Ihsahn - IHSAHN par PRINCE DE LU & YANN - 2973 lectures
En complément des interviews et des chroniques à propos du nouvel opus "The Adversary", VS vous propose un long tête-à-tête avec Ihsahn. L'occasion de revenir sur l'ensemble du parcours musical d'un pilier de la scène norvégienne, humble et sympathique malgré la très longue journée promotionnelle.


D'abord, je voudrais parler de ton parcours musical, avant que nous abordions "The Adversary". En dehors du noyau créatif que tu formais avec Samoth, suis-je dans l'erreur si je pense que ton premier morceau solo a été "Opus a Satana" sur le mini "Reveren
Non, "Opus A Satana" est la première chose que j'ai faite avec un séquenceur car je venais de m'acheter un ordinateur avec Cubase. Ca a été la première chose que j'ai programmée dans Cubase et le début de mon studio personnel.


A cette époque (1996-1997) avais-tu déjà l'idée de créer des side-projects comme Peccatum ou Thou Shalt Suffer ?
A ce moment, je voulais créer de la musique seul. En créant ces projets, ça a été un moyen de m'exprimer en dehors d'Emperor. J'en ai toujours eu envie. J'avais pas mal de matériel non utilisé.


Ca a été simultané avec la création de ton studio?
Oui, c'était en même temps.


Etait-ce important de contrôle tout le processus de création dès le début?
J'ai toujours été impliqué pleinement. Je joue du piano depuis l'âge de 6-7 ans et j'ai eu ma première guitare vers 10-11 ans. Et à cette époque, j'avais déjà un synthétiseur. Quand j'ai eu ma première pédale avec la guitare, j'ai essayé de connecter la guitare, le synthétiseur avec la pédale. J'ai commencé à chercher des sons cools de cette manière. Peu de temps après, j'ai eu mon premier enregistreur, un 4-pistes. Je me souviens avoir enregistré et ré-enregistré des morceaux de "Powerslave" avec le synthétiseur et la guitare. J'ai commencé à enregistrer très tôt et je pensais déjà que c'était vraiment cool.
J'avais déjà l'idée de monter un studio plus grand. Mais jusqu'au milieu des années 90, je n'ai pas eu l'argent pour investir assez. Je suis heureux que ça ait bien tourné. J'avais visité pas mal de grands studios et testé de l'équipement. Et avant j'ai pu acheter, alors que j'étais prêt à investir, il y a eu le break et les ordinateurs ont commencé à prendre beaucoup plus de place. Il est devenu beaucoup plus facile de monter son studio plutôt que d'acheter des équipements coûteux au fur et à mesure.


Pendant ce temps, Samoth développait son propre label Nocturnal Art Productions. Penses-tu aujourd'hui que c'était un bon choix financier de monter ton studio plutôt qu'un label?
Oui, je sentais que je devais faire ça. C'était important de réaliser tout moi-même, de faire par moi-même en investissant beaucoup d'énergie pour apprendre les techniques, en aiguisant mes connaissances en production musicale. J'étais prêt pour ça et je voulais vraiment le faire.


Tu as créé avec ta femme Ihriel Mnemosyne Productions.
Oui. Nous possédons notre studio privé, le Symphonique Studio, et Mnemosyne Productions possède aussi une part d'un studio analogique.


Tu as en tête de produire d'autres artistes?
Oui, c'est l'idée. Nous avons quelques groupes. Nous avons reçu un tas de démos et quelques groupes nous intéressent. J'espère maintenant que les choses vont aller au bout. Il y a beaucoup de bons labels de métal. Nous cherchons donc des groupes "border line".


