Greg Olliver et Wes Orshoski - LEMMY - HISTOIRE D’UNE LéGENDE par LAURENT BENDAHAN - 2652 lectures
Le style « rockumentaire » a le vent en poupe. Après Metallica, Anvil, Iron Maiden et tant d’autres, il ne manquait plus qu’une figure emblématique au tableau : le grand Lemmy. Place au tandem de choc, Greg Olliver et Wes Orshoski qui ont suivi et étudié le maestro pendant quelques années…


Pouvez-vous décrire brièvement votre parcours ?
Greg : J'ai fait une école de cinéma à New York et j'y suis resté un bon moment en me spécialisant dans les clips vidéo. J'ai bossé pour Joan Jett, Snoop Dog… J'ai commencé développer l'aspect « film documentaire » lorsque Britney Spears m'a désigné pour réaliser le sien. J'aime ce style de film, mais je dois avouer que le sujet de Britney ne me passionnait pas. C'est alors que Wes m'a suggéré d'en faire un sur Lemmy ! J'ai tout de suite adhéré à l'idée.
Wes : En ce qui me concerne, j'ai tout comme Greg une carrière de photographe et de cinéaste dans le milieu de la musique…


Mais étiez-vous des fans de Motörhead ?
Wes : tout le monde pense que nous étions des super fans, mais ce n'est pas vrai, et c'est justement ce qui fait la force de ce film. Nous avons abordé le sujet avec une certaine distance. Lorsque j'étais enfant, j'écoutais du heavy metal de manière obsessionnelle, et tous les styles, de Poison à Nuclear Assault. A l'époque, Motörhead était un groupe parmi tant d'autres…
Greg : Quant à moi, avant que Wes ne lance l'idée, je ne connaissais que « Ace of Spades ». J'ai plutôt grandi au son du blues et du rock'n roll à la « Steve Ray Vaughan ». Je trouvais Motörhead un peu « too much », mais j'avais tort. Je ne leur avais jamais donné une chance, ce que je regrette. A présent je suis leur plus grand fan.


Est-ce que Lemmy a tout de suite accepté votre proposition ?
Wes : Ça s'est plutôt bien passé. Nous avions la barrière du management à surmonter, mais une fois en contact direct avec lui, les choses se sont déroulées naturellement. Lemmy nous a en quelque sorte auditionnés pour voir si nous correspondions à ses valeurs humaines. Nous avons traîné quelques temps ensemble, à Hollywood, au Rainbow, son bar habituel. Après quelques verres, la confiance s'est installée. Nous n'avons, en tout et pour tout, parlé business pendant deux minutes ! Tout le reste n'était que du bonheur avec toutes ses anecdotes drôles et incroyables, la vie sur la route... Il avait besoin de nous tester autour d'un verre. C'était un passage obligé.


Combien de temps avez-vous passé avec lui ?
Greg : Trois ans et demi. Ce fut très long…


Est-ce que vous deviez respecter des règles strictes, des choses à ne pas faire ?
Greg : Non, il n'y avait pas de règles établies. Nous avions la possibilité de traîner en backstage, sur scène… partout en fait. Nous pouvions même filmer sa sortie de douche si nous le voulions. Par contre, c'était à nous de percevoir si le moment se prêtait à faire telle ou telle chose. Parfois, il faut savoir se montrer discret et s'éclipser.


Ce film a nécessité pas mal de relations, de demandes d’accréditations. Est-ce que toute cette organisation a été difficile à mettre en place ?
Wes : En effet, il a été difficile d'obtenir certaines interviews. D'ailleurs, nous avons parfois échoué. C'est le cas de Captain Sensible (Ex Damned) que nous avons tanné pendant plus d'un an sans succès. En fait, il avait pris tellement de drogues pendant sa période punk qu'il ne se souvenait plus de rien. Mais nous avons quand même été chanceux. Par exemple, les gars de Metallica sont très amis avec Lemmy. En plus, ils sont de vrais fans. Ils n'ont pas hésité une seconde à se prêter au jeu. A bien y réfléchir, le fait de représenter Lemmy ouvre bien des portes… (Sourire).


