Sven Le Tourneur - METIERS : SVEN LE TOURNEUR - HARD ROCK MAGAZINE par OROR 404 DE A JETER PROM - 3465 lectures
Nous avons parlé du média TV, du média radio, voici maintenant un aperçu de la presse. Pour cela, je suis entrée en contact avec Sven, rédacteur en chef du magazine Hard Rock.


Peux-tu me présenter Hard Rock Magazine et me décrire ton activité au sein de ce magazine ?
Présenter Hard Rock Mag peut être à la fois très long et très rapide. Il s'agit tout simplement d'un des mag métal qui a été les premiers à être créés à l'époque en France vers 84. Son histoire est jalonnée de changements d'équipes, d'éditeurs, de modifications de logos, d'orientations musicales, etc.
De mon côté, mon activité au sein du mag est assez simple. Je suis rédacteur en chef, je suis donc en charge de définir l'orientation générale du mag en faisant la sélection des groupes et de l'actu que nous allons traiter dans chaque numéro ; je suis aussi chargé de gérer l'équipe rédactionnelle avec laquelle je travaille, de la relation avec les labels, groupes, festivals, etc. le regroupement des textes une fois qu'ils ont été rédigés par les pigistes, la coordination de la secrétaire de rédaction et de la maquettiste, je fais de la maquette de temps à autre en cas de coup de bourre, je m'occupe d'environ un tiers des interviews, d'un petit quart des chroniques, de pas mal de report de festivals, de la rédaction des news, du planning global, le sampler, etc. Un vrai boulot à temps plein au final.


Quel a été ton parcours ?
Mon parcours est, je pense, relativement atypique par rapport au poste que j'occupe actuellement. Pour ne pas faire trop long, je suis issu d'une filière scientifique (bac S puis classe préparatoire intégrée en école d'ingénieur, ensuite fac de sciences et finalement administrateur système dans l'informatique pendant deux petites années). Tout cela m'a permis d'acquérir une certaine méthodologie de travail qui me sert tous les jours dans ce que je dois faire. En parallèle à mes études supérieures et à mon parcours professionnel dans l'info, j'ai régulièrement travaillé au sein d'une entreprise de traduction technique en temps que traducteur anglais/français du fait de ma facilité avec la langue anglaise et de mes « connaissances » techniques et scientifiques.
Mauvaise conjoncture dans l'informatique oblige à cette époque, je me retrouve au chômage début 2003 ; disposant de pas mal de temps libre, on me propose de collaborer à un webzine français pour rédiger quelques chroniques et quelques semaines plus tard, fin 2003, Rose, qui était journaliste chez Hard Rock Magazine depuis un bon paquet d'années, me présente le rédacteur en chef (Matthieu Millot) de l'édition précédant la nôtre qui me propose un poste de secrétaire de rédaction (relecture des papiers pour la correction des fautes, etc.) au sein du journal. De part mon expérience dans la traduction, je suis relativement à l'aise avec la langue française et le poste me convient totalement. Petit à petit je me mets à écrire quelques chroniques, à faire des interviews, etc.
A l'été 2004 l'éditeur de HRM coule suite à des problèmes financiers divers, le mag est en suspens pendant environ 6 mois avant que le nouvel éditeur ne me contacte pour que je sois co-rédacteur en chef sur la nouvelle mouture avec Guillaume Decherf. Au bout de 6 mois, à la fin de l'été 2005, je me retrouve seul à la tête du mag.
Au final, je suis arrivé en tant que rédac chef par un enchaînement de concours de circonstances, de connaissances à force de traîner en tant que zicos et simple passionné dans le milieu métal, sans que jamais de ma vie je n'aie pensé faire ce genre de travail.


Peux tu me décrire une journée ou une semaine type (ou un mois type, selon ce qui te parait le plus pertinent) ?
Je parlerais plutôt d'année type :) car au final ce travail m'occupe presque 24h/24 et 7j/7. En fait on fonctionne plus ou moins par cycles de numéro de mag. Dès qu'un numéro est terminé et envoyé sous presse, on attaque un nouveau cycle. Celui-ci commence toujours par l'écoute de tout ce que je reçois comme CD. J'établis une liste exhaustive de tout ce que les labels ou groupes indé m'ont envoyé, liste qui est ensuite soumise à l'équipe. On répartit ainsi entre tout le monde le travail à effectuer et parallèlement à cela je reste en relation étroite avec tous les labels afin de définir leurs priorités et nos coups de cœur pour trouver un bon équilibre entre tout cela. Vient ensuite le moment de mettre en place les interviews dont je suis en charge, par e-mail, téléphone ou en face à face lorsque les groupes viennent sur Paris.
A côté de ça, l'année est ponctuée de festivals un peu partout en Europe, avec lesquels nous avons des partenariats. Donc il m'arrive de m'y déplacer presque tous les mois pour ensuite rédiger les reports.


