"Nous avons dû sortir pas mal d'argent de nos poches mais au final la satisfaction est grande aussi. C'est toujours plus beau quand tu sais que tu ne le dois qu'à toi". Le "do it youself" a encore de beaux jours devant lui comme en témoigne l'ascension fulgurante de GORYPTIC. Encore confidentiel voilà quelques mois, 2007 aura été l'année du groupe de Valenciennes qui, non content de nous avoir assené un album de brutal death solide, est allé taquiner les scènes d'Europe pour une tournée fleuve. Le vénérable oncle de VS est allé questionner Guyom, le sage batteur de GORYPTIC.

Alors l'album est sorti depuis maintenant quelques mois. J'aimerais revenir sur votre décision d'autoproduire ce disque. c'était un choix délibéré ou vous avez tout de même tenté de démarcher des labels avant d'opter pour cette solution ?
Guyom – Oui le choix de sortir l'album en autoprod était délibéré et mûrement réfléchi. A la suite de la sortie du promo CD, nous avons été contactés par plusieurs labels qui désiraient sortir notre album mais nous avons décidé de repousser toutes les offres. L'idée était claire depuis le départ : nous voulions sortir le premier en autoprod pour contrôler chaque étape et aussi comprendre comment les choses se passaient. Au final, j'ai l'impression que nous nous en sommes pas si mal sortis même si les choses auraient pu être mieux. Niveau promo, nous nous sommes pas mal débrouillés ; on a réussi à se retrouver sur de gros fests cet été ; du côté distribution, l'album se retrouve disponible sur les 5 continents grâce à du trade, les retours sont très bons donc tout se passe très bien !!

C'était un choix plutôt audacieux au départ, un véritable coup de poker...
Guyom - Disons que cela dépend des moyens financiers du groupe. Un groupe qui va payer le studio, le pressage, le mastering, la promo, le merch et qui ne vend que 20 CD aura de sacrées pertes et probablement ni l'envie ni l'argent de faire un second CD. De notre côté, les choses sont un peu différentes car Ugo (guitariste) est ingé son et a son propre studio donc financièrement cela pèse dans la balance. Nous avons dû sortir pas mal d'argent de nos poches mais au final la satisfaction est grande aussi. C'est toujours plus beau quand tu sais que tu ne le dois qu'à toi. Après il existe également des groupes qui ne signent pas sur un label et qui arrivent à subsister et plutôt très bien comme Inhumate. Il n'y a pas de secret, au départ il faut un capital ; alors soit tu le rembourses et tu peux recommencer, soit tu prends une taule.

C'est tout de même une démarche plus fréquente dans le grind que dans le death metal. D'autant plus que vous n'aviez pas forcément une grande expérience de la distribution ou de la promo lorsque vous avez eu l'album en main...
Guyom - On a pu s'entraîner avec le 2 titres sorti un an auparavant. Déterminer les webzines sérieux, les coûts des envois mais aussi la méthode : on a reçu les CD un lundi, le mardi matin déjà 50 partaient pour les zines. La promo/distrib c'est une question d'organisation. Il ne faut pas se demander ce qu'on va faire des skeuds, à qui on les envoie, une fois les skeuds reçus. C'est aussi une question de temps, contacter les gens, savoir s'ils sont sérieux ou non, chercher des contacts pour le trade etc. Rien ne tombe directement dans les bras, il faut se bouger le cul et en général ça paie. C'est vrai que dans le death, pas mal de groupes enregistrent un promo et cherchent un label. C'est un choix. Cependant quand je fais quelque chose, j'aime bien comprendre les étapes pour être efficace et donc en passant pas une autoprod on se rend compte d'un paquet de choses. Signer sur un label peut être une belle étape mais ça peut aussi être casse-gueule. Combien de groupes ont signé pour couler un an après parce que les membres avaient les mains dans les poches et s'imaginaient monts et merveilles. Un groupe même signé doit continuer à faire la promo de son côté et ça c'est difficile à comprendre apparemment. Voilà nous le premier album devait être en autoprod, pour la suite on verra mais ce qui est sûr c'est que label ou non, maintenant nous savons que nous sommes capables de le faire et pas si mal que ça.

Quand on sait l'organisation que nécessite une autoproduction réussie comme celle de GORYPTIC, on ne peut que saluer votre détermination.
Guyom - Nous sommes 4 à travailler pour pouvoir financer la vie du groupe (album, merch, tournée). Ensuite chacun a ses occupations au niveau du groupe : promo, booking, site. Il y en a forcément un qui est en amont des choses mais cela ne remet en aucune manière la motivation commune. Chacun doit faire des concessions. Passer sa soirée à chercher des devis pour le pressage ou du merch, à faire une interview, dessiner un fly ou mixer un titre peut être ennuyant à la longue mais il faut bien s'y coller si on veut avancer.

