Il a fallu prendre son mal en patience pour pouvoir réaliser cette interview de Vektor, l'un des groupes de thrash les plus prometteurs et appréciés de ces dernières années. Auteur de 2 excellents albums, et avant de venir pour la première fois en Europe (ce sera le vendredi 21 juin au Hellfest), VS-Webzine a quand même pu poser quelques questions au leader de Vektor, David DiSanto, qui espérons le, pourra bien amener son groupe jusqu'au sol clissonnais !



1- Pour commencer, question habituelle, mais essentielle, peux-tu présenter le groupe et retracer son historique ?

David DiSanto : Salut, je suis David DiSanto. Je joue de la guitare et m'occupe du chant au sein de Vektor. Erik Nelson est le 2ème guitariste, Frank Chin le bassiste, et Blake Anderson le batteur. J'ai réellement lancé Vektor fin 2002, quand je suis arrivé à Phoenix, en Arizona, avec à l'époque un batteur nommé Willy Redshaw.

Nous avons enregistré une démo 5 titres contenant les morceaux « Oblivion », « Destroying The Cosmos », « Venus Project », « Accelerating Universe » et une version instrumentale de « Asteroid ». La démo s'appelait « Nucleus » et fût la première sortie sous le nom Vektor, comme le groupe s'appelait auparavant Locrian. Il y' a eu quelques changements de line-up au fil des ans, mais Erik (Nelson) m'a rejoint en 2004, Blake lui en 2007, et Frank l'année d'après.

2- Avec le recul, que penses-tu de «Black Future» ? C'est un album qui a bien été plébiscité et encensé par la presse spécialisée et de nombreux fans de metal...

Aujourd'hui encore j'adore "Black Future". Je qualifierais cet album de vraiment ambitieux. Il n'est pas trop commun pour un premier album d'avoir une durée totale proche des 70 minutes, mais nous avons voulu montrer aux gens une représentation exacte et complète de ce que nous faisions avec notre musique. C'était un album vraiment cool à enregistrer. Nous apportions un pack de 30 bières avec nous chaque jour au studio et il était entièrement consommé à la fin de chaque session (rires).

Nous prenions toutefois la musique très au sérieux, ce qui nous permettaient de garder une part de concentration importante au moment d'enregistrer l'album. C'était fou de voir tous les commentaires de la presse et des metalheads après que l'album soit sorti. La réaction des gens a été extrêmement positive, donc je suis ravi que ceux-ci aient réellement compris ce que nous voulions faire, parce que c'est un album absolument unique pour nous. L'enregistrement est un peu rude sur certaines parties, mais cela donne à l'album une sensation très organique, ce que je trouve génial. Il n'y a rien que je changerais vis à vis de « Black Future ». Ses imperfections le rendent plus frais que s'il s'agissait d'un opus surproduit. C'est brut, explosif, et dynamique.


3- Comment se déroule le processus de composition au sein de Vektor ? A t-il été le même entre «Outer Isolation» et «Black Future» ?

Je suis le compositeur principal du groupe. J'écris toutes les chansons et toutes les paroles. Cela ne veut pas dire que les autres mecs ne font aucun apport sur les chansons. J'écris essentiellement les riffs pour construire la structure de la chanson. Ensuite, j'apporte aux gars le « squelette » du titre, et eux exécutent les parties de batterie, les harmonies et les riffs de basse. C'est vraiment un effort collectif quand il s'agit de faire en sorte que le morceau sonne et soit ressenti comme un titre de Vektor. C'est la combinaison de tous nos styles qui permet aux chansons que j'écris de prendre vie.


4- Tout comme «Black Future», «Outer Isolation» a été enregistré dans les studios du Villain Recordings (Arizona) ; Et là encore, le résultat est très bon. Vektor ne sonne ni trop old school, ni trop propre/clean, la production met en valeur équitablement chaque instrument ; tu dois être très satisfait du boulot réalisé par Byron Filson ?

Ouais, Byron est un mec drôle et génial, et qui plus est, un ingénieur du son fantastique. Nous aimons travailler avec lui parce qu'il est tellement talentueux et sait exactement ce que nous allons faire. C'est aussi un très bon ami à nous, donc ça aide pas mal. Il y' a vraiment eu un effort de collaboration entre lui et nous, quand il a dû produire nos albums. Tout marchait de suite, il comprend vite le sens de notre musique, et surtout ce que l'on veut personnellement obtenir avec lui.



