Suite et fin de la listening session organisée par Season of Mist à l'occasion de la sortie du prochain album de MORBID ANGEL. David Vincent se prête au jeu de l'interview promo au cours d'une brève causerie dans une alcôve du bar La Maison Hantée!

Qu'est-ce que ça te fait d'être de retour sur un album de MORBID ANGEL? Je crois que tu n'avais rien enregistré depuis "Domination"...
L'album live est venu après. Mais oui, le dernier album était "Domination".
Et oui ça me fait vraiment du bien. Ça a mis du temps à venir... tout ça a infusé un moment et désormais c'est fait. Je me sens soulagé que ce soit enfin réalisé parce qu'on en parlait depuis des années. Pour une raison ou pour une autre nous n'avions pas fait le pas, ça a pris un certain temps avant qu'on se dise : nous devons le faire et le faire maintenant!
Le défi c'est que... tu vois ce qu'il s'est passé avec Pete et tant d'autres choses, mais dorénavant c'est fait. Je regarde toujours de l'avant!

Qu'est-ce qui t'a manqué le plus pendant que tu étais au loin?
Je ne l'ai pas réalisé à ce moment-là mais ce qui m'a le plus manqué ce sont vraiment tous ces visages souriants. Les visages de tous ces gens qui étaient en face de nous dans le public, qui étaient transportés par la musique et notre spectacle.

C'est important pour toi de partager des sentiments positifs avec le public?
Oui, parce que j'en reçois en retour. On se nourrit mutuellement.

Tu n'aurais pas pu retrouver ces sensations avec un autre groupe?
Ce serait différent. J'adore jouer de la musique, toutes sortes de musique. Mais MORBID ANGEL c'est quelque chose de complètement différent. Quand je jouais avec ma femme par exemple, c'est elle qui avait une forme de connexion avec le public, c'est ce qui importe.

Aujourd'hui, en 2011, comment définirais-tu l'entité MORBID ANGEL?
Je dirais que c'est une combinaison de Trey et moi. Mais ce serait négliger les contributions de Destructor et Tim Yeung sur cet album parce que je pense qu'ils ont accompli un très bon travail. Je suis vraiment fier de travailler avec eux ; chacun d'eux a insufflé énormément de force dans cet album. Je ne dis pas que ça n'aurait pas pu se faire sans ces personnes, ni que ça aurait été différent avec d'autres musiciens mais je suis vraiment content du résultat.

Existe-t-il une relation particulière entre Trey et toi?
Nous avons construit une relation très intéressante au fil des années...

De quoi est-elle faite?
C'est une bonne question! Je ne sais pas... de compréhension, d'estime, de respect, de cette capacité à travailler ensemble. Je ne sais pas, c'est étrange. Trey est une personne très intéressante. C'est un gars vraiment spécial, je n'ai jamais rencontré quelqu'un comme lui. Il est très individuel, très créatif et certainement pas la personne la plus facile avec qui travailler. Mais ce n'est pas mon cas non plus, donc je pense que nous formons une bonne équipe.

Êtes-vous opposés dans cette équipe comme pourraient l'être les faces du Yin et du Yang? Complémentaires et si différents?
Je ne pense pas que nous soyons opposés. A nouveau c'est une bonne question. Il me semble que c'est en rotation, non pas que ce soit défini comme ça mais... c'est un cercle vertueux. Je ne dirais pas qu'il y en a un noir et un blanc, mettons que l'ensemble est gris.

Quand vous avez commencé à écrire le single "Nevermore" il y a quelques années, vous attendiez-vous à quoi ressemblerait l'album?
Non. Je savais comment aller sonner cette chanson. Et je savais comment sonneraient la paire de titres que nous avons composés à l'époque, mais je ne m'attendais pas à ce que certains morceaux voient le jour de cette façon. Tu vois, s'il y a une chose que j'anticipe avec MORBID ANGEL c'est de toujours m'attendre à l'imprévisible. Si c'était simple et commun, ça ne m'intéresserait pas. Repousser les limites est très important. C'est quelque chose que j'ai ressenti dès le tout début, et cette année nous l'avons fait plus que jamais.

Vous avez besoin d'être surpris chaque jour, comme dans un couple?
Ce n'est pas tant une question d'être surpris. Quand nous avons commencé à travailler sur ces titres, par exemple « Too extreme », nous avons plus ou moins élaboré la structure. Je n'étais pas là pour les pistes de guitare, je n'étais pas en studio. J'avais entendu le brouillon des morceaux mais ils ne ressemblaient en rien au résultat final! Quand ça a été terminé, j'étais en train d'écouter et je me suis dit... whaouh, c'est vraiment spécial!

Est-ce à dire que tu n'étais pas tant impliqué dans l'évolution de votre son?
Quand Trey était en train d'enregistrer les rythmiques, je n'étais pas en studio. J'étais dans un autre studio avec Tim pour l'enregistrement des pistes de batterie. Quand je suis arrivé pour enregistrer la basse et le chant sur les morceaux de Trey, c'était la première fois que je les entendais réellement.
C'était bizarre, un vrai challenge! Les défis génèrent beaucoup de fun, beaucoup de diversité. J'étais vraiment excité parce qu'il fallait que je me force moi aussi à jouer différemment. C'est cool! C'était vraiment une démarche artistique, je n'ai jamais entendu quelque chose comme ça auparavant.
Même si je n'aimais pas, j'aimerais quand même. En tant qu'auditeur, même si je ne comprenais pas parce que c'est très étrange, j'aimerais ça...parce que c'est très étrange. Je suis en partie créateur de ce ragoût et j'en suis très fier. Je crois que c'est la meilleure chose que nous ayons jamais faite. Je dis cela à chaque album parce que je le pense.