Pour revenir à ton passé musical, je voudrais parler du premier Peccatum "Strangling from Within". Tu es le seul crédité pour la musique sur cet album. Le considères-tu comme un projet solo ou as-tu travaillé en suivant les idées de Ihriel?
Les crédits de l'album sont ainsi car j'ai réalisé pratiquement les parties instrumentales. Mais c'est bien le résultat d'une coopération. Nous avons travaillé ensemble dès le début. Après nous avons combiné les enregistrements avec ceux faits au Akkerhaugen Studio. Mais effectivement, j'ai enregistré la majeure partie de l'album au Symphonique. Maintenant j'enregistre quasiment tout au Symphonique, sauf pour les parties dont je n'ai pas les équipements. Le Akkerhaugen a de bons vieux équipements, des années 50, 60 et 70. Je fais un mélange entre mes éléments électroniques et les enregistrements faits avec des équipements dont Elvis disposait à Memphis (rires). Cela crée un contraste intéressant. Sur l'album "The Adversary", on entend bien que les guitares ne remplissent pas tout l'espace. Elles ont été enregistrées de manière assez naturelle.


En continuant de décliner ta discographie, on arrive à Thou Shalt Suffer et "Somnium". Les influences classiques ont toujours été très fortes dans ta musique. Comment ont-elles évolué avec le temps?
Je pense qu'il ne faut pas trop être intéressé par ma culture classique. Je ne sais jouer que des choses très simples. J'écoute de la musique classique mais je n'en joue pas comme un pianiste. En fait, je m'appuie plutôt sur la dynamique de la musique classique en différenciant les parties principales des parties secondaires (NDR: traduction de "big parts" et "down parts"). De nombreux morceaux de métal s'appuient sur ce principe. L'important est d'influer une dynamique et de proposer à l'auditeur des changements dans le morceau. C'est vraiment intéressant de proposer des parties techniques et en même temps dynamiques. Quand nous enregistrions les parties brutales (NDR "hammer parts") dans le studio avec Emperor, toute la difficulté était de les combiner avec les autres parties instrumentales pour créer cette dynamique. C'est un principe théorique très intéressant à mettre en place. Avoir des idées théoriques et essayer de les concrétiser. D'ailleurs, je change de sujet (rires) je travaille sur un livre de tablatures de Emperor qui devrait voir le jour cette année. Il reprendra tous les morceaux de "Scattered Ashes" avec les parties de guitares et la basse. Ca représente des pages de partitions (rires). Mais c'est vraiment quelque chose que je voulais faire. J'ai appris à jouer pratiquement de la guitare avec les livres de tablatures de Iron Maiden. Alors je me suis dit: pourquoi pas des apprenti-guitaristes qui jouent "Curse you all Men!"?


J'ai été surpris de lire dans une interview de 1997 ton intérêt pour participer à des projets plus électroniques et notamment de la techno. Tu peux confirmer ça?
Je pense qu'il s'agissait d'un malentendu (rires). Je n'ai jamais été intéressé par la techno. Je voulais sûrement parler de musiques électroniques. Je m'y intéresse depuis longtemps. J'ai ajouté pas mal d'éléments électro dans "Lost in a Reverie", une manière de voir les choses plus orientée vers l'ordinateur. Tu connais Native Instruments et Reaktor? Native Instruments est une société allemande qui fabrique des plug-ins logiels pour la musique. Et ils ont développé un énorme programme où tu fabriques complètement tes sons. C'est délirant, tu peux vraiment créer des sons complètement étranges avec. Je suis intéressé par ce type d'expérimentations depuis que j'ai décidé de devenir musicien professionnel à l'âge de 16 ans. J'ai envie depuis ce temps de décortiquer tous les principes de la musique. Et plus on apprend, plus on réalise qu'on ne sait pas. C'est juste que je veux apprendre encore plus de la musique. Je suis juste très curieux à propos de musique.


Tu peignais aussi à une période?
Quand j'avais 16-17 ans, je m'intéressais à beaucoup de choses mais on ne peut pas tout faire. Je n'ai pas fait grand chose dont je puisse être fier (rires).


En 2001, "Prometheus" est sorti. Tu as réalisé la majeure partie des enregistrements seul, Samoth et Trym étant occupé par l'album de Zyklon. Comment vois-tu aujourd'hui cette expérience épuisante?
Ca a été une expérience intéressante dans le sens où j'ai écrit et j'ai pu produire l'album tout seul. C'était enrichissant pour ça. Et rétrospectivement, après quelques années, je trouve que cet album représente bien mon état d'esprit de l'époque. Il mixe les vieux artifices de Emperor avec ce que je ressentais et reflète ma relation à Emperor. Il y avait beaucoup de monde qui voulait quelque chose de plus proche du vieil Emperor. Mais je n'avais pas envie de revenir en arrière, je voulais avancer.


