Mihai - DIRTY SHIRT par PAMALACH - 5180 lectures
Auteurs d'un troisième album bien velu, les Franco Roumains de DIRTY SHIRT nous font à nouveau le plaisir d'une petite interview !


Salut les Dirty Shirt ! Ravi de vous avoir à nouveau dans nos pages ! Peut-on faire un petit retour en arrière et revenir sur les événements qui ont suivi la sortie de "Freak Show" ? Des concerts, rencontres et souvenirs mémorables j'imagine ?
Bonjour à toi Pamalach et aux lecteurs de VS Webzine ! Je suis vraiment content de revenir chez "vous" comme nous l'avions fait à la sortie de "Freak Show" ! Notre premier album, « Same Shirt Different Day », était sorti en 2010, « Freak Show » datait de 2012 et avec la tournée qui a suivi, DIRTY SHIRT a fait un énorme pas en avant. Pour un groupe de notre envergure, nous avons pas mal tourné et joué plus de 70 concerts en 2 ans, essentiellement en Roumanie, mais aussi au niveau européen et plus particulièrement en France. Forcément, tout cela a généré beaucoup de rencontres et de souvenirs mémorables! On a rencontré des gens formidables partout.. .mais je dois reconnaître qu'à part la Roumanie, c'est avec les Français qu'on a le meilleur feeling !


Avec le recul, comment trouvez-vous "Freak Show" ?
Sans fausse modestie, c'est un album dont je suis très fier et que je réécoute occasionnellement avec plaisir. Il y a quelques morceaux qui, à mon avis, sont très réussis, comme « Bad Apples », « Freak Show », « Ride » ou « Saraca Inima Me ». Ce sont des morceaux qui resteront probablement des « must » dans notre setlist. Le plus marrant, c'est que même les enfants en bas âge (incluant mon fils de 3 ans) sont de grands fans de ces chansons. Je le prends comme un signe positif.


"Dirtylicous", votre troisième et nouvel album, est beaucoup plus agressif que ses prédécesseurs même si les mélodies demeurent. Était-ce une envie de proposer un album plus dur ou est-ce que cela s'est imposé de manière naturelle ?
C'était une envie qu'on avait depuis un moment, de descendre encore plus bas dans les accordage afin d'avoir un son encore plus lourd, agressif et moderne. Cette envie était doublée aussi par le désir d'augmenter encore plus le contraste entre le son métal et la mélodie des influences traditionnelles. C'était certainement un peu risqué, nous aurions pu tout foirer, mais au final, nous pensons que notre idée première était la bonne. De plus, l'endorssement que nous avons obtenu avec Washburn Guitars & Randall Amplifers, nous a énormément facilité les choses avec l'équipement.


Malgré le côté metal vraiment manifeste, je trouve que la musique que vous proposez sur "Dirtylicous" plus personnelle et moins marquée par l'influence des groupes que vous aimez. Est-ce que tu penses (même si c'est cliché) que vous avez atteint sur cet album une certaine maturité ?
Je pense que « Dirtylicious » continue la direction musicale que le groupe a commencé sur « SSDD » et développé sur « Freak Show ». Si on a réussi à se détacher un peu plus des groupes qui nous ont influencés, c'est vraiment une très bonne chose et j'en suis content. C'est sûr que sur cette album nous sommes arrivés à une certaine maturité artistique car le son est plus homogène et spécifique à Dirty Shirt. J'espère néanmoins qu'il ne sera pas le meilleur et que nous ferons mieux par la suite ^^.