C'est sûrement la meilleure raison pour continuer...
Exactement! Quand tu es à court d'idées, c'est le moment de se retirer! Et j'ai encore beaucoup d'idées. Nous avons tous toutes sortes d'idées.

Alors, aurons-nous la chance d'entendre un jour le 26eèm album de MORBID ANGEL?
Nous verrons. C'est une autre histoire. Ça nous prend tellement de temps pour faire un album, je ne sais pas si je serai encore en vie à ce moment-là.

Est-ce que Tim a eu l'opportunité de développer son propre style sur l'album?
Tim a écouté comment Pete jouait "Nevermore" et il a essayé de s'approprier ses gestes sur ce morceau. Sur d'autres titres, j'ai encouragé Tim à jouer comme il le voulait. C'est un très bon batteur, il a apporté énormément de choses sur l'album. Son jeu est très polyvalent, il peut jouer toutes sortes de musiques, y compris du jazz, donc il a été en mesure d'incorporer beaucoup de sensations intéressantes.
Quand tu écoutes l'album, tu peux entendre des patterns de batterie très spéciaux, vraiment bien foutus. Il complète les chansons d'une manière magnifique.

Pendant que j'écoutais l'abum, j'ai eu le sentiment que vous n'aviez jamais été aussi industriels, quasiment martiaux dans vos compos. Comment en êtes-vous arrivés à ce résultat?
Il n'y qu'une chanson qui sonne réellement de cette manière. C'était le but d'en arriver là, d'avoir cette sorte de drumbeat. Trey a montré à Tim ce qu'il devait jouer. C'est ce qu'il voulait que Tim joue. Une fois qu'il avait atteint le résultat voulu, il pouvait ajouter quelques trucs. A ce stade Trey disait : OK on va faire encore quelques prises, on a des versions alternatives, maintenant on va prendre le temps de réécouter tout ça. Mais au final, sur ces titres, Trey avait une vision très précise de ce qu'il voulait et c'est exactement ce que Tim a fait.

J'ai cru noter une évolution dans les thèmes de tes paroles. Notamment sur le titre « Too extreme ». Quand tu dis « We are your new religion, new religion », n'es-tu plus simplement anti-chrétien?
Je suis toujours anti-chrétien, mais pas seulement. Je suis également anti-islam, anti-hindouisme, anti-toute forme de gouvernement de la pensée. J'aime quand les gens prennent le temps de se réveiller, de puiser de la force en eux-mêmes, et de ne pas se soucier de ces vieilles croyances qui les maintiennent uniquement en esclavage. Donc, s'ils doivent croire en quelque chose, je voudrais seulement qu'ils croient en eux-mêmes. Votre nouvelle religion est réellement : pas de religion. C'est la meilleure voie et j'ai uniquement essayé de montrer cet exemple, c'est tout.

Plus loin, sur le titre "Destructos", des paroles surprenantes également. « Destructos is marching on man ». Que symbolisent-ils...
Les Destructos sont une race de robots extraterrestres. Il y a une fédération de planètes là haut qui nous observe. Ils ont créé l'Homme, l'ont mis sur cette planète et regardent combien de temps ça va nous prendre pour évoluer. Ils attendent, ils regardent, et ils voient que nous n'allons pas mieux aujourd'hui qu'au commencement. Nous avons toujours des guerres, nous sommes toujours cupides, nous abusons toujours des autres pour notre bien personnel. Nous continuons sur la voie de la surpopulation et de nos croyances dénuées de sens. Nous avons eu l'opportunité d'évoluer, nous l'avons encore, donc les Destructos arrivent pour détruire l'Homme avant d'aller combattre quelque chose d'autre. C'est un récit de science-fiction.

Il y a quelques jours j'ai vu la pochette de l'album sur internet. Avez-vous participé à l'élaboration de l'artwork?
L'album ou le single 7''?

L'album lui-même.
Nous avons eu quelques commentaires à ce sujet. Gustavo est arrivé avec ses idées et nous les a soumises. Il nous a envoyé ses versions de travail. Quand j'ai vu cette cover, j'ai senti qu'elle correspondait à la manière dont l'album sonnait. J'ai répondu à mon manager que je ne voulais plus en voir d'autres, je voulais cet artwork. Ce qui est intéressant c'est que Trey a aussi choisi cette cover en disant que c'était sa préférée. Nous n'en avions pas discuté ensemble. Séparément, nous avons convenu que c'était la bonne.

Peut-on voir le personnage sur la pochette comme un Dieu Déchu?
Oh non! Il n'est pas déchu du tout! Il se dresse et élève un règne omnipotent. C'est pourquoi il possède tous les symboles des croyances de notre ère. Il est le maître de tout.

Est-ce un reflet de l'homme lui-même?
J'aimerais que ce soit le cas. Je l'aimerais vraiment. Malheureusement non. Mais finalement nous allons être détruits alors...