Quels sont, selon toi, les avantages et inconvénients de ton activité ?
Occuper ce poste engendre pas mal d'inconvénients qui sont généralement gommés lorsque l'on aime vraiment ce que l'on fait. Il ne faut pas avoir peur de compter ses heures, de passer plusieurs nuits blanches d'affilée, il faut être disponible à tout moment pour se plier à la disponibilité des groupes notamment lorsque ceux-ci ont un emploi à côté de la musique, lorsqu'il faut prendre en compte le décalage horaire pour des interviews par téléphone ; être prêt à se déplacer – souvent à ses propres frais dans le cadre des festivals – même lorsque parfois on n'en a pas envie, ne pas s'attendre à pouvoir prendre de vraies vacances et ne pas avoir envie de devenir riche :) Car même si je vis uniquement de ce travail, il ne faut pas se voiler la face, la situation est la même que pour les groupes de musique, on peut en vivre correctement mais on ne deviendra jamais millionnaire.
Au niveau des avantages, j'ai l'occasion de pouvoir me mettre entre les oreilles les albums de groupes que j'adore en avant-première, mon budget d'achat de CD neufs a été considérablement réduit depuis 5 ans étant donné que je reçois pas mal de choses, j'ai aisément accès aux concerts et festivals lorsque je dois bosser dessus et surtout j'ai l'occasion de rencontrer des musiciens et groupes dont je suis extrêmement fan depuis tout jeune ; c'est toujours un vrai bonheur d'être en mesure de discuter quelques heures – hors promo –, de passer du bon temps et de boire des coups avec certaines personnes dont j'écoutais la musique lorsque j'étais ado. De même, je suis très libre et je peux gérer mon emploi du temps comme je l'entends. Je n'ai pas véritablement de patron au-dessus de moi, les seules véritables contraintes que je peux avoir sont celles que je me fixe par rapport aux objectifs d'évolution du mag.
Si tu aimes le métal, c'est le boulot rêvé pour te faire plaisir et les inconvénients dont je parlais précédemment ne sont au final pas bien graves. Par contre il faut aimer le relationnel et être prêt à rencontrer tout un tas de gens tout le temps.


Comment peut-on se former à ton/tes activités ? Par des écoles, des formations ? Par l’expérience ?
Comme tu as pu le voir avec mon parcours, il n'y a pas forcément de formation à suivre pour parvenir à faire cette activité. Bien sûr, tu peux faire une école de journalisme afin de devenir un « vrai » journaliste. Je ne me considère d'ailleurs pas comme un journaliste. Lorsque tu évolues dans un milieu aussi spécifique que celui du métal, je pense que le point le plus important est l'expérience et la passion de cette musique. Il faut bien entendu de préférence avoir de bonnes prédispositions rédactionnelles, savoir écrire correctement, maîtriser la langue anglaise, mais pour moi le plus important est vraiment la connaissance des groupes et avoir un certain bagage culturel dans le style, choses que tout grand fan de métal a forcément en étant tombé là-dedans tout jeune. Je suis loin de tout connaître, mais ça fait maintenant presque 20 ans que je suis devenu « metalleux », du coup ça me facilite grandement la tâche.
Pour prendre un contre-exemple, il suffit de jeter un coup d'œil à la plupart des reportages papier ou TV montés par de vrais journalistes qui n'y connaissent rien à la base, le résultat est toujours extrêmement décevant et loin de refléter la réalité. On ne peut probablement pas remettre en cause les capacités journalistiques de ces personnes – d'autant que souvent ces journalistes doivent probablement avoir des consignes spécifiques de leurs rédactions ou chaînes pour faire du « sensationnel » –, mais elles parlent d'un sujet qu'elles ne maîtrisent absolument pas, sont remplis d'a priori souvent négatifs et au final les metalleux ne se retrouvent pas dans leurs propos ni dans l'image qu'ils en renvoient. C'est généralement mon cas et je suis souvent choqué par la façon dont ces reportages sont orientés.


As tu un (ou plusieurs) conseils aux personnes qui aimeraient suivre ta voie ?
Je ne suis pas forcément le mieux placé pour donner des conseils, mais si je dois me baser sur la façon dont les choses se sont passées pour moi, je dirai qu'il faut avant tout être passionné par ce sujet avant de s'y lancer. Se bouger en concerts, rencontrer des gens, discuter avec les représentants des labels quand on a l'occasion de les croiser, avec les groupes, comme je le disais faire de vrais efforts pour savoir écrire correctement, et du coup se monter un petit réseau de connaissances afin de saisir toute opportunité qui pourrait se présenter. Si vous arrivez à rencontrer les bonnes personnes et à faire la preuve de vos capacités dans ce qu'ils pourraient vous demander, c'est gagné.



