Ibai (tout) - ILBELTZ par PRINCE DE LU - 2602 lectures
Après la sélection VS de son premier album Auskan Gabiltz Olatun Gainian (1598 Potrobizargorri I), il était temps de tailler une bavette avec l'homme derrière le projet basque Ilbeltz. Et Ibai est un vrai touche-à-tout qui ne s'impose aucune limite.


Peux-tu nous raconter l'histoire d'Ilbeltz? Est-ce un projet solo depuis les premières années?
Non, nous étions quatre amis quand nous avons démarré Ilbeltz, vers 1995. A cette époque, j'ai quitté un groupe dans lequel nous jouions une sorte de death metal. J'avais du heavy metal en tête, ainsi sont nés mes premiers morceaux. Un matin ensoleillé, nous avons décidé avec un ami de fonder notre propre groupe, et déjà ce jour-là nous étions quatre. Nous avons passé de bons moments. Nous avons donné autant de concerts que possible, jusqu'en 1999 environ. Ensuite nous avons eu des problèmes de line-up, puis nous avons enregistré les titres du split Iluntasunaren Itzulera (Le retour des ténèbres en Basque, que le label a traduit en anglais Triarchy of Vasconia). Nous avons partagé ce split avec deux autres groupes basques Aiumeen Basoa et Adhur.


Entre ce split et le premier album, dix années se sont écoulées. Comment expliques-tu ce délai? A-t-il été difficile d'élaborer les compositions de Auskan... ou le temps a-t-il passé trop vite?
Oui, le split a été sorti en 2000, cela fait très longtemps. En 2000, j'avais déjà quelques nouveaux morceaux et je pensais les enregistrer. Mais je n'en étais pas assez satisfait. J'ai réalisé qu'ils ne correspondaient pas à ce que je cherchais à faire. J'essayais de raconter une histoire qui s'est déroulée au XVIème siècle, mais je ne connaissais pas assez la musique de cette période. Alors j'ai commencé à "apprendre" à propos de la musique traditionnelle et de la musique de la Renaissance de différents pays et différentes cours d'Europe. Ainsi, j'ai parcouru un long chemin avant de finalement décidé d'enregistrer. Et je dois dire qu'au même moment j'ai commencé à écrire un livre, un roman de 1000 pages à propos de cette même histoire. Donc la musique n'a pas été la seule chose que j'ai dû apprendre... J'ai aussi joué dans d'autres formations, du rock à la musique classique. Et bien sûr, en plus de tout ça, j'ai dû travailler parce que j'avais besoin de manger (rire).


Quelles sont les influences musicales d'Ilbeltz? Quels styles de musique écoutes-tu? Metal, traditionnel, médiéval?
J'aime écouter toute sorte de musique. Je pense que chaque style a son point de vue particulier, et qu'il transmet son propre feeling. Par rapport à Ilbeltz, je dirais que les influences les plus importantes sont celles que tu cites, auxquelles s'ajoute la musique de la Renaissance. J'ai peur que la liste soit très longue... de groupes de metal (extrême ou non) jusqu'au rock, blues, jazz et classique de toutes les périodes. Mais ces dernières années, les musiques que j'ai le plus écoutées ont été la musique traditionnelle et celle de la Renaissance. Et je pense que cela a beaucoup influencé la composition des morceaux de l'album.


Ton album est fantastique, à l'exception du son de la batterie. J'ai lu que c'était un de tes amis qui avaient programmé la batterie. Est-ce exact?
Merci pour ton commentaire. Et oui, c'est exact. La batterie a été programmée par un de mes amis et moi. En fait, cet ami est aussi technicien ou ingénieur dans un studio, et il a réalisé la majeure partie du travail sur la batterie. Comme tu le dis, je sais qu'il y a des gens qui n'aiment pas le son de la BAR, et d'autres qui n'aiment pas la manière dont elle a été programmée. J'apprécie ces opinions et ces critiques. C'est important pour moi de connaître la réelle opinion de l'auditeur. D'un autre côté, il y a des gens qui m'ont dit apprécier la manière spéciale dont sonne la batterie. Donc j'ai entendu les deux opinions. Pour moi, la BAR fonctionne comme ça, et elle transmet les sensations dont j'avais besoin pour ces morceaux.


