS par SHAKA - 3103 lectures
Le groupe parisien JADALLYS a sorti en début d'année son deuxième album, "Labyrinthes". VS vous propose, un peu tardivement certes, une interview de ce groupe atypique.


Question très originale pour commencer : pouvez-vous présenter le groupe pour tous les lecteurs qui ne vous connaissent pas encore ?
Tino (guitare) : JADALLYS est un groupe français qui fait une sorte de metal fusion, qui mélange pas mal de styles. On va revenir là-dessus après. En fait, on est quatre. Il y a Selen, la chanteuse, Ded à la basse, Tibo à la batterie, et moi, Tino, à la guitare. On existe depuis 2001 et en fait, la formation actuelle date de 2006, avec l'arrivée de Tibo à la batterie, période à laquelle on a travaillé sur la réalisation de l'album qui ne sort que fin 2007 car il a mis un peu de temps à se faire, car on était dans une période on va dire de créativité, c'est-à-dire qu'on avait pas mal de choses diverses à essayer de réaliser, et c'est ce qui fait que l'album qui vient de sortir est assez divers à l'intérieur.


Tu parlais de diversité, vous avez un univers très particulier, c'est ce qui m'a frappé la première fois que je vous ai vus sur scène. Quels groupes avez-vous comme références ?
Selen (chant) : Pour ma part, à la fois du metal comme KORN, SYSTEM OF A DOWN... mais aussi des trucs plus mélodiques comme RADIOHEAD, PINK FLOYD... J'ai beaucoup d'influences assez éclectiques.

Ded (basse) : J'ai beaucoup d'influences aussi, je pourrais rajouter pour Tibo et moi, beaucoup de vieux progressif, comme les premiers GENESIS, ce genre de trucs.

Tino : A peu près les mêmes que les autres, avec beaucoup de KORN et aussi des vieux groupes qui ont inventé le hard comme BLACK SABBATH. J'aime beaucoup BLACK SABBATH, dans toutes les formations qu'ils ont eues. Et puis LED ZEPPELIN, DEEP PURPLE, des vieux groupes, mais qui ont tracé des voies. Et des trucs plus récents comme DISTURBED aussi. Sinon, les mêmes : SYSTEM OF A DOWN etc.

Tibo (batterie) : Moi, il y a un groupe français, c'est ANGE. C'est peut-être pas une influence forcément majeure, mais...


Pour les textes, élément essentiel de votre musique, quels sont les thèmes que vous abordez et les sources d'inspirations ?
Selen : J'aime beaucoup le XIXè siècle romantique, j'aime beaucoup Maupaussant, "Le Horla", c'est une référence, tout ce mouvement. J'aime aussi la littérature plus réaliste, style Sartre quand j'étais plus jeune, Camus aussi. J'adore les livres, on essaye de faire des récits à la base qu'on transpose en textes de chansons. C'est vrai que les textes ont leur importance, on y retrouve les questions existentielles. On ne parle pas vraiment de ce dont parle la "nouvelle chanson française", qui sont des choses du quotidien, nous ce sont des questions de fond comme le mal-être. Je sais que c'est pas forcément à la mode ou dans l'air du temps, mais moi, c'est quelque chose qui m'anime.

Tino : Je crois que les textes c'est vraiment important dans le groupe et dans tout ce que fait le groupe, c'est une dimension importante. C'est aussi pourquoi, je pense, qu'une partie du monde gothique aime ce que l'on fait, on entre un peu dans ce domaine-là aussi. On brasse plusieurs secteurs : le metal évidemment, le gothic et le rock aussi. Je pense qu'une partie des gothiques ont été touchés par les textes qui ont l'air mystiques et que derrière des histoires qui peuvent paraître magiques ou étranges, en réalité, ce sont des choses très réelles qui sont racontées. Derrière, ce sont des histoires de fond, sur la condition humaine, du mal-être.