5- Vos compositions sont complexes et fouillées ; je trouve qu'elles témoignent d'un bel investissement de votre part pour essayer d'apporter un peu de fraîcheur et d'originalité dans la scène actuelle. As-tu déjà rencontré des difficultés pour achever un morceau (donc y consacrer du temps) ou jusqu'à présent tout s'est déroulé sans accroc ?

Merci. Eh bien, tout dépend du morceau. Parfois, je finis une chanson en quelques jours ou semaines, et parfois un titre peut prendre des mois avant que j'en sois entièrement satisfait. Tout dépend de la façon dont l'inspiration coule à ce moment là. Il y' a des chansons qui restent, durant des années, incomplètes, et elles m'embêtent pendant longtemps (rires)​. La raison pour laquelle il faut tant de temps pour réaliser certaines compositions, c'est parce que je crois qu'écrire de la musique doit être un effort réfléchi. Toute forme d'art est plus utile quand il y' a de la pensée, de la réflexion et un but en son sein.

6- 3 morceaux, issus de la démo «Demolition» (2006), ont été ré-enregistré pour «Outer Isolation» ; Pourquoi ce choix ? Vous estimiez que ces morceaux méritaient de faire un peu 'peau neuve' et d'être à nouveau mis en avant ?

Nous avions prévu dès le début que nous voulions ré-enregistrer des vieilles compos et ensuite les répartir entre les albums qui allaient sortir. Nous n'avons jamais été satisfaits des enregistrements de «Demolition» (ndlr: considéré par le groupe comme une démo, de 8 titres tout de même), et la moitié des membres du groupe était différente à l'époque.

Je pense que nous avons trouvé notre style une fois que Blake et Frank ont rejoint le groupe et nous avons voulu montrer comment ces morceaux, une fois conçus, devaient sonner. Dans les deux albums, nous avons voulu présenter du nouveau matériel tout en retravaillant et en durcissant quelques vieux titres. Le troisième album contiendra uniquement du nouveau matériel.


7- De manière générale, quels sont les thèmes abordés par Vektor ? Mon impression est bonne, si je dis qu'ils sont souvent sombres et pessimistes ?

(Rires) ouais. Il n'y a pas de soleil et d'arc en ciel dans notre musique. Les sujets sont généralement centrés sur la destruction mondiale, la place de l'homme dans l'univers, les scénarios post-apocalyptiques, et la philosophie. Nous aimons parler de choses que la plupart des gens ne veulent pas admettre, ou bien d'émotions abstraites dans un monde qui va de plus en plus vite. Quel que soit le sujet sur lequel nous écrivons, il y' a toujours de fortes métaphores de la société moderne mis dans un contexte futuriste.

8- Que ce soit votre logo, la pochette de l'album et bien sûr une partie des textes, Vektor fait preuve d'un fort attrait pour la Science-Fiction ; On peut d'ailleurs notamment lire au dos du livret de l'album, « Sci-fi or Die ». D'où vient cette fascination pour cet univers ? Cela remontre à ton enfance ?

Ouais, j'ai toujours aimé les films de science-fiction. Mes parents étaient très ouverts d'esprits et me laisser regarder beaucoup de films sympas quand j'étais gamin, comme Alien, Terminator, Star Wars, Blade Runner et Mad Max. Ces films m'ont fait basculer dans la science-fiction, et puis une fois que j'ai commencé à jouer du metal, je trouvais que les 2 allaient parfaitement ensemble.



9- Cette question rejoint la précédente : D'un point de vue des influences, plutôt en rapport à «l'imagerie» du groupe, quelles œuvres en littératures, cinématographie, voire même certains comics apprécies-tu, et/ou on pu avoir une influence sur tes textes (et états d'esprits) ?

Je suis principalement inspiré par ce que j'apprends sur l'univers et le cosmos. J'aime l’œuvre de Carl Sagan, « Cosmos » ou encore regarder des documentaires sur la nature comme « Planet Earth ». Certains films ont inspiré des chansons à des degrés divers, tels Space Hunter, Mad Max, Terminator, Krull, The Empire Strikes Back, et Matrix, histoire d'en citer quelques-uns. Il y' a aussi quelques animés vraiment cool, comme Akira, Ghost in the Shell et Evangelion. Je ne lis pas beaucoup de fiction en fait. Je me rattrape sur le monde de la science à travers des articles et j'ai acquis beaucoup d'inspiration et d'informations durant les cours, puisque j'ai obtenu un diplôme en biologie.

10- Et d'un point de vue plutôt musical, quels groupes ou artistes t'ont influencé ? Voivod, Coroner ?