Peux-tu nous décrire le processus d'enregistrement, et en particulier de combien d'instruments tu as joué sur cet album?
Hé bien, l'enregistrement a été intense et paisible. J'ai enregistré la plupart des choses dans mon petit et humble "homestudio": accordéons, violons, flûtes, hautbois, basse, guitares classique et électrique en son clair, quelques percussions, les voix... Puis j'ai enregistré les guitares électriques et nous avons programmé la batterie en studio. Le mixage et le mastering ont été réalisés dans le même studio. Sur cet album, j'ai joué: les guitares électriques et classiques, la basse, les voix, l'accordéon chromatique, les flûtes, la flûte baroque, le clavier, un vieux tambour plein de poussière... et je pense que c'est tout. Imanol du groupe metal Azken Garrasia a enregistré le violon, Abistur (ex-Numen) le hautbois, Eneko de la Fuente le bodhram et l'alboka. Beleak du groupe Aiumeen Basoa a placé des voix gutturales, Egoitz du même groupe a joué la basse sur une partie du dernier titre. Ma mère et une de ses amies ont chanté l'irrintziak.


Si je te donne l'argent pour ré-enregistrer ton album dans un studio pro avec un ingénieur attitré qui va te coller un son plus puissant, acceptes-tu ou crains-tu de perdre le feeling de Auskan...?
Je pense que j'utiliserai cet argent pour les prochains albums que j'ai en tête. Tu sais, l'enregistrement de Auskan... a été intense, parfois difficile, et je pense que son son représente une période de ma vie. Donc je ne le changerais pas. La plupart du temps, j'ai adoré enregistrer cet album. Je me suis immergé dans une profonde joie, mais il y a eu aussi de très difficiles moments et je pense que ces sentiments intenses ressortent dans l'album, dans le son... A propos d'avoir une production plus puissante... oui, ce serait génial! Mais il semble que cela ne soit pas facile de conserver un équilibre entre les parties black/heavy et les parties traditionnelles/Renaissance. En masterisant les titres, tu as à choisir et à prendre des décisions délicates. Ma décision est allée vers l'équilibre. Mais oui, peut-être que si je devais changer quelque chose... j'emploierais un son de guitare plus puissant sur certaines parties, par exemple.


Peux-tu nous résumer l'histoire que relatent tes paroles, et qui font donc l'objet de ton livre?
Oui, j'ai écrit un roman de 1000 pages (rire), et cet album est basé sur plus ou moins le premier chapitre du livre. Le roman est en langue basque, et l'histoire parle de pêcheurs qui ont fuit la guerre au XVIème siècle pour devenir pirates. C'est principalement un roman d'aventures. Mais d'autres personnages très liés à la musique apparaissent également dans le livre, comme un joueur de luth vénicien ou un troubadour/ménestrel basque.


Beaucoup de groupes qui chantent dans leur langue natale ne se préoccupent pas de savoir si l'auditeur comprend ou non. De toute façon, beaucoup d'auditeurs ne se préoccupent pas de textes. Etait-il important pour toi de traduire tes paroles de l'euskera à l'anglais?
Oui, je préfère que les gens aient l'opportunité de comprendre de quoi parlent les morceaux. La traduction que j'ai faite n'est pas très bonne, mais au moins, les auditeurs peuvent approcher au maximum le sens d'origine. L'euskera que j'ai employé dans les textes n'est pas la forme standard. J'ai mélangé plusieurs dialectes, et cela n'a pas été facile pour moi de représenter ce mélange dans la traduction anglaise. De toute façon, mon anglais n'est toujours pas assez bon (rire).


Comment définirais-tu l'identité basque? Qu'est-ce qui est spécifique aux hommes de ton pays?
Et, comment pourrais-je définir l'identité française? Anglaise ou italienne? Je pense que des gens différents donneront des réponses tout aussi différentes. La même chose se passe chez nous. La différence est que certains Basques sont forcés d'être français, certains autres sont forcés d'être espagnols. Pour moi, la chose la plus spécifique du pays basque est notre langue. Langue et culture sont les deux éléments qui aujourd'hui différencient un Anglais d'un Français, n'est-ce pas? Donc, c'est aussi mon opinion concernant les Basques.


Vis-tu en ville ou à la campagne? Quelle est la place de la nature dans ta vie quotidienne?
Je suis issu d'une ville, qui n'est pas très grande mais c'est une ville. Pendant plusieurs années, j'ai vécu à la campagne et maintenant je suis à nouveau en ville, en bord de mer. La nature est un élément très important dans ma vie, et je souffre de la vitesse à laquelle la vie "moderne" et l'industrie détruisent les forêts, les montagnes, les champs, les rivières et les mers. Je ne comprends pas comment nous pouvons être aussi peu malins. Et je ne comprends pas pourquoi nous ne respectons pas la planète, l'environnement et l'endroit où nous vivons.