Pourquoi Philty « Animal » Taylor (NDR : le premier batteur) ne figure-il- pas dans le film ?
Greg : Mais nous avons essayé crois-moi, et ce pendant trois ans ! Impossible de le convaincre. Nous t'aimons quand même Phil !


Est-ce qu’il a été facile de retrouver tous les protagonistes de l’époque ?
Wes : Non, pas toujours ! Par exemple, nous avons eu un mal fou à dénicher Nick Turner (NDR : saxophoniste et flûtiste dans Hawkwind). C'est aussi le cas pour Stacia (ex danseuse de Hawkwind) que nous avons fini par retrouver dans un spectacle à Berlin. Ensuite, nous avons dû l'avoir à l'usure, pendant sept heures. Elle a finalement accepté l'interview. Mais tu veux savoir la vérité ? Je crois qu'elle l'a fait car elle en pinçait pour moi…
Greg : Oui, et j'étais bien jaloux ce jour-là (rires général).


Vous avez inclus dans le film une interview célèbre du journaliste Philippe Manœuvre qui s’est fait menacer par un couteau par Philty dans une chambre d’hôtel, pendant que Lemmy cassait tout autour de lui.
Qu'avez-vous pensé de ce document la première fois où vous l'avez vu ?
Greg : Nous aurions voulu avoir une machine à remonter le temps et vivre la scène en direct. C'était complètement dingue. Quelle violence ! Nous sommes heureux d'avoir pu récupérer ce film qui montre combien Lemmy était sauvage dans sa jeunesse. Mais j'ai une question pour toi. D'où vient cette interview ? Quand a-t-elle été diffusée ?


Je m’en souviens très bien.
C'était en février 1984, dans une émission qui s'appelait « Les enfants du rock ». Philippe et son équipe avaient préparé un spécial metal nommé « Rêve de fer ». Motörhead était alors en pleine promotion de son album « Another perfect day ».
Et quel est l'aspect le plus étonnant de la personnalité de Lemmy ?

Wes : Nous avons été soufflés par son sens de l'humour, son intelligence et son attitude de gentleman. On n'attend pas forcément ce genre de tempérament de la part d'un monstre du rock. Nous ne nous attendions pas à trouver un gars aussi drôle. J'étais également surpris par sa soif de lecture. Dans les backstages, il ingurgite livres après livres. Je citerais également sa dévotion envers les fans. Il n'hésite pas à signer des centaines d'autographes par jour. En trente shows que nous avons faits avec lui, il a toujours pris le temps de se prêter au jeu. Il ne fait pas ce métier pour l'argent et il est conscient qu'il doit tout à ses fans.
Greg : Je me souviens particulièrement de ce show à Birmingham où il faisait très froid. Lemmy gelait littéralement. Il a quand même pris le temps de s'arrêter pour des photos et des signatures.


Comment est-il possible de résumer trois années et demie de bandes dans un film de deux heures ?
Greg : Effectivement, cela s'est vite avéré comme un calvaire. Nous n'avons pas cherché à tout prix à condenser le plus d'informations possibles. Nous voulions simplement que l'enchaînement des scènes se fasse naturellement. Mais nous nous sommes rattrapés sur les quatre heures de bonus qui accompagneront le DVD. (Rires) Tu sais, nous avons tenu à rendre ces bonus aussi intéressants que le film. Habituellement, le second DVD est rempli de trucs inutiles que l'on ne regarde qu'une seule fois. Je vous garantis ici un résultat bien plus intéressant.


Et qu’a pensé Lemmy du résultat final ?
Wes : Il a adoré. Nous lui avons donné le pouvoir de couper ce qu'il désirait. Nous ne voulions en aucun cas le mettre dans l'embarras pour le restant de ses jours. Mais il n'a pas refusé tant de choses que ça…


Il a, entre autres, accepté que vous filmiez son appartement qui s’avère être une véritable poubelle…
Greg : (rires) Oh oui, son appartement est un endroit que tout fan de Motörhead devrait visiter. Il devrait vendre des tickets pour ça ! C'est un véritable musée. Lemmy y accumule tous ses souvenirs de tournée, et ce depuis la tournée Overkill ! Au début il avait peur que je rentre chez lui car je suis un grand gaillard. Il craignait que je ne casse des choses (rires).


