Vorph - SAMAEL par ARIS3AGAIN - 3739 lectures
Quelques heures avant leur excellent show à la Machine du Moulin Rouge de Paris, le 2 octobre dernier, nous avons rencontré Vorph, chanteur et guitariste de Samael, qui a accepté avec beaucoup de gentillesse de répondre à nos questions.




Pour commencer, on va parler du dernier album en date, « Lux Mundi ». Dans quel état d’esprit étiez-vous quand vous avez commencé à composer ce disque ?
Vorph : On n’était pas stressé, on n’avait pas « besoin » de fournir un album, on n’était plus sous contrat avec une maison de disque, donc on a pris notre temps, on a fait vraiment comme on en avait envie. Morceau par morceau… La composition a pris pas mal de temps ! L’enregistrement, en revanche, a été beaucoup plus rapide, en deux mois maximum. On a commencé à enregistrer après cinq ou six morceaux… C’était un nouveau départ, on avait une base, on avait pas mal d’idées d’orchestrations. On était parti sur une direction plus électro, industrial… On voulait ça de retour, pas un melting pot, mais de mélanger des éléments qui nous plaisent aujourd’hui. C’est un album qu’on a voulu faire, tout simplement.

Est-ce qu’il y a des artistes ou des évènements qui vous ont influencé particulièrement pendant ce moment ?
Honnêtement, je ne pense pas ! On a eu des groupes qui nous ont influencés à notre tout début. Maintenant, ce n’est plus le cas. Par contre, on ne veut pas re-sonner comme on l’a fait dans le passé. On écoute des choses très différentes, j’écoute par exemple beaucoup de musiques de films, de la musique classique. Xy écoute un peu de tout, même s’il est souvent en tournée avec des groupes Metal, donc il en écoute pas mal. Mak est aussi très ouvert d’esprit. On n’a pas de but précis, c’est plutôt un feeling. On veut une musique puissante, qui fonctionne bien en live. Apparemment, vu la réaction du public en tournée, on a plutôt bien fait les choses.

Comment se passe la composition du groupe ?
On n’a pas une démarche de groupe « habituelle », car c’est Xy qui fait toute la musique. Je m’occupe intégralement des paroles.

En parlant des paroles, en dehors de la religion, dont on va parler tout à l’heure, quels sont les thèmes qui t’inspirent particulièrement ?
Oui… En fait, beaucoup de morceaux n’ont pas vraiment de thème à proprement parler, à part le fait de vouloir s’exprimer, tout simplement. C’est assez abstrait. Je parle beaucoup de recherche personnelle, de comment trouver une position par rapport au monde qui nous entoure. Ce n’est pas lié à un sujet vraiment, mais c’est lié à une position personnelle. Je ne pense pas qu’il y ait de sujets politiques, mais il y a sans doute une sorte de conscience sociale sur certains morceaux. C’est un peu mélangé au sujet de la religion, c’est imbriqué j’imagine.

« Lux Mundi » est déjà votre dixième album…
Ah bon ? Je ne les ai pas comptés honnêtement ! (rires) En même temps, c’est spécial, parce que certains albums font parties de notre discographie, comme « Era One », mais pour moi, ce n’est pas vraiment un album de Samael, plutôt un disque d’Era One [le side project électro de Xy et Vorph, NdR]. On l’a sorti sous ce nom-là pour des raisons concrètes liées à notre contrat avec notre maison de disque. Ca a mis du flou par rapport aux intentions du groupe. Après, on a un album comme « Above », par contre, là, c’était une bonne décision de le mettre dans Samael. On s’est dit que vu qu’il y avait déjà un OVNI dans notre discographie, autant faire la balance en en mettant un qui part dans l’autre sens ! Le reste, c’est des albums plus assumés. Je trouve qu’il y a une sorte de fil logique entre tous nos disques, à part ces deux-là, qui sont au final un peu à la marge.

Et parmi tous ces albums, lequel a eu, selon toi, le plus d’impact dans la carrière du groupe ?
J’aimerais penser que notre dernier ! Mais on est au tout début, je ne sais pas encore quelles seront ses répercussions dans le futur. Jusqu’à maintenant, je pense que, clairement, c’est « Passage ». C’est l’album qui a été un vrai changement pour nous, parce que c’est là qu’on a commencé à utiliser une boîte à rythmes, donc ça nous a démarqués de tout ce qui était dans la scène à l’époque, on est devenu un peu des outsiders grâce à ça. Ca nous a permis d’intégrer d’autres choses, de trouver notre propre son. On n’a jamais senti qu’on faisait partie d’une scène, même si, au début, on nous a affiliés à ceci ou cela. A partir de 1996, donc de « Passage », ce n’était plus possible. Maintenant, les gens nous rattachent à des groupes comme Rammstein. Je m’en fous un peu, mais je trouve qu’on est très différents, on ne vient pas musicalement du même endroit.