Raconte-moi un peu comment vous vous êtes retrouvés à faire cette tournée à travers l'Europe ; une tournée qui n'est pas encore terminée d'ailleurs. Ça devait être l'aventure pour un jeune groupe comme GORYPTIC ?
Guyom - Tout est parti de notre participation au Red Alert open air en Ukraine. Eternal Bledding (groupe avec lequel nous avons tourné) figurait également à l'affiche et ils m'ont contacté pour essayer de planifier une tournée autour de cette date. L'idée nous bottait bien donc nous avons travaillé là-dessus ensemble. Au final nous avons réussi à booker un joli tour avec de très bons fests (Brutal Assault, Mountains of Death, Sziget Fest). Tu as entièrement raison d'employer le mot "aventure" ! C'était une superbe aventure, on a bouffé des bornes mais quel plaisir de jouer tous les soirs ! Au final nous n'avons pas participé au fest qui était à la base de tout car nous avons été bloqué en Moldavie pendant 12 heures !!! Tout est expliqué dans le report disponible sur notre site et forum :) ! Dans une semaine on entame le Trampling The South Tour avec cette fois les grindeux d'Infest où nous ferons 4 dates dans le Sud de la France (Poitiers, Toulouse, Montpellier et Hendaye) puis l'Espagne et le Portugal. On est vraiment impatient de repartir sur les routes!!!

C'est vrai que la réputation de GORYPTIC se construit aussi autour de vos prestations scéniques. Si certains ont des réserves quant à l'originalité de votre musique, vous mettez tout le monde d'accord pour ce qui est des concerts : GORYPTIC c'est une
tuerie sur scène. C'est un aspect que vous avez particulièrement travaillé ?
Guyom - Non, nous n'avons pas travaillé le côté scénique particulièrement. On bosse le set, les enchaînements et c'est tout. Sur scène, on donne juste le meilleur de nous-mêmes. On s'éclate sur scène, c'est probablement là que nous sommes le mieux. Ce sont des moments particuliers de communication, de sensation. Quant à l'originalité, certes on ne réinvente pas la poudre : ça blaste, on fait des breaks comme des milliers de groupes auparavant et comme des milliers continueront à le faire. On joue simplement la musique que nous aimons sans répondre à quelconque code en terme de structure ou je ne sais quoi d'autre. Quoi que tu fasses, on te comparera toujours à un autre groupe.

Tiens justement, tu comparerais GORYPTIC à quels groupes?
Guyom - Alors pour les influences je dirais Goratory, Skinless et Dying Fetus. Sinon, beaucoup nous comparent avec Cryptopsy. C'est marrant parce qu'on aime bien Cryptopsy mais ce n'est pas du tout un groupe récurrent dans notre playlist.

J'imagine que la perception que les gens ont de votre musique et celle que vous avez sont différentes mais c'est bien normal après tout, non ?
Guyom - Ah oui, tout à fait et Cryptopsy est un excellent groupe donc c'est très flatteur. Chacun perçoit la musique à sa manière et nous n'avons certainement pas assez de recul également.

Bon parlons un peu d'avenir. Quels sont donc les projets après ces dates hispano-portugaises ?
Guyom - Pour 2008, nous avons eu plusieurs propositions de tournée en Europe mais nous n'avons rien décidé pour le moment. On verra bien, rien ne presse. Sinon on a repris la composition également et on travaille lentement mais sûrement sur un second album. Déjà 2 titres de composés dont un sera joué sur la tournée à venir. On va peut-être les enregistrer avant la fin de l'année. Grosso modo c'est assez flou pour le moment, on travaille tranquillement et on réfléchit sagement.

Oui j'ai le sentiment que vous savez parfaitement où vous allez. Ce genre de maturité est bien rare.
Guyom - Merci ! je pense qu'il faut savoir aller doucement sans griller des étapes. Aller vite et griller tout le carburant ne fait pas avancer. Il faut savoir se fixer des objectifs réalisables, être conscients de ses capacités et de la charge de travail que cela implique.

Une dernière question, est-ce que vous appliquez systématiquement cette patience à votre musique. Je veux dire par-là est-ce que vous faites partie de ces très rares groupes qui prennent le temps de composer, d'aimer puis d'avoir un oeil plus critique
pour finalement détester certains morceaux au final ?
Guyom - Ah oui totalement. On se prend tout le temps la tête sur les morceaux, du coup on est assez lent à composer. On aime bien compliquer les choses. On compose un morceau en 2 mois. En général, on pose les riffs, la structure en quelques répètes et on atteint les 90% en terme de composition du morceau. Les derniers 10% sont toujours très longs car on chamboule tout, on réécrit les transitions et ces derniers 10% font que le morceau est terminé en 2 mois.
Aller jusqu'à haïr un morceau non, mais ne plus aimer un passage, oui cela arrive. Passage trop long, trop simple... Donc on le modifie immédiatement. Après pour les morceaux de l'album, certains passages nous gênent mais c'est trop tard donc on fait avec !! Ça doit être aussi dû au fait que nous les avons pas mal joués. C'est toujours ce même problème de recul, on a trop la tête dans le guidon, il faut aussi savoir la relever pour bien voir et comprendre les choses.

Qu'est-ce qu'on peut souhaiter à GORYPTIC pour le futur ?
Guyom - Un nouvel album, des nouvelles tournées , des rencontres et beaucoup de plaisir!!

Et bien on va vous souhaiter ça et plus encore!
Liens en relations :

http://www.goryptic.com/

http://www.myspace.com/goryptic