Pourquoi ce choix de chanter en français ?
Tino : C'est un choix qui est résolu, volontaire, un choix absolument délibéré. On aurait très bien pu chanter en anglais parce que notre chanteuse a vécu en Angleterre et elle a l'accent parfait pour ça. Mais, on a décidé de chanter en français pour deux raisons. La première, c'est qu'en fait on pense avant tout dans sa propre langue. Alors, quand on veut écrire des choses dans un but précis, c'est toujours plus facile d'écrire dans sa propre langue. La seconde raison, c'est parce que le français est une langue qui existe, qui est très belle, qui est nuancée. Pendant des années on a dit que c'était pas possible de chanter en français quand on faisait du metal ou du rock, mais pourquoi on déciderait qu'on est incapable de faire quelque chose ? Non, pas du tout. Alors, on s'est dit qu'on allait chanter en français car c'est une jolie langue, ça permet d'exprimer des choses. On n'est pas les seuls, il y en a de plus en plus et ils ont bien raison à notre avis.


Votre dernier album est produit par Stéphane Buriez (LOUDBLAST). Comment l'avez-vous rencontré et comment êtes-vous venus à travailler avec lui ?
Ded : Un défi personel que je m'étais lancé, c'était qu'un jour je voulais travailler avec Stéphane Kramer ou Stéphane Buriez, c'était un rêve d'ado. Par hasard, notre ancien ingé son qui n'est autre que Guyom, le chanteur de DEVIANZ (groupe extraordinaire s'il en est) connaissait Stéphane pour avoir déjà travaillé avec lui et nous a donc mis en contact. On l'a rencontré un soir à Bastille, le courant est tout de suite passé, je crois qu'il a compris notre musique, ce qu'on voulait faire. Ca a été hyper enrichissant, aussi bien musicalement qu'humainement d'ailleurs.

Selen : C'est vrai que c'est un ingé son qui connaît bien son travail. Il a le souci du travail bien fait, c'est même un chieur au niveau du travail, c'est pas une partie de plaisir et j'aime ça aussi.

Tino : En plus de toutes ses qualités sur le son qui sont grandes, Stéphane, c'est un artiste avant tout. Et, c'est ça qui fait que ça lui permet de se mettre à la place d'un groupe, de comprendre sa musique en profondeur. Pour nous, ça a été déterminant, il a tout de suite vu où on voulait aller. C'est vrai que c'est pas évident de voir tout de suite où on veut aller, car on est peut-être un groupe un peu complexe d'accès, mais il a tout de suite vu. Et le fait que ce soit un musicien, c'est le plus par rapport à beaucoup d'autres. Il a ce petit point en plus déterminant.

Selen : C'est clair qu'il y a des gens qui sentent tout de suite le truc, c'est ce qu'on doit appeler le talent. Il y a ceux qui l'ont et ceux qui l'ont pas. Après, il y a le boulot, il faut travailler, mais il sent les choses. Et le côté humain se superpose à tout ça.


Vous faites beaucoup de concerts, d'ailleurs, je vous ai vus plusieurs fois, quels sont vos meilleurs souvenirs live ?
Tibo : Je suis pas dans le groupe depuis longtemps, seulement mars 2006, mais le concert avec THE OLD DEAD TREE m'a pas mal marqué, je sais pas ce qui s'est passé, la sauce a pris et le public a bien réagi.

Ded : Le public de THE OLD DEAD TREE est à l'image du groupe, très ouvert, à la différence du public parisien qui est plutôt là pour voir son propre groupe et qui n'en a rien à foutre des premières parties. Je pense que le public des OLD est plus accessible peut-être parce que leur musique est assez complexe avec plusieurs facettes différentes et donc on a bénéficié de ça aussi. Sinon, j'ai un extraordinaire souvenir au Cadran Breton, qui est un superbe café de Montparnasse je crois où ce soir-là, on a joué moi contre le juke-box, Tino contre le flipper, Selen avec un ou deux travestis qui la draguait à à peu près un millimètre du micro, Tino et moi prêts à leur foncer dans le lard si jamais ils accédaient à Selen. Et aussi avec un mec complètement torché, qui venait de perdre malheureusement pour lui, son père et qui donc passait en boucle pendant le concert le morceau "Mon Vieux" de Daniel Guichard sur le juke-box (rires). Non, mais je l'invente pas, vrai de vrai, et tout ça le même soir, avec le mec torché qui au bout d'un moment est tombé raide par terre pendant le concert, sur le carrelage. Heureusement, on avait un pote qui avait fait du secourisme. Et la cerise sur le gâteau, c'est à minuit, l'écran géant qui était branché sur le match de foot de Canal +, qui se met à diffuser... vous savez bien ce qui passe sur Canal + le premier samedi du mois à minuit. C'était étrange de chanter avec en face le film de ... ! Et tout ça, le même soir.