Après tous ces albums, comment réussissez-vous à trouver encore de l’inspiration, à essayer de nouvelles choses ?
C’est l’envie ! Au départ, c’était l’envie de faire un album pour pouvoir faire des concerts en ce qui me concerne. Maintenant, c’est l’envie de faire en quelque sorte un disque « ultime ». Si demain, tu dois arrêter, qu’est-ce que tu laisses derrière toi ? Après, si on a fait l’album ultime, je n’en sais rien. En tout cas, « Lux Mundi » propose des choses qu’on n’avait pas faites auparavant. Donc si ça s’arrêtait demain et qu’on devait conseiller un de nos albums, ce serait celui-là.

Peux-tu nous expliquer pourquoi ?
C’est mon préféré déjà. Ca a longtemps été « Solar Soul », parce que j’avais l’impression d’avoir fait cette démarche, d’avoir fait un album qui contient tout ce qu’on a toujours été. Mais il manquait des choses. On a l’impression que « Lux Mundi » est plus complet, qu’il va plus loin dans nos racines. « Solar Soul » incluait pas mal de choses qui allaient jusqu’à « Passage », alors que celui-là, j’ai l’impression que ça remonte jusqu’au premier album. Il y a des idées qui étaient là au tout début, qui sont à nouveau là.

Parlons un peu de l’artwork maintenant. Qui l’a fait ?
C’est Patrick Pidoux, il avait déjà fait les artworks de « Solar Soul » et « Above ». En fait, c’est le batteur de l’autre groupe de Mak. C’est quelqu’un qui connaît Samael depuis très longtemps, on aime beaucoup son travail et sa vision de notre musique. Il arrive toujours à apporter quelque chose d’intéressant, d’un peu différent, mais qui reste dans l’univers du groupe.

Et faire un artwork avec du noir sur du noir, est-ce que ce n’est pas un peu ironique quand on appelle son disque « la lumière du monde » ?
Non, parce que justement, avoir deux sortes de noir, ça montre que si tu n’as pas de lumière, tu ne vois rien ! C’était une idée d’avoir la lumière qui révèle l’artwork. Tout simplement.

Et pourquoi « Lux Mundi » en particulier ?
Je ne sais pas… On avait un morceau qui s’appelait « Luxferre », mais je ne voulais pas avoir un titre de chanson qui soit le titre de l’album. Ca met le focus sur un seul morceau, donc on est resté dans l’idée de la lumière. Il n’y a ni grand concept, ni complication. On avait un moment une chanson qui s’appelait « Lux Mundi », mais qu’on n’a jamais enregistrée.

Tu parlais tout à l’heure de l’enregistrement, comment s’est-il déroulé ?
De la même manière que « Reign Of Light » et « Solar Soul », on les a réalisés chez nous, en Suisse. Mak a un studio chez lui, mais aussi un studio d’un de ses amis, qui est beaucoup plus professionnel, donc on a utilisé ces deux studios. Xy a son matériel chez lui, et vu qu’on bosse sur une boîte à rythme et un synthé, on n’a pas besoin d’aller en studio pour enregistrer ça. On peut utiliser le temps qu’on veut, ça empiète pas sur notre budget. On avait pris énormément de temps sur « Solar Soul », on a mis quasiment une année dessus. Là, on a fait plus succint. Une fois que quelque chose était enregistrée, on ne revenait pas dessus. Ca a sans doute participé à la démarche qu’on avait eu sur « Above », qui était plus « on avance, on ne revient pas en arrière ». « Lux Mundi » est abouti, mais pas devenu stérile à force de trop vouloir l’améliorer.

Vous avez sorti un EP peu avant « Lux Mundi », pourquoi avoir fait ce choix ?
En fait, ce n’était pas notre idée, on voulait simplement sortir le single d’« Antigod ». Nuclear Blast nous a demandé d’avoir un ou deux titres en bonus, ça ne devait sortir qu’en digital. On est parti dans cette idée. Eux nous avaient demandé de faire un mix, on l’a fait. Et vu qu’il y avait pas mal de matériel, ils l’ont fait sous cette forme-là. Du coup, l’EP a été sorti en version physique, mais aussi en vinyle pour les collectionneurs. Il n’y avait pas de plan d’EP en fait, notre seul but était de présenter un nouveau titre avant la tournée.