Vous bénéficier sur cet album de l'apport de plusieurs instruments du Transylvanian Orchestra. Comment se passe le processus de composition avec des musiciens de ce calibre ? Est-ce que leurs parties sont déjà composées à l'avance ou vous les laissez plus ou moins improviser ?
La collaboration avec les musiciens traditionnels sur « Dirtylicious » a commencé avec Marius Sabo, violoniste et chef de Ansamblul National Transilvania (je pense qu'il n'y a pas besoin de traduction) de Baia Mare. Par la suite, c'est lui qui nous a proposé des musiciens. En plus du violon, il y a de la clarinette, l'accordéon, et le cymbalum. Aux percussions, nous avons enregistré l'album avec un vieil ami musicien, connu notamment dans le milieu jazz et musique expérimentale. Nous avons trouvé marrant de baptiser ce « paquet » de musiciens exceptionnels sous le nom de « Transylvanian Folkore Ochestea ».
Concernant les enregistrements proprement dits, nous avons balayé quasiment toutes les possibilités, en partant des parties composées et figées jusqu'aux passages complètement libres à l'improvisation, en passant par des séquences où je leur donnais la ligne directrice puis eux proposaient des idées vraiment intéressantes. Très souvent, nous avions plusieurs enregistrements différents sur un même passage, et toutes les idées ont été enregistrées. C'est en post-production que j'ai fait les arrangements, très souvent avec des choix très difficiles. Le fait que j'ai joué dans un groupe spécialisé dans les mariages dans ma jeunesse et qu'à un certain moment j'ai fait des cours de musique avec un gitan de ma petite ville dans le registre jazz-manouche, m'a beaucoup aidé à composer les passages "traditionnels".


Je ressens une sorte de mélancolie dans "Dirtylicious" et ce, autant dans les moments calmes que ceux plus agressifs. Est-ce que c'est un "fil rouge" qui s'est imposé de lui-même ou un état d'esprit particulier a influencé vos compositions ?
C'est vrai qu'il y a des chansons ou des parties mélancoliques, mais sur l'ensemble je trouve l'album plutôt dans un esprit joyeux, satirique et même engagé. Notre musique est plus un voyage entre différents états d'esprit. C'est notre façon de composer et de voir la musique. Le « fil rouge » de l'album est apparu dans un deuxième temps du processus de composition. Généralement, après un album, on laisse les idées venir, circuler, disparaitre ou se pérenniser de manière très libre. Et puis, au fur et à mesure, un concept commence à prendre vie. Pour « Dirtylicious », après avoir composé 5-6 titres et comme tous avaient au moins un passage avec influences traditionnelles de l'Europe de l'Est, la musique folklorique est devenu naturellement le fil rouge de l'album.
Le déclic a eu lieu en France, lors des balances de notre concert à Grenoble en 2013. Lorsque ce fut le tour de notre violoniste de jouer, il a commencé à jouer « Ciocarlia » (le morceau en ouverture de l'album). Rapidement tout le monde a commencé à jammer avec lui et c'était la folie !
A ce moment-là, on a su que le folklore prendrait une place importante sur le prochain album. Et puis finalement, ce n'est pas si surprenant car la plupart de nos vieux morceaux les plus appréciés par le public, par la critique et par nous-mêmes sur scène, avaient une touche ou inspiration de la musique traditionnelle. A partir de ce moment-là, ce projet est devenu un énorme challenge artistique et en termes de production. On a donc passé quelques mois à faire des recherches sur les musiques traditionnelles, des paroles dans des livres anciens ou sur internet pour trouver des sources qui pourraient nourrir notre projet. Du coup, presque tous les titres du nouvel album contiennent des passages avec influences traditionnelles quand ils n'en sont pas directement inspirés.


J'ai été voir Goran Bregovic à Paris l'année dernière. Son show était assez musclé et j'ai trouvé pas mal de "ponts" entre ce qu'il fait et certains de vos passages traditionnels. Qu'est-ce que vous pensez de cet artiste et trouves-tu qu'il y a son ombre sur "Dirtylicious" ?
Bregovic est probablement le premier à avoir imaginer la fusion de la musique balkanique et les sonorités plus modernes et rock. Ses B.O. des films de Kusturica, tels que « Underground », « Chat noir, chat blanc » ou « Arizona Dream » sont des vrais chefs-d'œuvre. Même si on a repris « Pitbull » sur « SSDD », je ne crois pas que Bregovic a eu une influence directe musicale, mais plutôt dans l'esprit.