Ces deux groupes sont assurément de très grandes influences. Mes principales influences thrash comptent aussi Destruction, Kreator, Slayer, et Aspid (Russie). J'ai aussi eu pas mal d'influences venant du black metal et des groupes comme Emperor ou Immortal. Il y' a également des groupes hors metal qui ont un grand impact sur ​​notre son comme Rush et Pink Floyd. La combinaison de tous ces groupes a contribué à poser les bases du son Vektor.

11- Pour revenir plus spécifiquement à Vektor, je trouve votre musique intelligemment jouée ; Elle dégage un aspect brut, assez violent, notamment grâce au chant, mais également un côté plus atmosphérique, qui privilégie les phases moins explosives (comme sur «Venus Project»), Est-ce votre volonté de proposer une sorte d'alternance dans les rythmes et les ambiances, pour pouvoir rendre encore plus riche et vivante votre musique ?

Oui. J'aime la musique et les groupes qui ont beaucoup de dynamique au sein de leurs compositions, car c'est plus intéressant. Un pur riff thrash est certes cool pour un certain laps de temps, avant que votre cerveau ne souhaite entendre le titre suivant. Ces nuances permettent au morceau de croître et d'évoluer tout en restant intéressant. Souvent, les idées sont trop complexes pour transmettre un seul type d'émotion dans un morceau. Parfois, il est nécessaire de changer complètement l'ambiance de la compo pour pouvoir totalement exprimer l'idée voulue.

12- Arrêtons nous un instant sur le chant ; Si il peut peut être en rebuter quelques uns, parce qu'il est assez extrême et hargneux, je constate pour ma part qu'il colle à merveille à la musique du groupe : il lui apporte de la folie, de la furie et je dois avouer que c'est un vrai régal que de suivre les paroles et l'exécution vocale réalisée ; Je suppose que de l'intérieur tu accordes autant d'importance à l'aspect vocal que musical ?

Merci beaucoup ! La voix est la seule chose qui peut vraiment jouer lorsque je découvre un groupe. Si je n'aime pas les voix dans un groupe, alors j'ai tendance à ne pas aimer la musique non plus. Pour moi, le chant est définitivement aussi important que l'aspect musical.



13- Votre musique est déjà pleine de maturité, au point où on peut déjà dire que Vektor a son identité ; Pourtant dans le style que vous pratiquez, il est assez difficile de se démarquer de ses influences : Tel groupe ressemble à Slayer, un autre à Exodus...Je vous considère comme l'un des, si ce n'est LE groupe de thrash le plus innovant et intéressant de ces dernières années ; Vous pensez avoir trouvé votre son et votre personnalité au sein de toute cette 'vague de nouveaux groupes de thrash' ?

Merci encore. Je pense que nous avons vraiment trouvé notre propre personnalité au sein de la nouvelle vague de groupes de thrash. Lorsque "Black Future" est sorti, il a surpris beaucoup de gens, qui attendaient de voir ce que nous ferions après. Je pense que maintenant que « Outer Isolation » est sorti, les gens voient que nous avons un son bien distinct et que le premier album n'était pas juste un coup de chance. Quand j'ai commencé ce groupe, je n'ai jamais voulu copier ou être un rip-off d'autres groupes, et ceci ne changera jamais.

14- Au mois de juin, vous allez donner votre premier concert en Europe et donc en France ; il va se tenir au Hellfest, en open air. Comment cette opportunité s'est elle présentée ? Vous avez été contacté directement par l'organisation du Hellfest ?

Honnêtement, je ne sais pas comment c'est arrivé (rires). Il doit y avoir quelqu'un travaillant au Hellfest qui nous a vraiment aimé. Notre label, Earache Records, nous a contacté au sujet de la possibilité de jouer au Hellfest et nous avons dit oui tout de suite.

15- Ce sera donc votre première date outre Atlantique et cela va se produire devant des milliers de personnes, qui vous verront pour la première fois ; Est-ce que vous avez déjà joué devant autant de personnes ? Parce que je suppose que vous êtes impatients de venir nous atomiser !

Oui, ce sera la première fois que nous jouerons en Europe et nous en sommes extrêmement heureux! C'est un immense honneur que de jouer au Hellfest pour notre premier concert européen. Nous sommes totalement retournés quand on pense à la taille de cet événement, nous n'avons jamais joué devant une foule aussi grande que celle du Hellfest. Ça va être intense, et nous allons tout donner.

16- Pour finir, je te laisse le mot de la fin, si tu as quelque chose à ajouter aux lecteurs de VS-Webzine, tu peux !

Le fléau venu du désert américain vient envahir la FRANCE. Préparez-vous pour un assaut apocalyptique de 40 minutes et une raclée cosmique ! Sci-Fi or Die!