On parlait tout à l’heure du terme de la religion, qui revient régulièrement dans vos paroles…
On l’avait quand même bien laissé derrière. Ca a été très présent dans nos trois premiers albums. Au bout d’un moment, on s’est dit qu’on n’avait pas envie de passer toute notre carrière à tergiverser là-dessus, qu’on en avait déjà parlé. Là, la démarche est différente. Je trouve que la religion est revenue en force, il y a beaucoup de communautés qui se définissent par rapport à leur religion, et je trouve ça très dangereux. C’est une autre démarche. Je me suis libéré depuis très longtemps de tout ça, de cette religion qu’on m’a inculquée à la force, via l’école, la famille… C’est partout pareil, mais nous, on vient du Sud de la Suisse, une région très religieuse, très catho, donc c’est lourd à porter. C’est aussi pour ça que nos premiers albums étaient un moyen de vomir tout ça. Là, c’est différent, on est posé, on n’a pas besoin de choquer ou quoi que ce soit. Mais on a besoin d’en parler. « Antigod » est très rentre-dedans, le morceau est peu explicatif, c’est notre vision. On refuse de penser à l’intérieur des limites fixées, ce n’est pas seulement dangereux de le faire, mais c’est aussi dommage. Après, on en est sorti il y a longtemps, mais on ne fait pas de la musique que pour nous. Je me dis que peut-être ça peut faire plaisir à certains d’entendre des textes comme ceux-là. Surtout des gens plus jeunes. Nous, on arrive bientôt à 40 ans, on a un point de vue un peu plus mûr sur la question, mais ce n’est pas pour ça qu’on a envie de se taire !

Pour en revenir à l’album, quelles ont été les réactions du public ?
Actuellement, on est en tête d’affiche, les gens qui viennent nous voir nous connaissent. On n’est pas dans la découverte, on est entre nous. On joue la moitié de l’album tous les soirs, 6 morceaux. Le reste, ce sont des titres de nos disques précédents, on essaie de proposer une sorte de balance de ce qu’on a fait avant. Ca se passe très bien !

Et vous avez déjà des idées pour un futur album ?
Pas vraiment… On en a quelques-unes, mais on va peut-être prendre plus de temps avant d’en sortir un suivant. J’ai l’impression que si on presse les choses, le prochain disque sera pareil que celui-là. On est tellement fier de l’album… Je n’ai pas d’autres envies pour le moment. On va sûrement essayer de tourner un peu plus longtemps pour celui-là. En revanche, on a parlé de faire un album de réenregistrement, pour réactualiser des vieux morceaux. Par exemple à partir de « Ceremony Of Opposites ». Pas les premiers, vu qu’on joue très peu d’extraits de ceux-là. C’étaient des albums très primitifs. Au-delà du fait qu’ils sont vraiment ancrés dans le temps, je ne trouve pas qu’ils soient très intéressants. Si on les ré-ajournerait, il y aurait vraiment beaucoup de travail à faire. Si on faisait des réenregistrements, on ferait par exemple une sélection parmi « Ceremony Of Opposites », « Passage » et « Eternal ». On ne réenregistrerait pas les trois, mais une sélection, pour refaire les titres au goût du jour. Je ne suis pas sûr qu’on le fasse, mais c’est une idée. En ce moment, on a plutôt envie de tourner !

« Lux Mundi » a été sorti sur Nuclear Blast, votre collaboration se passe-t-elle toujours bien ?
En effet ! Ils savent ce qu’ils font, ils sont très professionnels, ça c’est le bon côté des choses. Le moins bon côté, c’est que ton album vit pendant un mois le temps d’en faire la promotion, et ensuite, ils sont ailleurs. Là, ça fait déjà trois mois que le disque est sorti, c’est déjà sorti de leurs priorités. Pour nous, non. C’est un album qui en est à son tout début, donc la vision est différente. Mais c’est notre dernier album avec Nuclear Blast sur ce contrat, à moins qu’on re-signe avec eux, ce qui n’est pas impossible d’ailleurs. C’est un label « metal », ils connaissent le sujet et leur réseau.