Tu vas sortir un split avec Hanternoz et Anceisural Eritance. Comment as-tu été en contact avec Antiq records? Quelles valeurs partages-tu avec ces deux groupes français?
Oui, j'ai enregistré un long morceau pour ce split! Leon de Hanternoz m'a écrit pour me parler de mon album. J'ai aussi écouté un de ses albums (et plus tard du Anceisural Eritance) et nous avons commencé à parler musique, histoire, contes, langues et d'autres choses. Je suis très intéressé par la musique et la culture bretonnes, sur les rives de la Loire... et j'ai beaucoup aimé un conte breton qu'il m'a raconté. Il avait déjà en tête d'enregistrer et de sortir un split basé sur ce conte. J'ai beaucoup aimé l'idée. Pour répondre à ta dernière question, je dirais que la principale valeur et l'esprit de ce split est le respect des forêts et de la nature. J'ai enregistré ma propre version et interprétation de l'idée du conte, inventant un autre petit conte qui se déroulerait au temps de Merlin. Concernant la musique, j'ai peut-être enregistré un morceau plus extrême, mais qu'importe j'en suis très content. J'ai beaucoup apprécié le composer et l'enregistrer. Je dois dire en parlant du son que c'est un enregistrement "underground" (dans mon cas).


Tu n'as pas de label. Es-tu intéressé pour signer un contrat ou penses-tu que tu pourrais perdre le contrôle de ton projet?
Je suppose que cela dépendrait du label et de sa proposition. Pour moi il est important d'avoir un complet contrôle sur les décisions qui concernent la musique. Et d'après moi, au final, après avoir couvert les frais, si le label gagne de l'argent, le musicien doit en gagner aussi. Et cela n'arrive pas si souvent de nos jours.


J'ai aussi lu que tu préparais un album de musique classique. Peux-tu nous en dire plus sur ce projet?
Oui, c'est vraiment une grande aventure. L'été dernier j'ai décidé de commencer la composition d'un "concert pour soliste et orchestre". C'était nouveau pour moi et j'étais très motivé. J'ai commencé à penser aux premières mélodies de base et aux harmonies, et en même temps à chercher des partitions ou des vidéos pour apprendre de ces concerts comme ceux de Tchaikovsky ou Tchaikin. J'ai travaillé vraiment dur, pendant à peu près 4 mois, 8 à 10 heures par jour. J'ai écrit les partitions sur papier, avec un stylo, mais je devais les retranscrire sur ordinateur. Je suis toujours en attente de l'ordinateur, je n'ai pas été en mesure de l'acheter encore. Après ça, je dois penser à l'enregistrement et certaines personnes intéressées m'ont dit qu'il y avait moyen de faire ça avec un vrai orchestre. C'est une option un peu dingue, parce que je crains de devoir jouer la partie soliste moi-même avec mon accordéon chromatique. Et c'est trop de pression. Mais je ne m'esquiverai pas.


Metal, classique, musique traditionnelle. Tu ne sembles pas avoir de frontières en ce qui concerne la création musicale. Y a-t-il des styles de musique que tu ne veux pas jouer?
Hé bien, je ne suis pas sûr. Parfois on peut prendre énormément de plaisir à jouer d'un style de chansons qu'on n'imaginait pas. Par exemple, quand on est saoul (rire).


Tu as aussi réalisé le design de l'album, pochette comprise. Es-tu intéressé par toutes les formes d'art?
Oui, je le pense. Mais dans ce cas, c'était la première fois que je me lançais dans le design. Et j'ai eu des petits soucis avec les couleurs, la lumière... Tu sais, je travaillais avec un ordinateur portable... J'ai fait beaucoup d'essais, mais... Comme tu demandes pour les autres formes d'art... il y a une paire d'années, j'ai commencé à écrire un script pour un film. Je ne l'ai pas encore terminé, j'ai seulement commencé les premières séquences. Mais qui sait, quand j'aurais terminé ce concert de musique classique... Le film est la continuité de l'histoire du CD et du livre.


Y a-t-il une chance de voir Ilbeltz sur scène dans le futur?
D'un côté, j'en aurais bien envie. Mais j'aurais besoin de demander beaucoup d'aide à un paquet d'amis. Qui sait... Peut-être que si les prochains albums sont assez bons.... Je te le ferai savoir si tu veux, le jour où cela arrivera.


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