A ce moment, tu as mentionné ton album solo dans des interviews. Qu'est-ce qui explique cette attente de 5 ans avant "The Adversary"?
L'idée est née très vite mais j'ai été très occupé avec Peccatum. J'ai travaillé avec pas mal de gens et je n'y ai plus pensé jusqu'après "Lost in a Reverie". Et ça a été un travail personnel qui a demandé du temps. Il fallait que je prenne de la distance vis-à-vis du métal et de Emperor, pour pouvoir revenir proprement et pleinement.


A l'époque de la fin de Emperor, tu as utilisé le mot "liberation".
Oui. C'était une libération. J'étais réconforté d'avoir mené Emperor jusque là. Mais je ne me voyais pas continuer plus loin avec.


Tu as donné ton nom à ce nouveau projet. Pourquoi penses-tu qu'il est plus personnel que ce que tu as fait avant?
Je pense qu'il me représente, comme un artiste avec une expérience de tant d'années. C'est la continuité de mon travail dans le métal. Il y a des parties qui ressemblent beaucoup à Emperor, ce qui n'est pas très étrange (rires), mais il y a aussi des parties qui sont plus progressives ou plus heavy metal que ce que j'ai jamais fait. J'ai essayé de représenter toute mon histoire dans le métal.


L'interview Blabbermouth précise que "le disque promet d'être un voyage représentatif à travers toutes les phases de la carrière de Ihsahn". Que penses-tu de cette description?
C'est un peu ennuyeux. Ce n'est pas bon d'être trop nostalgique. Je ne suis pas un retraité (rires). Quand j'ai quitté Emperor, les gens ont eu l'impression que j'avais arrêté. J'avais 25 ans. Maintenant j'ai 30 ans et j'ai l'intention de faire de la musique pour encore quelques années (rires). Je pense que "The Adversary" est plutôt dans la continuité. Il n'était pas dans mon intention de faire quelque chose de totalement nouveau ou original. Je désirais juste créer un album de métal qui ne soit pas qu'un alignement de riffs et de titres de 3-4 minutes. riff A, riff B, riff A, riff C, etc... Donc j'ai expérimenté du matériel, j'ai modifié de nombreuses fois les arrangements pour essayer d'avancer toujours plus loin. Et ça a donné un mélange de différents styles de métal, dans différents titres. Il y a des morceaux plus black metal, d'autres plus heavy. D'autres titres sont plus progressifs comme "Astera ton Proinon". je sais que les titres peuvent paraître beaucoup plus simples que ce que j'ai déjà faits (sourire) mais c'est une manière d'amener certains atmosphères plus progressives, plutôt que de remplir de notes tout le temps.


Penses-tu que ta musique demande un auditeur "actif"?
Je l'espère sincèrement. J'aime faire ce type de métal. Et que ce soit dans la musique ou les textes, j'essaie de proposer quelque chose d'abouti. Les thèmes des textes sont travaillés. J'essaie de développer des symboliques religieuses en m'éloignant du blabla sataniste habituel. C'était déjà le cas avec Emperor et j'essaie de développer mes idées plus loin.


Tu as l'image de quelqu'un qui travaille beaucoup et qui est perfectionniste. N'as-tu pas de frustration par rapport à tes anciens albums, en te disant "j'aurais pu faire ceci ou cela"?
J'essaie de travailler dur, oui (rires). C'est tout le temps comme ça. Surtout quand je fais tout moi-même, faisant l'enregistrement, le mixage. Je me dis que j'aurai pu ré-enregistrer cette partie ou celle-là. Mais je reste fier de ce que j'ai fait. Avec "The Adversary", je suis satisfait du travail mené, de l'enregistrement à la production, et satisfait du résultat final. Il est comme je le voulais. J'ai une relation très forte avec chaque titre et je ne suis pas encore lassé (rires).


Merci Ihsahn.
C'est moi qui vous remercie pour cette interview.


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