Selen : Et le mec qui voulait absolument qu'on reprenne "Mon Vieux" (rires) !

Tino : Il y en a un autre, c'était dans un bar à putes, avec les putes, qui étaient alignées le long du bar, c'était très sympa (rires) !

Selen : On a fini la soirée en buvant un coup avec ces nanas et c'était très sympa (rires).

Tino : Sinon, des bons souvenirs, il y en a aussi. Le concert avec AFTER FOREVER à la Loco était très sympa. J'ai aussi un grand souvenir avec le groupe italien CHAOSWAVE et avec le groupe canadien ZEROSCAPE qui était assez impressionnant. Les deux groupes tuaient. Et à Rennes, on s'est torché la gueule avec le public qui nous a payé plein de vodka. C'était très cool. A Reims aussi, à Guérande. Et les deux festivals de Raismes, c'était génial.


Vous n'avez pas encore fait de concert à l'étranger, il y en a de prévus ?
Tino : Il y avait plusieurs concerts qu'on aurait dû faire à l'étranger, mais qui pour des raisons administratives et de contrats, n'ont pas pu se faire. Des annulations souvent la veille, en Allemagne. On n'a pas eu de bol là-dessus. On a reçu des propositions de concerts en Italie, en Allemagne, en Suisse, au Japon, mais bon, pour l'instant... Ce sont des choses qui prennent du temps, mais ça va se faire tout ça. Ca coûte cher, ça se travaille et ça exige de mettre en place pas mal de choses et on était plus focalisé ces derniers temps sur l'album. c'est donc surtout des raisons pratiques.


Vous avez des fans à l'étranger ?
Tino : Oui, oui, il y en a au Japon, en Allemagne et curieusement, on en a aussi quelques-uns aux Etats-Unis, qui nous écrivent. Là, je pense que c'est très particulier, le fait que ce soit chanté en français, il y a des étudiants francophiles qui ont bien accroché. Alors, on reçoit des e-mails assez régulièrement. Mais bon, c'est quelques personnes, c'est un tout petit pourcentage des gens qui nous écrivent.


On parlait tout à l'heure de la scène française avec THE OLD DEAD TREE. Quel regard portez-vous sur cette scène, qui de plus en plus s'exprime en français d'ailleurs ?
Ded : Je suis relativement fan de la scène française, je trouve qu'il y a énormément de talents, mais qui n'ont pas assez accès à la diffusion. Les médias son sursaturés, il y a que le net, par exemple MySpace, qui peut sauver la création. On a rencontré des gens extraordinaires qu'on a rencontrés sur la route comme INNERCHAOS...

Selen : J'ai pas trop de mémoire, je suis la chanteuse (rires), mais il y en a beaucoup, comme DRY CAN, DORNFALL... C'est vrai qu'Internet, c'est la seule façon de relayer sa musique.


Globalement, que pensez-vous d'Internet et de ses aspects positifs (MySpace...) ou négatifs (téléchargement illégal...) ?
Selen : Moi, je trouve qu'Internet, c'est très bien, pour JADALLYS, ça nous fait connaître. Si on est téléchargé, très bien, s'il y a du téléchargement illégal, pour nous, c'est pas un préjudice comme pour les grosses pointures internationales. Donc nous, la problématique ne se pose pas. C'est vrai que si on ne vivait que de ça et qu'on devait manger tous les jours grâce aux ventes de disques et au téléchargement, c'est vrai que là, ça poserait un énorme problème, vu que le téléchargement payant, c'est la seule manière de rémunérer les artistes. Il me semble qu'aux Etats-Unis, le téléchargement payant marche de mieux en mieux et qu'à coup de procès des majors, ils arrivent petit à petit à faire peur aux internautes pour les faire payer. Maintenant, moi, je sais qu'Internet c'est pas un souci pour nous, au contraire, ça nous fait de la pub.