Est-ce que vous avez été inspirés par d’autres « rockumentaires » comme « Some kind of monster », « Headbangers’s journey » ou « The story of Anvil » ?
Wes : Pas vraiment. Notre contact avec Lemmy était notre seule source d'inspiration. Notre moteur était de faire un film qui s'inscrive dans l'histoire du rock, un document qui nous survivra et que sera un témoignage de son temps.
Greg : Personnellement, j'ai adoré « The decline of Western Civilization part II», « Some kind of Monster » et « The story of Anvil ». Avec « Lemmy », nous n'avons clairement pas copié le style de ses prédécesseurs. Mais j'espère en tout cas que notre film sera considéré comme l'égal de ces grands classiques.


Comment Lemmy se sent-il cinq minutes après un show. Tient-il toujours la route selon vous ?
Wes : Après un show, tout le monde dans Motörhead est crevé, lessivé. Il n'y a pas que Lemmy. Tu ne te rends pas compte de l'énergie qu'il faut fournir sur scène. Moi-même, je suis crevé après avoir tenu ma caméra pendant deux heures, et pourtant j'ai la moitié de son âge. Lemmy n'est pas différent des autres. Après le show, il se détend, il quitte sa chemise, il prend sa douche, il fume une cigarette, il lit un bouquin... Rien d'anormal en somme !


Avez-vous été surpris pas le volume sonore qui règne à un concert de Motörhead ?
Wes : Sur le moment pas trop. Par contre, j'ai été surpris lors de mon dernier check up, lorsque le médecin m'a affirmé que j'avais perdu toutes mes fréquences médiums ! Des sifflements permanents sont également apparus. Le médecin m'a tout de suite demandé si je travaillais en environnement bruyant ! Pas de doute, ces trois ans et demi passés à filmer Motörhead en live ont flingué mon audition. Le pire, c'est que personne dans le groupe ne porte de protections, à part Mikkey Dee qui met un gros casque, juste le temps de faire son solo.
Greg : Tu sais, rien que les vibrations envahissent littéralement tout ton corps, et cela, aucune protection ne peut le parer.
Wes : Il fait cela depuis si longtemps, il a l'habitude à présent et il n'a pas l'air d'en souffrir. Ajoute à cela les quantités d'alcool et de trucs qu'il s'enfile. Comme dirait Ozzy Osbourne, Lemmy est le vrai « Iron Man » (rires).


Pouvez-vous décrire un jour typique de Lemmy sur la route ?
Wes : Il se réveille généralement vers 15 heures. Puis il va faire personnellement son sound check. Ensuite, il va dans les backstage pour écouter ses groupes préférés, avec les Beatles en tête de liste, et il se relaxe en lisant un livre. Il lui arrive de donner des interviews, et il adore jouer sur des machines à sous. Il voyage toujours avec son bandit manchot. Il en possède deux en fait, au cas où l'un viendrait à se casser (rires).


Le groupe semble vraiment attaché à ses roadies non ?
Greg : L'équipe est composée d'un noyau dur comme Tim Butcher, son technicien basse, Roger le stage manager… Mais dans ce métier, il y a beaucoup de « turn over ». Le groupe et ses techniciens sont comme une famille. Tous les membres sont égaux et tous les gars qui se sont comportés comme des trous du cul ont été éjectés illico presto.


Quels sont vos espérances quant à ce film ?
Greg : Nous visons l'Emmy Award (rires !). En fait, nous ne savons pas trop à quoi nous attendre. C'est une situation nouvelle pour nous. Nous verrons bien…
Wes : Depuis mon plus jeune âge, je suis immergé dans le heavy metal. J'achetais des tonnes de cassettes et de magazines. Aujourd'hui, j'ai pu réaliser un rêve de gosse. Alors, peu importe ce qui arrivera. Je suis déjà heureux.



Auteur
Commentaire
huart
Membre enregistré
Posté le: 02/01/2016 à 13h52 - (1865)
Hello,
RIP Lemmy -
Mon titre préféré de Motorhead est (we are) the road crew

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