Si "Dirtylicious" est plus dur que "Freak Show", la prod s'éloigne aussi un peu du son très crémeux de son prédécesseur pour proposer un son plus chirurgical et précis. Comment parlerais-tu de la prod de "Dirtylicious"?
C'est vrai tout cela. C'est lié à notre envie de faire un son plus lourd, plus moderne. Nos préférences musicales ont également évolué depuis « Freak Show » et il y a des groupes actuels qui ont laissé une certaine empreinte sur notre musique. Concernant la prod, jusqu'à présent, c'était la plus importante dans l'histoire du groupe. On a compté plus de 25 personnes impliquées directement (artistiquement ou techniquement) sur l'album : 13 musiciens sur tous les morceaux, 7 studios dans 5 pays, etc… Mais aujourd'hui, avec les technologies de communication et la puissance de l'informatique musicale, tout cela est possible avec des budgets qui restent raisonnables. C'est vrai aussi que le groupe est énormément impliqué dans toute l'activité extra-musicale (production vidéo, audio, gestion, promo, etc…).


Un jour où nous discutions, tu me disais que DIRTY SHIRT était un groupe qui rencontrait un certain succès en Roumanie mais que tu avais presque l'impression que cela était arrivé presque trop tard maintenant que vous avez, pour la plupart, des vies de familles. Est-ce que c'est un sentiment que tu ressens toujours ?
Oui, et même encore plus… Si avant nous sentions que nous approchions de l'activité maximale qu'un groupe peut avoir sans être « pro », maintenant on est au point où nous ne pouvons plus répondre positivement à toutes les opportunités de concerts. Mais, malgré cela, Dirty Shirt reste un des groupes les plus actifs de Roumanie. Cette année on dépassera largement 25 concerts, on a fait un nouvel album, deux clips déjà produits, un troisième qui arrive, une belle tournée en Roumanie, quelques festivals importants, une première partie de Godsmack, etc… Et on a encore plein de surprises et des choses qui se préparent pour cet automne et pour 2016 :). C'est vrai que tout cela arrive un peu tard, et c'est vrai que si nous avions été un peu plus jeunes, nous aurions tenter de passer « pro ». Mais on savoure ces moments et on les vit au maximum.


Pourquoi à ton avis le folklore se marie si bien avec le metal ? Qu'est-ce qui fait à ton avis que certains styles se marient bien alors que d'autres ne donnent rien ?
Je pense que le metal peut se marier avec n'importe quelle autre musique. En général, la fusion des styles peut marcher. Seulement il faut savoir comment s'y prendre :). Je ne crois pas qu'il y a un style de musique qui serait complètement incompatible avec le rock ou le metal.


Quels sont tes coups de cœur musicaux du moment ?
J'écoute beaucoup de musique et j'essaye d'être « à jour ». Avec la démocratisation de la production musicale, la qualité de l'offre musicale a augmenté considérablement les dernières 10 années. Si je devrais choisir des morceaux « coup de cœur » du moment je pourrais citer deux chansons dans des registres très différents : « Cirice » de « Ghost », c'est une chanson excellente (même si je ne suis pas du tout fan du groupe ou du style) et « No Excape (from Balkan) » de Dubioza Kolektiv. Également, j'ai pas mal écouté de groupes avec qui nous sommes considérés comme du même « mouvement » musical (Kontrust, Russkaja, Twelve Foot Ninja…) ou des groupes qui mélangent la musique traditionnelle orientale avec du métal (Orphaned Land, Myrath…). Mais tout cela après avoir fini la composition de « Dirtylicious ». Par contre la fusion metal avec le folk nordique, je n'accroche pas du tout.