Ded : Je pense que le téléchargement illégal a été un gros problème, et qu'aujourd'hui faut savoir s'adapter. Le téléchargement illégal, c'est comme dans les années 80, quand on se copiait les K7. Ce que je pense, c'est qu'aujourd'hui, en France, il y a certaines raisons qui font que les gens se tournent vers le téléchargement illégal, comme le prix du disque. J'ai jamais compris pourquoi en France, la culture était considérée comme un produit de luxe et pourquoi la TVA n'était pas alignée à 5,5%. Je pense que les premiers qui ont compris, c'est RADIOHEAD, en faisant en sorte que ce soient les fans qui estiment la valeur de la musique. C'est eux qui touchent leur propre argent et ont réussi à s'adapter. Il y a aussi la possibilité d'acheter un bel objet qui s'appelle un disque. Il faut s'adapter et non cracher sur la technologie.

Selen : A l'heure actuelle, il y a une mutation technologique incontournable. Les majors n'ont pas voulu s'adapter et ont essayé de repousser au maximum les échéances. Bon, le disque se vend plus, il se vend plus. Maintenant, elles confortent leurs marges avec les sonneries de portables, donc tout va bien, tant mieux pour elles (rires).


Quels sont les albums que vous avez bien aimés en 2007 ?
Selen : Le dernier RADIOHEAD.

Tino : Il y en a tellement...

Ded : Ma révélation de l'année : SLEEPYTIME GORILLA MUSEUM !


Connaissez-vous VS et qu'en pensez-vous ?
Tino : VS, ça fait très longtemps qu'on connaît. Ca fait des années que ça existe. Je me souviens avoir lu des interviews qui m'ont beaucoup marquées sur des gens qu'on connaissait, par exemple Alain Ricard, Stéphane Buriez... C'est une mine d'informations, je trouve que c'est une référence, on y va régulièrement.

Ded : Je trouve que c'est un peu facile sur le forum de dire qu'un groupe est pourri car on les a vus une fois en concert. C'est tellement facile d'être derrière son PC et de dire que c'est de la merde. Ca, ça me dérange un petit peu.

Tino : C'est vrai, mais c'est pas le propre de VS, ça, tu le vois partout.

Ded : On est bien d'accord, j'ai vu largement pire sur d'autres forums.


Un dernier mot ?
Ded : Sortez ! Plutôt que de voir le concert sur Arte très tard la nuit, venez voir les artistes en vrai, car c'est là que vous aurez toute la dimension de leur musique.

Tino : J'ajoute un truc : ayez l'esprit de découverte, sortez, allez aux concerts. Parce que, c'est bien de prendre son pied avec les groupes qu'on connaît et qu'on aime, mais c'est bien aussi d'aller chercher d'autres choses pour s'ouvrir l'esprit. Même si, au départ on ne comprend pas bien, on finit en s'y intéressant par voir ce que les autres veulent dire.

Selen : Je voudrais faire un bisou à tout le public de VS. Qu'il continue à être curieux. Pour moi, l'art n'est pas quelque chose de tiède, c'est un engagement. Essayez de vous intéresser même à des choses où a priori on n'est pas totalement d'accord car on apprend toujours des choses.

Tibo : Sur la région parisienne, il y a énormement de concerts. Il y a pas forcément le budget qui va avec, tellement il y a d'offres. Les gens privilégient les gros artistes, comme NIGHTWISH ou DREAM THEATER qui mobilisent les masses... Ce que je veux dire, c'est qu'il y a des artistes qui ont un talent équivalent voire supérieur qui galèrent.

Selen : Oui, mais en même temps, est-ce que ce n'est pas le passage obligé dans le metal ? Est-ce que André Rieu n'est pas le passage obligé pour la musique classique ? On peut se poser, malheureusement, la question.


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