Peux-tu me raconter une anecdote, un « grand moment de solitude » qui aurait marqué ta carrière ?
Comparée à d'autres, ma carrière est encore toute jeune, après tout ça ne fait que 5 ans que je suis véritablement dedans ; j'ai passé beaucoup de vraiment bon moments qui sont de vrais souvenirs agréables (passer 3 jours avec les membres de Scorpions à Paris, un nombre incalculables de soirées et de parties backstage avec des groupes ultra sympathiques, etc.). Du coup, je n'ai que rarement eu des moments de solitude et je n'ai presque jamais rencontré de personnages désagréables, même ceux qui peuvent avoir une réputation plus ou moins sulfureuse. Tout s'est toujours bien déroulé
La seule petite anecdote qui serait un vrai moment de solitude s'est déroulée au Summerbreeze il y a 2 ou 3 ans après une interview avec Max Cavalera dans son tour bus. Tout se passe bien comme à l'accoutumée et au moment de quitter le bus, à cause de mes chaussures mouillées je me suis retrouvé à dévaler sur le coccyx l'escalier intérieur du tour bus devant une Gloria Cavalera catastrophée que j'aie pu me faire mal…
A part cela, je peux te citer mon interview par téléphone de Rammstein cet été qui a failli ne pas se faire car je me trouvais en Slovénie au Metal Camp et forcément tout a sauté en raison des gros orages de montagne qui avaient lieu au même moment… quand on sait comment il est difficile d'obtenir des créneaux d'interview avec ce groupe, j'étais relativement stressé que finalement ça ne puisse pas se faire ; ou alors une inter en face à face avec Rob Flynn pour laquelle j'ai dû patienter un bon paquet d'heures dans un pub londoniens car je passais en dernier, et me retrouver face à lui, sachant à quel point il est supposé être parfois caractériel, alors que j'étais légèrement éméché et qu'en plus nous faisions cela dans un studio d'enregistrement totalement insonorisé, donc vraiment isolés tous les deux face à face, ce n'était pas évident à gérer. Mais finalement j'ai dû parvenir à faire quelque chose de correct car tout s'est déroulé normalement.
Je pense que j'ai encore le temps de rencontrer mon lot de situations vraiment périlleuses, on en reparlera dans une dizaine d'années :)


Quels sont les projets à venir pour Hard Rock Magazine ?
Les projets sur le court terme sont une petite surprise pour nos lecteurs afin de fêter les 25 ans du magazine. Je ne peux pas encore en dire plus pour le moment, vous verrez cela avec le prochain numéro de janvier/février. A part ça, et bien tout simplement continuer à faire ce que nous aimons, toujours plus de découvertes, de rencontres, d'interviews, de chroniques et de festivals.


Quel est ton point de vue sur le métal français et quel avenir lui vois tu ?
C'est toujours assez délicat de différencier les groupes par rapport à leur origine nationale, notamment quand tu en discutes avec les musiciens, la plupart ont un discours cohérent qui est de dire que de toute façon à partir du moment où un groupe propose sa musique, quel est l'intérêt de se poser la question de son origine géographique. Il est cependant vrai qu'il existe des spécificités dans chaque pays et la France ne fait pas exception. Personnellement, je pense que pendant très longtemps la France a souffert de ne pas avoir de véritable leader qui soit parvenu à s'exporter et à montrer au reste du monde, notamment les Américains, les Anglais et les Scandinaves, que les Français eux aussi savaient faire du métal. Nous avons eu d'excellents groupes qui ont eu leur heure de gloire de façon méritée, notamment fin 80, début 90 avec toute la vague death (Loudblast, Massacra, Crusher, No Return, Misanthrope, etc.), le black métal a également été reconnu comme étant de qualité lorsqu'il venait de France (grâce à Antaeus, Anorexia Nervosa, etc. à l'époque), mais pour autant, il n'y a jamais réellement eu de groupe de métal français qui soit parvenu à vraiment s'imposer hors de nos frontières. J'ai l'impression que cela change depuis quelques années, peut-être est-ce amorcé par le succès de Gojira ? Mais au-delà de ce groupe vraiment méritant, de plus en plus de festivals étrangers font confiances aux groupe de métal français (Hacride, Dagoba, Zuul FX, etc.) en les programmant sur leur affiche, en Allemagne, Angleterre, Suède, Norvège, Slovénie, Pologne, République Tchèque, Belgique, USA, etc. Un peu partout dans le monde, nos groupes son en mesure de rivaliser avec leurs homologues étrangers, du coup je pense que les groupes actuellement en place et ceux à venir ont un bon potentiel à exploiter hors de la France.

Liens : http://www.hardrockmag.fr/
http://www.myspace.com/hardrockmagazine


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