Est-ce qu'il y a des livres ou des auteurs qui ont influencé de près ou de loin les paroles et le concept de "Dirtylicous" ? De quoi parlent les lyrics de l'album par exemple ?
Mihai Tivadar : Sur cette question je laisse répondre Leo Ciocan, notre parolier principal depuis « Freak Show ». Cette collaboration a été vraiment très étroite et on le considère quelqu'un de la famille Dirty Shirt. Son implication et talent ont contribué beaucoup à l'ascension du groupe.

Leo Ciocan : On n'a pas vraiment utilisé des livres, plutôt des articles plus ou moins scientifiques, sur quelques sujets tels que les aliments dangereux (« Dirtylicious »), le capitalisme sauvage et la société actuelle obsédée par l'argent (« Moneyocracy »), l'isolement social et son impact psychologique (« Mental csardas »), ou la corruption dans mon pays d'origine (« Hoți »).. Une autre catégorie est composée par des thèmes plus personnels, par exemple notre credo artistique (« My Art ») ou l'espoir d'une personne de se faire pardonner ses torts (dans le développement de « Cobzar »). Enfin, d'autres textes sont plus joyeux, tels que « Balkanique », avec un couplet en français et qui parle de notre joie de vivre et l'envie de célébrer sur la scène avec notre fans. Cette ambiance est gardée dans les titres inspirés par des chansons traditionnelles


Ces dernières années, nous avons pu voir que le metal pouvait autant devenir le moyen d'expression de musiciens du monde entier que le vecteur politique de groupes qui prônent le racisme et le nazisme. Comment expliquer un tel décalage ?
La musique est un moyen d'expression très fort, et les artistes en général ont une responsabilité, parce qu'ils peuvent influencer leurs fans et donc devenir des formateurs d'opinion. C'est vraiment regrettable qu'on arrive à prôner de telles non-valeurs. Ce sont des groupes qui n'ont rien compris au mouvement. Des cons il y en a partout, non ?


Si tu n'avais pas mixé le metal et la musique traditionnelle roumaine dans un même groupe est-ce que tu penses que tu aurais quand même joué ces styles dans des groupes séparés ?
C'est un truc que j'ai déjà fait. Quand j'étais en fin du lycée et à la fac en Roumanie, en parallèle de Dirty Shirt, je jouais dans un groupe de mariage, avec un setlist qui, forcement, incorporait beaucoup de folklore. C'est la raison pour laquelle à un certain moment j'ai pris des cours de piano, en plus de ma formation classique, avec un gitan âgé, excellent musicien (notamment à la guitare) de ma petite ville. C'était une expérience que j'ai vraiment adorée. Il faisait un truc sur piano, avec plein d'arpèges et accords diminués, des fois approximatifs (il est guitariste, ne l'oublions pas), et je devrais mettre sur notes ou retenir ce qu'il faisait. Évidemment, si je lui demandais de refaire, il jouait quelque chose d'autre ! Donc, il m'a obligé à écouter et à essayer de capturer plutôt le feeling que d'apprendre une telle suite d'accord ou telle mélodie. Depuis, il m'a toujours considéré comme son seul « disciple » en musique :).


Un dernier mot pour nos lecteurs ?
Nous avons déjà pris rendez-vous avec vous au printemps 2016, donc ça serait très mal poli de ne pas venir. On vous attend…


Auteur
Commentaire
MrGuitoune
IP:77.157.65.86
Invité
Posté le: 07/10/2015 à 15h03 - (1797)
Excellent interview, des excellents Dirty Shirt que j'ai découvert avec Dirtylicious, un de mes albums Folk de l'année 2015, franchement super bien réussi auquel j'ai accroché directe et que je réécoute assez souvent !

cyril_glaume
Membre enregistré
Posté le: 13/10/2015 à 07h11 - (1800)
"... Kontrust, Russkaja, Twelve Foot Ninja, Orphaned Land, Myrath…"

Avec d'aussi bons goûts, on comprend que la musique soit aussi excellente :) !!



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