En parlant de Nuclear, il y a tout un débat autour du rôle diminuant des labels dans l’industrie de la musique. Quelle est ta position à ce sujet ?
Je ne me fais pas trop de soucis pour les labels, je ne pense pas qu’on puisse sortir un album sans un label. Quelques-uns l’ont fait, mais tout le monde n’est pas Radiohead ou Nine Inch Nails. Pour les groupes de niveau plus modeste, t’es obligé d’avoir quelqu’un derrière toi qui fasse savoir tes actualités. L’information va très vite aujourd’hui, mais du coup, pour te faire remarquer, il faut taper plus fort qu’avant. Tu peux tenir au courant ta fanbase, mais au-delà, c’est délicat. Pour nous, c’est un peu différent, parce qu’on arrive à vivre sur notre fanbase. On y arriverait, mais on serait plus proche de la survie qu’autre chose. Et puis, je ne trouve pas ça intéressant, on a envie de faire découvrir notre musique à d’autres gens. Donc oui, je pense qu’on a besoin d’un label. Je sais qu’aux Etats-Unis, il y a des gens qui font des genres de groupes de promotion, ce n’est plus un label, mais ça revient finalement au même. La musique ne sortira pas physiquement dans ce cas, elle reste en téléchargement. Et puis même si ce ne sont plus des labels, ce sera des agences de promotion ou je ne sais quoi, et ça reviendra plus ou moins au même. Il faut savoir ce que tu veux, tu ne peux pas être ignorant du business si tu fais de la musique, mais soit tu fais du business, soit tu fais de la musique. Nous, on fait de la musique, on laisse au label le business.

Et les nouvelles façons d’écouter de la musique, le téléchargement illégal, le streaming, ça touche beaucoup le groupe, ou tu ne le ressens pas comme ça ?
Tout le monde nous dit que ça nous touche, donc j’imagine que oui… Je ne sais pas, finalement, les gens achètent quand même notre disque, notre merch’, ils viennent aux concerts. Et puis finalement, je crois que je préfère quelqu’un qui télécharge illégalement notre musique à quelqu’un qui ne s’intéresse pas du tout à nous. Le pire pour un musicien, c’est quand même de ne pas avoir d’auditeurs. Après, si c’est rémunéré ou non, c’est une autre histoire.



Autrement, le groupe va fêter bientôt ses 25 ans, vous envisagez un évènement particulier pour fêter ça ?
Je ne pense pas, on n’a rien de prévu pour le moment en tout cas. Après, je te parlais tout à l’heure de l’idée de réenregistrer d’anciens titres, ça pourrait sortir dans ce cadre, mais ce n’est pas vraiment lié au final.

Au bout de 24 ans donc, vous devez avoir pas mal d’histoires et d’anecdotes. Peux-tu nous raconter le pire concert de toute la carrière de Samael ?
Oui, je m’en souviens parfaitement ! C’était un festival en Pologne. Il faut dire que la Pologne est un pays qui nous a toujours très bien accueillis. C’était en 89, c’était un grand festival, 5000 personnes en salle. On avait fait le déplacement juste pour ce concert, donc tout de même un bon investissement. Et finalement, on a pu jouer que deux morceaux, on a eu un problème avec le synthé. On essayait de réparer, et le promoteur nous a dit qu’on ne s’inquiète pas, qu’on allait être payé. Mais nous, on s’en foutait d’être payé ou non, ça ne nous faisait de toute façon pas gagner grand-chose avec les frais de voyage. Mais voilà, on se retrouve devant des gens qui sont là pour nous voir, ultra motivés, et on fait deux morceaux… On était boosté d’adrénaline et on ne savait pas quoi faire… Donc oui, c’était le pire concert, clairement ! C’est très bizarre, car tu as un boost d’adrénaline, et que tu ne sais pas quoi en faire, à part donner des coups de pied dans les chaises… Oui, c’est très bizarre.

Et pour cette tournée, comment s’est-elle organisée ?
Keep Of Kalessin, on avait déjà joué avec eux il y a quelques années. Melechesh s’est greffé à l’affiche pour remplacer Septicflesh, qui est parti sur une autre tournée. Je suis très content, car Melechesh est un très bon choix. Les autres groupes sont différents. Je suis content, car j’aime beaucoup Noctem. Les deux autres groupes, Dead Shape Figure et Six Reasons To Kill, sont très bien aussi, donc je suis très content de cette affiche, c’est un très bon package.

Quels sont vos projets à part la tournée actuelle ?
On a quelques petites dates de prévues. En janvier, on va faire la fameuse croisière 70 000 Tons Of Metal. Pour l’an prochain, on est en train de regarder pour les festivals, vu que c’est maintenant que ça se boucle. Et on pense faire une tournée aux Etats-Unis, on verra comment ça se goupille. Il n’y a rien de fixé, mais beaucoup de projets !

Je te laisse le mot de la fin pour nos lecteurs !
Merci pour le support, on vit pour ça, donc merci beaucoup !
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